«^ bu. V& fK " & * T* ' SI ^ \j? * 0 JkT ««^ *^M* . ^ : â t * ^*£***Mj É| * { • y0t A*-  < * >*-*U* E j** Sft ■h ■ <> Répertoire général et raisonné de la jurisprudence, 2e édit. Paris, 1827-1828. Pardessus. — Cours de droit commercial, 6e édit., par de Rozière, Paris, 1856- 1857. Pont. — Traité des sociétés. Paris. 1872-1880. » Traité des petits contrats, 2e édit. Pari>, 1877-1878. Pothier. — OEuvres, édit. Bugnet, 2e édit. Paris, 1861-1862, \ Il Rolin i Sibérie). — Principes du droit international privé. Paris. 1*07. Rolland de Vu largi es. Répertoire do l;i jurisprudence du notariat, 2« édit. Paris, 1^ ii 1845. M. ii sseau. — Traité des sociétés. Paris, l-s>. Roi ssi m el Laisney. Dictionnaire théorique et pratiqué de procédure civile. édit. l'aria 1885. Supplément, 1896. Roi sseai d de Lacombi . — V. Dcspeisses, Loue t. Rozière de' . V. Pardessus. Ruben de Coi der. — Dictionnaire de droit commercial, industriel et maritime. Paris, 1885. Supplément, I : Si rvii le et An mi vs. — I !ours élémentaire de droit international pri\é, 3e édit., Paris, 1900. Tai lier. — Théorie raison née du code civil. Paris. 184" Thaller. — Traité élémentaire de droit commercial. 2e édit. Paris. 19 Tiiiiu. — Cours de code civil. Paris, 1892. Toullier. — Droit civil français, 6e édit., par Duvergier. Paris. 18i8. Suite par Duvergier. Paris 1830-1839. Troplong. — Commentaire sur le contrat des sociétés civiles et commerciales. Paris, 1843. Commentaire des litres (|u prêt, du dépùt et «lu séquestre. Paris. 1845. Vavasseur. — Traité des sociétés civiles et commerciales. .V édit. Paris. 1897. - élémentaire de droil civil français. Paris, 1889-1891. Weiss. — Traité élémentaire de droit international privé, 2e édit. Paris. 1890. Zach \hi.k. — Le droit civil français, traduit et an no il par Massé et Yer^é. Paris, 1854-1860. DE LA. SOCIÉTÉ, DU PRET, DU DEPOT DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 1. Les règles auxquelles est soumis le contrat de société sont réparties dans deux codes différents : le code civil (art. 1832 à 1873) et le code de commerce, dont les dispositions relatives à cette matière ont été complétées sur certains points et modifiées sur d'autres par plusieurs lois postérieures. Le code civil contient les règles qui gouvernent les sociétés civiles, le code de commerce, les règles particulières aux sociétés commerciales, c'est-à-dire à celles qui ont pour but une ou plusieurs opérations de commerce, ou qui revêtent la forme d'une société commerciale; sous cette forme peut, il est vrai, se dissimuler une société civile, mais si, autrefois, on pouvait décider que la société dont l'objet est civil se trouve soumise, malgré la forme qu'elle revêt, aux règles de la société civile, cette solution est aujourd'hui contredite par la loi du 1er août 1893, qui a ajouté à la loi du 24 juil. 1867, sur les sociétés commerciales, un art. 68, ainsi conçu : « Quel que soit leur objet, les sociétés en commandite ou » anonymes, qui seront constituées dans les formes du code » de commerce ou de la présente loi, seront commerciales et » soumises aux lois et usages du commerce ». Bien que les sociétés civiles occupent une place restreinte dans le monde des affaires, les règles qui les régissent ont cependant une grande importance, parce qu'elles forment la base de la législation commerciale. C'est ce qui résulte de l'art. 1873 du code civil et de l'art. 18 du code de commerce. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 1 2 DU CONTRAT DE SOCIETE On lit dans le premier : « Les dispositions du présent titre ne » s'appliquent aux sociétés de commerce que dans les points » qui n'ont rien de contraire aux lois et usages du commerce ». Le second dispose : « Le contrat de société se règle par le » droit civil, par les lois particulières au commerce, et par les » conventions des parties ». CHAPITRE PREMIER DÉFINITION ET CARACTERES DE LA SOCIETE 2. « La société est un contrat par lequel deux ou plusieurs » personnes conviennent de mettre quelque chose en commun, » dans la vue de partager le bénéfice qui pourra en résider » (art. 1832). Cette définition fait ressortir ou implique les caractères suivants : 1 ' La société est un contrat; 2° Ce contrat est consensuel ; 3° 11 est synallagmatique ; 4° Il est à titre onéreux; 5° Il est commutatif ; 6° Il a pour but la recherche de bénéfices ; 7° L'ensemble des mises doit constituer un fonds commun; 8° Les bénéfices doivent être partagés. 3. 1° Le caractère contractuel de la société ne nécessite qu'une seule observation, c'est qu'il constitue en général un des traits par lesquels la société se distingue de la commu- nauté ou indivision ('). 4. 2° Le caractère consensuel de la société n'est pas plus douteux (*) ; quoique l'art. 1832 ne le proclame pas, il résulte suffisamment du silence de ce texte, puisque, dans notre droit, le consentement suffit à former les conventions. On ne peut opposer l'art. 1834, qui, en exigeant au-dessus de 150 fr. un écrit, ne fait que reproduire l'art. 1341 et, par suite, con- (l) V. infra, n. 508 s. (') Guillouard, 7V. de la soc, n. 7 et 79. CARACTÈRE ONÉREUX 3 cerne exclusivement la preuve. Du reste, la société était con- sidérée comme un contrat consensuel à Rome (') et dans l'an- cien droit ('). La société peut même être tacite (3), sauf les difficultés de preuve (*). Ceci n'est dit que pour les sociétés civiles; le point de savoir si les sociétés commerciales peuvent exister sans un écrit est controversé. 5. 3° Le caractère synallagmatique de la société résulte de la définition du code (5) ; il produit d'importantes conséquen- ces, que nous retrouverons plus loin (6). 6. -4° La société est un contrat à titre onéreux [T), puisque, d'après l'art. 1833, chaque associé doit fournir un apport. Ce n'est pas à dire que, si l'une des parties est dispensée de faire un apport, le contrat soit nécessairement nul. Il l'est sans doute quand la dispense est écrite dans l'acte, — car il contient une donation non revêtue des formes obligatoires, — à moins que cet acte ne soit authentique et que l'associé dispensé de l'apport n'accepte formellement la libéralité à lui faite (•). Mais si l'acte relate un apport et que cet apport soit fictif, l'acte est valable comme donation déguisée <'), la jurispru- dence validant les libéralités qui se présentent comme des contrats à titre onéreux. De même, il peut y avoir donation indirecte si l'une des (' L. 4, D., pro soc, 17. 2. r) Domat, liv. I, tit. VIII, sect. 2, n. 6; Polluer, 7Y. du conlr. de soc, n. 78 ; Argon, liv. III, chap. XXXII, p. 319. (s) Hue, X, n. 32. («) V. infra, n. 35. 5 Guillouard, n. 8. (6j V. infra, a. 152 s. 1 Potliier, Tr. du conlr. de soc, n. 8 et 17. — Guillouard, n. 9 et 61. - Cass. civ.,5janv. 1886, S., 86. 1.241. — LabbéVo/e, S., 86. 1. 241; Laurent, XXVI. n. 142; Aubry et Rau, IV, p. 543, § 377, n. 3; Pont, Tr. des soc civ., n. 59; Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. coin., II, n. 134 ; Houpin, Tr. gén. des soc, I, n. 33. — Certains auteurs disent d'une manière absolue que l'acte est nul. — Guillouard, n. 61. — Les arrêts qu'ils citent Cass., 6 avril 1853, S., 53. 1. 618, D., 53. 1. 193. — Caen, 17 juin 1852, S., 53. 2. 138) sont étrangers à la ques- tion. (9) Polluer, n. 17 ; Guillouard, n. 9 et 65 ; Houpin, I, n. 33. A DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ parties fait un apport moindre que les autres et participe autant qu'elles aux bénéfices ('). Pothier le disait déjà (*). Toutefois, pour qu'il y ait donation, il faut que la simula- lion ait lieu dans un but de libéralité. Si elle a lieu dans le but de tromper les tiers et les associés, auxquels on veut faire croire à la réalité de l'apport, la société est nulle (3). Elle est également nulle, pour défaut de consentement, s'il ny a pas eu accord sur les apports ('). Que la donation soit déguisée ou qu'elle soit apparente, elle porte sur des biens présents, et, par conséquent, même si elle est faite en dehors du mariage, elle est valable (*). Pothier (6) affirmait, mais sans le démontrer, que la donation portait sur des biens à venir. Le donateur est immédiatement et irrévoca- blement dépouillé des bénéfices dont il gratifie le donataire; sans doute l'absence de bénéfices pourra faire disparaître le profit de la donation ; mais il en est de même de toute donation dont l'exécution est reportée à une époque ulté- rieure. 7. Ouoiqu'élant à titre onéreux, la société peut, comme nous l'avons dit, contenir une libéralité indirecte, c'est-à-dire que l'un des associés peut avoir eu l'intention de gratifier son co-associé en lui attribuant, dans les bénéfices ou les per- tes, une portion supérieure à ses droits ou inférieure à sa part normale. L'art. 854 présume la libéralité, en cas de société conclue par acte non authentique avec un successible, toutes les fois que le successible a tiré un avantage du contrat; en consé- quence, le rapport de cet avantage est ordonné. Nous verrons également que la société universelle est con- sidérée, au moins dans certains cas, en entier comme une donation déguisée. (') Guillouard, n. 9. - N. 17. (») Cass. req., 14 juin 1887, S., 87. 1. 407, D., 87. 1. 417. — V. infra, n. 46. 1 Trib. civ. Lorient, 27 fév. 1895, D., 99. 2. 266. (5) Duranton, XVII, n. 324 ; Duvergier, Tr, des soc, n. 54 ; Aubry et Rau, IV, p. 543, § 377, note 3 ; Pont, Tr. des soc. civ., n. 59 ; Laurent, XXVI, n. 141 ; Lyon- Caen et Renault, Tr. dedr. corn., II, n. 14; Guillouard, n. 65. («) N. 8. RECHERCHE DE BÉNÉFICES 5 8. .">" Le contrat de société est commutatif (l) ainsi que le disait Pothier (-) : car chacune des parties entend recevoir autant qu'elle donne. Sans doute le bénéfice peut être nul, mais le résultat de la vente ne peut-il pas aussi être une perte? La distinction entre les contrats commutalifs et les contrats aléatoires repose sur la nature des engagements con- tractés par les parties et non pas sur les résultats éventuels de ces engagements. S'il est faux de considérer le contrat de société comme un contrat aléatoire, il est plus inexact encore d'y voir, comme on l'a fait (s), un contrat étranger à celte classification; la raison invoquée en ce sens est que les bénéfices de chaque associé ne lui proviennent pas de son associé, mais du fonds commun auquel participent ses propres apports. Ce n'est pas là une raison sérieuse, car l'origine des bénéfices n'a rien à faire dans la question. Au surplus, la distinction entre con- trats commutatifs et aléatoires est générale et comprend tous les contrats à titre onéreux. Enfin on a soutenu que le contrat est à la fois commutatif et aléatoire (4) parce que, si chaque associé est tenu d'un apport certain, les bénéfices sont douteux. Nous avons réfuté l'argument tiré de cette dernière considération. Du reste, ce n'est pas faire rentrer un contrat clans une classification que de lui attribuer à la fois les caractères de toutes les catégo- ries qui la composent. La distinction n'a plus l'intérêt qu'elle offrait dans l'ancien droit, où les contrats commutatifs pouvaient être rescindés pour cause de lésion. 9. 6°-7'J L'ensemble des mises doit constituer un fonds com- mun, destiné à une exploitation en vue de bénéfices à réaliser. L'art. 1832 montre en effet qu'un des traits distinctifs du contrat de société est la recherche de bénéfices (5) ; l'ancien ;') Lyon-Gaen et Renault, Tr. de dr. corn., II, n. 82 ; Guillouard, n. 10. — Con- tra Démangeât sur Bravard, I, p. 168. •i X. 72. ' Pont, n. 12. (*) Bravard, I, p. 168. (5 Ainsi l'acte par lequel plusieurs négociants chargent un tiers de souscrire en leur nom des risques maritimes avec la clause que les risques se diviseront de plein G DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ droit était déjà en ce sens ('). Mais le droit romain décidait le contraire; il voyait une société dans le contrat par lequel deux personnes faisaient en commun une opération pour évi- ter les frais qui seraient résultés d'actes séparés (*). On a soutenu encore aujourd'hui que la recherche de béné- fices n'est pas essentielle à la société (3), en se fondant sur ce que la loi reconnaît les sociétés universelles, où les parties peuvent se contenter d'une jouissance commune sans profit, et la société formée pour l'usage d'une chose (C.civ. 1841). Il est facile de répondre que l'usage peut être mis en commun dans un but de lucre et qu'en raison des caractères essentiels que l'art. 1832 reconnaît à la société, ce but est supposé par la loi. C'est en cela que la société se distingue de l'association. On prétend que l'association et la société ne constituent qu'un seul et même contrat (*). C'est, selon nous, une inexac- titude. L'association est, comme la société, la réunion d'inté- rêts communs, coalisés dans un but actif (en cela elle se dis- tingue de la communauté ou indivision), mais où les parties veulent ou bien se prémunir d'une perte, ou bien réaliser un but étranger à leurs intérêts matériels. Si l'association ne se distinguait pas de la société, comment qualifierait-on les con- grégations religieuses, les cercles, les associations musicales et artistiques, etc.? Sans doute, dans la pratique, on voit sou- vent qualifier de sociétés ces sortes de réunions, de même que quelquefois, mais plus rarement, les sociétés sont traitées d'associations. Mais juridiquement les deux termes, comme les deux idées qu'ils contiennent, doivent être soigneusement distingués. droit entre les comandants contient autant de mandats qu'il y a de négociants et n'est pas une société. — Trib. coin. Marseille, 16 février 1892, Bec. Marseille, 92. 1. 149. — Pic, Ann. dr. corn., 1893, Doclr., p. 410. (») Potliier, n. 12. (*) L. 52, S 12 et 13, D., pro soc, 17. 2. (3) Planiol, Sole, D., 95. 2. 220. — C'est le système encore admis en Allemagne, où l'on considère notamment comme des sociétés les associations formées pour un divertissement ou un plaisir, pour l'instruction, pour la charité. — Eck, Holtzen- dorffs Rechlslexikon, v° Socielas. {*) Guillouard, n. 10 bis (ailleurs, n. 28 s. et 68 s., cet auteur qualifie d'associa- tions, comme nous le faisons nous-mêmes, les réunions dont il va être parlé et les distingue de la société). aEl HEBCHE DE BENËFII i B 7 10. 8° Il faut que les parties aient l'intention de partager l«s bénéfices et chaque associé doit être appelé à participer aux bénéfices et aux pertes de l'entreprise. C'est encore ce qui résulte de l'art. 1832 (' et Pothier le disait également (*). Il n'est pas, du reste, indispensable que la part de chacun soit fixée d'une manière irrévocable. On peut stipuler que l'un des associés n'aura droit à sa part de bénéfices qu'au cas où se réaliserait un événement déterminé (3). C'est encore ce que disait Pothier (4). Le partage suppose un bénéfice commun. Si les parties doi- vent recueillir tour à tour le bénéfice entier, il n'y a pas véri- tablement une société, mais, comme nous le verrons, un con- trat innommé qu'on peut faire rentrer dans les associations (5); c'est ce qui arrive particulièrement si les parties mettent en commun les gains qu'elles font ou les biens qui leur appar- tiennent pour les répartir ensuite, ou si deux commerçants mettent en commun une certaine somme, pour former un ca- pital dont chacun aura alternativement la jouissance exclusive pendant un temps déterminé. En effet, le bénéfice que chacun retire du capital pendant le temps qu'il en jouit, n'est pas partageable. C'est par la même raison qu'il faut refuser de voir des sociétés dans les tontines (6), qui, du reste, consistant dans une mise en commun de valeurs appartenant à différentes per- sonnes, sont des associations; en même temps, elles consti- tuent un contrat aléatoire entre des capitalistes qui fournis- sent chacun une mise, en convenant que les parts des pré- mourants profiteront aux survivants. Chacun des contractants se propose bien, par conséquent, de réaliser un bénéfice; mais ce bénéfice ne résulte pas de l'exploitation d'un fonds com- mun, et en tout cas il n'est pas partageable entre les contrac- (') Guillouard, n. 73. P) N. 12. (3| Guillouard, n. 73. «) N. 13. (8) Aubry et Rau, IV, p. 543. § 377. nute5 ; Laurent, XXVI. n. 117 : Lyon-Caen et Renault, Traité, II, n. 34 bis; Guillouard, n. 74; Hue, XI, n. 3. (8) V. infra, n. 355. 8 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ tants : de sorte que les lonlines ne présentent ni le sixième ni le huitième caractère essentiels à l'existence de toute société. 11 va sans dire que l'existence effective de bénéfices n'est pas nécessaire pour qu'il y ait société ; il suffit que les con- tractants ait eu l'intention de faire des bénéfices (l). li. Les sociétés constituent-elles des personnes morales ou juridiques, c'est-à-dire des êtres de raison, ayant un patri- moine distinct de celui de chaque associé ? La personnalité des sociétés commerciales ne fait guère de doute (2) ; l'art. 529 C. civ. et l'art. 69-6° C. pr. la supposent nécessairement. Mais la question est gravement controversée pour les sociétés civiles. La cour de cassation, surtout dans des arrêts récents, a affirmé la personnalité des sociétés civiles (3). La doctrine est généralement en sens contraire [' . (') L. 67, l).,prosoc, 17. 2; Ouillouard, n. 72. (2) Aubry et Hau, I, § 54, notes 21 et 26 ; Lyon-Caen et Renault, II, n. 105 et 124 : Ouillouard, a. 21 ; lloupin, I, n. 12. (3) Cass. req., 8 nov. 183(1, S., 3(5. 1. 811, D. llép., v» Exploit, n. 99. — Cass., 21 juill. 1854. S., 54. 1. 189. — Cas.-.. 9 mai 1804, S.. 01. 1. 329, D., 64. 1. 232.— Cass., 18 dov. 1865, S., 66. 1. il:.. — Cass. req., 23 fév. 1891, S., 92. 1. 73, D., 91. 1. 337. — Cass. req., 2 mars 1892, S., 92. 1. 497, D., 93. 1. 169. — Paris, 9 août 1831, S.. 31. 2. 289.— Bordeaux, 2 avril is:{2. S., 32. 2. 327. — Paris, 6 mars 1849, S., 49. 2. 427. — Orléans, 26 août 1869, M.. 69. 2. L85. — Paris, 27 fév. 1878, D., 78. 2. 27. — Trib. civ. Lyon. 9 janv. In.':'. Mon. jud. Lyon, 10 fév. 1892. — Cass. belge, 3 avril 1853, l'asicr.. 53. 1 . 288. — Duranton, XVII, n. 334 et 388; Taulier, VI, |>. 383; Pioudlion, Tr. des dr. d'usuf., IV. n. 2u64 et 2065; Pardessus, Cows de dr. comm., n. 975 et 976, 1089, 1207, et Consult., citée par Duvergier, n. 382 ; Favard, llcp.. v" Société, ebap. II, secl. IV, S 2; Troplong, I, n. 58 s. et II, n. 624, et Rapport sous Cass., 15 juill. 18i6, S., 49. 1. 289; Duvergier, n. 141, 381 et 382 ; Massé et Vergé, IV, p. 414, § 719, note 10; Championnière et Rigaud, 7V. d'enreg., III. n. 2743; Larombière, art. 1291 ; Foureix, Tr. des soc. comm., n. 11 ; Molinier, Tr. des soc. connu., n. 236; Delamarre etLepoitviu, Tr.dedr. comm. ,111, n. 13s. ; Bédarride, 7V. des soc, n. 9; Bravard, Manuel de dr. comm., oe édit., p. 85 s. et Tr, de dr. comm., 1, p. 173; Delangle, Des soc. comm., 1, n. 13 s.; Vavasseur, Traité des soc, 4- édit., I, n. 27 bis; lloupin, I, n. 14; Tballer, n. 280s. («) Cass. req., 29 juin J853, S., 55. 1. 495, D., 54. 1. 288. — Cass. crim., 21 juil. 1854, S., 54. 1. 489. — xNancy, 18 mai 1^72. S., 72. 2. 197, D., 73. 2. 103. — Douai, 11 juill. 1882, S., 83. 2. 49. — Alger, 19 janv. 1886, D., 87. 2. 169. — Trib. civ. Seine, 27 juill. 1874, S., 75. 2. 27. — Trib. corn. Seine, 2 août 1878, Droit, 12 sept. 1878. — Trib. civ. Langres, 9 nov. ou déc. 1887, S., 88. 2. 119, D., 88. 3. 136. — Trib. civ. Evreux, 21 oct. 1887, S., 88. 2. 119, D., 88. 3. 136. — Trib. civ. Castres, 19 déc. 1895, llép. pér. de l'enregistr., n. 8742. — Cass. belge, 22 juin 1855, l'asicr., 55. 2. 346. — Vincens, Expos, de la législ. comm., I, p. 297, et Tr. des PI R80N3 Mil h MORALE 9 Nous croyons que, dans notre droit actuel, les sociétés civiles nr forment pas, en règle générale, des personnes mo- rales. Eu effet c'est un principe certain qu'une collection quelconque d'intérêts ou d'individus ue peut pas acquérir la personnalité civile sans l'adhésion de l'autorité publique, qui, régulièrement, doit résulter d'une loi. Existe-t-il un texte de loi consacrant d'une manière certaine la personnalité des sociétés civiles? Toute la question est là. Le seul argument de la cour de cassation est que les « tex- tes du code civil, notamment les art. 18o0, 1852, 1867, 1843 à 1848, I800, 18o9, personnilient la société d'une manière expresse, en n'établissant jamais des rapports d'associé à asso- cié, et en mettant toujours les associés en rappport avec la société ». En d'autres termes, dans ces articles, le législateur, opposant la société aux associés considérés individuellement, lui fait jouer le rôle de propriétaire, de créancière ou de débitrice, supposant bien ainsi qu'elle constitue une personne fictive distincte de celle des associés. L'argument n'est pas décisif; car il se peut fort bien que, dans la pensée du légis- lateur, le mot société ne désigne que les associés considérés au point de vue de leurs intérêts collectifs. En d'autres ter- mes, chaque associé a deux catégories d'intérêts de nature très distincte : d'abord des intérêts qui lui sont "communs avec ses coassociés, et puis des intérêts personnels qui lui appartiennent soit en vertu de sa qualité d'associé, soit à tout autre titre; il est vraisemblable que, lorsque la loi parle de la société, elle n'emploie cette expression, à la suite de Po- soc. par ac/., p. 6 et 7 ; Toullier, XII, n. 82; Alauzet, Comm. du code de comm., 3« édit., III, n. 371 : Pont, I, n. 126; Demolombe, IX. n. 415: Aubry et Rau. IV, p. 546, § 377, notes 16 s. ; Tliiry, Rev. crit., V, 1854, p. 412 et 1855, p. 289 s.; Démangeât sur Bravard, I, p. 174, note i;BoisteI, Précis de dr. comm., n. 163 s.; Lyon-Caen et Renault, II, n. 105 et 140; lluben de Couder, Dict. dr. coin., V Société, n. 97; Guillouard, n. 24 s. ; Laurent, XXVI, n. 181 s., 221 et 223 ; Fré- mery, Eludes de dr. comm., IV, n. 30 s. ; Mongin, Sole, l'and. franc., 92. 1. 97; Rauter, De la soc. cic, p. 184 s. ; Rodière et Pont, Tr. du contrat de mur., I, n. 334; Boncenne, Tliéor. de la proc. civ., II, p. 132; Carré et Chauveau, Lois de laproc, I, quest. 287 bis ; Arnlz, IV, n. 1326; Meynial, Soles, S., 92. 1. 73 et 497 ; Pic, Ann. de d, . comm., VI, 1S92, Docte, p. 219; Hue, XI, n. 24. — La loi belge, du 18 mai 1873 'art. 2), a décidé expressément en ce dernier sens. — Le code civil espagnol (art. 1669) est en sens contraire. — V. infra, p. 16, note 5. 10 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ thier, que comme une formule abrégée pour désigner les associés envisagés exclusivement au point de vue de leurs inté- rêts collectifs, par opposition à ces mêmes associés envisagés au point de vue de leurs intérêts individuels, de sorte que le législateur aurait ainsi personnifié la société pour la com- modité du langage (comme nous le ferons constamment dans le cours de notre étude sur cette matière), sans avoir pour cela l'intention de la personnifier au point de vue juri- dique. Du reste, deux observations détruisent entièrement la portée de l'argument. En premier lieu, il est à remarquer que les textes qui em- ploient le mot de société sont tous relatifs aux rapports des associés entre eux ; aucun d'eux n'a trait aux relations des associés avec les tiers, et la question de la personnalité civile ne se pose qu'à ce dernier point de vue ; les rapports des associés entre eux se règlent de la même manière, que la société constitue ou non une personne morale. En outre, l'on peut rapprocher des textes qu'on nous oppose ceux du titre du contrat de mariage qui qualifient de com- munauté la société formée entre époux communs; ces textes sont beaucoup plus nombreux que ceux invoqués par nos adversaires ; un certain nombre d'entre eux concernent les rapports des époux avec les tiers, et cependant, si quelques auteurs ont tiré autrefois de cette expression la doctrine que la communauté est une personne morale, celte doctrine est universellement rejetée aujourd'hui, et par la jurisprudence elle-même. On a également voulu tirer parti, en faveur de la person- nalité civile, de l'art. 1800, qui, innovant sur le droit romain et l'ancien droit, interdit à un associé d'aliéner les biens so- ciaux, alors qu'autrefois il pouvait aliéner sa part de ces biens. Mais ce texte peut fort bien s'expliquer autrement : l'aliénation est de nature à entraver la marche de la société et la loi a voulu éviter ce résultat; l'art. 1860 a simplement entendu, comme l'indiquent les mots « l'associé qui n'est pas administrateur », régler une question de pouvoir; d'ailleurs, il ne fait ainsi qu'appliquer le droit commun, puisque, d'une PERSONNALITÉ MORALE 11 manière générale, ud copropriétaire ne peu! Aliéner les biens indivis ('). On n'est pas plus heureux en invoquant l'art. 8 de la loi du 21 avril 1810, qui accorde la personnalité aux sociétés miniè- res, « conformément à l'art . 529 C.civ. ». Ces dernières expres- sions ne signilient pas que l'art. 529 doit être appliqué aux sociétés civiles, mais au contraire que l'art. 520 est, par ex- tension, déclaré englober les sociétés minières ; évidemment la loi de 1810 a voulu, à raison de l'importance des sociétés minières, déroger, en leur faveur, au droit commun. Les textes que nous venons de passer en revue ne four- nissent donc qu'une induction assez faible à l'appui de la personnalité des sociétés civiles. Ceux qu'on peut leur opposer fournissent au contraire une induction très forte en faveur de la thèse contraire. C'est d'abord l'art. 69-6° C. pr., qui dis- pose : « Seront assignés... 6° les* sociétés de commerce, tant qu'elles existent, en leur maison sociale... » Voilà une consé- quence certaine de la personnalité civile, que la loi ne con- sacre qu'en ce qui concerne les sociétés de commerce ; pour- quoi ne l'aurait-elle pas consacrée en ce qui concerne les sociétés civiles, si ces dernières étaient aussi des personnes morales? Citons encore les art. 1862 et 1863, desquels il résulte que les associés qui se sont obligés en cette qualité ne sont tenus que pour leur part. Le créancier est donc forcé de s'adresser à tous les associés pour obtenir satisfaction com- plète, et chaque associé peut le forcer à recevoir sa part dans la dette. Décision qui serait inexplicable, si la société civile était une personne morale; car alors le créancier n'aurait qu'un seul débiteur, la société, et ne pourrait être forcé de recevoir un paiement partiel (arg\ art. 1220 et 1244). On peut tirer un argument semblable de l'art. 1849, qui oblige l'associé auquel aurait été payée, par le débiteur devenu depuis insolvable, sa part entière dans la créance commune, de rapporter cette part à la société ; ce texte suppose ainsi la validité du payement, fait à l'associé, de sa part dans la créance et ne permet pas aux autres créanciers du débiteur (') V. infra, n . 329. 12 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ insolvable d'exercer contre lui la répétition de l'indu et de con- courir avec la société sur la somme payée à l'associé. Si le payement fait à l'associé est valable, c'est évidemment que l'associé a un droit personnel à faire valoir la créance pour sa part. Deux autres textes fournissent un argument a contrario : l'art. 329, qui, comme nous l'avons vu, reconnaît la person- nalité morale aux sociétés de commerce, l'art. 8 de la loi du 21 avril 1810, qui, voulant la conférer aux sociétés de mines qui sont des sociétés civiles, prend la peine d'émettre une disposition expresse en ce sens. Admettons même que le doute puisse exister sur la valeur des divers arguments que nous avons tirés des textes. Il faut alors reconnaître que la question doit être résolue par l'exa- men de l'ancien droit dont il est naturel de supposer, jusqu'à preuve contraire, que le C. civ. a consacré les traditions. Or la personnalité des sociétés civiles n'a, antérieurement à ce siècle, jamais été soutenue. Sans doute, en droit romain, on admettait la personnalité d'un certain nombre d'associations; mais cette personnalité avait un caractère exceptionnel ; elle ne pouvait être conférée que par une autorisation formelle de l'Etat; cette concession n'était accordée qu'aux associations qui touebaient au droit public. En principe donc, la personne des associés ne se fondait pas dans celle de la société ('). « Xemo, dit un texte, societa- tem contrahens rei suae dominus esse desinit » (*). Un autre nous apprend qu'en dehors de certaines associations déter- minées, les sociétés n'ont pas de personnalité civile (:î). On a également cité en ce sens (niais ils sont moins sûrs) des textes qui autorisent les associés à aliéner leur part sociale ('). Ouelques textes parlent, il est vrai, de la communauté entre ') Guillouard, n. 25; Accarias, Précis de dr. ru>»., 1, n. 185; Girard, Manuelde droit romain, 2e éd., p. 564. (*) L. 13, § 1, D., deprœscr. verb., 19. 5. (3) L. 1, D., quod cujuscumq. universit., 3. 4. — V. aussi L. 1, D., de coller/, el cor p.. 47. 22. 4) L., 13, V).,pro soc, 17. 2. — L. 3, C, de coin. rer. alien., 4. 52. l'i RSONNÀLITÉ MORALE 13 négociés ' . mais, comme ceux mêmes du C. civ. dont la juris- prudence a tiré un Taux argument pour établir la théorie de la personnalité civile, ils n'entendent parler que des intérêts communs des associés. Ils disent que, comme l'hérédité; la société - personne vice fungitur » ('-), mais l'hérédité elle-même n'est pas une personne morale. Ils disent aussi que la bonorurn possessio peut être demandée au nom d'une société f3), mais veulent sans doute uniquement parler de celles des sociétés qui constituent des personnes morales, ou bien désignent les associés sous le nom de société. Ils disent enfin que l'associé créancier de la société peut obtenir son payement intégral de l'associé qui détiendra les fonds de la société (*), mais cette solution se justifie indépendamment de toute idée de person- nalité. On n'entend parler, dans l'ancien droit, de personnes mo- rales que le jour où sont créées les associations collectives qui, comme la province ou la commune, ont des intérêts et ont besoin d'avoir des droits. Mais la personnalité ne s'étend pas aux sociétés. On finit par emprunterau droit romain l'idée que la personnalité émane de l'autorité souveraine et on la subordonne à la concession royale ou seigneuriale, et, en fait, cette autorisation n'est donnée, comme en droit romain, qu'aux associations qui représentent un intérêt public. Cette théorie va tellement loin que si les sociétés taisibles, autrefois cons- tituées sans autorisation, viennent à se dissoudre, une auto- risation est nécessaire pour qu'elles se reforment (5). La nécessité d'une autorisation est proclamée par Loisel (6), Domat(T), Ferrière(8), Pothier^9). Le second dit formellement que cette autorisation est réservée aux sociétés « établies pour 1 L. 65, § 14, D., pro soc, 17. 2. — L. 3, § 4, D., de bon. poss., 37. 1. — L. 22, D., de fidej. et mandai., 46. 1. (*) L. 22. D., de fidej. et mandai., 46. 1. 3j L. 3, § 4, D., de bon. pos., 37. 1. (') L. 65, § 14, D., pro soc, 17. 2. (5) Coût, de Nivernais, ch. VIII, art. 15. («) Liv. III, lit. III, regl. 22. (') Dr. public, liv. I, tit. XV, sect. 2, n. 1. (8^ Dict. dedr. et deprat., v° Communauté. 9) Tr. des personnes, n. 210. 14 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ un bien public ». Pothier, dans son Traité des sociétés, auquel sont empruntées les dispositions du litre Des sociétés, ne fait même pas mention de la question de la personnalité. Il en est de même de Domat. Mais, en décidant que la propriété des objets échus à un associé par le partage remonte au jour de son entrée en société, que la chose apportée « devient commune entre les associés », Pothier repousse la personna- lité. Les sociétés commerciales elles-mêmes n'avaient aucune personnalité ; les auteurs spéciaux n'en parlent pas. Evidem- ment c'est par les grandes compagnies qui avaient un but commercial et passaient pour toucher à l'intérêt public, que la théorie de la personnalité des sociétés commerciales s'est introduite ('). C'est seulement à la fin de l'ancien droit que la personnalité s'est affirmée (*). Encore, dans les travaux prépa- ratoires du code civil, on voit exprimer l'idée que les sociétés commerciales n'ont la personnalité que si elles ont été établies par une loi (3). A plus forte raison a-t-on admis la même.idée pour les sociétés civiles. Ce qui démontre bien plus encore l'intention des rédac- teurs du code, c'est que le tribunal d'appel de Rouen pro- posa (l) sans succès qu'on proclamAt la personnalité civile des sociétés et qu'on défendit la saisie du fonds social pour les dettes de la société. Il est vrai que certains auteurs, dans l'ancien droit, recon- naissaient la personnalité de toute espèce de société. Ainsi Balde, pour refuser d'admettre la compensation entre la créance de l'associé sur un autre associé et la dette de l'asso- cié vis-à-vis de la société, se fondait sur ce que cette dette existait envers la personne sociale [corpus societatis) (5). Mais cette opinion ne l'avait pas emporté. On a récemment produit, pour établir la personnalité des sociétés civiles, un argument tout différent de ceux qui avaient (') Meynial, Note, S., 92, 1: 499. 2) Emérigon, Des assurances, I. p. 324. (s) Fenet, XI, p. 16. 1 Fenet, V, p. 544. (5) Sur la loi 9, C, de comp. PERSONNALITÉ MORALE 15 été invoqués jusqu'alors (*). I.es biens apportés par les associés, a-t-on «lit. sont affectés à un but déterminé. Ils se séparent donc du patrimoine des apporteurs, et sont soumis désormais à l'administration commune de tous les associés ; l'apporteur s'engage à respecter celte destination et par suite ne peut faire servir à son intérêt particulier les biens qu'il a apportés. Ses créanciers, qui n'ont pas plus de droits que lui, ne peuvent donc pas davantage s'emparer des biens apportés au préjudice des associés ou des créanciers sociaux. Ils n'ont, en d'autres termes, de droit sur ces biens qu'à la condition de supporter les charges dont ils sont grevés du chef de leur débiteur. En un mot, l'ail'ectation des apports à la poursuite du but social équivaut à un droit réel grevant les biens apportés. Il ne semble pas que ce raisonnement échappe complètement à la critique. Sans doute, en principe, les créanciers doivent respecter les droits conférés par le débiteur sur sa chose ; mais ce n'est pas établir un droit sur une chose que de l'affecter à un but déterminé ; la chose ainsi affectée reste en entier dans le patrimoine du débiteur, elle est donc, suivant le principe posé par l'art. 2092 C. civ., soumiseaugage de ses créanciers, et ne peut être assimilée à un bien aliéné au profit de la société considérée comme personne morale. Du reste, il est généralement reconnu que l'affectation d'un bien à un but déterminé ne soustrait pas ce bien au gage des créanciers. Ainsi tout le monde considère comme exceptionnels les art. 581 et 582 C. pr. civ., d'après lesquels la clause d'insaisissa- bilité est, dans certaines circonstances, opposable à certains créanciers ; tout le monde reconnaît également que l'insaisis- sabilité de la dot de la femme mariée sous le régime dotal, si elle se rattache à l'affectation spéciale de ces biens, déroge cependant au droit commun et ne peut être étendue à aucune autre hypothèse. Aussi les biens donnés ou légués à charge d'en consacrer le revenu à un but particulier peuvent-ils être saisis par les créanciers du donataire ou légataire, à moins que du legs ou de la donation ne résulte la création d'une 1 Tballer, loc. cil. 16 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ personne morale bénéficiant de ces revenus, ou à moins que les revenus ne doivent être remis à une personne morale ou physique déjà existante ; l'affectation d'un bien à un but déterminé n'équivaut donc pas par elle-même à l'établisse- ment d'une personne morale. Il semble, d'ailleurs, que si le raisonnement que nous apprécions ici était exact, l'association sans but lucratif cons- tituerait également une personne morale, car les biens qui y sont aifectés sont, eux aussi, aifectés à un but spécial ; c'est cependant ce qu'on ne soutient pas ('}. 11 est d'autant plus dangereux d'admettre la personnalité des sociétés civiles que celte personnalité a pour les tiers les plus grands inconvénients : la loi n'a pas voulu admettre l'existence des sociétés commerciales sans la subordonner à des formalités dont le but est de les révéler aux tiers. Non seulement on nedoil pas supposer qu'elle ait créé la personna- lité des sociétés civiles sans édicter également des formalités obligatoires, mais on ne peut souhaiter de voir ainsi opposée aux tiers une personnalité occulte et de laquelle ils n'ont pu se préoccuper. C'est tellement vrai, qu'après avoir reconnu la personnalité des associations en participation, qui sont des sociétés commerciales (*), la jurisprudence a fini par la nier, parce que ces associations ne sont pas soumises à la publi- cité (3). Toulefois si on se place sur le terrain législatif, et à condi- tion d'admettre la nécessité de ces formalités, on doit faire des vœux en faveur de la reconnaissance de la personnalité des sociétés civiles (*). La société est la réunion des intérêls communs des associés. Ces intérêts se fortifient par la con- cession de la personnalité h la société, il n'en est pas autre- ment de la société civile que de la société commerciale. Notre solution est en général celle des lois étrangères (5). («) V. infra, n. 569. (*) Cass., 19 juin 1821, S. chr. — Paris, 9 août 1831, S., 31. 2. 259.— Bordeaux, 2 avril 1832, S., 32. 2. 327. —Paris, 22 nov. 1834, S., 35. 2. 69. f») Cass., 2 juin 1834, S., 34. 1. 603. — Cass., 15 juill. 1846, S., 49. 1. 289. — V. infra, p. 18, note 1. (*) Guillouard, n. 23 et 27 ; Meynial, Sole, S., 92. 1. 73. (5) Le C. civ. espagnol de 1888 refuse la personnalité aux sociétés civiles <> dont PERSONNALITÉ MORALE 17 12. Certains auteurs oui prétendu que La personnalité de- vait être au moins reconnue aux sociétés civiles qui ont an Biège fixe où est établi leur domicile '). Ils se fondent sur ce que la personnalité des sociétés commerciales esl précisément basée sur l'existence d'un siège social ; la preuve, disent-ils, c'est que l'art. 8 de la loi du 21 avril 1810 décide en ce sens pour les sociétés minières. Cet argument est purement divinatoire. Du reste, les consi- dérations sur lesquelles nous nous sommes fondés pour nier la personnalité, ne perdent rien de leur importance dans le cas où la société a un siège fixe. En législation même, on peut douter de la valeur de l'opinion que nous combattons; la personnalité ne se comprend que pour les sociétés dont l'existence est révélée aux tiers par des formalités spéciales. L'existence d'un siège tixe ne peut être assimilée à une de ces formalités. 12 bis. II y a cependant des exceptions au principe ; c'est ainsi que la loi du 21 avril 1810, en déclarant meubles les droits des associés dans les sociétés minières (art. 8 al. final, confère implicitement la personnalité civile à ces sociétés (2). D'autre part, on admettait généralement, même avant la loi du l'r août 1893, que les sociétés civiles à forme commer- ciale constituaient des personnes morales (3). Aujourd'hui cette dernière solution ne peut plus faire de difficulté, la loi du 1er août 1893 ayant assimilé ces sociétés aux sociétés com- merciales. Nous examinerons ultérieurement si les associations cons- tituent des personnes civiles (;). les clauses demeurent secrètes entre les associés ». — Allemagne. On admet que les sociétés civiles n'ont aucune personnalité. — Wimlscheid, Lelirb. d. Pandekl., II, § 407, note 4; Eck, loc. cil.; C. ch\, art. 54 et 718.— Pour la Belgique, supra, p. 8, note 4. ') Demolombe. IX. n. 415. — Contra Guillouard, n. 23. (») Trib. civ. Saint-Etienne. 24 déc. 1883, sous Gass. civ., 26 oct. 1892, S., 93. 1. 321. — Laurent, XXVI, n. 421 s. ; Guillouard, n. 25, p. 43 et n. 362; Féraud-Gi- raud, Code des mines, I, n. 182; Delecroix, Des sociétés de mines, n. 148 s.; Lyon- Caen el Renault, II, n. 133. (» Douai, 6 avril 1889, Rev. des 7nines, 1891. 360. 1 V. infra, n. 569. SOCIKTIC, PRÊT, DÉPÔT. — 2e éd. 2 18 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 13. En revanche, si les sociétés commerciales forment des personnes morales, il faut excepter l'association en partici- pation (' ; car elle n'existe en réaiité qu'entre les parties et non vis-à-vis des tiers; non seulement elle ne forme pas une personne morale, mais elle n'existe même pas pour le public. 14. L'intérêt qui s'attache à la question de savoir si les sociétés civiles sont des personnes morales, est considérable. Cet intérêt apparaît sous les points de vue suivants. Si l'on refuse à la société civile la personnalité juridique, il faut déci- der que, pendant toute la durée de la société, les biens qui forment le fonds social appartiennent par indivis aux divers associés et que par suite le partage, qui sera eftectué après la dissolution de la société, rétroagira au jour où l'indivision a pris naissance (arg. art. 883 et 1872 , c'est-à-dire pour cha- que bien à dater du jour où la société en a fait l'acquisition. Chaque associé sera donc considéré comme ayant toujours été propriétaire des biens mis dans sou lot, et comme n'ayant jamais eu la propriété des autres effets de la société attribués par le partage à ses consorts, et par suite le résultat du par- tage déterminera la nature mobilière ou immobilière du droit de chaque associé. Au contraire, si l'on reconnaît aux sociétés civiles la personnalité juridique, on est conduit à décider que, pendant toute sa durée, la société est seule propriétaire des biens composant le fonds social. Chaque associé n'a donc, tant que la société dure, qu'un droit de créance contre la Cass., 2 juin 1834, S., 34. i. 603. — Cass., 19 mars 1838, S., 38. 1. 343. — Cass., 15 juil. 1846, S., 49. 1. 289. — Cass., 5 mai 1858, S., 59. 1. 223, D., 58. 1. 222. — Cass., 13 avril 1864, S., 64. 1. 173, 1).. 64. 1. 306. — Cass., 19 fév. 1868, S., 68. 1. 297. — Cass., 22 déc. 1874, SÎ, 75. 1. 214. — Cass. req., 27 juin 1893, S., 94. 1. 25, D., 93. 1. 484. — Cass. req., 10 déc. 1895, S., 99. 1. 518. — Paris, 19 avril 1831, S., 31. 2. 202. — Rouen, 19 janv. 1844, S., 44. 2. 393. — Paris, 17 nov. 1848, S., i'.'. 2. 200. — Bastia, 25 avril 1855, y., 55. 2. 422. — Aix, 2 mai 1871, ^.. 71. 2. 261, D., 72. 2. 165. — Poitiers, 22 déc. 1887, S., 88. 2. 1. — Poi- tiers, 8 déc. 1892, S., 98. 1. 460 (sous Cass., 27 juin 1894), D., 93. 2. 111. — Rennes, i janv. 1894, D., 94. 2. 120. — Troplong. I, n. 480 s. ; Duvergier, n. 407 ; Ruben de Couder, Die t. de dr. coi/t., \° Société en parlicip.. n. 2j; Aubry et Rau, I, § 54, note 31 ; Pont, I, n. 124 et II, n. 1801 ; Rousseau, n. 1772 s. : Vavasseur, I, n 315; Poulie, Tr. des assoc. en parlicip., n. 73s. ; Guillouard, n. 22; Lyon-Caen, Note, S., 88.2. 1 ; Boislel, Précis dedr. corn., I, n. 366; Rivière, Répét. écrites sur leC. com., p. 150; Laurin, Cours élément, de dr. com.. n. 527: Houpin, I, n. 12 ; Hue. XI, n. 23. PERSONNALITÉ MORALE 19 société pour obtenir, s'il y a lion, sa part dans les bénéfices, par conséquent un droit mobilier, alors même qne le fonds social comprendrait des immeubles ('). L'indivision ne com- mence entre les associés qu'au jour où la personne morale meurt, c'est-à-dire au jour de la dissolution de la société, et c'est seulement à cette époque que le partage rétroagit. Cependant certains auteurs prétendent que môme dans notre opinion l'associé n'a qu'un droit mobilier tant que dure la société (2) ; dans ce système, l'art. 529 C. ciw, qui, dans les sociétés de commerce, qualifie le droit des associés de droit mobilier, ne se rattacherait pas à la personnalité morale, mais bien à l'idée que les associés, réunis pour faire des béné- fices, ont pour seul objet le partage de fruits, lesquels sont mobiliers. Nous ne nous attarderons pas à réfuter cette ingé- nieuse conception, qui a contre elle, selon nous, le texte de la loi et la tradition, mais dont la discussion excède les limites de notre sujet. Dans l'opinion que nous venons de signaler, on consent tou- tefois à admettre le caractère immobilier des parts dans les sociétés constituées pour une exploitation immobilière, parce qu'alors les bénéfices sont constitués par le produit- d'immeu- bles, et on applique cette solution aux sociétés commerciales ayant un pareil objet (3). 15. Dans le système de la personnalité civile, l'associé n'a qu'un droit mobilier sur toute la masse sociale, même sur les immeubles. Donc s'il laisse un successeur aux meubles et un autre successeur aux immeubles, sa part dans la société appar- tient tout entière au premier ('). De même cette part tombe dans la communauté légale si l'associé est marié sous ce régime (s). Au contraire, dans notre opinion, on peut décider soit que '; Thaller, n. 312. — V. en ce sens, pour les sociétés commerciales, Nancy, 19tév. 1881, S., 82. 2. 161. (!) Mongin, Elude sur la situation juridique des sociétés dénuées de personna- lité, Rev. crit., XIX, 1890, p. 712 s., g 3. 3 Mongin. op. cit., p. 718. \ V. notre TV. des suce, 2« éd., III, n. 3359. 1 Tiib. civ. Lyon, 4 avril 1884, S., 86. 2. 25. —Thaller, n. 312. —V. noire Tr. des suce, 2e éd., III, n. 3357. '20 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ la part sociale appartiendra au légataire de meubles ou d'im- meubles suivant le résultat du partage social ('), soit qu'elle appartiendra immédiatement au successeur des meubles pour les meubles, et au successeur des immeubles pour les immeu- bles. La solution de la question dépend du point de savoir si l'effet déclaratif du partage est applicable aux droits des successeurs des copartageants. De même, on décidera, suivant les opinions sur la portée de l'effet déclaratif, ou que le partage déterminera si les biens sociaux attribués à l'associé tombent dans la communauté légale (*), ou qu'ils y tomberont pour la part de l'associé sur les meubles sociaux. De même encore, si l'un des associés est mineur, l'aliénation de son droit a lieu, suivant les opinions, dans la forme requise pour la vente de ses meubles ou celle de ses immeubles (3). 16. Si la société civile forme une personne morale, l'appel interjeté contre elle sera régulièrement notifié par une copie unique à son avoué (*). Au contraire, si elle n'est pas une per- sonne morale, 1 appel doit être notifié à l'avoué de chaque associé. Si la société est une personne civile, l'assignation est donnée à sa requête ou contre elle et elle este en son propre nom; c'est ce que décide la cour de cassation (5). Cependant elle avait jugé pendant un certain temps que l'assignation doit être donnée à la requête de tous les associés, par la raison que, les associés n'étant pas solidaires, il importe aux tiers de connaître leurs noms (°). Cette raison est évidemment insuf- lisante pour admettre que le principe de la personnalité soit mis en échec. L'assignation est donnée aux associés dans notre doctrine (7). (') En ce sens Guillouard, n. 26. - En ce sens Guillouard, n. 26. '3; V. pour les sociétés commerciales Cass. req., 15 nov. 1887, S., 88. 1. 410. (*) En ce sens Cass. req., 2 mars 1892, précité. (5) Cass., 21 juill. 1854, S., 5i. 1. 489, D., 55. 1. 41. — Cass., 18 nov. 1865, S., 66. 1. 415. — Thaller, n. 306. « Cass., 11 nov. 1829, S. chr. — Cass., 8 nov. 1836, S., 36. 1. 811. — Cass., 26 mai 1841, S., 41. 1. 483. — Cass., 30 août 1859, S., 60. 1. 359, D., 59. 1. 365. — V. en ce sens, pour les sociétés commerciales, Nancy, 19 fév. 1881, S., 82. 2. 161. f) Hue, XI, n. 26. PERSONNALITÉ MORALE 21 Dans la doctrine <|iii refuse la personnalité civile aux socié- tés, elles ae peuvent ester en justice en leur propre nom ; le nom de tous 1rs associés doil figurer dans l'assignation et les actes «le procédure ' . Cependant, tout en reconnaissant que cette dernière manière de procéder est licite, certains au- teurs (') ont prétendu que la société peut agir en son propre nom; en effet, disent-ils, la solution contraire dérive de la maxime Nul ne plaide par procureur »; or cette maxime n'esl pis d'ordre public et les associés peuvent y renoncer. A notre avis, cela n'est pas exact ; si la société ne peut figurer dans les actes de procédure, ce n'est pas parce qu'elle cons- tituerait un mandataire agissant en son propre nom, mais parce qu'elle n'a aucune existence reconnue par la loi. La preuve que tel est bien le motif de la solution, c'est que la société, même déclarant représenter les associés dont elle donne les noms, ne peut agir en justice. Dans tous les cas, si la règle « Nul ne plaide par procureur » n'est pas d'ordre public, cela signifie seulement que les adversaires des plai- deurs contrevenant à cette règle peuvent y renoncer; admet- tre que ces derniers eux-mêmes peuvent y renoncer, ce serait enlever a la règle toute sa portée. 17. Un des etfets de la personnalité civile des sociétés, c'est qu'en conformité de la jurisprudence constante qui attribue aux personnes morales la capacité des personnes réelles, elles peuvent recevoir des libéralités (3). 18. Nous verrons encore qu'à la question se rattache le point de savoir si les créanciers personnels des associés peu- vent concourir avec les créanciers de la société sur les biens de cette dernière (*), s'il peut s'opérer une compensation entre les créances et les dettes de la société et celles qui sont per- sonnelles à l'associé (5). (') Trib. civ. Evreux, 21 oct. 1887, S., 88. 2. 119, D., 88. 3. 136. — Trib. civ. Lan- ières, 9 déc. 1887, S., 88. 2. 119, D., 88. 3. 136. — Guillouard. n. 26 ; Hue, XI, n. 26. 5 Mongin, Rev. cil., 1890, p. 712 s., § 3. • iass. req., 2 janv. 1894 (motifs), S., 94. 1. 129, D., 94. 1. 84. — Gotelle, Rap- port, sous Cass. req., 2 janv. 1894, précité ; Thaller, n. 314. — Contra Hue, XI, n.30. *l V. infra, n. 352. V. infra, n. 365 et 366. 22 DL" CONTRAT DE SOCIÉTÉ 19. Les administrateurs et mandataires d'une société non pourvue de la personnalité morale, n'ont d'action en recours que contre les associés. Si au contraire la société est une personne morale, ils n'ont d'action que contre elle, sauf s'ils sont, en fait, mandataires des associés ('). 20. Dans la théorie de la personnalité, les associés ne peu- vent, comme nous le verrons, ni aliéner ni hypothéquer les biens de la société pendant le cours de celle-ci. Ils le peuvent dans la doctrine contraire. Même distinction pour les hypo- thèques légales et judiciaires. 21. Enfin, au point de vue fiscal, l'art. 69, $ 4 de la loi du 22 frim. an VII portant que les cessions de parts d'intérêt dans les sociétés sont soumises à un droit de 50 cent. p. 100, les ces- sions de droits dans une société civile bénéficient de cette dis- position si la société civile est une personne morale (*). Au contraire, si elle n'est pas une personne morale, la cession est soumise aux droits plus élevés exigibles sur les ventes de meubles et d'immeubles (3). CHAPITRE II CONTRATS QUI CONSTITUENT DES SOCIETES 21 bis. Les caractères que la loi attribue, explicitement ou implicitement, au contrat de société servent à déterminer les contrats qui sont des sociétés et à les distinguer des autres actes ou conventions. Ainsi l'ensemble des mises doit constituer -un fonds com- mun. La souscription de risques maritimes par plusieurs per- sonnes, sans solidarité, n'est pas une société ('). Mais la mise en commun d'immeubles pour les exploiter et répartir les bénéfices est une société ('). (') En ce dernier sens Cass. req., 4 juil. 1893, S., 94. 1. 166. (*) Cass.. 14 fév. 1870, S.. 70. 1. 136. — Cass., 27 juil. 1870, S., 70. 1. 401. — Cass., 17 août 1870, S., 70. 1. 435. — Cass., 4 déc. 1871, S., 71. 1. 215. — Cass., 6 mars 1872, S.. 72. 1. 88. — Cass., 14 nov. 1877, S., 78. 1. 44. (3; Trib. civ. Castres, 19 déc. 1895, Rép. périod. de l'enreg., 18%, n. 8742. (') Trib. corn. Marseille, 16 fév. 1892, Bec. Marseille, 92. 1. 149. — V. supra, n.9. (5) Nancy, 28 juil. 1891, Gaz. Pal., 91. 2. 552 mines,. CONTRATS CONSTITUAI DES SOCIÉTÉS 23 22. La société doil être distinguée tic la vente. La distinction est en général très simple. On a cependant pu se demander s'il y a vente ou société dans la convention par laquelle le propriétaire d'une coupe de bois la cède à un tiers, avec la clause que la coupe sera exploitée « à moitié perte et profit ». On pense généralement qu'il v a là une vente, niais on autorise les parties h stipuler que le contrat est une société ('). Cette opinion, à notre avis. oublie que la nature d'une convention ne dépend pas de la volonté des parties. Nous pensons que ce contrat est une société, par la raison que, d'après les termes du contrat, les pertes comme les bénéfices se répartissent entre les deux par- tics : si les frais d'exploitation dépassent le produit, chacune des deux parties subira une perte ; or il est très vrai que le prix d'une vente peut consister dans une part des bénéfices que réalisera l'acheteur, mais une vente ne peut, sans perdre son caractère, mettre le vendeur en perte. Au contraire, si le cessionnaire doit payer un prix calculé suivant les quantités d'arbres abattus ou les produits extraits de ces arbres, il y a vente (*). On s'est également demandé s'il y a vente ou société dans le contrat par lequel un auteur cède à un éditeur la propriété d'une œuvre moyennant une part des bénéfices de la publi- cation. Ici encore on décide qu'il y a vente (3), sauf si les parties ont eu l'intention de s'associer. Nous répondons ici encore qu'il n'appartient pas aux parties de fixer la nature de leur convention. Cette convention est, selon nous, une vente, car l'auteur ne participe pas aux pertes que peut faire subir à l'éditeur l'excédent des frais de tirage et de publicité sur les produits de la vente. Mais le contrat passé entre un auteur et un éditeur, aux termes duquel le livre du premier est publié à frais com- Casa., 2 déc. 1842, D. Rép., \° Société, n. 130. — Pont, n. 'J4 : Laurent, XXVI, n. 153: Guillouard, n. 19; Houpin, I,n. 9. (s) Gass., 7 janv. 1835, S., 35. 1. 5iU chêne-liège). — Houpin, loc. cit. (3) Paris, 10 mars 1843, S., 43. 2. 139. — Pont, n. 94 ; Laurent, XXVJ, n. 153 ; Guillouard, n. 19 et 77 : Houpin, loc. cil. 24 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ muns et avec répartition des bénéfices, est une société (*}. 23. Le contrat par lequel on cède un fonds de commerce moyennant l'abandon d'une partie des bénéfices est une vente et non une société ; le vendeur n'a, en effet, rien à voir dans l'exploitation et, d'autre part, le cédant ne participe pas aux pertes. On peut rapprocher cette solution de celle que nous donnons sur le contrat par lequel un patron promet à son employé une portion des bénéfices (-). De même, le contrat par lequel un officier public ou minis- tériel cède son étude moyennant l'abandon d'une part des bénéfices est une vente (3). Cette dernière solution est très importante : les sociétés formées pour l'exploitation des offices ministériels sont illici- tes ; si donc la convention en question constituait une société, elle serait nulle. Considérée comme une vente, elle est vala- ble (*) pour les raisons mêmes qui nous font admettre la validité de la convention analogue intervenue au sujet de la rétribution d'un clerc : rien n'interdit de faire consister un prix dans une quotité des produits de la chose vendue ou louée. Cette convention n'a pas, du reste, les inconvénients d'une société, car le vendeur n'a aucun droit de gestion ni d'immixtion ; on objecte qu'il est investi « d'une manière im- plicite d'un pouvoir de contrôle » (') ; cela n'est évidemment pas exact. La question peut être assez pratique. Il est vrai, comme on l'a dit, que les traités relatifs aux cessions d'offices sont sou- (') Paris, 20 avril 1894, Gnz. PuL.Oi. 1. 730. - V. infra, n. 29. (s) Troplong, I, n. 96; Duvergier, n. 59; Pont, n. 45 ; Guillouard, n. 18; Houpin. loc. cit. (*) Cass. civ., 23 juin 1868, S., 69. 1. 67, D., 68. 1. 452. — Toulouse, 14 nov. 1835, S., 36. 2. 155. — Troplong, loc. cil.; Duvergier, loc. cil. : Pont, lue. cit. — Cotilra Cass. civ., 10 déc. 1878, S., 80. 1. 61, D., 79. 1. 8. — Paris, 2 janv. 1838, D. Rép., \o Société, n. 154. — Déc. min. just., 3 fév. 1837, S., 38. 2. 48. — Guil- louard, loc. cit. ; Durand, Des off. minist., a. 288 : Garsonnet, Tr. de proc, I, p. 385, § 99. note 18. (Ce dernier auteur fait exception pour le cas où la stipulation ' d'un prélèvement « n'est ni l'objet principal ni même la condition accessoire de la cession d'office et qu'elle représente uniquement le prix de cession de la clientèle et la rémunération d'un patronage que le cédant promet de fournir au cessionnaire auprès des clients de l'étude ». (5j Guillouard, loc. cit. COU nuis i 0NS1 m \m DES soi n i ES 25 mis au contrôle de la chancelle rie; il est possible aussi, comme on le prétend, que la chancellerie n'accepte pas comme mode de paiement du prix l'attribution «l'une pari de hénéiices au vendeur; mais est-il nécessaire, comme on le soutient égale- ment, que le mode de paiement du prix soit définitif? Pour- rait-on qualifier de contre-lettre non obligatoire la convention qui, ultérieurement, fixerait un nouveau moyen d'acquitter le prix? 24. Le bail doit être également distingué de la société; il y a société et non point bail lorsque le propriétaire confie son immeuble à un tiers, même sous le nom de bail, moyennant un loyer représentant la plus forte partie des locations que le prétendu preneur retirera de l'immeuble; cette convention ne peut être qualifiée exactement de bail, d'abord parce que le prétendu preneur ne jouit pas de la chose louée, ensuite parce qu'il ne s'oblige pas personnellement au paiement d'un loyer ('). La convention est-elle, comme on l'a prétendu, un mandat salarié (2)? Nous ne le pensons pas; le mandat oblige le mandataire à faire quelque chose pour le compte du man- dant; or, dans l'espèce, le prétendu preneur ne s'engage à faire aucune démarche pour louer l'immeuble. En réalité, le contrat s'analyse dans une société pour l'exploitation d'un immeuble appartenant à l'un des associés, avec gestion confiée à l'autre associé, et partage inégal des bénéfices. La question est très importante, car la société ne finit qu'au terme fixé et le mandat est révocable à volonté ; l'opinion que nous combattons est donc forcée d'admettre que la conven- tion en question peut être révoquée au gré du concédant (3), et cela seul la condamne; car cette révocabilité n'a certaine- ment pas été dans l'intention des parties. il y a également société et non pas bail (*) dans la conven- tion par laquelle un propriétaire contie son magasin à un tiers 1 Lyon,2déc. 1868, S., 69. 2. 284, D.. 71. 2. 168. — Laurent. XXVI, n. 152 bis; Guillouard, Tr. du conlr. de louage, 1, n. 11 et 62; Houpin, n. 6. (s) V. les autorités précitées Contra Bordeaux, 2 juil. 1847, S., 48. 2. 247. (*) Guillouard, Tr. du contr. de louage, f, n. 12; Fuzier-IIerman. C. civ. annoté, n. 18. "26 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ sous la condition de lui remettre une portion du produit des droits du magasinage; ici une partie des autorités qui voyaient un mandat dans l'hypothèse précédente reconnaissent qu'il s'agit d'une association en participation ('). Mais il s'agit bien d'un bail et non pas d'une société, si au prix fixe de location s'ajoute une partie des bénéfices. En effet, la fixation d'un prix uniforme est incompatible avec le contrat de société, tandis que la fixation d'un loyer variable, surtout comme appoint à un loyer fixé, n'est pas incompa- tible avec le contrat de louage. 25. La cession par un preneur de ses droits indivis dans un bail est-elle une cession de bail ou un contrat de société? Cette question ne nous parait pas susceptible d'une réponse absolue. Il se peut que les parties aient entendu s'associer pour exploiter en commun la chose louée, participer aux frais et se répartir les bénéfices. En ce cas, il y aura société. Il se peut aussi que les parties aient voulu simplement, sans mêler leurs efforts, participer au bail. 26. En principe, la cession du droit indivis d'habiter une maison est un bail ; il n'y a pas de bénéfice à partager. Au contraire, la cession du droit indivis dans un bail de chasse ou dans un bail de terrains, fait dans un but de spécu- lation, est, en principe, une société (*). En tous cas, le juge du fait décide souverainement s'il y a bail ou société (3). 27. Le cas le plus fréquent de cessions faites dans ces con- ditions est la cession du droit au bail d'une chasse consenti sans but de spéculation ; c'est une cession de bail. On a décidé que cette cession ne pouvait être une véritable cession de bail par la raison que le droit à la chasse est concédé intuiti per- sonne, qu'il ne peut, en conséquence, se transmettre aux héri- tiers du cessionnaire (*) ; mais, outre que la cession de ce droit, (') Guillouard, op. cit., I, n. 62. H Douai, 15 mars 1893, sous Cass. req., 31 janv. 1894, S., 94. 1. 237, D., 94. 1. 532 bail de chasse; cet arrêl en conclut que le décès de l'une des parties met fin au contrat). (8) Cass. req., 31 janv. 1894, précité. {*) Douai, 15 mars 1893, sous Cass. req., 31 janv. 1894, précité. CONTRA K I ONSTITI \M Dl S BOCIÉTÉS 27 même considérée comme cession de bail, ne se transmet peut- être pas aux héritiers «lu cessionnaire, ce raisonnement con- duirait à dire que le J)ail de chasse lui-même n'est pas un bail. Mais on n'a pas osé soutenir que la cession du droit indi- vis à une location de chasse fût une véritable société; on y a vu un contrat innommé, participant de la cession de bail et de la société ('). 28. Nous nous sommes demandé ailleurs s'il faut voir une société ou un bail dans le métayage (2) ou le cheptel (3). 29. La distinction entre le louage d'ouvrage et la société est importante : le louage d'ouvrage, sans cesser aujourd'hui à la volonté de l'un des contractants, peut du moins prendre fin par cette volonté appuyée de motifs légitimes, tandis qu'un associé ne peut se retirer à contre temps. La capacité, en outre, n'est pas la même dans le louage d'ouvrage, que clans la société. A la différence de l'associé, le locateur d'ouvrage n'est pas tenu des pertes de l'entreprise. Il n'a pas de droit de contrôle à exercer sur les actes du maitre (*). Le contrat entre un patron et un employé dont la rémuné- ration consiste, soit dans une portion des bénéfices, soit dans une remise sur les affaires qu'il procure au patron est un louage d'ouvrage. II est valable notamment s'il est fait entre un officier ministériel et son clerc (5). On peut également considérer comme un louage d'ouvrage l'acte par lequel deux officiers ministériels (comme un avoué ou un huissier) ou un avoué et un agréé stipulent qu'ils se confieront respectivement les affaires qui rentrent dans leurs attributions réciproques. Peut-être cependant est-ce plutôt une association. En tout cas, cet acte nous parait licite (6). Nous avons déjà (') Douai, 15 mars 1893, précité. — L'arrêt précité de la cour de cassation main- tient cette interprétation du juge de fait comme étant souveraine. [*) V. notre Tr. du conlr. de louage, 1™ éd., II, n. 1090. (3) V. notre Tr. du conlr. de louage, l'e éd., Il, n. 2112, 2143. («) Cass., 9 nov. 1869, D., 70. 1. 213. — Laurent, XXVI. n. 152 bis; Guillouard, Traité du contrat de société, n. 11. I,5) V. notre Traité du contrat de louage, I" éd., H, n. 1403 s. (6) On a cité en ce sens Cass., 13 janv. 1835, S., 35. 1. 17, qui est étranger à la question. — Contra Laurent, XXVI, n. 158; Guillouard, n. 49. 28 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ dit que seule la société formée pour l'exploitation d'un office public est nulle. On a cependant prétendu que la convention dont nous parlons blesse l'ordre public, parce qu'elle spécule relativement aux procès. Nous cherchons en vain où se trouve cette spéculation ; au surplus, rien n'interdit de faire des pro- cès un objet de spéculation; c'est même là, il faut le recon- naître, le trait caractéristique de certaines professions et de certains offices. La mission de recouvrer une créance ou tout autre droit moyennant une part des bénéfices est encore un louage d'ou- vrage (»). 30. La société peut être mêlée à un autre contrat. Ainsi l'associé peut consentir un prêt à la société ou lui verser des fonds en compte-courant (*). En ce cas l'associé sera un emprunteur ou un dépositaire en ce qui concerne les sommes versées; il sera donc un créancier (3). (.cla est très important à constater, car. tandis que sa part de bénéfices ne lui est attribuée qu'après le payement des créanciers, il viendra, pour ce qui lui est dû comme créan- cier, en concours avec les autres créanciers (*). Nous distinguerons ultérieurement la société du mandat, notamment en examinant le contrat par lequel mission est donnée de vendre un objet avec droit de garder tout ce qui. excédera un certain chiffre Enfin la société doit, comme nous le verrons, être distin- guée du prêt; il est, comme nous le montrerons, assez délicat de déterminer la nature du contrat par lequel le bailleur de fonds stipule, comme rémunération, une part dans les béné- fices d'une entreprise (6). 31. Nous distinguerons également la société de la commu- nauté ou indivision et de l'association (7). V. notre Traité du contrat de louage, l" éd., II, n. 2065. (*) Guillouard. n. 222; Hue, XI. n. 79. 1 tiuillouard. lue. cit.: Hue, loc. cit. « Cass., 21 juil. 1879, S.. 82. 1. 349. D.. 82. I. 77. — (luillouard, loc. cit.; Hue. loc. cit. Y. noire Tr. du mandat, n. 401. V. ce que nous disons à propos du prêt, infra, n. 693 s. V. infra, n. 5U8 s, 555 s. FORME — PROMES81 DE SOI IÉ1 É 29 CHAPITRE III FORME ET PREUVE DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ SECTION PREMIÈRE DELA FORME DU CONTRAT. DE LA PROMESSE D'ENTRER EN SOCIÉTÉ 32. Nous avons déjà vu que la sociélé civile est un contrat consensuel, par suite soustrait à toute espèce de formes, pourvu que le consentement soit donné par les associés ('). Telle était la solution admise en droit romain et dans l'an- cien droit. Il n'y a d'exception que pour le cas où une disposition de l'acte est de nature telle qu'elle doit être constatée dans un acte authentique. Il en est ainsi pour l'apport d'un brevet d'in- vention -), ou pour le cas où les gérants reçoivent un pouvoir d'hypothéquer les immeubles; la loi du Ie' août 1893 (art. 6), qui permet de conférer ce mandat dans un acte de société sous-seing privé, n'est pas applicable aux sociétés civiles (3). 33. La promesse d'entrer en société, faite par une partie envers l'autre, niais sans réciprocité, est valable (4j; elle donne lieu, en cas d'inexécution, h des dommages-intérêts (5). Mais on décide que celui qui a promis d'entrer en société ne peut être déclaré associé (6), car, dit-on, la formation de la société exige la volonté personnelle de s'associer. L'argument nous parait insuffisant, car il conduirait à dire que l'associé peut également se retirer dans le cours de la société sous la simple sanction de dommages-intérêts ; nous ne voyons aucun incon- vénient à permettre au juge, conformément à l'art. 1142, de déclarer obligatoire la promesse de s'associer et d'en ordon- ner l'exécution forcée parla réalisation des apports. (') V. supra, n. 4. (*) V. in [ru, n. 176. (s) V. notre Tr. du mandat, n. 466. (* r.uillouard, n. 33; Houpin, I, n. 27; Hue, XI, n. 9. (•) ' iuillouard, loc. cit.; Houpin, lac. cit.; Hue, loc. cit. 8) (iuillouard, loc. cit.; Hue, loc. cit. 30 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Pour les sociétés commerciales, il en est de même ; on a soutenu cependant que la promesse n'est alors nullement obligatoire et ne peut donner lieu à des dommages-intérêts, les sociélés commerciales exigeant pour leur constitution des formalités spéciales (*). Cette opinion n'est pas exacte (s). Il est de principe que toute promesse, à moins d'être contraire à l'ordre public, est obligatoire; si, du reste, la société com- merciale, irrégulièrement constituée, est nulle, les formalités de sa constitution ne sont pas exigées pour la promesse d'en- trer en société. Enfin on peut tirer un argument du caractère obligatoire, reconnu par tout le monde, de la promesse de prêt et de la promesse d'hypothèque. Si la promesse de constituer une société est intervenue en- tre tous les futurs associés, la société doit être regardée comme constituée; on peut invoquer en ce sens l'art. 1589. 34. La forme du contrat de société est réglée par la loi du lieu où il est passé (3). SECTION II PREUVE DU CONTRAT 35. La preuve du contrat de société, dans l'ancien droit, n'obéissait pas d'une manière complète aux principes. En mettant même à part les sociétés commerciales, que l'ordon- nance de 1673 assujettissait à la rédaction d'un écrit, à l'en- registrement dans un greffe, et à l'affichage, on distinguait entre les sociétés universelles et les sociétés particulières. Ces dernières étaient soumises au droit commun et on leur appliquait l'ordonnance de Moulins, qui interdisait la preuve testimoniale au-dessus de 100 livres. Cette même solution, malgré la généralité du texte de l'or- 1 Paris, 24 fév. 1860, D., 60. 2. 84. — Toulouse, 22 juin 1872, S., 73. 2. 169, D., 72.2. 156. I-' Paris, 11 avril 1861, Journ. trib. de corn., X, p. 375. — Paris, 1er mai 1862, Joum. trib. de corn., XI, p. 314. — Paris, 2 déc. 1887, D., 88. 5. 332. — Houpin, loc, cit. (:1) Trib. com. Marseille, 7 fév. 1878, Jurispr. corn, et marit. de Marseille, 1878, p. 93, Journ. dr. bit., V, 1878, p. 381. l'HKI \l 31 donnance, n'étail pas universellement reçue pour l<-s sociétés universelles; on y faisait souvent échec en admettant les sociétés taisihles. Les sociétés taisibles, ou communautés de pain et de pot, étaienl des sociétés universelles qui se formaient, sans qu'au- cune convention fût nécessaire, par une habitation en com- mun pendant un an et un jour ('). Déjà certaines coutumes les avaient rejetées. 11 en était ainsi, par exemple, de l'ancienne coutume d'Orléans fart. 80). Le texte général de l'ordonnance de Moulins aboutissait à prohiber les sociétés taisibles au-dessus de 100 livres. Il a été reconnu dans les travaux préparatoires que la règle posée par l'art. 1834, et d'après laquelle la preuve par témoins ne serait pas admise au-dessus deloOfr., a eu surtout pour but, en rappelant le droit commun, de supprimer l'ex- ception admise encore parquelquescoutumes pour les sociétés taisibles ('). Aujourd'hui donc, en ce qui concerne la preuve, le contrat de société demeure soumis de tous points aux règles du droit commun (3). Par conséquent, son existence ne peut, en prin- cipe, être prouvée par témoins qu'en matière n'excédant pas 150 fr. Si l'objet de la société dépasse ce chiffre, un écrit sera nécessaire. Cependant, même au-dessus de 150 fr., l'existence de la société pourra être prouvée par témoins, s'il y a un commencement de preuve par écrit (art. 1347) (*), ou si le titre I ipr. Coquille, Coût, de Sivernais, ch. XXII ; Polhier. n. 79. - Obs. du Trib. d'appel de Paris, Fenet, V, p. 279. — Rapport de Bouteville au tribunat, Fenet, XIV, p. 406. — Discours de Gillet au Corps législatif, Fenet, XIV, p. 420. Cass., 12déc. 1825, S. chr. — Cass., 19 juil. 1852, S., 53. 1. 33, D.. 52. 1. 299. — Cass., 17 fév. 1858. S., 58. 1. 461, D.. 58. 1. 124. — Paris, 17 avril 1807.S. chr. —Bruxelles, 28 juin 1810, S. chr. — Turin, 10 avril 1811, S. chr. — Nancy, 17 janv. 1829, S. chr. — Paris, 16 juin 1897, Gaz. Trib., 30 sept. 1897. — Duran- ton, XVII, n. 336; Troplong, I, n. 200; Duvergier. n. 66; Aubry et Rau, IV, p. 548, § 378, note 1 ; Pont, n. 133 s. ; Laurent, XXVI, n. 171 ; Guillouard, n. 81 : Houpin, I, n. 59; Hue, XI, n. 32. (4) Cass., 12 déc. 1825, S. chr. — Cass., 17 avril 1834, S., 34. 1. 276. — Cass., 19 juil. 1852, S., 53. 1. 33, D., 52. 1. 299. — Cass., 17 fév. 1858, S., 58. 1.461. D., 58. 1. 124. — Cass.req. 'et non ci v.), 18 déc. 1889, S., 93. 1. 467. — Nancy, 17 janv. 1829, S. chr. — Orléans, 26 août 1869, S., 70. 2. 113, D., 69. 2. 185. — Besançon, 12 juin 1889, Gaz. l'ai., 89. 2. i50. — Troplong, I, n. 200 ; Duvergier, n. 69; 32 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ a été perdu par suite d'un cas fortuit, imprévu et résultant d'une force majeure (art. 1348). Dans tous les cas, les règles ordinaires sur l'aveu et l'interrogatoire sur faits et articles (') et le serment (2) devront être appliquées. Nous le répétons, c'est le droit commun de tous points. Au premier abord, l'art. 1834 parait contredire le principe que nous venons de formuler. En effet, cet article, en décla- rant applicable à la société une des règles du droit commun en matière de preuve, semble insinuer que les autres ne doi- vent pas recevoir leur application. Ce texte, qui est la repro- duction presque littérale de l'art. 1341, est ainsi conçu : « Tou- » tes sociétés doivent être rédigées par écrit, lorsque leur objet » est d'une valeur de plus de cent cinquante francs. — La » preuve testimoniale n'est point admise contre et outre le » contenu de l'acte de société, ni sur ce qui serait allégué avoir » été dit avant, lors au depuis cet acte, encore qu'il s'agisse >> d'une somme ou valeur moindre de cent cinquante francs ». Mais les travaux préparatoires de la loi lèvent tous les doutes en montrant, comme nous l'avons vu, que l'art. 1834 a eu pour seul but d'exclure toute exception relative aux sociétés taisibles. En d'autres termes, notre code autorise les sociétés universelles, au moins celle de tous biens présents (art. 1837] ; mais leur existence ne résultera plus du seul fait de la cohabitation ot de la vie en commun pendant un certain temps et ne pourra même pas être prouvée par témoins au- dessus de 150 fr. (s). C'est le droit commun. Le législateur a voulu qu'il devint applicable de tous points en ce qui con- cerne la preuve des sociétés : et s'il ne signale que cette appli- cation particulière, ce n'est pas pour exclure les autres, mais parce que celle là aurait pu soulever quelques doutes à cause de l'ancienne pratique. Aubry et Uau, IV p. 549, § 378, note 3; Pont, n. 149 s. ; Laurent, XXVI, n. 176 : Houpin, toc. cil. {'--\ Auteurs précités. (») Trib. civ. Lyon, 8 juil. 1887, Mon.jud. Lyon, 12 déc. 1887. — Paris, 19 janv. 1894, Gaz. l'ai.. Table. 1er sem. 1894, v° Société corn., n. 3 impl.: la société de fait pour l'exploitation d'une distillerie résulte de la déclaration faite à la Régie dans laquelle les associés ont pris leur qualité et du fait reconnu par les parties que l'une d'elles était chargée de la tenue d'une caisse commune . rai i \i 33 Une preuve écrite peut, en fait, résulter des écritures ou prospectus de la société, indiquant les noms des assoeiés; cependant les tribunaux peuvent également reconnaître qu'en l'ait ers mentions s'expliquent autrement ('). 36. Pour savoir si l'objet de la société est ou non d'une valeur supérieure a 150 fr., et si par suite la preuve testimo- niale de l'existence du contrat doit être rejetée ou admise, il faut considérer l'ensemble des apports faits par les associés, sans se préoccuper d'ailleurs du montant de la demande (2). Ainsi deux personnes forment une société dans laquelle elles apportent chacune une mise de 50 fr., total 100 fr. : lasociété réalise des bénéfices considérables, 10.000 fr. par exemple, et l'un des associés en réclame sa part à l'autre: il pourra prouver par témoins le fondement de sa demande, c'est-à-dire l'existence de la société. En sens inverse, si les apports réunis des associés représentent une valeur supérieure à 150 fr., la demande que l'un des associés formerait contre l'autre ne pourrait pas être prouvée par témoins, alors même que l'actif de la société se trouverait actuellement réduit à un chiffre inférieur à 150 fr. Quand la loi dit qu'il doit être passé acte de toutes sociétés dont l'objet est d'une valeur de 150 fr. (art. 1834', elle se place évidemment, pour apprécier la valeur de l'intérêt engagé, au moment où les parties contractent; car elles ne peuvent pas lire dans l'avenir. Du reste, cette solution est admise pour l'interprétation de l'art. 1341, qui s'exprime dans les mêmes termes que l'art. 1834. C'est donc à tort qu'on soutient que l'objet de la société est la part que le demandeur réclame dans la société. En admettant que l'expression soit susceptible de deux interpré- tations, nous avons indiqué les raisonsdécisivespour lesquelles la première doit l'emporter. Du reste, il est faux que la récla- Paris, 16 juin 1897, Gaz. Ti'ib., 30 sept. 1897. Cass., 5janv. 1875, S.. 75. 1. 72, D., 77. 1. 39. — Turin, 24 mars 1807. S. chr. — Troplong. 1, n. 202 ; Larombière, art. 1341, n. 15: Demolombe. XXX. n. 34 et 35; Aubry et Rau, IV. p. 5 49, § 378, note 2; Pont, n. 145 et 14G: Laurent, XXVI. n. 175: Guillouard, n. 88; Arotz, IV, n. 1268; Houpin. loc. cit. : Hue. XI. n. 33. — Contra Duranton, XVII, n. 343. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 3 34 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ mation du demandeur soit l'objet de la société, elle n'est que l'objet de la demande. 37. Si l'écrit qui constate la formation delà société est sous seing- privé, il devra satisfaire aux exigences de l'art. 1325, c'est-à-dire qu'il devra être rédigé en autant d'originaux qu'il y a d'associés, et que chaque original devra contenir la men- tion de l'accomplissement de cette formalité ('). En effet, l'art. 1325 donne cette solution pour tous les contrats synal- lagmatiques et la société doit, nous le savons, être rangée parmi ces derniers. Il faudrait un texte formel pour que l'opi- nion contraire pût être admise. Cette opinion contraire est cependant consacrée par la juris- prudence et admise par quelques auteurs (-). Ce qui lui enlève toute valeur, c'est qu'elle ne tient pas compte de l'art. 1323, dont elle parait ignorer l'existence. Ses partisans se conten- tent de dire que l'écrit signé des parties est une véritable preuve par écrit et que l'ait. 1834 ne réclame pas autre cbose. Il n'est pas douteux qu'en effet l'écrit ne soit en lui-même une preuve suffisante, mais à ce point de vue il en est de tous les contrats comme de la société et, pour tous les contrats synallagmatiques, l'art. 1325 exclut cependant cette solution. On nous oppose encore que nous sommes forcés de recon- naître qu'un aveu constaté par écrit fait foi contre celui qui a avoué, quoique l'écrit ne soit pas rédigé en double. Or, dit- on, il n'y a pas dans l'écrit qui constate la société autre chose qu'un aveu de l'existence de la société. Nous trouvons cet argument singulier ; il est certain que l'aveu fait foi quoique l'écrit qui le constate ne soit pas rédigé en double; mais l'aveu fait également foi quoiqu'il ne soit pas constaté par écrit. Du reste, si l'objection était sérieuse, elle ne laisserait rien subsis- ter de l'art. 1325. Mais, comme nous venons de le dire et conformément au droit commun, l'écrit qui n'est pas rédigé dans le but spécial de prouver la formation de la société peut, s'il contient l'aveu (') Pont, n. 135; Laurent, XXVI, n. 173; Arntz, IV. n. 1267; Hue. XI, n. 32 et 33. H Paris, 17 avril 1807, S. chr. — Bruxelles, 28 fév. 1810, S. chr. — Turin, lu avril 1811, S. chr. — Troplong, I, n. 205 ; Guillouard, n. 83. PREUVE 35 d'une partie, servir de preuve contre cette partie quoiqu'il ne suit pas rédigé en double (,). 38. Il résulte de l'art. 1834 (pie les modifications au pacte social ne peuvent être prouvées par témoins, même au-des- sous de loO fr., si l'acte de société a été rédigé par écrit. Cela est conforme à l'art. 1341. Mais il eu est autrement s'il existe un commencement de preuve par écrit (2) ; telle est, en effet, la solution admise dans l'interprétation de l'art. 1341. 39. Les juges peuvent, malgré l'art. 1834, recourir aux simples présomptions pour interpréter l'acte de société (3). C'est encore le droit commun. 40. L'art. 1834, malgré les difficultés qu'on a soulevées sur ce point, ne s'applique qu'aux droits prétendus par les associés, soit entre eux, soit contre les tiers. Au contraire, les tiers qui agissent contre les associés peuvent démontrer l'existence de la société par tous les moyens de preuve et notamment par témoins et par présomptions (*). En effet, il est de principe que lés tiers peuvent par tous Jes moyens établir l'existence d'une convention et que l'art. 1344 ne leur est pas opposable; on ne peut donc se prévaloir davantage contre eux de l'art. 1834, qui n'est qu'une application de l'art. 1341. Du reste, nous avons montré que, d'après l'opinion générale, la théorie de la preuve testimoniale, telle qu'elle est établie dans les art. 1341 s., doit être tout entière appli- quée à la société. Or, dans cette théorie, figure l'art. 1348, qui permet de prouver par témoins un acte dont on n'a pu se procurer une preuve par écrit et telle est la situation des tiers, auxquels on ne peut reprocher de ne pas avoir entre les mains un exemplaire de l'acte de société. (■) Pont, n. 135; Laurent, XXVI, n. 173. - r.ass., 19 juil. 1852, S., 53. 1. 33, D., 52. 1. 299. — Paris, 26 janv. 1883, sous Gass. civ., 4 nov. 1885, S., 88. 1. 365. (3) Cass., 25 nov. 1872, S., 73. 1. 385. — Gass., 1er mars 1882, S., 8i. 1. 231. — <'.;i-s. civ., 4 nov. 1885, S., 88. 1. 365 (étendue de l'apport). (4) Gass., 23 nov. 1812, S. chr. — Cass., 21 mai 1878, S., 79. 1. 175, D., 78. 1. Ï56. — Troplong, I, n. 210; Aubry et Rau, IV, p. 548, §378, note 3; Pont, n.158; Guillouard, n. S7 ; Houpin, I, n. 59; Hue, XI, n. 34. — Contra Duvergier, n.76 s.'; Laurent, XXVI, n. 178. 3G DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 11 est donc inutile d'insister sur une objection qu'on a tirée des termes absolus de l'art. 1834. Il n'est guère plus sérieux de soutenir que le tiers a pu se procurer une preuve par écrit. en exigeant que l'acte de société lui fût représenté. Sans doute, il a pu l'exiger; mais quel aurait été le résultat de cette représentation? de prouver au tiers l'existence de la société; elle ne permettra pas au tiers de prouver lui-même l'existence de la société quand il agira contre les associés, car il n'aura plus l'acte de société entre les mains. Dira-t-on qu'il lui est possible d'exiger qu'un exemplaire de l'acte de société lui soit confié pour servir éventuellement de preuve contre les asso- ciés? Ce serait l'absurdité même, un obstacle à toutes les transactions, enfin une solution incompatible avec l'art. 1325, qui n'exige que la rédaction d'un nombre d'exemplaires égal au nombre des parties. 41. Les règles de preuve que nous venons d'établir s'ap- pliquent à toutes les sociétés civiles. Elles s'appliquent spécialement aux sociétés fromagères, qui s'établissent dans le Jura entre le propriétaire d'un troupeau de vaches et celui du chalet où doivent être fabriqués les fro- mages dont ils se partageront les produits ('). On a cepen- dant soutenu et jugé que ces sociétés, quel qu'en soit le chif- fre, peuvent être prouvées par témoins (-). Mais on n'a pu rien répondre à la généralité du texte de l'art. 1834; on s'est contenté de dire que. de temps immémorial, l'usage est que les sociétés fromagères peuvent être prouvées par témoins. On a ajouté, ce qui est moins sérieux encore, qu'à raison de leur diffusion, ces sociétés doivent être considérées, pour tous les habitants de la région, comme des « communautés préexistantes » auxquelles ils se contentent d'adhérer. On a pensé que l'antiquité de l'usage pourrait justifier une dérogation législative à l'art. 1834 (3). En 1865, une commis- (') Besançon, 23 avril 1845, S., 46. 2. 655, D., 47. 2. 15. — Pont, n. 138 ; Lau- rent, XXVI, n. 175 : Guillouard, n. 85 ; Houpin. I, n. 61 : Hue, XI, n. 35. - Besançon, 28 déc. 1842, S., 46. 2. 655, D., 47. 2. 15. — Besançon, 8 janv. 1851, 25 mars 1837, 11 janv. 1862, 4 déc. 1862, 12 mars 1867, S., 67. 2. 281, D.T 67. 2. 33. (') Guillouard, n. 85. pri i \i 37 Bion de personnes notables du Doubs et du Jura avail élaboré un projet dont l'art. l,r «''tait ainsi conçu : « Les associations fromagères "ii fruitières établies dans les départements de l'Est pour la fabrication des fromages, dits de Gruyère, sont des sociétés, civiles et d'une nature spéciale. Elles se consti- tuent avec T C. civ., le contrat de société peut être révoqué sur la demande des créanciers de l'associé qui a eu pour but de soustraire son actif au gage de ses créanciers, à condition que ses co-associés soient complices (7). La complicité de tous les co-associés est nécessaire. SECTION III DE L'OBJET ET DE LA CAL'SE 65. L'objet de la société (avec lequel se confond la cause, comme dans tous les contrats synallagmatiques) est le but Pont, n. 16; Guillouard, n. 32; Houpin, I, n. 25 ; Hue, XI, n. 9. ('-) Pont, n. 16; Guillouard, n. 32; Houpin, I, n. 25. (!) Gass., 20 mars 1860, S., 61. 1. 61, D., 60. 1. 398. — Pont, n. 16 ; Guillouard, n. 32; Houpin, loc. cit. — V. cep. Cass., 5 mars 1843, S., 43. 1. 144. (') Larombière, art. 1120, n. 7 ; Pont, n. 17; Guillouard, n. 32 bis, Houpin, I, n. 26; Hue, XI, n. 9. (') Pont, n. 17 ; Guillouard, n. 32 bis; Houpin, loc. cit. ; Hue, XI, n. 9. 6, Cass., 6 avril 1842, S., 42. 1. 597. — Cass. ,4 août 1847, S., 47. 1. 649, D.,47.1. 309. — Larombière, art. 1120, n. 7 ; Pont, n. 17 ; Demolombe, XXIV, n. 30 ; Guil- louard, n.32 bis ; Houpin, loc. cit.; Hue, XI, n.9. — Contra Laurent, XXVI, n.138. C) Trib. corn. Seine, 23 janv. 1894, Gaz. l'ai., 94. 1. 403. — Trib. corn. Seine, 27 fév. 1894, Gaz. Pal., 94. 1. 405, Journ. Trib. corn.. 95. 180. — Thaller, n. 305. — V. supra, n. 46. OBJE I ET CAUSI 47 qu'elle poursuit ' ou plus exactement <;u- on pourrait égale- ment considérer la recherche des bénéfices connue le but de la société la nature de l'exploitation. L'art. 1834 qualifie égale- ment d'objet la réunion des apports, mais cela est impropre. L'art. 1833 exige que l'objet de la société soit licite. Quoique la question de savoir si l'objet est licite présente des difficultés sérieuses d'application, le principe n'a rien de particulier à la société : 1rs art. 1108, 1131 et 1133 exigent d'une manière générale que les contrats aient un objet licite. Le droit romain appliquait déjà cette solution à la société (!), et il en était de même de l'ancien droit f3). 66. Sont nulles notamment les sociétés ayant les objets sui- vants : L'usure (*); L'exploitation d'une maison de tolérance /\ ou d'une mai- sou de jeu (6), par exemple d'un casino de ville d'eaux (7). Nous examinerons s'il en est de même quand l'exploitation doit avoir lieu à l'étranger '"); Les avances à faire à des joueurs 9 : Un objet portant atteinte à la liberté du commerce ou de l'industrie ('") ; 1 Guillouard, n. 42. ; L. 44, 57 et 71, 1)., pro soc, 17. "2. — L. 35, § 2. D., de contrait, empt., 18. 1. — L. 1, § 14. D.. de fit. et rat. dist., 27. 3. Domat, liv. I, tit. VIII, sect. 1, § 11; Pothier, n. 14: Argou, liv. III, ch. XXXII, p. 321. •' Pothier, n. 14. 1 Trib. com. Montargis, 28 juin 1888, Droit, 13 mars 1889. — Pothier, n. 14: Treilhard, Exposé des motifs au corps législatif. Fenet, XIV, p. 394. 6 Cass.. 16 août 1864, S., 65. 1. 23. — Chambéry, 2 mai 1894, D., 97. 2. 149. — Paris, 9 avril 1897, D., 97. 2. 244. — Trib. civ. Charleroi. 12 janv. 1897, Pas., 97. 3. 103. — Lyon-Caen et Renault, II, n. 7: Guillouard, n. 53: Houpin, I, n. 29- — Un cercle n'est pas illicite par cela seul que parmi ses actes entre l'exploitation d'une maison de jeu, Chambéry, 28 janv. 1892, Rec. Grenoble, 92. 2. 53. " Chambéry, 28 avril 1890, Ann. de comm., IV, 1890, Jurispr., p. 233. — Même restriction que pour les cercles, Chambéry, 28 janv. 1892, précité. ' V. in fra. n. 77. • Trib. com. Seine, 8 déc. 1887, Gaz. Pal., 88. 1. Sttppl., 5. — Trib. civ. Seine, 15 mars 1894. Gaz. Pal., 94. 2. 147. — Pothier, n. 14 : Treilhard. loc. cit. ' Trib. com. Dunkerque. 28 août 1883, Gaz. Pal., 88. 2. 362 Association entre canotiers qui se divisent en groupes et stipulent une pénalité contre ceux qui remorquent des navires affectés à un autre groupe que le leur . 48 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ L'exercice illégal de la médecine ('). La société formée pour le partage des gains du jeu entre personnes dont l'une s'engage à jouer ou parier avec l'argent avancé par l'autre, et à la charge de partager les bénéfices, est nulle (*), car tous les contrats consistant dans un jeu ou pari sont nuls. La société ayant pour objet la contrebande est nulle (5). Il en est ainsi, comme nous le verrons, même si la contre- bande doit être laite à l'étranger ('). Esl illicite également la société ayant pour objet la vente d'objets qui ne sont pas dans le commerce, par exemple les remèdes secrets (5). Est illicite la société formée pour faire obtenir à des tiers, moyennant finances, une faveur-, par exemple des décora- tions (6). La loi du 4 juillet 1889 a sanctionné le caractère (' Il élait admis, môme avant la loi du 30 nov. 1892, que le médecin qui s'associe avec 11 il tiers et couvre de son nom l'exercice illégal de la médecine pratiqué par ce dernier est co-auteur de la contravention. — Cass.. 25 avril 1857, S., 57. 1. 619. — Cass., 17 déc. 1859, S.. 60. 1. 298. — Toulouse, 12 août 1859, S., 59. 2. 625. — Dubrac, 7'/'. de jurispr. médicale, n. 333. — Aujourd hui la loi du 30 nov. 1892 (art. 16 dispose qu'il y a exercice illégal de la médecine de la part de « toute per- sonne qui. munie d'un titre régulier, sort des attributions que la loi lui confère, notamment en prêtant son concours aux personnes désignées dans les paragraphes précédents i celles qui pratiquent l'exercice illégal de la médecine . à l'effet de les soustraire aux prescriptions de la loi » ; le médecin qui couvre de son nom l'exer- cice illégal de la médecine par un tiers commet donc une infraction. — Alger, 17 mars 1>'.'i. S.. 95. 2. 237. — Pabon, Manuel jurai, des médecins, n. 21; Lecho- pié et Floquet, La nouv. législ. médicale, p. 155; Roland, Les médecins et la loi du S0 nov. (892, n. 244. (*) Trib. civ. Nice. 12 juin 1894, Gaz. Trib.. 11 août 1894. — Argou, liv. III, ch. XXXII, p. 321 ; 1 Ion pin, n. 29. — Contra Haute-Cour d'Angleterre, 22 nov. 1875, Journ. dr. in t., 111, 1876, p. 38 (rendu par interprétation de la loi anglaise, qui s'exprime de la même manière que l'art. 1965 . — Y. notre 7"*'. des contrats aléa- toires, du mandat, etc., n. 145. (J) Paris, 18 fév. 1837, D. Hep., v» Société, n. 150 et 173, et v° Oblif/alions,n. 593. — Potbier, u. 14; Treilbard, toc. cit. : Troplong, n. 86: Duvergier, n. 30; Char- don, Dol et fraude, III, n. 415; Pont, n. -43; Larombière, art. 1133, n. 34; Delan- gle, Soc. I. n. 103; Guillouard, n. 53; Laurent, XXVI, n. 1:33; Fuzier-Herman, C. r/c. annoté, art. 1133, n. 41 : Houpin, I, n. 29; Hue, XI, n. 12. 1 V. infra. n. Î7. - Paris. 15 janv. 1838. — Paris, 28 nov. 1868. — Paris, 5 fév. 1889, Gaz. Pal, 89. 1. 620. — Trib. civ. Cbàlons, 28 déc. 1866, sous Cass., 16 mars 1869, S., 69. 1. 325. — Guillouard, d. 44 ; Houpin, I, n. 29. ■ lillouard, n. 44. OBJET ET CM SI 19 illicite du trafic des décorations, en punissant co trafic d'une peine grave. Môme solution pour les fonctions publiques ' . 67. La société relativeà l'exploitation d'une Ponction publi- que est également nulle (2) ; car la fonction est accordée à la personne et il n'appartient pas plus à celui qui l'occupe de la mettre en société que de l'aliéner. Ainsi est nulle la convention par laquelle un candidat à une fonction publique s'engage envers un autre candidat à se retirer, moyennant la charge imposée à ce dernier de parta- ger avec le premier les bénéfices de sa fonction (3). 68. La société formée pour L'exploitation d'un office public ou ministériel est nulle comme étant illicite (4). Les offices sont, en effet, comme les fonctions publiques, conférés par le gouvernement, et quoique la nomination des officiers publics soit, en général, faite sur la présentation de leurs prédéces- seurs, elle n'est faite qu'au profit de personnes qui sont con- sidérées comme présentant des garanties suffisantes de mora- lité et de capacité; ces garanties disparaîtraient si l'association pour l'exercice d'un office public était possible. Du reste, l'art. 91 de la loi du *28 avril 1816 n'admet, en matière d'office, quelecontratde cession, et il déroge à la règle d'après laquelle (') Guillouaril, n il: Houpin, I. n. 29. ' Guillouard, n. 45; Hue, XI, n. 13. i'i Lyon. 12 janv. 1822, ]). Rép., v° Société, n. 159. — Guillouard, n. 45; Hue XI, ii. 13. * Cass. req., 26 fév. 1851, S., 51. 1. 327, D., 51. 1. 253.— Cass., 15 janv. 1855, S., 55. 1. 257, D., 55. I. 5. —Cass. civ., 6 août 1872, S., 73. 1. 67, D., 72. 1. 294. — Cass., 25 janv. 1887, S., 87. 1. 224. — Cass., 11 déc. 1888, S., 89. 1. 80. — Rennes. 2'.» nov. 1839, D. Rép., v° Office, n. 352. — Rennes, 28 août 1841, y., 41. 2. 494, D. Rép., v» 0/yîc-e,n.352. - Nimes,7 déc. 1848, D., 49. 2.203.— Toulouse, 18 janv. 1866, S.. 66. 2. 107, D., 66.2. 6. — Rennes, 19 janv. 1881, S., 81. 2. 181, D., 81. 2. 104. — Rennes, 15 avril 1886, S., 86. 2. 213. — Caen, 18 janv. 1888, S.. '.' I. 2. '.iT. — Poitiers, 13 janv. 1890, Rec. de Voiliers, 90. 82. — Pau, 8 juin 1891, S.. '.»',. 2. 127, D., 93. 2. 174.— Bordeaux. 28 avril 18%, D.,98 2. 84.— Troplong, I, n. 89 s. ; Duvergier, n. 59 s.; Larombière, art. 1128, n. 18; Laurent, XXVI, n. 157 s.; Aubry et Hau, IV, p. 550, § 378, note 4; Demolombe, XXIV, n. 338; Pont, n, 37; Durand. Des cessions et Iransm. d'office, n. 279 s.; Lyon-Caen et Renault. Traité, II, n. 72; Guillouard, n. 45: Garsonnet. Tr. de proc, I, p. 383, | 99; Wahl, Note, S., 94. 2. 290. § 2, n. 4; Houpin, I, n. 29 et Journ. des soc, 1893, p. 566; Hue, XI, n. 14. Société, puêt, dépôt. — 2e éd. 4 50 DU COMBAT DE SOCIÉTÉ les offices sont intransmissibles. Sans doute, il arrive que, par le décès d'un officier public, l'office soit en co-propriété entre ses héritiers, mais la co-propriété n'a pas les inconvénients de la société, qui permet aux associés de s'immiscer dans la gestion, et, d'ailleurs, ce qui est alors on indivision ce n'est pas l'office, mais le prix qui en sera retiré, puisqu'aucun des héritiers n'a, comme tel, le droit de gérer l'étude. Cette solution a été donnée pour les offices d'avoué ('), d'huissier (s), de notaire [3), de courtier maritime (*). 11 n'y a d'exception que pour les charges d'agent de change. Le caractère illicite de leur mise en société était reconnu par la jurisprudence avant la loi du 2 juil. 1862, qui a permis aux agents de change près les bourses pourvues d'un parquet de s 'adjoindre des bailleurs de fonds intéressés, qui participeront aux produits de la charge. De même les sociétés entre officiers publics pour la mise en commua des produits de leur charge est nulle (B). La cession d'une part dans un office est également nulle (6). In notaire n'ayant pas le droit de recevoir les actes aux- quels il est intéressé, une société formée pour réaliser des opérations qui devront être constatées par actes passés devant lui est aussi illicite (7). Rennes, 28 août 1841, S., il. 2. i'.ti, D. Rép., v» Office, n. 352. — Trib. civ. Nantes, 0 mai 1839, S., 39. 2. 434. (*) Cas>., 9 fév. 1852, S., 52. 1. 190, I)., 53. 1. 70. — Cass., 12 fév. 1878, S., 78. 1. L53. — Riom, :! août L841, S., il. 2. 192, D. Rép., \° Office, a. 362. — Paris, ifév. 1854, S., 54. 2. L48, D., 54. 2. 149. — Toulouse, 18 janv. 1866, S., 66. 2. 107, ] i., 66. 2. 6. — Pau. 8 juin L891, précité. . , Cass., 15 janv. 1855, S., 55. 1. 257, D., 55. 1. 5. — Paris, 31 janv. 1840, S., 10. 2. 81. — Paris, 15 l'év. 1840, S., 10. 2. 81. — Lyon, 29 juin 1849, D., 50. 2. 155. 1 Bordeaux. 8 juin 1853, D., 53. 2. 109. — Rennes, 19 janv. 1881, S., 81. 2. 181, D., 81. 2. 104. — Rennes, 15 avril 1886, précité. — Fabre, Des courtiers, I, n. s2; Boistel, Précis, de dr. coin., n. 589 ; Ruben de Couder, Dicl. dr. com., v° Courtiers, a. 33 s. — V. cep. Alger, 26 juil. 1860, S.. 61. 2. 61, D , 60. 2. 187. 3 Montpellier, 28 août 1830, D. Rép.. v» Huissier, n. 128. — Riom, 3 août 1841, S., il. 2. 492, 1). Réf.. \" Office, n. 362. — Angers, 23 avril 1842, D. Rép., v" Commissaire priseur, n. 50. — Durand, op. cit., n. 288 ; Garsonnet, I, p. 386, § 99, note 17. fii Caen, 18 janv. 1888, S., 90. 2. 97 (courtier maritime) et les arrêts précités. r Dijon, 25 juin 1884, sous Cass., 14 mai 1888, S., 89. 1. 12. — Houpin, I, n. 29: Hue, XI, n. 11. OBJET Kl i Al M 51 Nous avons examiné ailleurs s'il faut admettre la validité du contrai par lequel un officier ministériel promet à son clerc, pour les services que lui rend ce dernier, une part des béné- fices de l'élude, ou de celui par lequel un officier public cède si charge moyennant l'abandon d'une partie des produits ('). Il va sans dire (pie la société pour l'exploitation d'un cabi- net d'agent d'affaires est valable (2). 69. Il ne suffi! pas qu'une fonction soit constituée en mono- pole pour que la société conclue en vue de son exploitation soit nulle; il faut encore que le monopole soit créé, partiellement du moins, dans un intérêt général ; s'il est créé dans un intérêt purement pécuniaire, une société peut être formée pour son exploitation Ainsi le concessionnaire d'un chemin de fer peut faire une s uiélé de ce genre (*). De même pour un facteur à la halle (8). 70. Il existe certaines professions qui ne sont ni des fonc- tions publiques, ni des offices publics et pour l'exercice des- quelles des conditions spéciales de capacité sont exigées. Tels sont les pharmaciens. La société conclue pour l'exer- cice de cette profession est-elle valable? < On a soutenu d'une manière générale qu'elle est nulle (6) et on a même appliqué cette solution au cas où la société est formée avec un médecin (') ; et on n'excepte que la société avec une personne ayant un diplôme de pharmacien. La raison qu'on invoque est que les conditions de capacité exigées par la loi sont éludées. Elles le sont surtout, ajoute- t-on, si la société est formée avec un médecin, que l'on s'expose à placer entre son devoir médical et l'intérêt de l'officine à la prospérité de laquelle il est associé ^8). 1 V. s nitra. il. 29. i3i Paris, 5 déc. 1871 agence d'expropriation . cité par Houpin, I, n. 30. — Il ou pi n, loc. cil. 3 Paris, 3 avril 1884, fler. des soc, 85.15. — Guillouard, n.52; Houpin, I, n.30. l'i Toulouse, 9 déc. 1885, Rev. des soc, 86. 456. — Houpin, I, n. 45. » Paris. 5 mars 1881, S., 81. 2. 130, D., 82. 2. 39. — Guillouard, n. 52; Houpin, I. n. 30. i6, Paris, 27 mars 1862, S., 62. 2. 381, D., 62. 2. 105. — Paris, 31 mai 186G, S., 67. 2. 19. - Laurent, XXVI, n. 162; Guillouard, n. 51 ; Hue, XI, n. li. Laurent, loc. cil.; Guillouard, loc cil.; Hue, loc. cil. H Laurent, loc. vit.; Guillouard, loc, cit. 52 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ L'argument est, il est à peine nécessaire de le remarquer, entièrement sans valeur quand il s'agît d'une société entre deux pharmaciens; aussi les sociétés de ce genre sont-elles très fréquentes dans les grandes villes et on ne s'est jamais avisé de les faire déclarer nulles. Mais s'il en est ainsi, l'argument n'a pas plus de valeur quand la société est formée entre un pharmacien et un médecin. On sait que, dans nos lois, le diplôme de médecin permet d'exer- cer les fonctions de pharmacien; la situation est donc la même que si la société était conclue entre deux pharmaciens. Qu'en- tend-on exprimer par cette formule que le médecin est placé entre son devoir médical et l'intérêt de l'officine? Sans doute que le médecin aura tendance à imposer des remèdes nom- breux à ses malades, peut-être au détriment de leur santé! Si le législateur avait eu cette crainte, il aurait interdit aux médecins d'exercer la profession de pharmacien. Nous n'interdirons même pas la société entre le pharma- cien et un tiers ('). 11 faut songer que le pharmacien est un commerçant, que des capitaux lui sont nécessaires pour ac- quérir et gérer son fonds de commerce, qu'une commandite est pour lui aussi utile que pour tout autre commerçant. Si l'associé trouvait dans cette qualité le droit de fabriquer et de vendre les produits, la société serait sans doute illicite; mais ordinairement l'associé ne peut s'ingérer que dans la compta- bilité et dans la partie matérielle de l'exploitation. En ce qui concerne ces deux points, l'immixtion n'a rien de dangereux pour le public. Une société de ce genre n'est donc pas compa- rable avec celle qui est formée au sujet d'un office ministériel et qui permet à l'associé de dénaturer le caractère que doit avoir un office ministériel. Il est essentiel toutefois que la gérance ne soit pas confiée à l'un des associés non muni du diplôme nécessaire, sinon la société est nulle v2). 71. Une société est illicite quand elle est faite en vue d'un (') Lyon, 22 mai 1861, S., 62. 2. 39. — Contra Houpin, I, n. 29 et les auteurs précités. (2) Trib. corn ni. Lyon, 17 déc. 1889, An», dr. corn., IV, 1890, jurispr., p. 67. — Trib. coinm. Seine, 30 juin 1894, (laz. Trib., 29 juil. 1894. OBJET m <:\i -i 53 commerce ou d'une industrie réservés à l'Etal ou à un tiers qui en a obtenu la concession ou à «les personnes déterminées qui «-il <>iii le monopole. Il en serait ainsi pour la fabrication des allumettes, ou pour la négociation de valeurs susceptibles d'être cotées à la bourse ('); la société pour l'exploitation d'une maison de coulisse est donc mille. Mais les syndicats financiers sont valables (■). Aussi le syndical formé pour le placement des actions d'une société n'est pas nul (3). 72. Sont nulles les sociétés contractées pour échapper à un impôt, par exemple une société entre deux marchands de Liquides pour frauder le Trésor ou une caisse municipale (*). 73. Suffit-il qu'un acte soit interdit à une personne, en rai- son de sn profession, pour que la société conclue entre cette personne et un tiers en vue de l'accomplissement de cet acte soit nulle? La négative nous parait certaine; quand la loi ou l'administration considèrent des actes déterminés comme incompatibles avec l'exercice d'une profession, la révocation ou d'autres mesures disciplinaires peuvent bien être pronon- cées en cas de contravention, mais l'acte n'est pas nul, car, en lui-même, il n'est pas illicite. Ainsi un officier public, auquel il est interdit d'exercer le commerce, fait valablement des actes de commerce et la jurisprudence permet qu'il soit déclaré en faillite. De même un officier public pourra s'associer pour faire le commerce. dépendant on décide généralement que la société formée entre un notaire et un tiers pour l'acquisition d'immeubles et leur revente en détail est nulle (3). Des deux arguments qu'on ! Trib. civ. Seine, 8 déc. 1887, cité par Houpin, I, n. 28. — Lyon-Caen et Re- nault, II, n. 69; Guillouard, n. 53; Houpin, loc. cit.; Hue, XI, n. 14. <*) Trib. civ. Seine, 6 juil. 1881, Trib. com. Seine, 9 et 21 juin 1882, cités par Cosson, L'agiotage et les syndicats financiers, p. 6. — Gosson, loc. cit. Paris, 28 avril 1887, sous Cass. civ., 23 déc. 1889, S., 91. 1. 321 (particulière- ment s'il est fait entre tous les souscripteurs primitifs . *) Cass., 8 nov. 1880, S., 81. 1. 248, D., 81. 1. 115. — Limoges, 18 août 1879, S . 79. 2. 248, D., 80.2. 131. — Guillouard, n. 53; Fuzier-Herman, sur l'art. 1133, n. 7A ; Houpin, I, n. 29. 5 Dijon, 25 juin 1884, sous Cass., 14 mai 1888, S., 89. 1. 12. — Besançon, 54 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ a invoqués en ce sens, le premier, tout au moins, est fort sin- gulier; on a dit que la loi du 25 ventôse an XI interdit aux notaires de recevoir des actesdans lesquels ilssont personnel- lement intéressés ('). Cela est très exact (*), mais est-il impos- sible de supposer que le notaire se serve d'un acte sous-seing privé ou s'adresse à l'un de ses confrères ? On dit encore que l'art. 12 de lord, du 4janv. 1843 inter- dit aux notaires de faire des spéculations sur les immeubles. Nous avons répondu par avance à cette considération : une défense de ce genre n'est sanctionnée que par des mesures disciplinaires; l'acte fait par le notaire est évidemment vala- ble et ni son vendeur ni son acquéreur ne peuvent se voir opposer la nullité. Pourquoi en serait-il autrement d'un asso- cié? 74. Est nulle la société formée entre un tiers et un fonc- tionnaire, un employé ou un officier public pour se partager les bénéfices d'actes que ce dernier n'a pas le droit de faire. Ainsi en est-il d'un traité passé entre un fournisseur et ùu officier d'administration (3), et cela même si cette association n'est pas réprimée par la loi criminelle (*). De même pour la société entre un commis et un tiers pour se partager les béné- fices d'une opération illicite faite au détriment du commer- çant (5). 75. Est nulle encore, la société formée pour entraver le commerce ou la liberté des conventions, par exemple la société formée pour empêcher que des immeubles mis en adjudication dépassent un certain prix (6). De même, la société ayant pour objet des manœuvres des- tinées à hausser le prix d'une denrée est nulle (7). 9 janv. 1889, D., 90. 2. 19. — Guillouard, n. 50; Fuzier-Herman, sur l'art. 1133, n. 102; Hue, XI, n. 11. 1 Guillouard, loc. cit. -) V. supra, n. 68. (s) Aix, 22 juin 1878, S., 79. 2. 19. — Guillouard, n. 53. (*) Aix, 22 juin 1878, précité. — Guillouard, loc. cit. (5) Agen, 11 fév. 1887, liée. iVAgen, 87. 296. (6j Cass., 23 avril 1834, S., 34. 1. 746. — Laurent, XXVL n. 161 ; Pont, n. il ; fluillouard. n. 53; Houpin, I, n. 29. (7) Treilhard, loc. cit. — La société entre plusieurs fabricants de céramique d'une même région, pour mettre en commun, afin de les vendre à prix égal. OBJET II ( \l SK •).) Il en est ainsi égalemenl «les sociétés formées pour l'acca- parement d'une marchandise ('). 76. La société constituée pour aider au fonctionnemenl d'une entreprise illicite, par exemple d'une congrégation non autorisée, est nulle (*). 76 bis. Une société pour une exploitation soumise à l'au- torisation du gouvernement n'est pas illicite (3 . Elle est sim- plement conditionnelle. 77. On s'est demandé si l'objet de la société, illicite en sup- posant que l'exploitation doive avoir lieu en France, est égale- ment illicite quand l'exploitation doit avoir lieu à l'étranger. Par exemple, une société conclue pour faire la contrebande ou exploiter une maison de jeu à l'étranger, ou pour partager le gain d'un billet de loterie étrangère est-elle illicite? Quoique la négative compte des partisans très sérieux (*), l'affirmative nous parait certaine (5). Outre qu'il serait cho- |enrs produits, avec clause que les associés vendront exclusivement ces produits à la société dans la proportion des apports de chacun, est valable, alors que les asso- ciés, formant la minorité des fabricants de la région, ne se sont engagés que pour un temps et un rayon limité, et n'ont pas eu l'intention de se créer un monopole. Paris, 14 avril 1891, S., 92. 2. 150. - Grenoble, i»-- mai 1894, S., 94. 2. 277, D.. 95. 2.221. (') Cass., 2 avril 1851, D., 54. 5. 119. — Bourges, 11 août 1826, sous Cass., 18 juin 1828, S. chr., D. Rép., v° Obligations, n. 613. — Aubry et Rau, IV, p. 323, § 315; Fuzier-Herman, C. civ. annoté, sur l'art. 1133, n. 16 s. (*) Cass., 26 fév. 1849, S., 49. 1. 245, D., 49. 1. 44 (société universelle de gains entre membres d'une communauté non autorisée). — Caen, 20 juil. 1846, S., i7. 2. 278. (3) Contra Bordeaux, 29 avril 1891, Gaz. Trib.. 19 sept. 1891 (agence d'émigra- tion ; cet arrêt en conclut que les associés peuvent se retirer tant que l'autorisation n'est pas intervenue). («) Cass., 25 août 1835, Si, 35. 1. 673. — Paris, 22 fév. 1849, S., 49. 2. 144, D., 49. 2. 105. — Trib. civ. Seine, 12 mars 1847, Gaz. Trib., 13 mars 1847. — Hauie- Cour justice Angleterre, Chancellerie, 18 avril 1891, Journ. dr. int., XIX, 1892, p. 743 (société pour la concession de la loterie d'un Etat étranger). — Larom- bière, art. 1133, n. 41 ; Aubry et Rau, IV, p. 550, § 378, note 7; Fuzier-Herman. art. 1133, n. 12; Hue, XI, n. 12. — V. aussi, en ce qui concerne les loteries, la jurisprudence allemande antérieure à l'arrêt du 7 déc. 1886, cité à la note suiv., Trigant-Genesle, Journ. dr. inlern.. XXIII, 1896, p. 829. (5) Paris, 31 mars 1849, S., 49. 2. 464, D., 49. 2. 214. — Trib. civ. Seine, 29 juil. 1865, Gaz. Trib. 25 août 1865.— Trib. de l'Empire allemand, 7 déc. 1886, Journ., dr. intern., XVII, 1890. p. 12 (loterie). — Pont, n. 43 et 44 ; Brocher, Cours de dr. intern. privé, II, n. 160 ; Lyon-Caen et Renault, II, n. 70 et 71 : Guillouard, n. 54 ; Frèrejouan du Saint, Jeu et pari. a. 272; Despagnet, Dr. int. prier, ,j6 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ quant de voir un tribunal français sanctionner des engage- ments que la loi française considère comme immoraux, nous ne voyons pas comment un changement de latitude mo- difierait le caractère de la société contractée. Du reste, on sait que, d'une manière générale, les tribunaux français n'ont pas, d'après les principes du droit international, le droit de méconnaître les lois étrangères et doivent appliquer ces lois toutes les fois qu'un contrat régi par elles leur est soumis; pourquoi, dès lors, pourraient-ils ne pas tenir compte de lois qui considèrent comme illicite une société également consi- dérée comme illicite en France? On objecte qu'il appartient à chaque peuple de se suffire ;i lui-même pour l'exécution de ses lois de police. Cette objec- tion repose sur une confusion; il ne s'agit pas ici des lois de police, lesquelles touchent au droit criminel et ont, en effet, un caractère territorial; il s'agit de lois qui rentrent dans le droit civil et. par suite, doivent être respectées dans tous les États. Cette solution a, au point de vue pratique, l'avantage qu'é- tant basée sur des raisons de droit international, elle oblige également les tribunaux étrangers à considérercomme nulles les sociétés formées pour une exploitation illicite en France. Enfin Pothier était en ce sens ' . Ainsi la société formée par l'exploitation d'une maison de jeu à l'étranger est nulle (i). Il en est de même d'une société qui se propose la contre- bande h l'étranger (:t). Tout en décidant le contraire en principe, la cour de cassa- n. 486; Surville et Arlhuys, id., n. 248; Bossion, Du conflit des lois en ce qui concerne la subst. des oblig., p. 310; Vavasseur, I, n. 38. — Gpr. Journ. dr. intern., XX, 1893, p. 810 s. (') Tr. du conlr. d'assur., n. 58. - Paris, 31 mars 1849, S., 49. 2. 464, D.,49. 2. 2 i i . — Trib. civ. Seine, 31 mars l.si9, S., 49. 2. 464. — Despagnet, Précis de dr. in t. privé, n. 420; Guillouard, n. 54; Frèrejouan du Saint, Du jeu el. pari, n. 272. — Contra Paris, 22 fév. 1849, S , 49. 2. 144, D.,49. 2. 105. — Trib. civ. Seine, 12 mars 1847, Gaz. Trib., 13 mars. — Larombière, art. 1133, n. 41 ; Aubry et Rau, IV, p. 550, § 378, note 7; Fuzier- llerman, C. et», annoté, sur l'art. 1133, n. 12. (3j Guillouard, loc. cit. — Contra Larombière, loc. cit.; Aubry et Hau, loc. cit.; Kuzier-Herman, sur l'art. 1133, n. 42. OBJET ET CAUSE 57 lion àdmel cependanl la Qullité de la société <|iii, en même temps que la contrebande-, se propose pour but d'acheter la connivence des employés des douanes ('). dette distinction ne peut se justifier. Il va sans dire que, pour les partisans de l'opinion que nous avons combattue, la société formée pour une exploita- tion illicite à l'étranger est valable môme si elle est formée entre un Français et un sujet du pays où l'exploitation doit avoir lieu (2). Car s'il est vrai que les tribunaux français n'aient p;is à se préoccuper de la loi étrangère, la nationalité des parties en cause n'importe pas. Il faut aussi aller, dans cette opinion, jusqu'à dire que 1rs tribunaux français doivent reconnaître la validité d'une société de ce genre formée exclusivement entre sujets des pays étrangers; la raison est toujours la môme. 78. La société garde-t-elle son caractère illicite si l'opéra- tion qu'elle a pour but de réaliser à l'étranger, considérée comme illicite par la loi française, n'est pas interdite par la loi du pays où elle doit être exécutée? La question s'est élevée pour la société ayant pour but l'exploitation d'une maison de jeu dans un pays où cette exploitation est autorisée. On a prétendu que la société doit être, malgré cette der- nière circonstance, considérée comme illicite vis-à-vis des tribunaux français, parce qu'elle est « contraire aux lois éternelles et universelles de la morale » (s), et on a rappelé que c'est en effet sur des considérations de morale que se sont fondés les rédacteurs du code civil en refusant toute action en vertu du jeu (*). Cette considération ne nous paraît pas déterminante; la loi française ne peut avoir la prétention d'être, à un point de vue absolu, la consécration de la morale; elle ne peut pen- ser qu'à appliquer les idées de justice et d'ordre public qui (') Cass., 25 août 1835, S., 35. 1. 673. -'} Larombière, art. 1133, n. 41. (») Paris, 31 mars 1849, S., 49. 2. 464, D., 49. 2. 214. — Pont, n. 44 ; Lyon-Caen et Renault, II, n. 71; Guillouard, n. 54; Brocher, oj>. cit., II, n. 160. lîuiliouard, loc. cit. 58 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ préoccupent ses sujets, et n'ignore pas que de pareilles idées changent avec les pays. Du reste, les considérations de droit international sur lesquelles nous nous sommes fondés condui- sent à la même solution. L'opinion contraire aboutirait aux plus singuliers résultais, car il faudrait aussi dire que les tribunaux français n'ont pas le droit de sanctionner les sociétés faites pour l'exploitation des offices publics dans un pays où cette exploitation est au- torisée, les sociétés pour la fabrication du tabac dans un pays où celle fabrication est libre. Réciproquement, nous pensons que les tribunaux français doivent proclamer le caractère illicite d'une société conclue pour une exploitation qui doit avoir lieu dans un pays où elle est regardée comme illicite alors même qu'en France elle est jugée tout autrement ('). 79. Une société es! valable quoiqu'elle soit constituée en vue d'opérations à faire dans un pays étranger et que, pour mener à bout ces opérations, elle soit obligée de rompre un blocus établi par sa loi nationale (' . 80. Il peut arriver que l'objet d'une société d'illicite devienne licite. Ainsi la loi du 2 juillet 18(i2 ;i autorisé les sociétés pour l'exploitation d'une charge d'agent de change, nulles jusqu'alors. Dans ce cas, l'action en nullité conlinue-t-elle à pouvoir être dirigée contre une société antérieure à la loi qui déclare licite l'objet de cette société? On a admis la négative, par la raison qu'il y a de la part des associés, qui continuent à exécuter le contrat de société, ratification de la nullité (s) ; on oublie que la nullité est absolue et, par suite, non susceptible de ratili- calion. ' Ballot, Rev. dr. fr. et élr., VI, 1840, p. 803 s. 2) C. Alabama, Joui)}, dr. in/., IV, 1877, p. 266. 3) Paris, 12 juil. 1880, .louai, de soc, 1880, \>. 589. — Lyon-Caen, Rev. ail. X, 1881, p. 275. BANCT10N DES CONDITIONS INEXISTENCE il DE VALIDITÉ 59 SECTION IV SANCTION DES CONDITIONS d' EXISTENCE ET DE VALIDITÉ DES SOCIÉTÉS g 1. Personnes qui peuvent provoquer la nullité de la société. 81. Par application de ht disposition générale de l'art. 1 12.'i, la nullité de la société pour cause- d'incapacité ne peut être demandée que par l'incapable seul ' . L'associé incapable ne peut être mis par ses associés eu demeure de déclarer s'il entend ou non provoquer la nul- lité (*). Cette solution ressort suffisamment de l'art. 1304, qui donne à l'incapable, pour se prononcer, dix ans à partir du jour où il est devenu capable; ses co-contractants ne peuvent lui enlever le bénéfice du délai que lui accorde la loi; du reste, on décide en ce sens pour la généralité des actes passés par l'incapable. Enfin la solution contraire contredit l'abro- gation des actions provocatoires. Pour soutenir que le principe n'est pas applicable en ma- tière de société, on s'est prévalu de ce que, la société étant un contrat successif, l'incapable ne peut laisser indéfiniment ses co-associés dans l'incertitude. Si cet argument avait quelque valeur, nous ne voyons pas pourquoi il se restreindrait à la société : dans la vente, qui n'est pas un contrat successif, la partie capable n'a-t-elle pas le même intérêt à savoir si l'in- capable intentera une action en nullité? Du reste, il ne s'agit pas de laisser indéfiniment les associés capables dans l'incer- titude, puisqu'au bout d'un certain temps l'action en nullité cesse de pouvoir être intentée. 82. Par exception, la nullité des sociétés entre époux, qui repose sur l'ordre public, peut être invoquée par tout inté- ressé (3). (') Lyon-Caen et Renault, II, n. 81 ; Guillouard, n. il ; Houpin, I. n. 23. (*) Contra Lyon-Caen et Renault, II, n. 81 ; Guillouard, n, 41; Houpin, loç. <■!(. C) Paris, 2» mars 1870, S , 71. 2. 71. — Lacointa, Note, S., 88. 1.305,— notam- ment par le syndic de la faillite de la sociélé. Lacointa, loc. cit. 60 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 83. Conformément au droit commun, la nullité fondée sur les vices du consentement ne peut être invoquée que par les personnes dont le consentement a été vicié. Au contraire, la nullité pour défaut de consentement ou pour objet illicite peut être invoquée par tout intéressé. § II. Temps pendant lequel la nullité peut être opposée. 84. Ici encore il y a lieu d'appliquer le droit commun. Si la société entre époux est nulle, les motifs sur lesquels est fondée la nullité, — contravention aux art. 1099, 1388 et 1395 C. civ. — commandent de décider que cette nullité est d'ordre public ('). Elle ne peut donc pas être ratifiée, au moins pendant le mariage^). Mais, après la dissolution du mariage, la société peut-elle être ratifiée? On a décidé l'affirmative ('), par application sans doute de la jurisprudence qui décide qu'une nullité d'ordre public disparait par une confirmation intervenue après que les motifs de nullité ont disparu '). La nullité d'une société fondée sur un objet illicite peut être également formée indéfiniment (5) ; il en est ainsi même si la nullité dérive de ce que les actes rentrant dans l'objet de la société étaient interdits à certains associés (H), car l;i société n'en est pas moins illicite. Mais une action en restitution ne peut être formée que pendant trente ans; donc, la société fût-elle illicite, l'associé qui a reçu les apports de ses coassociés ou a touché leur part de bénéfices ne peut être actionné que pendant trente ans à partir du jour de la réception (7). • Pari?, 14 avril 1856, S., 56. 2. 369, D., 56. 2. 231. — Lacointa, Noie, S., 88. 1. :!n5; Labbé, Note, S.. 90. 1. 49. (-1 Paris, 14 avril 1856, précité. — Lacointa, loc. cil. — Décidé de même que la nullité peut être opposée en appel. — Paris, 10 déc. 1893, D., 97. 2. 125. 3 Cas*, req., 6 fév. 1888, S., 90. 1. 49, D., 88. 1. 401. (■*) Cass., 31 janv. 1833, S., 33. i. 471. iluc, XI. u. 19. 6 Contra Hue, loc. cil. (7) V. infra, n. 92. EFFETS DE I.A NULLITÉ (il l [II. Effets de la nullité. I. Entre quelles personnes se ///'/finit la nullité. 85. Un contrat nul, quelle que soit la cause de la nullité, est nul vis-à-vis de tout le monde. La nullité d'une société est donc prononcée vis-à-vis de tous les associés, alors même qu'un seul d'entre eux est l'au- teur des laits, par exemple des manœuvres frauduleuses, qui ont entraîné la nullité '). .Mais la milité prononcée à la demande d'un associé contre certains de ses coassociés n'est pas opposable aux autres associés (*). La justitication de cette solution est, non pas, comme on l'a dit (3), dans le caractère synallagmatique du contrat, mais dans le caractère relatif de l'autorité de la chose jugée. 86. Nous étudions plus loin les effets de la nullité vis-à-vis des tiers (*). IL Effets de la nullité entre les parties. A. Restitution des apports et des avances. 87. La société dont l'objet est illicite est nulle et même inexistante ; elle ne peut donc engendrer aucun etl'et : le néant ne saurait rien produire. Il en résulte que chaque associé a le droit de répéter le moulant de ses apports, car ils se trou- vent avoir été effectués sans cause. Cette solution est admise à peu près par tout le monde (5). Elle n'est pas contestable pour ceux qui, comme nous, admet- tent que, malgré la nullité de la société, les bénéfices qui sont entre les mains d'un associé doivent être partagés entre tous les associés ((!). Mais les auteurs qui soutiennent la solution (') Trib. féd. suisse, 6 juil. 1894, Ami. de. comm., 1895, doctr., p. 148. (*) Douai, 12 fév. 1848, S.. 49. 2. 670, D., 50. 2. 8. — Pont, n. 8 ; Guillouard, a. 8. (3) Guillouard, n. 8. •j V. infra, n. lU2s. (s) Cass., 15 jativ. 1855, S., 55. 1. 257, D., 55. 1. 5. — Cass.. 14 mai 1888, y., 89. 1. 12. — Trib. civ. Nantes, 23 juin 1845, D., 45. 4. 377, — et les auteurs cités infra, p. 62, note 1. — Co/ilra Hue, XI, n. 18. (6) Laurent, XXVI, n. 165 s. <)2 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ contraire par le motif qu'un acte nul ne produit aucun effet, permettent cependant aux associés de reprendre leur apport ('). Gela est peu logique (' , puisqu'un acte nul ne peut produire aucun effet; c'est par une subtilité excessive qu'on prétend que l'associé demandeur en restitution de ses apports invoque non pas le fonctionnement de la société, mais la nullité même de la société ; se prévaloir de la nullité de la société pour le fonctionnement de laquelle ont été versés les apports, n'est- ce pas affirmer que les apports ont été versés à une société nulle, et n'est on pas obligé, pour appuyer cette réclamation, de démontrer que la société était nulle et de s'appesantir ainsi sur son caractère illicite? En vain dit-on encore que si les apports doivent être restitués, c'est que précisément, à cause de la nullité de la société, le détenteur de ces apports ne peut assigner à sa détention aucune cause légitime. Est-ce donc au détenteur qu'il appartient de prouver la cause légï- limc de sa détention? N'est-ce pas, aux termes de l'art. 1315, le demandeur qui doit prouver que son action est fondée? En tout cas, comme nous le montrerons à propos de la restitution des bénéfices (8), il ne peut être fait aucune dis- tinction entre la société qui porte sur un objet interdit à tous el celle qui porte sur un objet interdit à certaines personnes, parmi lesquelles se trouvent certains des associés (*). Dans les deux cas, l'objet de la société est illicite. 88. En cas d'annulation d'une société pour incapacité, pour défaut de consentement ou pour vices du consentement, les parties doivent être remises dans le même état que si elles n'avaient pas contracté (5j. Ici donc on est d'accord pour admettre que les apports doivent être restitués. 89. Il existe une hypothèse où les apports ne peuvent être repris, et même doivent être versés dans la masse à partager ' Duvergier, n. 31 ; Aubry et Hau, IV, p. 551, g 378, note 9; Pont, n. 53; Lyon- ( laen et Renault, Traité, II, n. 73 ; Guillouard, n. 58 et 8(5 ; Houpin, I, n. 31. — Con- tra Uelainarre et Lepoitvin, Tr. du conlr. de commission, I, n. 65; Troplong, I, n. 105. • Laurent, XXVI, n. 166; Hue, loc. cit. V. infra, n. 92. * Contra, Hue, XI, n. 18. 5 Liuillouard, n. 41 et 59. EFFETS DE LA M II. il i. G3 «Milrc les associés s'ils ne l'ont |>;is encore été; c'est celle où l'un «les associés a l'ait apport d'industrie; comme cet apport ne peut être repris, les autres apports doivent, par compen- sation, être partagés entre les associés (*), mais seulement pour une portion correspondante au temps pendant lequel l'industrie a été fournie En outre, dans ce même cas, le versement de l'apport doit être accompagné de ses intérêts à partir du jour où ces inté- rêts devaienteourir d'après les principes du contrat de société, et cela pour la totalité de l'apport (s). 90. Les sommes que l'un des associés a avancées h l'autre en vue des opérations sociales doivent lui être restituées (4), quelle que soit la cause de la nullité. Elles portent même intérêt à partir du jour où elles ont été reçues, comme étant indues (5). B. Répartition tirs bénéfices et du fonda social . 91. Etudions d'abord le cas où la sociéléest nulle à raison du caractère illicite de son objet. En ce qui concerne les bénéfices réalisés, on m ai A tiendra les partages qui en auraient été faits entre les associés, aucun d'eux ne pouvant puiser dans la société qui n'a pas d'exis- tence légale une action pour les attaquer (6). 11 suit de là que si, au moment où la nullité est prononcée, tous les bénéfices sont partagés, la nullité n'a aucun effet en dehors de la res- titution des apports. 92. Mais que décider quant aux bénéfices non partagés qui se trouvent entre les mains de l'un des associés? Les autres peuvent-ils en demander leur part ? La négative est générale- ment admise (7). Une société inexistante, dit on, ne peut en- Kiom, 15 mars 1894. Rec. Hiom, 95. 356. - Hiom, 15 mars 1894, précité. (8) Hiom, 15 mars 1894, précité. (* Cass. civ., 14 mai 1888, S., 89. 1. 12. Cass. civ., 14 mai 1888, précité. (f' (luillouard, n. 57; Iloupin, I, D. 31. : Cass., 10 janv. 1865, S., 65. 1. 110, 1)., 65. 1. 290. — Cass., 8 nov. 1880, S., 81.1. 248, D., 81. 1. 115. — Paris, 4 fév. 1854. S., 54.2. 148, D., 54. 2. 149. —Li- moges, 18 août 1879, S., 79. 2. 248, D.,80. 2. 131.— Dijon. 25 juin 1884, sous Cass., Cl DU CONTRAT DU SOCIÉTÉ gendrer au profit des prétendus associés une action en par- tage. Les bénéfices resteront donc où ils sont, par application de la maxime In pari turpitudine meliorest causa possidentis. On ne peut donner aux associés le droit de les réclamer qu'en leur permettant de s'appuyer sur le pacte social, lequel doit, à raison de son caractère illicite, rester ignoré. C'est du reste en ce sens que décidait Pothier :' . L'opinion contraire nous parait préférable (-). 11 est tout d'abord fort singulier que l'associé qui détient un profit illi- cite soit mieux traité que celui qui détient un profit licite. D'un autre côté, si le contrat est immoral, ce n'est pas une raison pour rendre plus immoral encore le partage des béné- fices en donnant tout à l'un, en vertu de la circonstance toute fortuite qu'il détient les gains, et rien aux autres. Il va, en outre, contradiction entre la solution de nos adversaires et la doctrine, pourtant généralement admise, qui permet aux asso- ciés de reprendre leurs apports; la reprise des apports se fonde évidemment aussi sur le contrat qui les constate, c'est- à-dire sur le pacte social. Nous ajouterons que, d'après l'opi- nion qui parait l'emporter aujourd'hui, les prestations faites en vertu d'un contrat illicite peuvent être répétées; il n'y a pas de raison pour refuser d'appliquer cette solution à la so- ciété. Enfin, on reconnaît bien que si les bénéfices ne sont pas entre les mains d'un associé, le juge peut liquider la société conformément aux conventions. Il résulte de là que si deux personnes ont acheté en com- 1 i mai 1888, S., 89. 1. 12. — Paris, le' avril 1*93, Droit, 23 mai 1895 (participants à une caisse de jeu). — Trib. corn. Lyon. 17 déc. 188.», Aitn. dr. coin., IV, 1890, p. 67. — Trib. civ. Seine. 15 mars 1894, Gaz. l'ai . 94. 2. 147. — Trib. civ. Nice, 12 juin 1894, Gaz. Trib.. 11 août 1894. — Uuranlon, XVII, n. 327 ; Troplong, n. 99 s.; Duvergier, a. 25 s. ; Aubry et llau, IV, p. 551, § 378, note 8; Pont, n. 54 s. : Lyon-Caen et Kenault, Traité, II, n. 74 ; Guillouard, n. 57 ; Fuzier-Herman, sur l'art. 1133, n. 5.; Houpin, I, n. 31 ; Hue, XI, n. 15. 1 \. 36. ' Cass., 24 août 1841, S., 42. 1. (>i<. — Cass.. 15 déc. 1851, S., 52. 1. 21, D., 52. 1. 71. — Cass., 13 mai 1862, S., 62. 1. 825, D., 62. 1. 338. — Cass., 7 fév. 1865, S., 65. 1. 235, D., 65. 1. 289. — Cass. civ., 15 nov. 1876, S., 77. 1. 409, D , 77. 1. 70. — Lyon, 9 déc. 1850, S., 50. 2. 634, D., 51. 2. lu. — Paris, 10 mai 1860, S., 60. 2. 465, D., 60. 2. 89. — Paris, 17 mars 1861, S., 62. 2. 381, D., 62. 2. 105. — Besan- çon, 9 janv. ISS1.», D., 90. 2. 19. — Laurent, XXVI, u. 166 s. BFFETS DE LA M LLITÉ 65 imiii un billet d'une loterie interdite et que !<■ porteur se soit l'ail payer le lot gagné, l'autre associé a une action en partage de ce loi Certains auteurs, tout eu rejetant notre opinion en principe, l'adoptent pour le cas où la société est nulle à raison de ce qu'elle porte sur certains actes licites en eux-mêmes, mais in- terdits à certains des associés (par exemple sur l'exercice de la profession de pharmacien) (*). Mais la société, clans ce cas comme dans celui où son objet est interdit à tout le monde, a pour but une exploitation qui, dans les conditions où elle se présente, est interdite par les lois; la nullité a donc tous les caractères d'une nullité fondée sur l'objet illicite de la société. Un arrêt a décidé qu'au contraire, dans cette hypothèse, ceux des associés qui ont le droit d'exercer la profession peu- vent seuls réclamer les bénéfices; ainsi, le notaire qui a formé avec des tiers unv société pour l'exploitation de sa charge, pourrait s'approprier seul les bénéfices (3). Cette opinion est profondément injuste; elle ne repose sur aucun texte. 93. Supposons encore que les bénéfices soient entre les mains d'un tiers, d'un gérant par exemple; on nepeutévidem • ment les lui laisser, ils ne lui appartiennent pas. Comment faire cependant pour l'obliger à les restituer, dans l'opinion d'après laquelle toute action fondée sur le contrat de société est nulle? Le gérant qui tient son droit du contrat de société refusera de restituer; s'il consent à la restitution, il faudra répartir les bénéfices entre les associés; comment procèdera- t-on si aucun d'eux n'a le droit d'intenter une action en par- tage? On voit à quelles inextricables difficultés conduit h' système que nous avons combattu. 94. En tout cas la nullité n'est pas en principe un obstacle à la demande en partage du fonds social (v). '■ ContraG. >upw Emp. d'Allemagne, 7 déc. 1*n">. Journ. tir. inl., XVII, L£ 1>. 133. — C. supr. Suède, 17 mais 1886, Journ. dr. in/.. XVI. L889, p. 923. — (J. sup. Luxembourg, 18 avril 1890, Gaz. Pal., 90. 2. 327. l*t Hue, n. 16 et 17. > Bordeaux, 28 avril 1896, D., 98. 2. 84. [') Cass., lô nov. 1876, S., 77. 1. 109, D., 77. 1. 7o. Société, prêt, dépôt. — "2e éd. ô 66 DU CONTRAT 1>E SOCIÉTÉ Il est admis en général qu'une société nulle doit être réglée par le juge suivant l'intention des parties (l) ; il peut ordonner le règlement conformément aux stipulations du pacte social et, à défaut de stipulations, conformément au droit commun (*). Il en est ainsi, par exemple, pour les sociétés relatives à l'exploitation des offices ministériels (3). 95. Quant aux sociétés nulles parce que certains des asso- ciés n'avaient pas la qualité nécessaire pour en faire partie (sociétés de pharmacie entre personnes dont certaines ne sont pas munies des diplômes nécessaires), il y a lieu d'attribuer le fonds social aux personnes qui ont cette qualité, moyennant une indemnité payable aux autres (*). 96. Si la nullité est prononcée pour cause d'incapacité des parties ou pour défaut de consentement, il est clair que l'as- socié qui détient les bénéfices n'a pas le droit de les conser- ver; on ne peut, ici, refuser l'action aux autres associés sous le prétexte que la sociélé est illicite. Donc les bénéfices seront partagés (s). En principe, ce sont les stipulations du pacte social qui seront observées à cet égard (6). Ainsi décidé pour les socié- tés entre époux (7). 97. En admettant que la société entre concubins soit nulle, on dit (jue la femme, dans l'opinion qui lui interdit de récla- mer sa part de bénéfices, peut alors réclamer des gages de domestique si elle en a fait les fonctions (R! ; il serait, dit-on, (•) Cass. civ., 13 mai 1862, S., G2. 1. 825, D , 62. 1.338. •' Cass. civ., 13 mai 1862, précité. — Cass. civ., 5 janv. 1886, S., 86. 1. 241, D., 86. 1. 122. — Paris, 12 fév. 1885, 1)., 86. 2. 191. - Grenoble, 24 déc. 1889, D., 92. 2. 617. — Poitiers, 13 janv. 1890, Rec. de Poitiers, 90. 82. — Pau, 8 juin 1891, s., 94. 2. 127. 1)., 93 2. 174. - Lyon-Caen et Renault, Traité, II, n. 225. (») Poitiers, 13 janv. 1890, précité. — Pau, 8 juin 1891, précité. («) Trib. corn. Lyon, 17 déc. 1889, Ann. dr. comm., IV. 1891, Jurispr., p. 67. i5i Cass. civ., 7 mars 1888, S., 88. 1. 305. — Guillouard, n. 60; Lacointa. Noie, - 88. 1. 305. («) Houpin, I, n. 23. — V. cep. Pont, n. 37 et 217. (?) Cass. crim., 9 août 1851, S., 52. 1. 281, D., 52. 1. 161. — Cass. req., 27 juin 1893, S., 94. 1. 25, 1)., 93. 1. 488. — Trib. civ. Seine, 24 juin 1891, Droit, 22 juil. 1891. — Contra Trib. coin. Marseille, 23 nov. 1892, Rec. Marseille, 93. 1. 41. s Guillouard, n. 86 (qui cite en ce sens Cass., 14 mars 1870, S., 70. 1. 364. Cet arrêt est étranger à la question ; il se rattache à la théorie d"après laquelle l'inexé- cution dune promesse de mariage oblige à la réparation du préjudice causé et EFFETS DE LA NULLITÉ 67 contraire à l'équité que l'homme avec lequel elle ;i vécu s'enri- cln'l à ses dépens. Nous nous étonnons de voir invoquer cet argument par les auteurs qui ne reculent pas devant L'iniquité d'une solution (jui laisse, en cas de société illicite, tous les bénéfices entre les mains d'un seul associé. A un autre point de vue encore, il nous parait peu logique de permettre k la femme de réclamer des gages de domestique : il faudrait qu'elle prouvai l'existence d'un contrat de louage d'ouvrage, or ce contrat n'existe p;is. 98. Les tribunaux ne peuvent pas donner à l'un des mem- bres d'une société déclarée nulle le droit d'acquérir par préférence l'actif social {*). 99. Lorsqu'une société est nulle, l'un des associés ne peut néanmoins reprendre le consentement qu'il a donné, en se retirant ou après la dissolution, aux autres associés de se servir de son nom dans la raison sociale ou la dénomination de la maison de commerce [-). C. Effets entre les associas /mur l'avenir. 100. Une société nulle ne produit aucun effet pour l'ave- nir; il en est ainsi notamment de la nullité pour cause illi- cite (3). Ce n'est pas seulement parce qu'un contrat dont la nullité est d'ordre public ne produit aucun effet, c'est aussi parce que tout acte nul cesse, pour l'avenir, d'être obliga- toire. Ainsi les associés ne peuvent être obligés de réaliser leurs apports ('). 101. De ce que la société nulle ne produit aucun effet pour l'avenir, on a conclu que la marque de fabrique de cette so- ciété ne peut pas être vendue, mais doit être détruite (5). décide que celui qui par une promesse de mariage s'est assuré des services de domesticité d'une femme, doit lui rembourser la valeur de ces services au cas où il n'exécute pas cette promesse). '| Toulouse, 6 mars 1893, D., 93. 2. 504. Trib. corn. .Marseille, 27 mars 1893, Rec. des soc, 1894, p. 76 (pour la société etilre époux). i ■ Guillouard, n. 50; Iloupin, I, n. 31. 1 t îuillouard, n. 56. I3) Toulouse, 6 mars 1893, D., 93. 2. 504. — Contra L. S., Sole, D., 93. 2. 504. 08 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Cette solution n'est pas acceptable; la valeur de la marque de fabrique fait partie de l'actif; elle appartient comme tout l'actif aux associés. III. Effets de la nullité entre les associés et les tiers. 102. Les associés peuvent opposer la nullité aux tiers ('); car c'est un principe certain qu'un acte nul ne produit aucun effet. On a objecté l'art. 42 du code de commerce et l'art. 50 de la loi du 24 juillet 1867, qui donnent, en effet, la solution contraire, mais concernent uniquement les sociétés commer- ciales; du reste, ces textes s'expliquent si l'on songe qu'ils sanctionnent l'omission de formalités exigées uniquement dans l'intérêt des tiers. La jurisprudence fait une distinction (*). Elle admet bien que la nullité peut être opposée aux tiers s'ils ont connu le caractère illicite de la société (ce qui est, à vrai dire, le cas le plus habituel), mais elle ne l'admet pas dans le cas con- traire, par la raison que les associés ne peuvent se prévaloir vis-à-vis d'un tiers de la faute qu'ils ont seuls commise. La raison est insuffisante pour répondre à l'argument que nous avons employé. Du principe que nous avons atlniis.il résulte que la femme qui a contracté société avec son mari peut opposer la nullité de la société aux tiers qui ont contracté avec son mari ('). 103. 11 est évident que, de leur côté, les tiers peuvent op- poser la nullité aux associés (4), sauf s'il s'agit d'une nullité pour incapacité ou vices du consentement. 1 Laurent, XXVI. n. 169: Lyon-Oaen et Henault, II, n. 74; Guillouard, n. 60; Houpin, I, n. 31. — Contra Talon, Et. sur te contr. de soc. (cité par Guillouard , p. 89. -■ Rennes, 9 avril 1851, S., 52. 2. 261, D., 53. 2. 208. — Lyon, 28fév. 1853. S.» :. '.. 2. 383, D., 53. 2. 207. — Pont, n. 50. r9 C. cite Brooklyn. 1885, Journ. dr. Int.. XIII, 1886, p. 737. 4 Guillouard, n. 60: Houpin, loc. cil. SOI il i i - CIVILES ET COHMERI IALES 69 .11 VPITRE V DES DIVERSES ESPECES DE SOCIETES SECTION PREMIÈRE ni » SOCIÉTÉS CIVILES ET DKS SOCIÉTÉS COMMERCIALES 104. L'intérêt de la distinction entre les sociétés civiles et les sociétés commerciales a sensiblement diminué depuis que la loi du 1er août 18(.)3 a entièrement assimilé aux sociétés commerciales les sociétés civiles à forme commerciale ('). Mais cet intérêt est resté cependant très considérable; la distinction subsiste. Il est important de déterminer dans laquelle de ces deux classes rentre une société déterminée si. en fait, cette société n'a pas revêtu les formes commercia- les. Ce qu'il importe de dire, c'est qu'aujourd'hui la distinc- tion existe, non plus entre les sociétés civiles et les sociétés commerciales, mais entre les sociétés civiles non revêtues de la forme commerciale, d'une part, et, d'autre part, les socié- tés civiles revêtues de la forme commerciale et les sociétés commerciales. Voici les principaux intérêts de la distinction : 1° Des formes particulières et des mesures de publicité sont exigées pour les sociétés commerciales; elles sont seule- ment, comme nous venons de le voir, autorisées pour les sociétés civiles ; 2° Les sociétés commerciales constituent des personnes morales; on discute la question de savoir s'il en est de même des sociétés civiles ; 3° Dans les sociétés commerciales, les associés peuvent limiter leur responsabilité au montant de leurs apports; il n'en est peut-être pas de même dans les sociétés civiles; 4° Mais, dans les sociétés civiles, chaque associé ne peut être poursuivi que pour sa part; dans les sociétés commer- ciales, les associés indéfiniment responsables peuvent être poursuivis solidairement ; [') V. infra, même n°. 70 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 5" La mort d'un associé ne dissout pas toujours les sociétés commerciales; elle dissout toujours les sociétés civiles; 6° La prescription des actions dirigées contre les membres d'une société commerciale est de 5 ans (C. co., art. 64); elle est de 30 ans contre les membres d'une société civile; 7° La société commerciale peut être mise en faillite ou en liquidation judiciaire; la société civile ne peut être mise qu'en déconfiture ; 8° La compétence n'est pas la même. La loi du 1er août 1893, dans l'art. 68 qu'elle ajoute à la loi du 24 juil. 1867, s'exprime ainsi : « Quel que soit leur objet, les sociétés en commandite ou anonymes qui seront constituées dans les formes du G. co. ou de la présente loi seront commerciales et soumises aux lois et usages du com- merce » ('). 105. On était, avant la loi du 1" août 1893, d'accord pour reconnaître que le caractère civil ou commercial de la société ne dépend pas de sa forme et qu'une société civile par son objet reste telle malgré la forme commerciale que lui attri- bueraient les parties (s i. Cette dernière solution a cessé d'être exacte, la loi du lpr août 1893 ayant entièrement assimilé aux sociétés commerciales les sociétés civiles à forme commerciale. Toutefois, il reste vrai que les sociétés commerciales par leur objet ne peuvent emprunter les formes des sociétés civiles, c'est-à-dire se constituer sans l'observation des formes exi- gées par le G. co. La qualité des parties n'influe pas davantage sur le carac- (l) Le projet soumis à la Chambre (Tliellier de Poncheville) n'allait pas aussi loin; il n'appliquait pas aux sociétés civiles à forme commerciale les règles de fond des sociétés commerciales (Journ. o//\, 22 janv. 1890, déb. pari, p. 62). L'art. 68 est une innovation que la commission a introduite dans le but d'empêcher que les tiers ne soient, par la forme de la société, induits en erreur, et aussi de ne pas laisser les sociétés civiles prendre les avantages de la forme commerciale (limitation des pertes aux apports, etc.) sans en accepter les inconvénients (fail- lite). (Rapport Clausel de Coussergues, 9 avril 1892, Journ. o/f'., doc. pari., Cham- bre, sept. 1892, p. 970,. Un amendement contraire Bardoux, Sénat, 3 juil. 1893, Journ. o/J'. du 4, déb. pari., p. 1028; a été rejeté (Sénat, 13 juil. 1893, Journ. o/f. du 14, déb. pari., p. 1147). (*) Cass., 27 mars 1866, S., 66. 1. 211. — Cass., 26 fév. 1872, S., 72. 1. 175. — Cass., 28 janv. 1884, S., 86. 1. 465. — Rouen, le>' avril 1881, S., 82. 2. 153. SOCIÉTÉS CIVILES ET COMMERCIALES "1 ter.' de la société; ainsi, une société est commerciale par son objet quoiqu'aucun dos associés ne soit commerçant et, réci- proquement, une société reste civile par son objet quoique Ions ses membres soient commerçants ('). Le caractère civil ou commercial d'une société se déter- mine donc par l'objet de cette société : elle est commerciale si son objet rentre dans les actes de commerce désignés par le code de commerce, elle est civile dans le cas contraire (*). C'est, en effet, sur ces bases qu'on se fonde pour savoir si une convention quelconque est civile ou commerciale. 106. Lorsqu'une société a pour objet à la fois des opéra- tions civiles et des opérations commerciales, elle doit être réputée commerciale (8), à moins, comme nous le verrons, (jue la dernière catégorie d'opérations ne soit destinée qu'à rendre possibles les opérations de la première espèce. Car, en tant qu'elle a un objet commercial, la société doit accom- plir toutes les formalités nécessaires à la constitution des sociétés commerciales et ces formalités sont indivisibles (*). Dans une autre opinion, il faut considérer l'objet principal de la société (s). * Une société civile devient en tout cas commerciale quand ' Pont, n. 104; Guillouard, n. 91. (*) Pont, n. 104: Guillouard, n. 91. (3) Cass. civ., 21 juil. 1873, S., 73. 1. 456, D., 74. 1. 127. — Cass. req., 12 déc. 1387, S., 88. 1. 319, D., 88. 1. 429. — Cass req., 23 oct. 1889, S., 91. 1. 63, D., 69. 1. 474. — Paris, 15 fév., 17 et 29 août 1868, S., 68. 2. 229. — Lyon, 13 fév. 1878, S., 78. 2. 325. D., 79. 2. 99. — Rouen, 1er avril 1881, S., 82. 2. 153, D., 82. 2. 92. — Paris, 24 juil. 1886, .loum. des soc, 88. 29. — Orléans, 28 juil. 1887, S., '.h». 2. 42, D., 88. 2. 258. — Rouen, 16 juin 1890, S., 92. 2. 309. — Alger, 24 mai 1894, Rev. alg., 94. 2. 351. — Pont, n. 118; Vavasseur, n. 4 s.; Ruben de Couder, Dict. dr. com , v° Société, n. 89 s.; Lyon-Caen et Renault, Traité, II, n. 92; Guillouard, n. 91 ; Houpin, I, n. 67 ; Thaller, n. 241, — et les décisions citées dans les notes suivantes. • Gand, 1er mai 1880, Jurispr. d'Anvers, 82. 2. 37, Anal. Journ. dr. inl., IX. 1882, p. 637' société immobilière qui a pour objet aussi l'ouverture de rues, les constructions dégoûts, l'ouverture de crédit à des constructeurs, etc.;. — Trib. civ. Seine, 24 août 1888, Journ. dr. inl., IX, 1882, p. 306 (société immobilière a laquelle ses statuts permettent d'acheter et vendre divers produits, recevoir de l'argent en dépôt, affréter des navires, etc.). — V. à propos des sociétés minières. infra, n. 114. 5 Limoges, 31 oct. 1893. Rec. soc, 94. 297. — Trib. com. Seine, 31 mars 1894, Rev. soc, 94. 254. — Bruxelles, 2 avril 1890, S., 91. 4. 38. — Houpin, I, n. 67. i'1 DL CONTRAT DK SOCIETE elle vient à se livrer à des opérations de commerce répétées et habituelles ('). 107. Une société de transports est commerciale. Il en est ainsi notamment d'une compagnie de chemins de fer («). Une société formée pour obtenir la concession d'un chemin de fer est également commerciale, car elle se propose ou de revendre la concession ou de l'exploiter; or les deux objets sont commerciaux (3). 108. La société formée pour l'achat et la revente d'immeu- bles est civile (4) ; on admet en effet généralement que Tachât d'immeubles pour les revendre n'est pas une opération com- merciale, les modes de transmission des immeubles ne s'al- liant pas h la célérité des actes commerciaux'. Il n'en est autre- ment que si la société a en même temps d'autres objets, comme les entreprises de démolition et de reconstruction, etc. (3). La société formée pour l'achat et la location d'immeubles est également civile (6). ;•) Trib. coin. Albi, 15 juil. 1892, Journ. des soc, 92. 447. — Trib. civ. Nantes, 22 oct. 1892, liée, de Nantes, 92. i. 426. — Trib. coin. Seine, 11 mai 1894, Gaz. J'ai., 94. 2. 105. — V. à propos des sociétés minières, infra, n. 114. (2) Cela a été décidé même pour l'administration des chemins de fer de l'Etat. qui n'est pas d'ailleurs une société. — Cass. req., 8 juill. 1889, S., 90. 1. 473. — Trib. confl., 22 juin 1889, cité sous Cass., 8 juill. 1889, S., 90. 1. 473 (motifs). — Cass. belge (Ch. réun . 27 mai 1852. S.. 90. 1. 473 (note . — Cass. belge, 7 mai 1869, Panier., 69. 1. 330. — Contra Cass. belge, 14 nov. 1844, S., 45. 2. 564. (3) Cass. req., 8 nov. 1892, S., 93. 1. 32, D., 93. 1.78. — Cass. req., 27 déc. 1*92, D.,93. 1. 78. («) Cass. req., 29 avril 1885, S., 86. 1. 118. — Aix, 22 mai 1855, D., 56. 2. 108. — Aix, 27 déc. 1855, 1)., 56. 2. 108. — Bordeaux, 4 août 1856, D., 57. 2. 77. — Paris. 29 août 1868, 5., 68. 2. 329. — Paris, 8 mars 1889, S., 89. 2. 225, D., 90. 2. 233. — Aix, 30 nov. 1893, Gaz. Pal., 93, 2. 2- p.. 11. — Trib. coin. Seine, 11 mai 1894, Gaz. l'ai., 94. 2. 16, Ann. dr. comm., 94. 1. 74, Lois nouv., 94. 2. 163. — Trib. <:om. Toulouse. 30 déc. 1895, Gaz. l'ai.. 96. 1. 464. — Bruxelles, 18 mars 1879. 1)., 84. 2.99. — Bruxelles, 10 août 18^6, Pasicr., 87. 1. 6. — Cass. HoUande, 7 fév. 1889, Anal, journ. dr. int., XVIII, 1891, p. 618. — Laurent, XXVI, 'n. 228; Guil- louard, n. 92; Houpin, I, n. 6)<. — Exposé des motifs (de la loi du 1er août 1893 1 Thellier de Poncheville, Journ. ofj'.. avril 18S0, Doc. pari., p. 125. — Contra Bruxelles, li avril 1887, Pasicr., 87. 2. 281. — Aix, 23 juill. 1881, S., 83. 2. 35. — Démangeât ?ur Bravard, VI, p. 316; Ollivier, Rev. prat., 1, p. 241; Garsonnet, Rev. crit., XXXV, 1869, p. 347, n. 12. (5) Cass. req., 29 avril 1885, S., 86. 1. 118. — Guillouard, n. 92. Pajis, 31 mars 1887, Rev. des soc, 87. 432. — Trib. civ. Seine, 24 août SOCIÉTÉS HI VILES ET COMMERCIALES 73 Il «mi est de même de celle <|iii est formée pour la mise en valeurs d'immeubles r, ou pour la revente <>u la location d'immeubles après l'édification de constructions (*). La société formée pour la construction de l'immeuble d'un tiers est encore civile 109. Une société formée pour l'exploitation d'un fonds de commerce est commerciale (*). Telle est notamment la société formée pour l'exploitation d'une entreprise de spectacle (B). II en est autrement d'une société pour exploiter un cabinet de dentiste ou de médecin (6). 110. On admet généralement que l'auteur qui publie ses œuvres ne fait pas acte de commerce. N'est donc pas commerciale la société formée pour la rédaction et la publication d'un ouvrage [') ou d'un recueil périodique (8). 111. La société formée pour l'exploitation d'eaux minérales 1881, Jown. dr. in!., IX, [882, p. 306. — Cass. Hollande, 7 fév. 1889, précité. — Gnillouard, n. 92; Iloupin, I, n. 68. — V. cep. Trib. com. Seine, 17 fjan v. 1888, Gaz. Trib., 1er lév. 1888. l) Aix, 11 janv. L887, Gaz. l'a/., 87. 2. 586. — Trib. civ. Seine, 24 août 1891, précité. — Trib. com. Seine, 11 niai 1894, précité. — Cass. Hollande, 7 fév. 1889, précité. — Bruxelles, 14 juil. 1893, Pasicr., 94 2. 6i. — Contra Trib. coin. Seine, 12 déc. 1885, Jown. Mb. com., 87. 89. Cass. Hollande, 7 fév. 1889, précité. — Lyon, 27 juin 1895, Ann. dr. com., IX, 95. 70. — Trib. civ. Lyon, 9 janv. 1892, Mon. jud. Lyon, 10 fév. 1892. — Trib. com. Marseille. 11 juill. 1888, Rec. Marseille, 88. 1. 337. (3) Poitiers, 20 mars 1895, Ann. dr. com., 95. 65 (Cependant cet arrêt décide le contraire pour le cas où les entrepreneurs s'engagent à fournir les pierres de la construction, même en les extrayant d'une carrière leur appartenant). — Lyon, 27 juin 1895, Mon. jud. Lyon, 23 juill. 1895 (société qui loue à une ville des ter- rains pour y élever des constructions qui appartiennent à la ville, alors même qu'elle fournit les matériaux). — Cpr. aussi en sens contraire, Cass. req., 29 avril 1885, S., 86. 1. 118. ' Lyon. 5 fév. 1889, Mon. jud. Lyon, 13 avril 1889 imprimerie, librairie ou ex- ploitation de journaux). — Décidé qu'une société constituée pour répandre les idées de spiritisme est commerciale si son but réel est d'exploiter une librairie. — Trib. civ. Bordeaux, 4 avril 1892, Droit, 2 sept. 1892. (5) Alger, 29 avril 1898, Loi, 19 mai 1898 (arènes pour courses de taureaux). ") Trib. coin. Seine, 19 août 1892, Gaz. Pal., 92. 2. 339 (même si accessoire- ment on y vend des articles afférents à la prothèse dentaire). (7) Trib. com. Seine, 17 sept. 1887, Journ. Irib. com., 89. 166. *ï Home, 18 juill. 1889, S , 91. 4. 19. 74 DU CONTRAT DE SOCIETE ou thermales est civile ('), sauf si l'exploitation porte en même temps sur des hôtels (*), et à moins que ces hôtels ne soient l'accessoire de l'établissement d'eaux (3). Mais elle est commerciale si, même en fait seulement, elle se livre à des opérations commerciales (*). 112. La société ayant pour but l'exploitation, par un pro- cédé quelconque, des produits du sol est civile. Ainsi est civile la société qui se propose l'élevage des che- vaux, l'établissement d'un dépôt d'étalons et d'une école de dressage, le tout à l'aide des ressources du sol (5). Il en est de même de la société qui a pour but l'exploita- tion, dans un but lucratif, du droit de chasse (6). 113. La société formée pour l'exploitation des fonds ou la vente des produits d'un fonds est une société civile (7) ; la loi, en eilét, ne considère pas comme un acte de commerce une vente de ce genre, puisque l'art. 638 refuse de ranger au nombre des actes de commerce la vente par un propriétaire, cultiva- teur ou vigneron, des denrées provenant de son crû. Ainsi est civile la société pour l'extraction et la vente du pétrole (8), ou pour l'exploitation de vignobles (9). Il en est ainsi même si les produits du sol ont été préala- [') Cass. req., 27 mars 1800. S.. 66. 1. 211, IL, 66. 1. 428. — Metz, 16 mars 1865, S., 65. 2. 65. — Montpellier, 18 août 1874, S., 7i. 2. 299. — Paris, 4 fév. 1875, S.. 75. 2. 289. — Montpellier, 10 août 1883, S., 84. 2. 36. — Grenoble, 12 fév. 1889, Rec. Grenoble, 89. 8'.». — Lyon, 28 fév. 1894, Mon. jud. Lyon, 4 sept. 1894. — Trib. civ. Seine, 27 mai 1895, Ann. dr. comm., 95. ('.:>. — Lyon-Caen et Renault, I, n. 124; Guillouard, n. 93; Houpin, I, n. 68; Bourgeois Ann. dr.com., IV, 1890, p. 120. — Contra Lyon, 31 juil. 1889, Mon. jud. Lyon, 3 déc. 1889. i'i Metz, 16 mars 1805. précité. — Grenoble, 13 juin 1893, S., 94. 2. 36. — Trib. com. Seine, 16 avril 1894, Loi, 9 mai 1894 motifs). — Lyon-Caen et Renault, loc. cil. (3) A moins aussi qu'elle ne se livre au commerce de toutes eaux minérale-. Lyon, 31 juil. 18*9, Ann. dr. coin.. 1890. jurispr., p. 97. (*) Trib. com. Seine, 16 avril 1894, précité. (3) Caen, 28 mars 1887, S.. 88. 2. 231. — Orléans, 28 juil. 1887, S., 90. 2. 42, D., 88. 2. 258. — Guillouard, n. 93. •;«) Cass. crim., 18 nov. 1865, S., 66. 1. 415, D., 66. 1. 455. — Orléans, 19 nov. 1887, D., 88. 2. 162. — S'il n'y a pas un but lucratif, le contrat est une association. C) Trib. civ. Annecy, 24 juil. 1886, Gaz. l'ai., 87. 1, Si/]>]>1., 74. — Guillouard, n. 93; Houpin, I, n. 68. (8| Trib. com. Seine, 27 mai 1891, Loi, 22 juill. 1891. I9) Trib. corr. Toulouse, 30 déc. 1895, Gaz. Pal., 96. 1. 461. SOI IÉTÉ8 • l\ ill 8 ET I OMUERCIALES 75 blement préparés, car la loi ne distingue pas (1 . Ainsi esl civile la société pour la conversion de betteraves en sucres s'il ne s'agit que de betteraves poussées sur un champ apparte- nanl à la société 114. La société formée pour obtenir la concession d'une mine esl civile (s). La société formée pour l'exploitation d'une mine ou car- rière esl également civile (*), puisqu'elle a pour but la vente des produits du sol. Du peste, l'art. 32 de la loi du 21 avril 1810 porte que <• l'exploitation des mines n'est pas considérée comme un commerce ». Cela est exact, soit si les produits doivent être vendus à des tiers 5), soit s'ils doivent être ven- dus aux associés eux-mêmes (6). Il en est de même de la société formée pour la recherche d'une mine et l'exécution de travaux destinés à en apprécier .') Pont, n. 106; Guillouard, n. 93. (s) Cass., 12 mai 1875, S., 76. 1. 376, D.. 76. 1. 320. — Guillouard, n. 93. (3; Trib. coin. Marseille, 18 oct. 1888, Rec. Marseille, 89. 1. 53. («) Cass., 31 janv. 1865, S., 65. 1. 123. — Cass. req.,28 janv. 1884, S., 86. 1. 465, ])., 84. 1. 145. — Cass., 28 oct. 1885, S., 86. 1. 108. — Cass. req., lS déc. 1887, S., 88. 1. 319, D., 88. 1. 428. — Cass., 11 juin 1888, S., 90. 1. 516, D., 89. 1. 293. — Toulouse, 19 avril 1844, S., 45. 2. 18, D., 45. 4. 251. — Lyon, 13 fév. 187s. S.. 78. 2. 325. — Paris, 27 fév. 1878, D., 78. 2. 257. — Amiens, 26 fév. 1-861, S., 82. 2. 188. — Douai, 23 août 1882, D., 85. 2. 105. — Douai, 24 déc. 1883, D., 85. 2. 106. — Lyon, 24 juin 1887, Gaz. Pal., 87. 2. 426. — Paris, 30 nov. 1889, Gaz. Trib.. 27 déc. 1889. — Bordeaux, 3 fév. 1890, Rec. Bordeaux, 90. 1. 225. — Nancy, 31 déc. 1885, Hev. des mines, 86. 235. — Bennes, 19 Tév. 1892, Rec. Angers, 92. 151. — Paris, 21 mai 1892, S., 92. 2. 270. —Trib. coin. Marseille, 14 oct. 1886, Rec. Mar- seille. 86. 1. 301. — Trib. civ. Saint-Etienne, 16 juin 1891, Mon.jud. Lyon, 20 juin 1891. — Cass. belge, 13 mai 1886, Rev. des mines. 86. 324. — Trib civ. Castres, 19 déc. 1895, Rép. pér. de l'Enreg., n. 8742. — Trib. corn. Nantes, 22 oct. 1892, Rec. Saules, 92. 1. 42*",. — Trib. civ. Marseille, 21 fév. 1896, Rec. des soc, 96. 435. — Trib. civ. Seine, 25 fév. 1896, Gaz. Trib., 16 sept. 18%. — Bruxelles, 30 janv. 1879, l'asicr., 79. 2. 88, Journ. dr. int., IN, 1882, p. 435. — Bruxelles, 2 fév. 1882, D., 83. 2. 1. — Douai, 12 juin 1893, Droit, 26 août 1893. — Limoges, 31 oct. 1893, D., 95. 2. 556. — Trib. civ. Saint-Etienne, 24 déc. 1883, sous Cass. civ., 26 oct. 1892, S., 93. 1. 321. — Trib. corn. Albi, 5 avril 1892, Gaz. Pal., 92. 1, Suppl., 50 (alors même qu'elle met une grande quantité de valeurs en circulation . — Trib. civ. Seine, 3 janv. 1888, Gaz. Trib., 25 fév. 1888. — Pont, n. 109; Laurent. XXVI, n. 126; Guillouard, n. 94 et 360; Lyon-Caen, Sole, S., 86. 1. 465; Féraud-Giraud, Code des mines. I, m. 162 s.; Delecroix, Iles sociétés des mines, n. 169 s.: Iloupin, I, n. 68; Exposé des motifs Thellier de Ponclieville. loc. cit. (s) V. les autorités précitées. (*) Contra Bordeaux, 3 fév. 1890, précité. TG DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ la valeur, si les personnes qui font celte recherche ont l'inten- tion d'exploiter elles-mêmes la mine une fois découverte ('). .Mais il en est autrement si elles se proposent de vendre leurs droits (-), car alors la société a un but de spéculation. La société de mines ne perd pas son caractère civil à raison de la commercialisé d'actes qu'elle accomplit accessoirement ;'i son objet principal et pour tirer le meilleur parti de ce der- nier (*), par exemple la fabrication des briquettes ou de char- bons agglomérés (*), le traitement et le transport des mine- rais (5), l'achat de brai ou goudrou (6), la construction d'un chemin de fer nécessité par les transports dans la mine (7). Il en est de mémo de la transformation des produits (8), car nous avons vu qu'elle ne modifie pas le caractère civil d'une société. Peu importo môme que, dans ces divers buts, la société achète certaines matières (9). Mais il en est autrement si les actes commerciaux que fait la mine sont importants et étrangers à l'exploitation de la mine (10), par exemple si la société achète des produits d'au- Etouen, 19 août 1857, D., 57. 2. 183. — Trib. civ. Seine, 3 janv. 1888, Gaz. Trib.,25 fév. 1888.— Pont, n. 110; Laurent. XXVI, n. 227; (iuillouard, n. 95; Feraud-Giraud. op. cit.. 1, n. 171; Delecroix, op. cit., n. 532 s. l'uni, n. 1 lo ; Laurent, XXVI. n. 227 ; (iuillouard, n. 95 ; Féraud-Giraud, loc. rit. .- Delecroix, loc. cit. l'iCass., 28 janv. 1884, S., 86. 1.465, D., 84. 1. 145. — Cass. req., 12 déc. 1887, S., 88. 1. 319, D., 88. 1. 428 (société qui livre les pierres extraites après les avoir façonnées). — Lass req., Il juin 1888, S., 'M. 1.516 l par exemple si les statuts réservent à la société <■ le droit de se livrer aux opérations qui pourraient devenir nécessaires à l'intérêt social >■)• — Amiens, 26 fév. 1881, S., 82. 2. 188. — Guil- louard, n. 94 ci 360; Houpin, loc. cit. • Lyon. 13 fév. 1878, D., 79. 2. 99. — Lyon, 24 juin 1887, précité. — Bruxelles, 30 janv. 1879, précité. — Guillouard, n. 94 et 360; Houpin, loc. cit. H Paris, l4. 1. 126. - Limoges, 31 oct. 1893, D., '.*5. 2. 556, .Dix. ///•. com., 94. 132. — Houpin, loe. vil. (3) Douai, 12 juin 1893, précité. — Paris, 7 août 1894, précité. — Houpin. loc. cit. — Décidé aussi que la société qui a pour objet l'exlraction des lignites et. en outre, la fabrication des briquettes au moyen d'un mélange de lignites et de cliar- bons gras, est commerciale. — Trib. civ. ydne, 21 fév. 1893, Droit, 22 avril lv'.'::. 4 Cass. req., 12 déc. 1887, procité. [*) Cass. req.. 11 juin 1888, S., 90. 1. 516 (motifs). — Cass. req., 1er août 1893, . 1. 22, 1).. '.»'.. 1. 126 limpl.i. —Paris, 21 mai 1892, S., 92. 2. 270. (') Cass. req.. lpr août 1893. précité. (') liuillouard. n. 366: Delecroix, Des sociétés de mines, n. 163 s. 78 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ En vertu de quel texle ou de quel principe les sociélés civi- les qui comprennent des personnes nombreuses et inconnues les unes aux autres sont-elles des sociétés de capitaux ? Ne faudrait-il pas aussi bien décider que les sociétés civiles autres que les sociélés minières sont, si, en fait, leurs membres sont très nombreux, des sociétés de capitaux? Oui fera la distinc- tion? N'arrive- t-il pas souvent enfin que les sociétés minières ont pour objet une exploitation peu importante et intervien- nent entre personnes peu nombreuses et se connaissant les unes les autres? L'opinion (pie nous combattons a surtout été soutenue pour permettre à l'associé de céder son droit sans l'assentiment de ses co-associés ; nous verrons plus tard si celte dernière solu- tion est exacte. 116. lue société formée pour l'exploitation d'un canal est civile ('). On ne peut objecter que cette société a pour objet un entreprise de transports, car ce n'est pas elle qui effectue les transports ; elle se contente de percevoir des taxes sur les transports. Il en est ainsi alors même que la société se propose de construire le canal qu'elle exploitera; celte construction n'est pas l'objet de la société, elle n'est que le moyen de rendre l'exploitation possible - . D'ailleurs, un canal est un immeuble et nous avons dit que la société relative à la construction d'un immeuble est civile. Aussi la société formée pour la construction d'un canal est- elle également civile (s). ' Trib. civ. Seine, 12 fév. 1890, Gaz. Pal., 90. i.344. — Bruxelles, 2 avril 1890, S., '.il. 4. 38. — Lyon-Caen et Renault, Traité. I, n. 124; Thaï 1er, Ann. dr. coin., III, 1889, Doclr., p. 18 s. ; Boistel, Note, D., 90. 2. 233; Note, S., 89. 2. 225 ; Hou- pin. I, n. 68. — De même la société pour l'obtention d'une concession d'eaux desti- nées à alimenter un canal d'irrigation. — Cass., 6 janv. 1874, S., 77. 1. 27, D., 77. J. 235. — Lyon-Caen et Renault, Traité, n. 124; Bourgeois, loc. cit. - Paris, 8 mars 1889 (Gomp. de Panama), S., 89. 2. 225, D., 90. 2. 233. — Trib. civ. Seine, i fév. 1889, S., 90. 2 225. — Bruxelles, 2 avril 1890, S., 91. 4. 38. — Noie, S., 89. 2. 225; Boistel, Sole, D., 90. 2. 233; Lyon-Caen et Renault, loc. cit. — Contra Trib. corn. Seine, 18 fév. 1889, Gaz. Pal., 89. 1. 375. i'i Thaller, Ann., op. cit., p. 20. — De même la société pour le dessèchement d'un lac. — Ch. Bourgeois, Ann. dr. corn., loc. cit. — Contra Trib. com. Seine, 15 avril 1889, Ann. dr. com., IV, 1890, Jurispr., 20. SOCIÉTÉS CIVILKS II m . \IM KRCIAEES 79 117. Une société ayanl pour objet l'exploitation de l'éclai- rage et udr.. p. 186; Lecaisne. Et. jurid. sur les soc. coopér. île consommations, p. 36; Wahl, Note, >.. 99. i. 21. - Contra Cass. Home, 13 janv. 1898, S., 99. i. 21. 1 Décidé que la société coopérative dont le but est d'utiliser le lait appartenant aux propriétaires associés est civile alors même qu'elle utilise accessoirement le petit lait en engraissant des porcs. Trib. civ. Niort. 8 nov. 1892, Gaz. l'ut.. 92. 2. Suppl., 43. 1 Lecaisne, Et. jur. sur les soc. coopér. de consommation, p. 13 s.: Wahl, Note, S . '.•.'. i. 21 ; Tballer, n. 237. — Conlra les autorilés citées, dans la note 2, supra en faveur du caractère civil ou commercial de la société de coopération, considérée comme société. — Y. aussi en sens contraire Hubert-Valleroux, Rev. des soc, 1897, p. 316. ;i V. in Ira. n. 55s. Trib. corn. Nantes, 26 juin 1886, précité. — Trib.com. Marseille, 17déc. 1895, précité. — Lyon-Caen et Renault, II, n. 1037. B0( IÉTÉS CIVILES l.l COMMERCIALES 81 Ce caractère leur appartient alors, même si elles consacrent leurs bénéfices ;■ une œuvre philanthropique ou d'assistance, par exemple ;> la constitution d'une assurance mutuelle entre 1rs sociétaires ('). 121 bis. Les sociétés d'assurances ;i primes sont des socié- tés commerciales ('-), car elles ont pour but de faire des héné- Bces sur les contrats passés avec les assurés; du reste l'art. 633 (',. coin, attribue formellement ce caractère aux sociétés d assurances maritimes. Quant aux sociétés d'assurances mutuelles, nous montre- rons, en parlant des associations, que ce ne sont pas des sociétés, mais de simples associations. A supposer que ce soient des sociétés, elles sont, ainsi que nous le dirons, ci- viles ! . Il en est de même des sociétés de reconstitution des capitaux (*). 122. En admettant que les sociétés fondées pour l'éduca- tion et l'instruction soient de véritables sociétés et non pas des associations (nous montrerons, à propos des associations, l'exactitude de la première solution), elles constituent des sociétés civiles (5). Il est, quoiqu'on ait dit en faveur de cette doctrine le contraire, impossible de méconnaître que ces sociétés ont un but de lucre et, si on le niait, il faudrait leur refuser le caractère de sociétés, car il n'y a pas de société où il n'y ait pas recherche de bénéfices. Mais la recherche du gain n'est que la caractéristique de la société en général et, pour qu'une société soit commerciale, il faut en outre qu'elle fasse les actes de commerce ; or l'instruction et l'éducation ne sont pas rangées par le code de commerce parmi les actes de commerce. (') Cass. Rome, 13 janv. 1898, précité. — Thaller, Ann. dr. coin., l'oc.cil., p. 187; YYahl, loc. cit. - Cass., 8 avril 1828, S. chr. — Cass., 16 juill. 1872, S., 72. 1. 277. — Cas<. civ., 5fév. 1894, S., 94. 1. 277, D.,94. 1. 136;incendie|. — Grenoble, 18 juill. 1830, S. chr. — Caen. 12 mai 1846, ])., 47. 2. 138. _ Paris. 0 mars 1888, D., 89. 2. 256. — Tril). coin. Seine, 9 mai 1890, Loi, 4 juin 1890. — Cologne, 1" fév. 1847, D., 47. 2. 142. — Guillonard, n. 97. (3; V. infra, n. 562 bis. 4 V. infra, n. 562 bis. (8) Paris, 23 juill. 1852, D., 54. 2. 102. — Laurent, XXVI, n. 229; Guillouard, n. 99; Iloupin, I, n. 08. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 0 82 DU CONTRAT DE SOCIETE 123. Les sociétés formées pour l'exploitation d'un cercle, quand elles ont un but lucratif (dans le cas contraire, ce ne sont pas des sociétés) ('), constituent des associations commer- ciales (2), car on admet généralement que l'entrepreneur d'un cercle est commerçant. Une société pour ouvrir une exposition est également com- merciale, si les organisateurs veulent faire un profit (3). 124. Les juges du fait décident souverainement quel est l'objet de la société (*). Mais la cour de cassation a le droit de déterminer si cet objet est civil ou commercial (5), car il ne s'agit pas là d'une question de fait. SECTION II DES SOCIÉTÉS UNIVERSELLES ET DES SOCIÉTÉS PARTICULIÈRES 125. « Les sociétés sont universelles ou particulières », dit l'art. 1835. ï I. Des sociétés imiter selles. 126. L'origine des sociétés universelles est des plus ancien- nes; il est probable que ce genre de société a toujours existé. Le droit romain distinguait deux sortes de sociétés univer- selles : La société de tous biens (omnium bonorum) absorbait môme les biens à venir des associés, y compris ceux qui étaient acquis à titre gratuit, et en exceptant seulement les biens d'une origine illicite. La société était également chargée de toutes les dettes, présentes et futures, des associés. (') En tout cas ce ne sont pas des sociétés commerciales. — Trib. corn. Seine, 11 mars 1892, Droit, 4 avril 1892. — V. à propos des associations, infra, n. 563. (*) Paris, 5 janv. 1888, S., 90. 2. 146, D., 89. 2. 140. — Cpr. Chambéry, 28 janv. 1892, Rec. Grenoble, 92. 2.53. — Alauzet, Dr. cou,., VIII, n. 2981 ; Houpin, I.n. 54. (3) Trib. com. Seine, 11 déc. 1885, Journ. trib. corn., 87. 87 (exposition du tra- vail). — Décidé qu'elle est commerciale s'il doit y avoir des droits d'entrée, alors même que les organisateurs veulent honorer la mémoire d'un auteur et donner à l'Etat l'entreprise après réussit», pourvu qu'il y ait de leur part une spéculation. — Trjb. com. Seine, 14 fév. 1890. Journ. trib. com., 91. 98. * Guillouard, n. 9. ■' Pont, n. 105; Guillouard, n. 91. — Contra Cass., 8 janv. 1840, S., 40. 1. iy. — Cass., 8 mai 1867, S., 67. 1. 313, D., 67. 1. 225. SOCIÉTÉS UNIVERSELLES 83 La société d<- t<>us gains omnium quœ ex guaestu veniunt) ne comprenait que les biens ;'i venir acquis à titre onéreux, <•! 1rs revenus des biens présents et des biens à venir acquis à litre gratuit. La société était chargée du passif correspondant ,ui\ liicns qui y étaient compris. ( les deux mêmes espèces de sociétés étaient reconnues dans l'ancien droit (*). La première était très fréquente en dehors d'une convention formelle (société taisible). I. Entre quelles personnes peut intervenir une société universelle. 127. En matière de société universelle, la loi exige des conditions spéciales de capacité. « Nulle société universelle ne peut avoir lieu qu'entre pér- il sonnes respectivement capables de se donner ou de recevoir • l'une de l'antre, et auxquelles Un est point défendu de s'avan- ». tacjer au préjudice d'autres personnes » (art. 1840). Le législateur est parti de cette idée que la stipulation d'une société universelle dissimule presque toujours une donation. « Ce que vous avez expressément défendu, disait ïreilliard en son Exposé des motifs (*), ce qu'on ne peut faire directement, il serait inconséquent et dérisoire de le tolérer indirectement : il ne faut donc pas que, sous les faus- ses apparences d'une société, on puisse éluder les dispositions d'une loi qui a défendu de donner, et que ce qui est illicite devienne permis, en déguisant sous les qualités d'associés celles de donateur et de donataire ». Ile là deux règles : 1° « Nulle société universelle ne peut » avoir lieu qu'entre personnes respectivement capables de » se donner ou de recevoir l'une de l'autre ». Ainsi une société universelle ne pourrait pas valablement être contrac- tée entre un père et son enfant adultérin (arg. art. 908). lue incapacité réciproque de se donner n'est pas exigée pour que l'art. 1840 soit applicable; il suffit que l'un des as- (') Domat, liv. I. lit. 8, sect. 3, §§ 3 et 4;Pothier. q. 28, 29 et 43;Argou, liv. III, eh. XXXII, p 320. 8 Fenet, XIV. p. 396. 84 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ sociés soit incapable de donner à l'autre ('). Ainsi la société universelle entre un pupille et son tuteur est nulle tant que le compte de tutelle n'est pas apuré, parce que le pupille ne peut donner au tuteur, et quoique le tuteur puisse donner au pupille (*). La société ne peut pas davantage être formée avec les pro- ches parents, indiqués par l'art. 911, d'une personne incapa- ble de recevoir (s) : l'art. 911 considère ces parents comme étant interposés, dans le cas où une libéralité leur est faite. 128. L'effet de la nullité prononcée par application de l'art. 18i0 est d'effacer rétroactivement la société, c'est-à-dire de remettre les parties dans le même état que si elles n'avaient pas contracté (*). Il s'agit, en effet, d'une nullité prononcée pour incapacité et les nullités de ce genre, même en matière de société, sont rétroactives. 129. 2° Si l'avantage que l'une des parties procure à l'autre, en contractant avec celle-ci une société universelle, dépasse la quotité disponible déterminée par les art. 913 s., 1091 et 1098, il y aura lieu à la réduction. Nous traduisons ainsi la restriction que la partie finale de notre article exprime en termes fort obscurs (5). Il nous parait difficile de l'entendre, avec quelques auteurs (6), en ce sens que les personnes qui laissent des héritiers réservataires à leur décès n'ont pu vala- blement pendant leur vie contracter une société universelle avec qui que ce soit. S'il en était ainsi, l'existence des sociétés universelles serait bien précaire, puisque leur validité ne serait jamais assurée qu'après le décès des associés sans héri- tiers réservataires. Il a du reste été dit au Tribunat, par le rapporteur Boutte- ville, que le but de l'art. 1840 est de mettre le projet enpar- (')Pont, n. 218; Guillouard, n. 37; Houpin, I, n. 71. (2) Pont, n. 218; Guillouard, n. 37. 3) Guillouard, n. 38; Houpin, loc. cit. (*) Guillouard, a. 41. (5) Troplong, I, n. 305 s. ; Pont, n. 224 s. ; Massé, Note, S., 39. 1. 546; Aubry et Kau, IV, p. 553, § 379, note 7; Guillouard, n. 39 et 114 ; Houpin, I, n. 71. — Cpr. Cass., 25 juin 1839, S., 39. 1. 546. (6) Duvergier, n. 119; Laurent, XXVI, n. 242. — Cpr. Nîmes, 18déc. 1886, sous Cass., 12 juill. 1887, cité infra. SOCIÉTÉS l NIVERSEL] ES 85 fait accord avec nos lais sm- les successions, donations et testa- ments ('). En v;iin dit-on (jne notre opinion a le grave inconvénient il<> provoquer des difficultés pour la fixation du montant des avantages sujets à réduction. Ces difficultés se produisent au même degré pour les autres conventions, dans le cas où elles contiennenl également un avantage sujet à réduction. On n'est pas mieux fondé à prétendre que l'art. 18Ï0 annule formellement les sociétés faites au préjudice d'héritiers réser- vataires; il les interdit simplement, se contentant par là d'in- diquer qu'elles ne doivent pas être considérées comme des sociétés. Ajoutons qu'il est généralement reconnu que les donations déguisées sont valables et qu'elles sont seulement réductibles à la quotité disponible; il faudrait des expressions très for- melles pour que l'art. 1840 dût être considéré comme dérogeant à ce principe. .Mais il résulte expressément de l'art. 18i0 que tout avan- tage est, en cas d'atteinte à la réserve, soumis à la réduction; il n'est aucunement nécessaire que la société ait pour but de frustrer les héritiers réservataires (2); le résultat seul doit être examiné. 130. A supposer même que les sociétés entre époux soient valables, la société universelle entre époux qui ont des enfants d'un précédent mariage est réductible dans les limites de Fart. 1098 (3). 131. Entre concubins, la société universelle est valable ('), car les concubins sont aujourd'hui capables de se faire des libéralités. Mais le concubinage en lui-même ne suffit pas à démontrer la société universelle (5). .') Fenet, XIV, p. 407. (*) V. cep. Guillouard, n. 41 in fine. Décidé même qu'elle est nulle. Nîmes, 18 déc. 1886, sous Cass., 12 juil. 1887, S., 87. 1.384. — Cet arrêt va jusqu'à admettre que la société fondée avant le mariage devient nulle par le mariage. .') Lyon, 8 mars 1889, Ann. dr. comm.. III, 89, p. 118. \ Paris, 16 mai 1890, Gaz. Trib., 30 mai 1890. — Trib. civ. Seine, 13 déc. 1888, Gaz. l'ai.. 89. 1. 113. 86 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 132. L'art. 1840 s'applique même à la société universelle de gaina ('), car sa disposition est conçue en termes absolus. Cette application est, du reste, très critiquable (2), car une société où n'entrent que les revenus des biens des associés ne permet pas des libéralités très sérieuses. 133. Faut-il conclure de l'art. 1840 que, même entre per- sonnes capables de s'avantager, la société universelle soit une donation déguisée? On l'a soutenu (3). Il en résulterait que si l'un des associés est héritier de l'autre, il devrait rap- porter à sa succession les bénéfices résultant de la société. Ce sont là des solutions inadmissibles; on ne peut, en l'ab- sence d'un texte formel, supposer une donation déguisée là où les parties ont affirmé faire un acte à titre contrat onéreux. Restreinte à l'hypothèse pour laquelle la loi l'a émise, cette hypothèse est très plausible; on peut croire que des per- sonnes qui ne pouvaient s'avantager ont voulu tourner cette prohibition, mais quelle apparence y a-t-il que des person- nes capables de se faire des libéralités réciproques aient, si elles ont voulu s'avantager, recouru à une société univer- selle? 134. Dans notre opinion, l'art. 1840 n'ordonne pas entre cohéritiers le rapport des avantages résultant d'une société à titre universel, puisqu'il n'y voit pas une donation. Le rap- port n'est donc exigé que dans les conditions fixées par le droit commun, c'est-à-dire par la disposition générale de l'art. 834; le rapport est dû de plein droit si l'acte de société est sous seing privé; il n'est dû, si l'acte est authentique, qu'en cas de fraude, c'est-à-dire à la condition que l'association constituât véritablement une donation déguisée et eût pour but de procurer un avantage au successible. Les auteurs qui considèrent la société universelle comme étant, en toute hypothèse, une donation déguisée, décident très logiquement que le cohéritier doit à ses cohéritiers le rapport des avantages résultant de la société universelle, (') Nîmes, 18 déc. 1886, sous Cass., 12 juil. 1887, précité. — Pont, n. 215; f.uil- louard, n. 37: Houpin, loc. cit. (») Guillouard, n. 37. (3) Guillouard, n. 36. DIVERSES ESPÈCES DE SOCIÉTÉS UNIVERSELLES S7 même si cette société est faite sans fraude et par acte authen- tique ('). 135. Si la société universelle entre personnes capables de se faire des libéralités est une donation, il faudra conclure qu'elle est révocable pour cause d'ingratitude ou de surve- nance d'enfants. La dernière de ces deux solutions est acceptée par plu- sieurs auteurs [*). Ils invoquent à l'appui de cette solution l'observation faite au conseil d'Etat par Real que « d'après le principe adopté, la survenance d'enfants détruira la société de tous les biens » (s;. Cette observation, qui en elle-même serait insuffisante, est du reste contredite par la réponse qu'y fit Cambacérès : « Si la société donne quelque avantage à l'autre associé, on le réduira à. la portion disponible » (*). Ainsi la société peut être l'objet d'une réduction seulement si, en fait, elle contient une donation indirecte; c'est une solution indiscutable. 136. La capacité exigée pour contracter une société uni- verselle est la même que pour toute autre société. En dehors du cas où elle intervient entre personnes incapable* de don- ner et de recevoir — en ce cas elle est toujours nulle — la so- ciété universelle, nous l'avons montré, n'est pasune donation; si elle est réductible au profit des héritiers réservataires, c'est là une solution exceptionnelle, qui d'ailleurs se justifie suf- fisamment par l'idée que la société universelle, quoique cons- tituant un acte à titre onéreux, est présumée, vis-à-vis des héritiers réservataires, contenir au profit de l'associé survi- vant une libéralité indirecte. IL Diverses espèces de sociétés universelles. 137. (( On distingue deux sortes de sociétés universelles, » la société de tous biens présents, et la société universelle de » gains » (art. 1836). Aucune d'elles ne joue un grand rôle dans la pratique. (») Guillouard, n. 40. (*) Pont, n. 221 ; Guillouard, n. 38; Houpin, I, n. 71. (3) Fenet, XIV, p. 373. (•) Fenet, loc. cit. 88 DU CONTRAT DK SOCIÉTÉ Les dénominations du Code sont peu exactes, puisque la société de biens présents comprend certains biens à venir et, en outre, quelquefois les gains, et que la société de tous gains comprend les meubles des associés. A. Société universelle de tous biens présents. 138. « La société de tous biens présents est celle par laquelle » les parties mettent en commun tous les biens ?)ieubles et im- » meubles qu elles possèdent actuellement, et les profits qu'elles » pourront en tirer. — Elles peuvent aussi y comprendre toute » autre espèce de gains; mais 1rs biens qui pourraient leur » advenir par succession, donation ou legs, n'entrent dans cette » société que pour la jouissance : toute stipulation tendant à » y faire entrer la propriété de ces biens est prohibée, sauf » entre époux, et conformément à ce qui est réglé ci leur >> égard » art. 1837). 139. Le projet du C. civ. n'admettait que la société de tous gains, il prohibait la société de tous biens (') ; sur la proposition du tribunal d'appel de Paris, qui, pour deman- der le rétablissement de la société de tous biens, se fondait sur l'intérêt qu'elle peut avoir [tour les indigents (*), on se décida à rétablir cette dernière, mais on la limita aux biens présents. Treilhard, dans son Exposé des motifs, justifiait par diverses raisons l'exclusion des biens à venir (3). 1° Les donations de biens à venir sont interdites en prin- cipe dans notre droit; or la possibilité de contracter une société universelle comprenant tous les biens à venir aurait fourni un moyen facile d'éluder cette prohibition; 2° il est désirable que les parties puissent apprécier l'importance des apports qu'elles font à la société ; comment le pourraient-elles en ce qui concerne les biens à échoir par succession, dona- tion ou legs? 3° Il pourrait se produire dans la suite une iné- galité choquante entre les parties. 4° En tant qu'elle s'applique aux biens à échoir par succession, la prohibition pourrait se ') Penet, II. p. 371. (s)Fenet, V. p. 280. 3 Fenet, XIV, p. 397. SOCIÉTÉ UNIVERSELLE DE TOUS BIENS PRÉSENTS 89 rattacher aussi à la règle qui interdii dans notre droit les pa< tes sur succession future. De ces considérations, une seule es! vraimenl juridique, celle qui concerne la prohibition des donations d<- biens à venir; la dernière l'es! égalemenl quand il s'agit de biens qui doivent provenir des successions; 1rs deux autres n'ont pas une grande portée, car elles se réduisent à dire que la société portant sur des biens à venir est aléatoire; or les contrats aléatoires sont autorisés. Néanmoins, comme ces considérations ont guidé les rédac- teurs du code, on doit admettre la nullité des sociétés des biens ;\ venir même si elles sont formées par contrat de mariage, quoique les donations de biens à venir par contrat de mariage soient autorisées. 140. En l'absence de convention relative à la composition de la société de tous biens présents, elle comprend exclusive- ment dans son actif, outre les gains, les biens actuellement possédés par les associés; c'est le langage de l'art. 1837. Le mot possédés, quoique critiqué par certains auteurs (*), nous parait rigoureusement exact, car, à notre avis, il ne s'agit pas seulement ici des biens dont les associés sont pro- priétaires, mais aussi de ceux dont ils sont possesseurs à un titre quelconque (!). On est bien forcé d'admettre qu'un asso- cié peut apporter les immeubles dont il est possesseur et qu'il est en voie de prescrire (s). Nous ne voyons pas pourquoi il n'en serait pas de même des meubles. Nous ne voyons pas davantage pourquoi il n'en serait pas encore de même des biens possédés à titre de location. La propriété sous condition suspensive est une propriété actuelle ('), car la condition est rétroactive. 141. Il résulte de l'art. 1837 que les biens à venir acquis à titre onéreux peuvent entrer en société; ils n'y entrent pas de plein droit, la première partie de l'article fournit un argument a contrario. Y entrent-ils de plein droit pour la jouissance? (') Guillouard, n. 106. (*) Contra Guillouard, n. 106. '. Guillouard, n. 106. (*) Guillouard, n. 106. 90 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ la question se pose également pour les biens acquis à titre gratuit dont nous allons nous occuper. Les biens acquis à titre gratuit ne peuvent entrer dans la société universelle que pour la jouissance; mais y entrent ils de plein droit pour cette jouissance, ou une stipulation for- melle est-elle nécessaire? La première solution nous paraît la plus sûre ('). D'une part, l'art. 1837 dit que ces biens « n'en- trent dans la société que pour la jouissance », et cela indi- que tirs clairement qu'ils y entrent de plein droit; l'argument est d'autant plus fort que pour les gains l'art. 1837 venait de s'exprimer tout autrement; d'autre part, la société universelle de gains comprend également la jouissance des biens à venir, et on peut tirer de cette dernière solution un argument a fortiori, la société de tous gains comprenant moins sur cer- tains points et rarement plus que la société de tous biens. 142. L'art. 1837 dispose que la société de biens a venir peut comprendre toute espèce de gains. On peut donner pour exemple les gains résultant de l'exercice de l'état ou de la profession des parties. Il résulte de l'art. 1837 que les gains ne sont pas de plein droit compris dans la société. 143. Tous les biens présents des associés entrant dans la société universelle de biens présents, toutes leurs dettes pré- sentes y tombent aussi (!). C'est une application de la règle Non sunt bona nisideducto œre alieno, qui s'applique à toutes les aliénations à titre universel. On peut tirer parti en ce sens de l'ancien droit qui, faisant rentrer dans la société les biens présents en même temps que les biens à venir, imposait à. la société le paiement des dettes présentes et futures (s). Quant aux dettes futures, elles restent à la charge des asso- ciés pour le capital (*). Cette solution comporte une exception (») Duranton, XVII, a. 351 ; Aubry et Rau, IV, p. 352, § 379. — Conlra Trop- long. I. n.276; Duvergier, n. 93; Pont, n. 170: Laurent, XXVI, n.236; Guillouard, n. 107 ; Houpin, n. 72. 3 Troplong, I, n. 277: Duvergier, n. 98; Pont. n. 179 s.; Laurent, XXVI, n. 237; Guillouard, n. 107; Houpin, I. n. 72. (3) Polhier, n. 37; Domat, liv. I, tit. VIII, sect. 3, § 2. (*) Troplong, I, n. 277; Duvergier, n. 98; Pont, n. 179 s.; Laurent, XXVI, n. 237; Guillouard, n. 108; Houpin, I, n. 72. SOCIÉTÉ UNIVERSELLE DE TOUS BIENS PRÉSENTS 01 pour les dettes provenant des biens apportés ;'i la société lors de sa formation, en vertu du principe que nous avons repro- duit plus haut i' . Pour la même raison, la société supporte 1rs (Iciit's provenant des biens acquise litre onéreux pendant le cours de la société. Les auteurs qui ne font rentrer pour la jouissance clans la société les biens futurs acquis à titre gratuit qu'en vertu d'une convention formelle, décident très logiquement qu'en l'ab- sence île cette convention la société ne répond môme pas des intérêts des dettes futures, mais qu'il en est autrement si cette convention est intervenue (*). Pour nous, qui faisons rentrer la jouissance des biens à venir de plein droit dans la société, nous imposons également à la société le paiement des intérêts des dettes futures. En aucun cas, l'entretien des associés et de leur famille ou l'entretien de leurs enfants n'est de plein droit à la charge de la société (s). 144. La société qui porte à la fois sur les biens présents et à venir est nulle en son entier et non pas seulement pour les biens à venir (*). Deux idées ont été invoquées en ce'sens; si la première est très douteuse, la seconde n'est guère contes- table. On a dit d'abord que la condition de faire entrer dans la société des biens à venir est une condition illicite et que, d'après l'art. 1172. les conditions illicites annulent l'acte tout entier; c'est dénaturer singulièrement la convention que de dire que la mise des biens à venir en société est une condi- tion ; on sait que le G. civ. définit tout autrement la condi- tion. Il faut donc s'en tenir à l'idée, d'ailleurs certaine, que, dans la pensée des parties, l'acte est indivible. En s'en tenant à ce dernier motif, on est conduit à adopter une solution que le premier motif conduirait à rejeter : comme (') Pont, n. 179; Guillouard, n. 108; Houpin, loc. cil. (s) Troplong, loc. cit.; Duvergier, loc. cit.; Pont, loc. cit.; Laurent, loc. cit.: Guillouard, loc. cit. (3, Pont, n. 180, 181 et 185: Houpin, I, n. 72. (*) Troplong, I, n. 276; Duvergier, n. 103; Aubry et Ilau, IV, p. 552, § 379, note 3; Larombière, art. 1172. n. 52; Pont, n. 188; Laurent, XXVI, n. 134; Guil- louard, n. 104. 02 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ la nullité entière de l'acte repose sur la volonté des parties, elles peuvent manifester une volonté contraire, et cela est très rationnel ; elles ne pourraient pas manifester cette volonté si on justifiait Fart. 1837 par l'art. 1172, car le principe posé par l'art. 1 172 est d'ordre public. De même, le juge peut faire dériver souverainement cetle volonté des circonstances. l!. Société universelle de gains. 145. « La société universelle de gains renferme tout ce que » les parties acquerront par leur industrie, à quelque titre que » ce soit, pendant le cours de la société; les meubles que cha- •• cun des associés possède au temps du contrat y sont aussi » compris ; mais leurs immeubles personnels ni/ entrent que » pour la jouissance seulement » (art. 1838). Comme nous l'avons déjà remarqué, la composition active de cette société ne répond pas au nom qu'elle porte; elle est dans une certaine mesure une société de biens présents, puis- qu'elle comprend les meubles présents. En droit romain, la société de tous gains ne comprenait pas les meubles présents (') ; mais il en était autrement dans l'ancien droit (2). Aujourd'hui, la société de tous gains comprend trois élé- ments : 1° Les meubles présents; nous avons indiqué à propos de la société de tous biens ce qu'il faut entendre par les biens présents ; 2e La jouissance des immeubles présents. C'est là sans doute ce qu'il faut entendre par la jouissance des immeubles personnels ; la jouissance des immeubles futurs n'y est pas comprise (3), car celle des meubles futurs en est également exclue; du reste, le sens des mots « immeubles personnels » est indiqué par le rapprochement de la disposition relative aux meubles présents. Il faut ajouter que la dénomination (') L. 7 s., pro soc, 17. 2. (*) Coût, d Orléans, art. 214. i') Conlra Duvergier, n. 106; Pont, n. 202; Laurent, XXVI, n. 238; Guillouard, n. 110. SOCIÉTÉ I.MVl lisii.i i; DE GAIN'S 93 même de la société doil conduire à en exclure les valeurs qui ne proviennent p;is de gains. Ce sont bien, objecte-t-on, des -.lins. Commenl peut-ou ainsi qualifier les biens acquis moyen- nant l'abandon d'autres biens? 3° Tout ce que les parties acquièrent par leur industrie. La société comprend donc les produits du travail de toute nature ') — connue le disait déjà le droit romain (2) — mais eux seulement (3). Elle ne comprend pas les produits d'un don de fortune (*). Cependant, il en est autrement d'un délit (5), car le délit est un acte d'industrie; ainsi, le produit d'un vol entre en société. .Nous savons que cette solution parait étrange à pre- mière vue, elle n'a cependant rien que de juridique et même d'équitable. En droit, nous le répétons, il s'agit bien là du produit de l'industrie; sans doute, il est de principe qu'au- cune action ne peut se fonder sur un fait illicite, mais l'asso- cié qui prétend partager le produit du délit de son associé ne se fonde pas sur le fait illicite de ce dernier, il se fonde sur l'existence d'un gain partageable et c'est au contraire pour refuser de partager que l'associé coupable serait -forcé dp prouver l'origine illicite de sa possession. Dans tous les cas, les sommes versées entre les mains d'un associé pour la réparation d'un délit commis à son préjudice n'entrent pas en société; elles ne constituent pas un gain, puisqu'elles remplacent dans son patrimoine une autre valeur qui en est sortie. 146.11 va sans dire que la composition fixée par l'art. 1838 n'a rien d'obligatoire. La société de tous gains peut compren- dre d'autres biens que ceux indiqués dans l'art. 1838, mais elle deviendra alors une société de tous biens. Réciproquement, la société de tous gains peut ne compren- dre qu'une partie des éléments fixés par l'art. 1838. Cela nous parait évident, car la loi n'a voulu, comme nous l'a montré (') Guillouard, n. 110. (2) L. 8, D.,prosoc, 17. 2. (3) Guillouard, n. 110. ,' Guillouard, n. 110; Houpin, I, n. 73. (3) Contra Guillouard, n. 110; Houpin, loc. cit. 94 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ l'Exposé des motifs, qu'empêcher les parties de comprendre dans les sociétés universelles des éléments trop nombreux. Aussi sommes-nous étonnés de voir certains auteurs (*) con- sidérer lad mission des meubles présents dans la société comme un obstacle à la diffusion des sociétés de tous gains; cette admission n'est pas obligatoire. 147. Comme au sujet de la société de tous biens, la loine parle pas des dettes. Tout le mobilier présent des associés tombant dans la société, nous en concluons que leurs dettes mobilières présentes y tombent également (2) ; il est de tradition que les dettes mobilières sont une charge de l'universalité mobilière. Le législateur a fait l'application de ce principe à la commu- nauté (art. 1409-1°), et tout porte à croire qu'il a entendu en faire aussi l'application à la société. Telle était, d'ailleurs, la solution de Pothier ('). Quelques auteurs appliquent le principe que le législateur suit pour la répartition du passif des successions échues aux époux sous le régime de la communauté (art. 1411 s.) : ce qui conduit à dire que toutes les dettes de chaque associé, sans distinction entre celles qui sont mobilières et celles qui sont immobilières, tombent à la charge de la société proportion- nellement à la valeur des meubles de cet associé comparée à celle de ses immeubles, pour un tiers par exemple si la valeur du mobilier apporté par l'associé est par rapport à ses immeubles connue 1 est à 2, et représente par suite le tiers de son actif total ('). Tour justifier ce système, on se contente de le dire plus équitable (cela n'est pas douteux), sans remarquer qu'il est exceptionnel et qu'il contredit le principe élémentaire et indis- cuté d'où nous sommes partis. Les intérêts des dettes contractées au cours de la société sont à la charge de la société dans l'opinion qui confère à la société la jouissance des biens des associés (s). ('] Guillouard, n. 109. ('-'; Troplong, I, n. 295; Duvergier, a. 111 ; Laurent, XXVI, n. 239. \. 52. 4 Btiguet sur Pothier, n. 52, note 3; Pont, n. 206; Guillouard, n. 111. I5) Guillouard, n. 112. SOI II.H.S PAHTICI L1ÈRES !'•> Il eu est autrement dans l'opinion contraire. Les dettes contractées au cours de la société sont pour le principal à la charge de l'associé qui les contracte ('). Il en est cependant autremenl de celles qui sont contractées dans l'in- térêt . (») Paris, 11 fév. 1888, Rev. soc, 88. 527. — Houpin, loc. cit. (') Houpin, loc cit. 5 V. supra, n. 66 s. 6 Troplong, I, a. 114 et 116: Duvergier, n. 18 s.: Aubry et Rau, IV, p. 513, § 377, note 2 ; Pont, n. 64 et 65 ; Laurent, XXVI, n. 143; Lyon-Caen et Renault. II, n. 32; Guillouard, n. 64; Houpin, I, n. 33; Hue, XI, n. 21; Thaller, n. 327. ' N. 10. (H) L. 88. D.. pro soc, 17. 2. (9) Fenet, XIV, p 398. Fenet, XIV. p. 419. " Malepeyre el Jourdain, Des soc. com.. p. 38; Rousseau, Des soc. corn., I, n. 61; Duranlon, XVII. n. 318; Massé et Vergé, IV, p. 424, § 713, note 6 ; Par- dessus, Dr. com., III. ii. 984; lioislel. Précis de dr. com., n. 154 ; Alauzet, Comm. sur les soc, I. n. 390; Bédarride, Des soc, 1, n. 30; Duvergier, n. 20; Pont, I, n. 65; Lyon-Caen et Renault, Traité, II, n.32; Ruben de Couder, Dict., v° Société, u. 4(J; Delangle, Des soc corn.. I, n. 60; Deloison, Des soc com.. I, p. 51 ; Guil- louard, n. 04; Lyon-Caen, Sole, S., 87. 2. 17; Houpin, loc cit.; Thaller, n. 327; Lck, Holzenciorff's Rechtslexikon, v° Socielas. — Contra Trib. civ. Charleroi, OBJETS Ql i l'i i \ i \ i ÊTRE IPPOB rÉS [01 crédit commercial, attaché au nom de l'un des associés, sera Bouvent pour la société un levier d'une extrême puissance, et un ne voil pas pourquoi il ne pourrait pus luire l'objet d'une mise, an>si bien que l'industrie; <»n ne ^ « > î t pas pourquoi un commerçant ne pourrai! pas tirer parti (\i\ crédit que lui a procuré smi travail, alors qu'un industriel peut tirer parti des connaissances u elle est devenue propriétaire ('). 166. La propriété esl acquise à la société d'une manière définitive el irrévocable, de telle sorte que si, lors de la disso- lution, les apports sont compris dans le lot de l'associé qui les a faits, une mutation nouvelle s'opère (*). On a soutenu cependant que la imitation résultant de l'apport est subor- donnée à la condition résolutoire qu'elle ne soit pas comprise dans le lot de l'auteur de l'apport; c'était la doctrine de I*o- thier('). Elle est évidemment erronée dans le cas où la société constitue un être moral; elle n'est pas moins inexacte dans le cas contraire (*). II. Apport en jouissance. 167. L'apport en jouissance peut se concevoir de deux manières. Peut-être les parties ont-elles entendu que la so- ciété acquerra sur l'objet auquel s'applique l'apport un droit réel de jouissance, un droit d'usufruit; les rapports respectifs de l'associé qui a promis l'apport et de la société seront alors ceux d'un nu propriétaire et d'un usufruitier. Mais peut-être aussi (ce sera beaucoup plus fréquent) les parties ont-elles entendu conférer à la société un droit personnel de jouissance sur l'objet de l'apport; dans ce cas, les rapports respectifs de l'associé et de la société seront ceux d'un bailleur et d'un preneur : l'associé sera tenu de faire jouir la société et non pas seulement, comme dans le cas précédent, de la laisser jouir. Quant à savoir si. dans telle hypothèse déterminée, les parties ont entendu conférer à la société un droit réel ou un droit personnel de jouissance, on comprend bien que ce n'est plus une question de fait, rentrant à ce titre dans le domaine i'i Pothier, n. 112; Uuranton, XVII, n. 396; Duvergier, n. 147 s. ; Pont, n. 403 s. ; Laurent, XXVI, n. 269; Guillouard, n. 154 et 186; Houpin, I, n. 46 et 86. : Testoud, Rev. ail., XIV, 1885, p. 162. Jj 7V. du contr. de soc, n. 179. ' V. Wahl, Note, S., 96. 1. '.17. 106 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ du juge en cas de contestation ('). Elle présente une extrême importance au point de vue des risques. a. — Nous supposerons d'abord qu'il a été dans l'intention des parties de conférer à la société un droit personnel de jouissance. Dans ce cas, l'apport de l'associé est un apport successif : il s'est engagé à faire jouir la société pendant toute sa durée. Cette obligation ne peut plus être remplie par l'as- socié lorsque la chose dont il a promis la jouissance estvenue à périr. A dater de ce moment, l'associé se trouve donc sans mise et, comme il est essentiel à l'existence de la société que chaque associé ait une mise, la loi, ainsi que nous le verrons. déclare la société dissoute (art. 1867 al. 2). Dans notre pre- mière hypothèse, les risques sont donc toujours à la charge de l'associé. b. — Les parties ont entendu conférera la société un droit réel de jouissance, un droit d'usufruit. Alors, pour savoir a, la charge de qui sont les risques, il faut distinguer si l'asso- cié est demeuré propriétaire de son apport ou s'il en a trans- mis la propriété à la société; il faut distinguer, en d'autres termes, si l'on se trouve dans le cas d'un véritable usufruit ou d'un quasi-usufruit. Dans la première hypothèse, les ris- ques seront pour le compte de l'associé, mais la société, en cas de perte de la chose, perdra son usufruit ('); dans la deuxième, la perte sera pour le compte de la société. C'est une application de la règle casum sentit dominus. 168. Reste à savoir dans quels cas l'associé demeure pro- priétaire des choses dont il a promis l'usufruit à la société, dans quels cas au contraire il lui en transmet la propriété. L'art. 18ol répond à la question : « Si les choses dont la jouis- » sauce seulement a été mise dans la société sont des corps cer- » tains et déterminés, qui ne se consomment point par l'usage, » elles sont aux iis/• peut répéter que le montant de son Uimation ». Ainsi, lorsque l'apport en usufruit porle sur un corps cer- tain el déterminé qui ne se consomme point par L'usage, l'associé, en principe, et saut' les exceptions que nous indique- tons tout à l'heure, demeure propriétaire, et les risques sont pour son compte. Il faut s'entendre toutefois : les risques sont pour le compte de l'associé demeuré propriétaire, en ce sens que, si la chose périt par cas fortuit, la société sera libérée de l'obligation de la lui restituer lors de sa dissolution; mais ;ï un autre point de vue les risques sont au compte de la société, car elle perdra son droit d'usufruit, comme nous l'avons dit, si la chose périt. En un mot, la chose est aux risques de l'associé pour la nue propriété, aux risques de la société pour l'usu- fruit : si la chose périt par cas fortuit, chacun perdra le droit réel qu'il y avait, l'associé la nue propriété, la société l'usu- fruit; et l'associé n'en conservera pas moins tous ses droits dans la société. On ne peut pas dire ici qu'il est sans mise ; car il a complètement rempli la seule obligation dont il est tenu, celle de conférer à la société un droit réel de jouissance. Ce droit, une fois acquis à la société, a nécessairement péri pour elle. Au contraire, dans les quatre cas suivants, qu'indique l'art. 1851 al. 2, la société devient, en qualité de quasi-usufruitière, propriétaire des biens dont la jouissance lui est conférée, et demeure à ce titre chargée des risques, en ce sens que la perte de la chose ne la libère pas de l'obligation d'en resti- tuer la contre-valeur : 1° Si 1rs choses se consomment. Le droit de jouir emporte nécessairement ici pour la société celui de consommer, puis- qu'il s'agit de choses dont on ne peut jouir autrement; donc la société devient propriétaire, car le propriétaire seul a le droit de consommer. — 11 va sans dire cependant que le con- traire peut être décidé. 2° Si elles se détériorent en les gardant. On ne peut guère supposer que l'intention des parties ait été de réduire l'asso- cié, qui apporte de semblables choses en jouissance, à les 108 DU CONTRÂT DE SOCIÉTÉ Reprendre en nature, c'est-à-dire considérablement diminuées de valeur, lors de la dissolution de la propriété. Nous examinerons plus loin si la société peut cependant obliger l'associé à reprendre ces apports en nature. 3° Si elles sont destinées à être vendues. La société ne peut pas vendre sans être propriétaire; on doit donc supposer que l'intention des parties a été de lui transférer la société. 4° Si elles ont été mises dans la société sur une estimation. Il importe peu d'ailleurs que l'estimation soit contenue, comme la loi le suppose, dans un inventaire ou dans tout autre titre ('). L'estimation emporte vente au profit de la société, parce que telle a été vraisemblablement l'intention des parties. C'est donc le prix d'estimation qui devra être res- titué lors de la dissolution de la société. Aucune distinction n'est à faire entre les meubles et les immeubles (2), quoique dans d'autres situations l'estimation des immeubles n'emporte pas vente. Dans les trois autres cas, nous verrons que l'associé aurait droit à la restitution de choses semblables à celles qu'il a livrées à la société ou d'une somme suffisante pour se les procurer. 169. Dans le cas où l'estimation d'un immeuble a été faite, l'associé qui a apporté cet immeuble ne peut demander la rescision de l'acte de société en se basant sur l'art. 1674, pour lésion de plus de sept douzièmes dansl'estimalion (3). Eneffet, l'art. 1674 est un texte exceptionnel et on est d'accord pour décider qu'il ne peut être étendu à des cas analogues; or la mise en société n'est pas une véritable vente, car la loi consi- dère la société comme un contrat distinct de la vente. Du reste, le motif de décider en sens contraire n'existe même pas en matière de société; car si on peut être forcé par une néces- sité pressante, et pour se procurer de l'argent, de vendre, on ne peut être forcé d'entrer en société. 170. Si l'apport est fait à titre de jouissance, comment dis- ' Guillouard, n. 163; Houpin, I, n. 80. [*) Laurent. XXVI, n 276; Guillouard, n. 162; lloupin, loc. cil. x3) Troplong, II, n. 698 ; Duvergier, n. 175; Pont, n. 402; Guillouard, n. 163; Houpin, loc. cit. TRANSMISSION! DES APPORTS 1 09 ttnguer si cette jouissance esl un usufruil ou une jouissance pers 'Il<\ analogue au bail? On ;i prétendu qu'il faut pré- sumer soil l'usufruit ' , soil la jouissance personnelle ('/. Il ii \ a, selon nous, aucune raison de présumer l'un ou l'au- tre (s); le juge décidera. La différence est très importante, comme nous l'avons dit, el connue nous le venons encore à propos de la transcription et de la garantie. 171. La jouissance peut être apportée soit pour la dupée de la société, soit pendant un temps déterminé. Dans ce dernier cas, si la société se termine avant l'expira- tion de la durée de la jouissance, cette jouissance fait partie de l'actif et peut être aliénée dans l'intérêt des copartageants('). § IV. De la transmission /les apports vis-à-vis des tiers. 172. Il faut ici distinguer suivant la nature des objets. Conformément à l'art. Il il C. civ., l'apport de meubles n'est parfait vis-a-vis des tiers que par la tradition, en ce sens qu'un tiers qui, de bonne foi, aurait reçu de l'associé le meu- ble apporté antérieurement à la société en deviendrait pro- priétaire (C. civ., 11 il et 2279 . 173. L'apport d'immeubles en société est soumis à latrans- cription (5). En d'autres termes, s'il s'agit d'immeubles, la so- ciété ne devient propriétaire, vis-à-vis des tiers, qu'à partir de la transcription. On a soutenu le contraire par la raison que l'apport en société n'est pas une véritable mutation, et, pour (') Troplong, II. n. 538; Duvergier, n. 168. (*) Duranton, XVII, n. 393. (3) Pont, n. 276; Laurent, XXVI, n. 248; Lyon-Caen et Renault, Traité, II, n.28; Guillouard, n. 188. 1 Cass. re(j., 7 juin 1886, S., 90. 1. 406 (brevet d'invention). i i Cass., 8 mars 1875, S., 75. 1. 449, D., 76. 1. 369. — Cass. req., 25 avril 1893, D., 93. 1. 320 (apport dans une société anonyme moyennant l'attribution d'actions). — Amiens, 10 juill. 1883, Journ. des soc, 87. 451. — Paris, 18déc.l884, Rev soc, 85. 470. — Hennés, 11 juill. 1892, Gaz. l'ai., 93. 1, 2« p., 26. — Mourlon, De la transcr., I, n. 52; Flandin, De la Iranscr., I, n. 266; Gauthier, ibid., n. 61; Ver- dier, ibid., n 36; Lesenne, ibid., n. 7; Troplong, De la Iranscr., n. 63; Aubry et Rau, II, § 209. note 20, et IV, p. 551, § 378, note 10; Lyon-Caen et Renault, II, n. 21; Guillouard, n. 177 et Tr. de la vente, II, n. 795; Houpin, I, n. 40; IIuc, XI, n. 56; Fuzier-Ilerman, art. 1138, n. 33. 110 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ justifier cet argument, on s'est fondé sur l'art. 68, § 3, n. 4 de la loi du 22 frim. an VII, qui dispense du droit de mutation l'apport en société. Ce raisonnement est évidemmentinexact : il est certain que l'apport en société est une mutation, puis- que l'associé qui fait l'apport perd, au profit de la société, la propriété de cet apport; quant à la loi du 22 frim. an Vil, elle se justifie, comme le démontrent ses travaux préparatoires, par une faveur qu'on a voulu accorder aux associés. Au sur- plus, l'art. 1er de la loi du 23 mars 1855 exige la transcription de « tout acte entre vifs translatif de propriété immobilière ». Cette transcription n'est pas nécessaire si l'apport porte sur un immeuble commun à tous les associés ('), dans l'opi- nion qui nie la personnalité morale de la société, car il ne s'opère alors aucune mutation de propriété; il en est autre- ment dans le système contraire. Quoique le droit proportionnel de transcription soit exigé lois de l'enregistrement sur les « actes emportant mutation de propriété immobilière » (L. 21 vent, an VII, art. 19) et sur tous les actes qui sont « de nature à être transcrits » (L. 28 avr. 1816, art. 54), la cour de cassation n'admet pas que l'acte de société donne lieu, sur les apports immobiliers, au droit de transcription (!). Etant donné le système de la cour de cassation, le droit de transcription ne devrait pas être perçu, si les parties soumet- tent l'acte de société ;\ la transcription, puisque celte trans- cription est inutile, et que, dans l'opinion de la cour de cas- sation, l'acte n'est pas de nature à être transcrit. On décide néanmoins le contraire (3) ; cette solution, très contestable, se rallache à une théorie générale de la jurisprudence, d'après laquelle le droit proportionnel de transcription est exigible, lois de la transcription à la conservation des hypothèques, sur les actes mêmes dont la transcription est inutile (4). (<) Cass. req., 25 avril 1893, précité. — Amiens, 10 juill. 1883, précité. — Hou- pin, loc. cit. i-i Cass. 5 arrêts), 23 mars 1846, S., 46. 1. 312. — Cass., 5 janv. 1848, S., 48. 1. 97. (3 Cass., 6 déc. 1864, S., 65. 1. 49. — Contra Wabl, Sole, S., 92. 1. 97 et Rev. cril., 1893, p. 129 s. [») Y. Wahl, loc. cit. TRANSMISS10M DES APPOH1 3 111 i74. L'apporl d'un usufruit immobilier es! soumis à ta transcription comme l'apport d'une propriété immobilière ('). L'apporl d'une jouissance personnelle (à litre de bail) estsou- mis à la transcription si elle excède dix-huit ans - . En effet, l'art. 2, n. \ de la loi du '2'.) mars 1855 soumet à la transcription les baux de plus de dix-huit ans; sans doute on doit interpré- ter restrictive ment les textes qui subordonnent la translation de propriété ou dejouissance à l'accomplissement d'une forma- lité ; mais ce n'est pas déroger à cette règle que d'assimiler au bail une transmission qui y est analogue et peut-être iden- tique; les raisons de décider sont trop évidemment les mêmes pour que l'hésitation soit possible. Ce qui surtout doit contribuer à faire adopter cette opinion, c'est qu'en la rejetant on cstconduit àdéciderque, quelleque soit la durée de la jouissance considérée, l'apport n'est pas soumis à transcription; l'esprit de la loi de 1855 répugne à celle solution, qui n'a jamais été soutenue. Mais on a cru pouvoir y échapper en prétendant que, quel- que faible que soit sa durée, l'apport de la jouissance d'un immeuble est soumis à transcription (3). On assimile la jouis- sance personnelle a l'usufruit, ce qui revient à traiter de la même manière deux sortes de jouissances très distinctes l'une de l'autre; et c'est bien médiocrement justifier cette assimila- tion (en admettant même que cette formule ait un sens) que de dire que l'apport d'une jouissance « est un usufruit avec quelque chose de plus ».I1 est, en tout cas, fort singulier que, pour avoir refusé d'assimiler l'apport d'une jouissance per- sonnelle à un bail, on soit amené à exiger pour cet apport des formalités plus rigoureuses que s'il s'agissait d'un bail. 175. S'il s'agit d'une créance cédée à la société, elle n'est transmise vis-à-vis des tiers que par l'accomplissement des formalités prescrites par l'art. 1690 (*). D'abord, on ne voit (') Houpin, I. n. 47. • Flandin. Tr. de la transe, I, n. 269; Lyon-Caen et Renault, II, n. 27.— Conira Hue, XI, n. 64. 1 Mourlon, Tr. de la transe, I, n. 52; Guillouard, n. 190; Houpin, I, n. 49. 4 Cas?, civ., 24 déc. 1894, S., 95. 1. 69, D.. 95. 1. 206. — Cass. civ., 7 juill. 1897, S., 98. 1. 113 (sol. implie. .- Paris, 30 mars 1868, sous Cass., 28 avril 1869, 112 DU CONTRAT DE SOCIETE pas pourquoi ces formalités, jugées nécessaires quand il s'agit d'une vente proprement dite, ne le seraient pas au même degré quand la transmission de propriété s'opère par un apport en société; rationnellement, il serait absurde de dis- tinguer. Ensuite, par ses termes généraux, l'art. 1690 s'ap- plique à toute cession et l'apport en société, en admettant qu'il ne soit pas une vente, est bien une cession. On peut même soutenir que l'apport en société est une vente, car l'associé transfère une chose moyennant un prix qui consiste dans sa pari éventuelle de bénéfices et d'actif. L'opinion contraire se contente donc à tort de nous oppo- ser ce raisonnement étroit (pie l'art. 1090 doit être restreint littéralement à la vente. N'est-on pas d'accord pour appli- quer ce texte à la donation ou à l'échange? Eu vain dit on encore que l'art. 1690 se justifie mal; c'est là un singulier point de vue, car il faut se placer en face des idées auxquelles a obéi le législateur d certainement, s'il avait cru que l'art. 1690 lût difficile à justifier, il ne l'aurait pas introduit dans notre code. En tous cas, il est certain (pie. dans l'opinion contraire, il faut appliquer l'art. 1328 G. civ. et exiger, pour que l'apport en société d'une créance soit opposable aux fiers, que l'acte de société ait acquis date certaine ('). Notre solution est exacte même si au lieu d'apporter dis- tinctement une créance, l'associé apporte tous ses biens, parmi lesquels se trouve une créance (*). En tout cas, elle est indiscutable si l'apport est fait à litre onéreux (-1). De même, si une société se dissout pour faire place à une S., 69. 1. 313, D., 69. i. 445. — Paris, 18 déc. 1884, D., 86. 2. 15. - Nîmes, 16 juill. 1895 impl.), Mon. Trib. Midi, k août 1895. — Troplong, II, d. 766; Du- vergicr, n. 379; Aubry el Rau, IV, p. 551, § 378, note 11; Pont, n. 259: Lyon- Caen et Renault, II, d. 21 ; Hue, XI, n. 56 el Tr. de la cession et de la transm. des créances, I, n. 282; Houpin, I, n. 42. — Conlra Bordeaux, 15 août 1868, l)., 69. 2. 111. — Laurenl, XXVI. n. 245; Guillouard, n. 178 et Tr. de la vente. Il, n. 795. (') Guillouard, n. 118 et 7V. de la vente, loc. cil. (*) Gass., 28 avril 1869, précité. —Paris, 18 déc. 1884, précité. — IIuc, locc. dit. '■'; Cass., 18janv. 1871, y. ,71. 1. si. — Hue, locc. dit. TRANSliISSIOM DES kPPORTS 113 nouvelle société, la signification du nouvel acte de constitu- tion doil être faite aux débiteurs de l'ancienne société ('). 175 bis. Mais si le débiteur paye la dette à l'associé sans avoir eu connaissance de la société, le payeme.nl scia valable même après que la société aura eu date certaine (2) ou qu'elle aura été publiée (3), la publication n'étant pas faite pour ren- dre l'acte de société opposable au débiteur. 176. L'apport d'un brevet d'invention est soumis vis-à-vis des tiers à l'enregistrement prescrit pour les cessions du bre- vet d'invention par l'art. 20 de la loi du 5 juillet 1844 (*). On objecte qu'à la différence de la cession l'apport en société conserve à l'apporteur une portion indivise des droits appor- tés ; niais l'objection est erronée dans le système de la juris- prudence, d'après lequel la société, même civile (5), est une personne morale qui devient propriétaire des apports; et d'autre part, l'argument conduirait à dire que la vente d'une portion indivise d'un brevet n'est pas soumise à l'enregistre- ment ; d'un autre côté, la loi de 1844 a obéi à un but de pu- blicité qui en commande l'application à tout transport de propriété. L'apport d'une licence n'est pas soumis a l'enregistrement, car la licence ne transporte que la jouissance du brevet (6). • ittra Guillouard, Tr. de la vente, II, n. 796. '2) Guillouard, Tr. de la vente, loc. cit. (") Guillouard, Tr. de la vente, loc. cit. (*) Trib. civ. Seine, 14 mars 1884, Loi, 28 mai 1884. — Lyon Caen et Renault, II, n. 21: Lyon-Caen, Rev. crit., XII, 1883, p. 055 s., XIV, 1885. p. 412; Houpin, I, n. 44, Journ. des soc, 1891, p. 241: Allard, Tr. des brevets d'invention, n. 87; Pouillet. ibid., n. 306 ; Hue, XI, n. 56. — Contra Cas*, crim , 24 mars 1864, S., 64. 1. 374. — Cass. crim., 24 nov. 1866, Bull, crim., 1866, n. 246. — Cass. crim., 19 juin 1882, S., 83. 1. 17. — Trib. Douai, 11 juil. 1888, Journ. soc, 90. 84. — Huard. Rép. de léçfisl. en mat. de brevets, p. 456; Renouard, Tr. des brevets, n. 171 ; Bédarride, Brevets d'inv., I, n. 254 ; Ruben de Couder, Uicl. de dr. corn., \" Brevets d'inv.. n. 402. (3) D'ailleurs, dans le cas tranché par l'arrêt du 19 juin 1882 précité, il s'agissait d'une société commerciale. (6j Lyon-Caen. Rev. crit., XII, 1883, p. 657: Houpin, loc. cit. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 114 DU CONTRAT DK SOCIÉTÉ g V. Intérêts et fruits des apports. A. F mit s. 177. L'associé n'est débiteur des fruits de la chose apportée qu'à partir du jour où il est mis en demeure de délivrer la chose à la société ('). Celte solution est toutefois très contestée. On n'a pas pu nierqu'ellenefùt imposée par le droit commun, et Pothier l'admettait explicitement (!j. Mais on a tiré en sens contraire argument de l'art. 1846, qui, quand l'apport est d'une somme d'argent, fait courir les intérêts de plein droit et sans sommation. 11 nous semble que l'art. 1846 fournit, au contraire, en faveur de notre doctrine, un argument a con- trario très puissant, car si la loi l'a ainsi décidé pour les sommes d'argent seules, alors qu'elle venait de parler des apports de corps certains, c'esl évidemment qu'elle a voulu admettre pour ces derniers une solution contraire Du reste, il est à remarquer que si l'art. I son profit particulier » (art. 1846 al. 2). Ainsi les intérêts courent de plein droit (5) et ils peuvent dépasser le taux légal. Us sont dus jusqu'au moment de la restitution (6). ' Aubry et Uau, IV, p. 554, § 380, note 2 ; Guillouard, n. 195 ; Hue, XI, n. 68. i!) Lyon, 8 juil. JS'J2, Mon. jud. Lyon. 10 nov. 1894 décide avec raison que, faute d'exécution de celte obligation, la dissolution de la société peut être deman- dée . — Pont, n. 274 ; Houpin, I, n. 43 ]ces auteurs cependant font exception pour le cas où les procédés seraient notoirement connus, parce qu'alors il y aurait un vice apparent'. Contra Malepeyre et Jourdain, Soc. corn., p. 45. 11 Malepeyre et Jourdain, loc. cit. ls) L. 1, § 1, D., de usur. et frucL, 22. 1. — L. 60, pr. I)., pro soc, 17. 2. — Cass., 21 juil. 1884, S , 86. 1. 291, D.. 85. 1. 471 (motifs). — Troplong, II, n. 513: Pont, n. 318; Laurent, XXVI, n. 256; Guillouard, n. 198 ; Houpin, n. 80; Hue. XI, n. 67. — V. cep. Trib. com. Xantes, 8 sept 1895. Rec. Santés, 95. 1. 92 pour les prélèvements mensuels exagérés . 5 Pont, n. 323 et 326: Laurent, XXVI. n. 257 : Guillouard, n. 199; Houpin, I, n. 80. 122 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Ce n'est là qu un exemple : l'associé est tenu évidemment aussi des dommages-intérêts sans mise en demeure pour les valeurs autres qu'une somme d'argent et dont il prive la société à son profit personnel. Il n'y a pas, comme en matière d'apport, de raison de distinguer entre les sommes d'argent et les valeurs d'une autre nature. Le motif sur lequel est fondé l'art. 1816 conduit, au contraire, à une solution géné- rale : la loi a voulu punir l'abus de confiance commis par l'associé; d'un autre côté, il est de principe qu'un délit com- mis emporte de plein droit mise en demeure. Le rapproche- ment de l'art. 18i6 avec le passage de Pothier (') d'où il est extrait fournit enfin un argument très sûr : « Chacun des associés doit rapporter à la niasse commune tout ce qu'il a perçu du fonds commun et il en est par conséquent débiteur envers la société. Par exemple, si l'un des associés a tiré de la caisse de la société quelque somme d'argent pour l'em- ployer à ses aiiaires particulières, il n'est pas douteux qu'il est débiteur de cette somme envers la société ». 191. L'art. 1846 doit être larg-ement interprété à un autre point de vue. Quoiqu'il ne parle que des sommes prises dans la caisse sociale, il s'applique évidemment aux sommes enle- vées à la société avant d'être entrées dans sa caisse (s), par exemple à un loyer ou fermage (3) ou à un prix de vente touché et détourné par l'associé, à la somme qu'il devait lui- même payer et n'a pas payée (*). La raison de décider est la même, et nous avons vu que l'art. 1846 a voulu seulement fournir un exemple. D'autre part, l'art. 1846 s'applique non seulement aux sommes provenant des apports ou des bénéfices, mais encore à celles qui proviennent de versements faits en sus de leurs apports par des associés (5). 192. L'art. 1846 s'applique même si l'associé n'a tiré (')N. 118. ; Cass.. 28 juin 1825, S. cbr. — Grenoble, 4 mars 1826, S. chr. — Pont, n. 320; Laurent, XXVI, n. 156; Guillouard, n. 199; Houpin, loc. cit. (3) Guillouard, n. 199; Houpin, toc. cit. (*) Guillouard, n. 199; Houpin, loc. cit. i5i Contra Ttïb. corn. Marseille, 19 nov. 1886, Rec. Marseille. 87. 34. OBLIGATION DE TENIB COMPTE DE6 VALEURS SOCIALES 1*2*1 aucun profil des valeurs qu'il a détournées. On ne tient donc aucun compte du profit qu'il en a tiré pour calculer le mon- tant clos dommages-intérêts ('); la loi exige seulement, mais exige toujours, la réparation du préjudice. Mais quant aux intérêts des sommes d'argent détournées, ils sont dus en toute hypothèse, non seulement si l'associé n'a tiré aucun profit de ses détournements (s), mais encore si la société n'en a souffert aucun préjudice (s). 193. L'art. 18iG s'applique non seulement aux sociétés particulières, mais encore aux sociétés universelles ('). Le texte ne distingue pas; une distinction, d'ailleurs, ne se com- prendait pas. Pothier [*) cependant adoptait la solution contraire et son opinion a été reproduite par certains auteurs modernes (6) ; elle se fonde sur ce que la société universelle, prenant les revenus de tous les biens des associés, doit supporter les intérêts des dettes qui grèvent ces biens, et que, dès lors, il s'établit une confusion entre les intérêts dus par l'associé à la société et les intérêts perçus par la société. Ce raisonne- ment ne nous parait pas exact; si la société est, en général, tenue de supporter les intérêts des dettes des associés, on ne peut lui imposer l'obligation de supporter les intérêts des dettes que les associés ont contractées envers elle-même, inté- rêts qui, au surplus, sont mis à leur charge à un titre en quel- que sorte pénal, et qu'enfin l'art. 1846 oblige, sans aucune distinction, l'associé personnellement à payer. 194. Le fait qu'un associé a employé les valeurs sociales à son profit personnel ne peut se présumer; il doit être démontré, conformément au droit commun. Toutefois, si cet associé est un gérant, l'emploi à son profit personnel doit être présumé et c'est h lui, s'il veut échapper (M Pont. n. 324; Laurent XXVI, n. 258: Guillouard, n. 201; Iloupin, loc. cil. (') Guillouard, n. 199; Houpin, loc. cit. (s) Cass., 22 mars 1813, S. chr. — Oass., 21 juil. 1884, S., 86. 1. 291, D., 85. 1. 417 { motifs . — Laurent, XXVI, n. 150; Guillouard, n. 199; Houpin. loc. cit. (*) Pont, n. 419. (•)N. 119. (6) Guillouard, n. 202; Houpin, I, n. 80. l'2i DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ à l'art. 18Ï6, qu'il appartient do démontrer cpie les valeurs détournées n'ont pas été employées à son profit ('), car sa qualité de gérant lui impose l'obligation d'employer les valeurs sociales au profit de la société, et, cette obligation existant de plein droit à sa chaîne, il doit démontrer qu'il l'a accomplie. SECTION IV OBLIGATION DK VEILLER A IV INTÉRÊTS DK LA SOCIÉTÉ 195. Chaque associé est tenu de veiller et de pourvoir en bon père de famille aux intérêts de la société. Il ne peut donc pas sacrifier l'intérêt social à son intérêt personnel, mais il peut en sens inverse sacrifier son intérêt personnel à l'intérêt social. En droit romain, l'associé n'était tenu de fournir pour les a d'aires sociales que l'activité qu'il fournissait à ses propres affaires 2 : c'était un des cas exceptionnels où la faute légère dont étaient tenues toutes les personnes obligées envers autrui, s'appréciait in concreto. La raison en était le jus fra- ternitatis qui présidait aux relations des associés entre eux. C'était également la solution de l'ancien droit; on ajoutait, ce qui n'était pas douteux, que s'il s'agissait de fautes lourdes, confinant au dol, l'associé ne pouvait pas s'excuser en pré- tendant qu'il commettait les mêmes fautes dans la gestion de ses propres affaires (3 . Aujourd'hui l'art. 18.'i() porte que : « Chaque associé est » tenu envers la société des dommage* qu'il a causés par sa » faute ». Le code a donc, quoique ce point ait été autrefois controversé, rejeté la théorie traditionnelle : l'associé, comme tout obligé, est responsable de sa faute, sans restriction; il doit jouir en bon père de famille et doit réparer les consé- quences de la faute que ne commettrait pas un bon père de (')Cass.. 22 mars 1813, S. clir. - Pont, n. 323; Aubry et Ran, IV. p. 561, § 381 bis, note 7 ; Houpin, loc. cit. (*) L. 72. D., pio soc, 17. 2. (3) Domat, liv. I, til. VIII. sect. IV. .S 3; Pothier, n. 124. — Cependant Argou, II, liv. III, cli. XXXII, p. 323, dil que les associés <• doivent répondre de toutes les fautes qu'ils font ». OBLIGATION DE VEILLEE \l\ INTÉRÊTS DE I.A SOCIÉTÉ 125 famille, même s'il la commet dans la gestion de ses propres affaires '). L'art. IS.'iO ne fait que tirer une application par- ticulière de l'art. I l.'J", qui soumet toute personne obligée do veiller à la conservation de la chose « à y apporter tous les soins d'un bon père de famille ». Les travaux préparatoires sont également formels en ce sens (*). 196. Les associés peuvent s'obliger à ne vendre qu'à la société les produits de leur fabrication (:<). 197. La faute ne s'entend pas seulement de la faute active (in commitendo ; l'associé est également responsable de sa faute passive (in omittendo) (*). C'est déjà ce que disaient le droit romain (5) et Pothier (6). Ainsi l'associé est responsable si, par sa faute, il omet de faire une acquisition qui serait avantageuse pour la société (7), s'il n'a pas exercé une surveillance suffisante sur les em- ployés (8), s'il a laissé se détériorer faute de soins les biens sociaux (9j. Il résulte a contrario de l'art. 1850 que l'associé ne répond pas du cas fortuit (,0). C'est, du reste, la solution adoptée par l'art. 1148 pour tous les débiteurs. Enfin le droit romain (u) et l'ancien droit (12) décidaient dans le même sens. Toutefois, et conformément au droit commun, l'associé est (') Duvergier, n. 324; Pont, n. 353 et 354; Laurent, XXVI, n. 253: Guillouard. n. 205; Houpin, I, n. 81; Hue, XI. n. 72.— Contra Duranton, XVII, n. 403 : Troplong, n. 5G6 s. ; Aubry et Rau, IV, p. 101, §308, note 28. : Fenet, XIV. p. 373 et 374. (»; Grenoble, l** mai 1894, S., 94. 2. 277, D., 95. 2. 221. — Et dans ce cas ils ne peuvent se fournir ces produits à eux-mêmes. — Même arrêt. — V. supra, p. 5i. note 7. ' Paris, 21 janv. 1852, D., 52. 2. 278. — Lyon, 3 déc. 1857, S., 58. 2. 471, D. , 59. 2. 171.— Pont, II, n. 536; Laurent, XXVI, "n. 254: Guillouard, n. 206 ; Houpin. I, a. 81; Hue, XI, n. 72. (5) L. 52, §11, D., pro. soc, 17.2. (•) X. 124. C) L. 52, § 11, D., pro. soc, 17. 2; Pothier, n. 124; Pont, II, n. 536: Guillouard. n. 206. (8j Paris, 21 janv. 1852, D., 52. 2. 278. — Lyon, 3 déc. 1857, S., 58. 2. 471, D.. 59. 2. 171. — Pont, II, n.536: Laurent, loc. cit. : Guillouard, n.206; Hue, loc. cit. (3) Pont, loc. cit.; Guillouard, loc. cil. C°) Guillouard, n. 187 ; Houpin, loc. cit. ; Hue, loc. cit. (")L. 52, §3, D., pro soc, 17, 2. (») Domat, liv. I, tit. VIII, sect. 4, § 4. 126 DU CONTRAT DK SOCIÉTÉ tenu du cas fortuit provoqué par sa faute ('). Par exemple, il est tenu du vol provenant de l'insuffisance de sa surveil- lance (s). 198. En droit romain, l'associé qui avait commis des frau- des était déclaré infâme. Cette sanction avait déjà disparu dans l'ancien droit (3). 199. De l'obligation imposée à l'associé de veiller aux inté- rêts de la société, la loi tire diverses conséquences. 1° « Chaque associé est tenu envers la société des dommages >> qu'il lui a causés pur sa faute sans pouvoir compenser avec » ces dommages les profits que son industrie lui aurait procu- » curés dans d 'autres affaires » (art. 1850). D'ailleurs, la com- pensation n'a lieu qu'entre personnes respectivement débitri- ces l'une de l'autre (art. 1289) ; or, l'associé est bien débiteur envers la société à raison du préjudice qu'il lui a causé par sa faute ; mais la société n'est pas débitrice envers lui pour le profit qu'il lui a procuré par son industrie. C'était, du reste, déjà la solution de l'ancien droit ' Mais l'associé peut compenser avec les pertes qu'il a causées à la société le profit qu'il lui a procuré dans la même affaire^). Cette solution résulte a contrario de l'art. 1850; elle est, du reste, fort équitable, car les résultats d'une affaire doivent s'apprécier en bloc; elle est, en outre, très juridique, parce qu'une opération unique est indivisible et ne peut se scinder. Sans doute, s'il fallait ici encore, comme on l'a proposé, recourir aux principes de la compensation, on serait amené à admettre la solution contraire; car l'associé n'est pas créan- cier des profits procurés à la société, au contraire il en est débiteur, puisqu'il en doit la restitution à la société; mais il ne s'agit pas ici, comme dans le cas précédent, de compensa- tion; il s'agit d'apprécier dans son ensemble une opération unique. i i Domat, loc cit. -, Domat, loc. cit. — Y. supra, p. 125, mite 8. ( Argou, liv. III, ch. XXXII. p. 325. ' bornât, liv. 1, lit. VIII, sect. 4,§8; Polluer, n. 121 : Argou, liv. III, ch. XXXII, p. 323. Duranlon, XVII, n. 103; Duvergier, n. 331; Pont, n. 361; Guillouard, n. 204; Hunpin, I, n. t>J . — Contra Laurent, XXYI, n. 255. OBLIGATION DE VEILLES AI \ INTÉRÊTS DE LA SOCIÉTÉ 127 L'associé commet une faute si, en cas de conflit entre son intérêt et celui de la société, il ne donne pas la préférence à ce dernier ('). Quoique cette solution soit contraire au droit commun, elle doit être admise en matière de société. Tout d'abord elle est imposée par la tradition et cet argument est très puissant, si Ton songe qu'aujourd'hui l'associé est plus strictement puni de sa faute qu'autrefois. Ensuite, elle est implicitement sanctionnée par le code, qui en fait deux appli- cations dans les art. 1818 et 1819, car les solutions données par ces deux textes sont également contraires au droit com- mun et ne se justifient que par l'obligation imposée à l'associé de mettre les intérêts sociaux au-dessus de ses intérêts pro- pres. L'associé ne peut donc pas mettre obstacle à une opération projetée par la société, en invoquant le préjudice que cette opération lui causerait (*). 200. 2° « Lorsque l'un des associés est, pour son compte » particulier , créancier d'une somme exigible envers une » personne qui se trouve aussi devoir à la société une somme » également exigible, t 'imputation de ce qu'il reçoit de ce débiteur doit se faire sur la créance de la société et sur la » sienne dans la proportion des deux créances, encore qu'il » eût par sa quittance dirigé l'imputation intégrale sur sa » créance particulière : mais s'il a exprimé dans sa quittance « que l'imputation sera faite en entier sur la créance de la » société, cette stipulation sera exécutée » (art. 1848). — Exemple : Un débiteur qui doit 1.200 fr. à la société et G00 fr. à l'un des associés, paie 300 fr. a cet associé. Celui-ci devra verser 200 fr. à la caisse sociale et garder seulement 100 fr. pour lui, donnant ainsi à la société le double de ce qu'il garde, parce que la créance de la société est deux fois plus considérable que la sienne. Il en sera ainsi, alors même que, dans la quittance qu'il a délivrée au débiteur, l'associé aurait imputé les 300 fr. pour le tout sur sa propre créance. Paris, 26 avril 1*50, S.. 50.2. 329, D., 50. 2. 129. — Pont. n. 327; Laurent, XXVI, n. 259; Guillouard. n. 208; Houpin, I, n. 85 bis. — Y. cep. Cass., 16 nov. lsTn. S., 71. 1. 94, D., 70. 1. 350. — Contia Hue. XI, n. 70. - Paris, 26 avril 1850, précité. — Guillouard, n. 214; Houpin, loc. cit. 128 DU CONTRAT DV. SOCIÉTÉ Il n'a pas le droit de faire une semblable imputation, parce qu'il sacrifierait l'intérêt social à son intérêt personnel. Cette règle était déjà posée par Pothier ('). L'art. 1848 suppose que la créance de la société et celle de l'associé sont toutes deux exigibles. Il s'applique, croyons- nous, à plus forte raison si la créance de la société est seule exigible .*), car les intérêts de l'associé sont encore moins favorables alors que dans le cas contraire. Mais il ne s'applique pas si la créance de l'associé est seule exigible (';. En ce cas, l'imputation ne peut être inspirée par le désir qu'aurait l'associé de mettre ses intérêts au-dessus des intérêts sociaux, car l'imputation en faveur de la créance exigible dérive de la loi. 11 faut décider pour les mêmes motifs, et en tirant un argu- ment implicite de l'art. 1848, que ce texte cesse de s'appli- quer toutes les fois que l'imputation est légale (*). L'art. 1848 doit être également écarté dans le cas où l'im- putation est faite par le débiteur, conformément à l'art. 1253 (s). Dans ce cas encore on ne peut rendre l'associé res- ponsable de l'imputation. On a objecté que l'associé pourrait profiter de celte solution pour obtenir du débiteur une impu- tation favorable à ses intérêts; mais la possibilité d'une fraude ne peut conduire à rejeter une solution conforme aux prin- cipes. Au reste, il est certain que, si cette fraude existe réellement, l'art. 1848 reprendra son application (6). Ce que l'art. 1848 dit de l'imputation doit s'appliquer à la compensation Ç). D'une part, les motifs de décider sont abso- lument les mêmes; les auteurs qui ont affirmé, au contraire, l'iN. 121. (2) V. cep. Guillouard, n. --'In. (s) Guillouard, n. 210. (kl Larombière, art. 1256, n. G; Guillouard, n. 210; Hue. XI, n. 70. (5) Troplong, II, n. 5ô9 ; Duvergier, n. 336; Larombière, art. 12f>6. n. 6; Pont, n. 333; Laurent, XXVI, n. 260; Guillouard, n. 211. — Contra Duranton. XVII. n.40L 6 Guillouard, n. 211. >'• Massé et Vergé, IV. p. 434. — Con'.ra Duvergier, n. 339; Pont, n. 340; Lau- rent, XXVI. n. 262; C.uillouard, n. 212. OBLIGATION DE VEILLER AUX INTÉRÊTS Dl LA SOCIÉTÉ 129 que la compensation n'esl |>;is un l'ail volontaire de L'associé nui été victimes d'une confusion : la compensation, quoique légale, ne s'opère que si l'une des parties l'invoque; c'est, en effet, un principe élémentaire que les tribunaux ne peuvent la suppléer; elle est légale seulement en ce sens qu'une fois invoquée par les parties, elle est rétroactive et est censée s'être opérée au jour de la coexistence des deux dettes. D'autre part, et quoiqu'on ait contesté ce point, l'art. 1848 n'est pas un texte restrictif, non susceptible d'être étendu. Il est, en etl'et, la conséquence logique de l'obligation imposée à l'associé de mettre les intérêts sociaux au-dessus des siens. Il va sans dire que si, au lieu d'être opposée par l'associé, la compensation est opposée par celui qui est en même temps son débiteur et son créancier, la solution contraire doit l'em- porter. 201. L'art. 1848 est applicable à tout associé. Il s'appli- que d'abord et sans difficulté à l'associé administrateur (') ou à l'associé chargé d'administrer à défaut d'administrateur nommé (*). Mais il ne s'applique pas moins au cas où un gérant a été désigné, aux associés non administrateurs (3). Non seulement le texte est général, mais, quoi qu'on ait dit, les motifs aux- quels il a obéi s'opposent à toute distinction. Car on ne voit pas pourquoi l'associé non administrateur ne serait pas obligé de préférer l'intérêt de la société au sien propre; il est tenu de sa faute; pourquoi ne serait-il pas tenu des conséquences de sa faute? On objecte à tort que l'associé non administrateur n'a pas le droit de donner quittance des sommes dues à la société; rien ne l'empêche du moins de faire des diligences pour le recouvrement de ces sommes. 202. 3° « Lorsqu'un des associés a reçu sa pari entière de » la créance commune, et que le débiteur est depuis devenu » insolvable, cet associé est tenu de rapporter ci la masse com- (') Guillouard, n. 211 bis. (!) Guillouard, n. 211 bis. (3) Duranton, XVII, n. 401 ; Massé et Vergé, IV, p. 434. — Contra Troplong, n. 558; Duvergier, n. 341 ; Larombière, art. 1256, n. 6: Pont, n. 338; Guillouard. n. 211 bis. Société, prêt, dépôt. — 2' éd. 9 130 DU CONTRAT DK SOCIÉTÉ » mime ce qu'il a reçu, encore qu'il exil spécialement donné » quittance pour sa part » (art. 1849). Ce texte est emprunté au droit romain (') et à l'ancien droit (*). Pothier rattachait déjà la solution qu'il donnait a l'obligation qu'ont les associés de préférer l'intérêt de la so- ciété au leur propre. Ce motif est encore exact (3). Certains cependant pensent que l'art. 1849 est dû à l'idée que la so- ciété seule, à l'exclusion de l'associé, est créancière (*); c'est supposer, ce qui est, on le sait, liés douteux, que la société est douée de la personnalité morale; en tout cas, elle ne jouissait pas de cette personnalité dans l'ancien droit, où cependant la même solution était admise. 202 bis. L'associé qui fait pour son compte une opération qu'il devait faire pour le compte de la société doit restituer à cette dernière tout le profit qu'il a fait (:,i. C'est encore une suite de son obligation de mettre au-dessus de ses intérêts ceux de la société. De même, l'associé ne peut s'opposer à une opération pro- jetée pour le compte de la société en invoquant le préjudice que celte opération lui causerait (6). Enlin, comme le disait Pothier (7), l'associé qui vend sa part dans un objet pour un prix supérieur à celui qui est obtenu pour le surplus de cet objet doit tenir compte à la société de la totalité du prix qu il a obtenu (8). 203. Nous commenterons, en parlant de l'administration, l'art. 1859-3°, d'après lequel chaque associé est tenu de con- tribuer aux dépenses. Nous parlerons également plus loin de l'obligation qui incombe aux associés de contribuer aux pertes. 2( 4. Nous verrons que le détournement, par un associé, de biens sociaux, peut donner lieu à la dissolution judiciaire 1 L. 63, § 5, D., pro. soc, 17. 2. Pothier, a. 122. 1 Pont, n. 341; Laurent. XXVI, n.263; Guillouard, n. 213; Hue, XI, n.71. 1 Troplong, II, n. 560; Duvergier, n.342. Cass., 25 août 1835, S., 35. 1. 673. — Guillouard, n. 201. |") V. supra, n. L99: t7) N. 122. . Rép., v° Société, n. 78. — Guillouard, n. 8; Eck, loc. cit. ' Trib. civ. Lyon. ler fév. 1894, Mon. jud. Lyon, 6 avril 1894. — Trib. civ. Bordeaux, 2 avril 1894, Rec. de Bordeaux. 94. 2. 69. — Par exemple sans l'avoir entendu s'il devait être entendu. — Trib. civ. Bordeaux, 2 avril 1894, précité. (*j Trib. civ. Lyon, 1«' fév. 1894, précité. Contra Eck, loc. cit. (qui cite le §8 Inst.de soc, et 1.65,§9,D.,/)/'osoc. 17. 2 . (6) Décidé cependant que si un associé, après avoir signifié qu'il se considérait comme étranger à la société, a été exclu, ses droits cessent du jour où il a fait la dite signification. Trib. corn. Seine, 3 nov. 1892. Gaz. Pal., 93. 1. 72. — Décidé aussi que le juge du fait fixe la date de l'événement qui a exclu un associé. — Lass., 16 mars 1891, S., 92. 1. 10. INDEMNISATIONS DES DÉPENSES il OBLIGATIONS 133 ot de la raison sociale ' cl des imprimés de là société (*) : d'une pari son nom est resté sa propriété; il n'a pas pu l'intenlion A<% l'aliéner définitivemenl au profil dé la société, il n'a même pas eu le droit de l'aliéner, car on admet géné- ralement que le nom est inaliénable. D'autre part, comme nous allons le dire, les tiers, ignorant l'exclusion, pourraient avoir le droit de réclamer l'exécution des engagements sociaux à l'associe qui continuerait à figurer en nom dans la société. 212 bis. Tant que le nom de l'associé exclu n'a pas disparu de la raison sociale, les tiers qui traitent avec la société dans l'ignorance de l'exclusion peuvent considérer l'associé exclu comme obligé à leur égard aussi bien que tous les associés (r; . En efïet, si (ce qu'il faut supposer pour que tous les associés' soient obligés) les tiers ont traité avec un administrateur de la société ou avec un associé agissant dans les limites de ses pouvoirs, ils ont, en réalité, traité avec le mandataire de tous les associés; l'exclusion de l'un des associés a, sans doute, révoqué le mandat conféré à ce dernier; mais on sait que le mandataire engage le mandant vis-à-vis des tiers qui igno- rent la révocation du mandat. 213. Les tribunaux peuvent fixer un délai pendant lequel l'associé exclu ne pourra exercer un commerce ou une indus- trie similaires à ceux qu'exerce la société (■*). CHAPITRE VIII DROITS DES ASSOCIÉS ENVERS LA SOCIÉTÉ SECTION PREMIÈRE INDEMNISATIONS DES DÉPENSES FAITES ET DES OBLIGATIONS CONTRACTÉES POUR LA SOCIÉTÉ 214. Aux termes de l'art. 1852 : « Un associé a action » contre ta société, non seulement à raison des sommes qu'il i Paris, 18 nov. 1893, Gaz. l'ai., 94. 1. 10. — Trib. corn. Seine, 3 nov. 1892, Gaz. l'ai.. 93. 1. 72. *) Paris, 18 nov. 1893, précité. — Trib. corn. Seine, 3 nov. 1892, précité. »-*) Paris, 18 nov. 1893, Gaz. l'ai., 94. 1. 10. 134 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ » a déboursées pour elle, ?nais encore à raison des obligations » qu'il a contractées de bonne foi pour les affaires de la » société, et des risques inséparables de sa gestion » . Cette disposition, qui fournit une solulion de bon sens, est empruntée au droit romain et à l'ancien droit (1). Parmi les dépenses faites pour la société, on peut citer les fiais de voyage (*), les frais d'envois de choses ou de mar- chandises (3), les frais de douane et d'octroi ('), les prêts faits régulièrement à la société (6), les salaires des ouvriers (6), les réparations nécessaires (7). Ajoutons que. la société prenant à sa charge certaines dettes grevant l'apport social (ainsi que nous le montrerons •en étudiant les droits des créanciers), l'associé qui a payé ces dettes a un recours contre la société (8). Mais si l'associé a fait un déboursé contrairement à une défense du contrat social (par exemple si des administrateurs ont été nommés et si l'associé ne figure pas parmi eux), il n'a, conformément au droit commun, qu'une action de in rem verso contre la société (9). L'art. 1852 ne s'applique plus, car l'as- socié ne peut être de bonne foi. 215. L'associé a droit en outre à l'intérêt jusqu'au rem- boursement elîectif. C'était déjà la solution donnée dans l'ancien droit (10). Klle résulte, aujourd'hui, principalement de ce que l'associé agit comme un mandataire de la société. En etlet, ou bien il est administrateur, ou bien il n'y a pas d'administrateur et (') L. 38. § 1, L. 52, §§ 10. 12 et 15, L. 67, 1)., pro soc, 17. 2. — L. 27, D., de negot. gesL, 3. 5. — L. 18, § 3, D., fam. ercisc, 10. 2. — Uomat, liv. I, lit. VIII, sect. IV, n. il et 12; Pothier, n. 127 s. (2) Domat, toc. cit.; Guillouard, n. 165; Houpin, I, n. 85. (3) Guillouard, n. 165; Houpin, loc. cil. ' i*) Cass., 17 fév. 1886, D., 86. 1. 443. — Guillouard, n. 165; Houpin, loc. cil. (:;) Cass., 7 mai 1844, S., 45. 1. 53, D., 51. 5. 494. — Guillouard, n. 165; Houpin, loc. cil. — V. cependant Hue, XI, n. 74, d'après lequel l'associé serait alors assi- milé à un prêteur ordinaire. — V. supra, n. 179. !6) Domat, loc. cil. (7) Domat, loc. cit. I8) Cass., 29 mai 1877, S., 78. 1. 402. — Rouen, 29 déc. 1871, S., 72. 2. 51. — Houpin, I, n. 44. ')Huc, XI, n.74. i °) Domat, loc. cil.; Pothier, loc. cit. INDEMNISATIONS DKS DÉPENSES ET OBLIGATIONS 135 alors fous les associés ont mandat d'administrer, ou enfin, hors de ces deux cas, il s'agit par hypothèse «le dépenses faites dans l'intérêt de la société, et chaque associé a le droit, en sa qualité de propriétaire indivis, de faire les actes nécessaires aux intérêts de la société. On peut donc, en ces diverses hypo- thèses, invoquer l'art. 2001 qui accorde des intérêts de plein droit au mandataire pour les dépenses qu'il a faites. Nous ajoutons que cette solution est évidemment voulue par le législateur, car elle est le corollaire de l'art. 181G,qui oblige l'associé à payer de plein droit des intérêts pour les sommes qu'il a prises dans l'actif social. Enfin la solution contraire aurait le grand inconvénient de distraire les associés de l'administration de la société et de les empêcher de faire les actes avantageux aux intérêts communs ('). Ces motifs sont, on le voit, assez généraux pour que la solution que nous donnons soit absolue et notamment pour que l'associé ait droit aux intérêts quoique la société ait des administrateurs et qu'il ne figure pas parmi ces derniers (?). On a cependant soutenu (3) que dans cette dernière hypo- thèse l'associé n'est qu'un gérant d'affaires, et qu'il adroit, de plein droit, aux intérêts dans l'opinion seulement qui, à ce point de vue, assimile le gérant d'affaires au manda- taire. 216. L'associé a également droit aux intérêts des intérêts qui lui sont dus; mais il n'y a pas droit de plein droit, ni même en vertu d'une demande spéciale formée arbitrairement à cet effet; il n'y a droit que dans les conditions prescrites par l'art. 1 154, dont la disposition, très générale, comme on le sait, par ses termes et par les motifs sur lesquels elle repose, s'applique également au mandataire. Cependant on a décidé et soutenu que l'associé a de plein (') Cass., 24 mars 1869 (impl.), S. 70. 1. 315, D.. 70.1. 105.— Cass., 21 juil. 1884, S. 86. 1. 291. — Riom, 1" juil. 1835, sous Cass., 25 mai 1839, S., 39. 1. 705 — Del- \ incourt, III, p. 459, note 11 ; Duranton, XVII, n. 411; Troplong, II, n. 603; Du- vergier, n. 348; Aubry et Rau, IV, p. 558, § 381, note 5; Massé et Vergé, IV, p. 436, § 717, note 6; Pont, n. 413; Guillouard, n. 166; Houpin, loc. cit. — Confia Poitiers, 15 mai 1822, S. chr. — Colmet de Sanlerre, VIII, n. 32 bis, II. (s^Pont, n. 413. (•) Guillouard, n. 166; Hue, XI, n. 74. 136 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ droit la faculté de réclamer les intérêts des intérêts ('). Le motif suivant a été invoqué : l'associé ne retire aucun profit des intérêts, il rentre dans ses déboursés. — Ne pourrait-on pas en dire autant du mandataire? Au surplus, l'art. Iloi se restreint-il aux créanciers qui retirent profit des intérêts? Les motifs dont il s'est inspiré (crainte de voir le débiteur trop obéré par la capitalisation des intérêts) ne s'appliquent-ils plus en matière de société? Il est, en tous cas, une question que soulève l'opinion contraire, qu'elle ne résout pas et qui ne laisse pas d'être délicate. A partir de quel moment se produit la capitali- sation? Se fait-elle jour par jour, mois par mois, année par année ? Il va sans dire que si l'associé a été forcé de payer les inté- rêts des intérêts, il a un recours contie la société pour leur montant (*). 217. En second lieu, l'associé peut recourir contre la société « à raison des obligations qu'il a contractées de bonne foi pour les affaires de la société ». Par exemple, comme le supposaient le droit romain (s) et Pothier , l'associé vend un immeuble de la société; cette vente l'obligeant à garantie, il peut se faire protéger par la société contre les risques d'éviction, et, si l'éviction le force à indemniser l'acquéreur, se faire rembourser cette indemnité par la société 218. Enfin l'associé peut se faire couvrir par la société des « risques inséparables de sa gestion », c'est-à-dire se faire rembourser les frais dépensés ou les perles subies dans l'exercice et comme conséquence de ses obligations d'associé, par exemple : La perte provenant d'un vol opéré à son préjudice alors qu'il voyageait pour le compte de la société (6 ; Cass., 24 mars 1869, S.. 70. 1. 315,D.(70. 1. 105. — Guillouard, n. 1(37; Hou- pin, loc. cit. {-) Hue. XI, n. 74. 1 L. 67, D., pro soc. 17. 2. « N. 127. !5i Guillouard, a. 169. 6 L. 7)2. § 4, D.,pro soc, 17. 2; (iuillouard. n. 169: Houpin, 1, n. 85. INDEMNISATIONS DES DÉPENSES H OBLIGATIONS 137 de l'accident dont il est victime pendant qu'il travaille ou dirige des travaux pour le compte de la société ('); d'un naufrage dont il est victime pendant an voyage accom- pli pour le compte de la société (*). 219. Il va sans dire qu'en cas d'imprudence de l'associé, le droit à l'indemnité disparait on s'atténue suivant que cette imprudence a cause tout entière la perte on y a contribué '). Ainsi l'associé qui dans un voyage emporte des objets qui lui sont inutiles ne peut, en cas de vol de ces objets, recourir contre la société (*). 220. C'est contre les associés et non contre la société que doit agir l'associé pour se faire rembourser les sommes qui lui sont dues, puisque, d'après nous, la société n'est pas une personne morale (5). Il en est autrement dans l'opinion qui considère la société comme une personne morale (6). Les associés ne sont pas, d'ailleurs, tenus solidairement envers leur co-associé (7) ; la solidarité, en effet, ne peut résul- ter que d'un texte (art. 1202). il est vrai que les mandants sont tenus solidairement envers les mandataires; mais, si l'associé qui a fait des dépenses pour le compte de la société est mandataire de ses co-associés, il est aussi mandant pour sa part; on peut, du reste, lui appliquer l'art. 1214. Il résulte de là que le demandeur n'a de recours contre ses coassociés que pour ce qui excède sa part dans la dette (8). L'insolvabilité de l'un des associés contre lesquels existe le recours doit évidemment, dans l'opinion qui considère les eo-associés comme des débiteurs solidaires, retomber à la charge de tous les associés, de l'associé créancier comme des associés débiteurs. i1) Guillouard, n. 16y; Houpin. loc. cil. *) Houpin, loc. cit.; Hue, XI, n. 75. (') Cpr. Guillouard, n. 169. *) Pothier. n. 129; Guillouard, n. 169. ,*) Laurent, XXVI, n. 280; Guillouard, n. 170. •) Houpin, I, n. 85. ") Cass., 15 nov. 1831, S., 32. 1. 10. — Cass., 8 janv. 1862, S . 62. 1. 477, D.. 63. 1. 75. — Font, n. 426: Laurent, XXVI, n. 280; Guillouard, n. 170; Houpin. lue, rit. ! Hue, XI, n. 75. 138 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Il en est encore de même, quoique cela soit plus contesta- ble, clans l'opinion contraire (!); car c'est là, on peut le dire, un risque couru par l'associé dans l'intérêt de la société et pour lequel il aura recours contre elle. C'était, du reste, la solution admise par le droit romain et par l'ancien droit (*). SECTION 11 DROIT I)'USER DUS CHOSES APPARTENANT A LA SOCIÉTÉ 221. Aux termes de l'art. 1859-2° : « Chaque associé peut » se servir des choses appartenant à la société, pourvu qu'il » les emploie à leur destination fixée />ar l'usage, et qu'il ne » s'en serve pas contre l'intérêt de la société, ou de manière » à empêcher ses associés d'en user selon leur droit ». On a critiqué la formule de ce texte (3), laquelle est empruntée à Pothier (*). On a dit que le droit accordé à l'associé de se servir des choses de la société est, en réalité, l'exception et non la règle, attendu que ce droit ne peut guère être exercé sans méconnaître les restrictions qu'a apportées l'art. 1859-2" lui-même à son exercice. L'exactitude de la formule importe peu; la règle de l'art. 1859-2° est suffisamment claire. Ainsi, comme le disait Pothier ('), l'associé pourrait se ser- vir d'une maison destinée à l'habitation des associés ou non destinée à être louée. 11 pourra, comme le disait aussi Pothier (6), se servir du cheval appartenant à la société pendant le temps où ce cheval sera inutile à la société elle-même. 222. Chaque associé peut, comme nous le montrerons, forcer ses co-associés à contribuer aux dépenses. (') Pont, n. V25; Guillouard, n. 170 bis: Houpin, loc. cit. — Contra Laurent, XXVI, n. 280; Hue, XI, n. "5. H L. 67, D., pro soc, 17. 2: Domat, liv. I. tit. VIII, sect. 4, § 15; Polluer, n. 132. [*) Duvergier, n. 360; Laurent, XXVI, n. 323; Guillouard, n. 249. (*) N. 84 et 85. (*) Loc. cit. (*) Loc. cit. ASSOCIATION \\ I | IN TIERS 139 223. Il a, dans certaines conditions, comme nons le dirons également, le droit d'administrer la société. SECTION III DROIT DE s'ASSOCIEK UN TIERS, D'ALIÉNER 01) D'HYPOTHÉQUER SA PARI \ 1. Association arec un tiers. 224. Le contrat de société implique des rapports person- nels et de confiance entre les associés : il est fait intuitif per- sonne. De là il suit que, si chaque associé peut traiter de ses droits dans la société et les céder à une tierce personne, il ne peut pas, du moins sans le consentement de ses coasso- ciés, traiter de sa qualité d'associé et l'abdiquer au profit d'un tiers qu'il mettrait à sa place. L'art. 1861 consacre cette double proposition : « Chaque associé peut, sans le consent le- » ment de ses associés, s'associer une tierce personne relalive- » ment à la part qu'il a dans la société ; il ne peut pas, sans » ce consentement, l'associer à la société, lors même qu'il en » aurait l'administration ». Trois solutions doivent être distinguées : 1° L'associé peut vendre librement sa part, de même que ses créanciers peuvent la saisir. Nous nous occuperons ulté- rieurement de cette hypothèse. 2° 11 ne peut, sans l'assentiment de ses coassociés, associer un tiers à sa part. La société s'étant formée par le consentement de tous les associés, l'affiliation d'un nouveau membre n'est possible qu'autant que tous les associés y consentent, car nous avons dit que la société repose sur un lien de confiance mutuelle; le consentement donné par la majorité ne suffirait pas, car il s'agit d'une modification à apporter au pacte social ('). Aussi le droit romain (!) et l'ancien droit (*) étaient-ils déjà en ce sens. {') Besançon, 28 déc. 1842 et 23 avril 1845, S., 46. 2. 655, D., 47. 2. 15. — Aubry et liau, IV, p. 559, § 381, note 11; Laurent. XXVI, n. 332: Guillouard. n. 254; Houpin, I, n. 98; Hue, XI, n. 96. f) L.- 19 et 20, D., pto soc, 17. 2. — L. 47, I).. De reg. jur., 50. 17. 3) Domat, liv. I, lit. VIII, sect. II, § 5; Pothier, n. 91. 140 I>L CONTRAI DE SOCIÉTÉ Le consentement peut être tacite [*). Aussi la règle posée par l'art. 1861 n'est applicable qu'aux sociétés par intérêt, dans lesquelles la considération de la personne est domi nante. On s'accorde à reconnaître qu'elle est étrangère aux sociétés par actions, qui sont des sociétés de capitaux (*). JsTon seulement la part sociale est alors assez impersonnelle pour que la personne de l'associé soit indifférente, mais on doit supposer, par celle raison même, que les associés ne veulent pas se connaître et qu'en réalité dans leur esprit l'association se forme entre les capitaux! La distinction entre l'action et l'intérêt est très délicate, elle rentre clans le droit commercial. La preuve du consentement doit être faite conformément an droit commun; ainsi elle doit, en général, être faite par écrit, elle ne peut être faite par témoins qu'avec un commen- cement de preuve par écrit (3). Le fait qu'accidentellement les associés ont admis le crou- pier à s immiscer dans la société ou que son nom ligure dans des actes passés par la société n'est pas nécessairement une preuve de ce consentement (*). II va sans dire que le consentement des associés peut être donné d'avance et que, par exemple, le contrat social peut autoriser la cession par chaque associé de sa part à un tiers, qui se substituera à ses droits et à ses obligations (s). Cela seul justifie la solution que nous venons de donner à propos des sociétés par actions, et, au surplus, on ne peut rien objec- ter à celte conséquence de la liberté des conventions. Cette clause est opposable aux tiers sans qu'il soit néces- saire de la porter à leur connaissance par une clause du traité passé avec eux (•), En effet, racle de société est tout ^ Guillouard, n. 254. 2 i:ass., 1er venlùse an X, S. chr. — Pont, n. 598; Guillouard, n. "254. (s) Cass., 7fév. 1826, S. chr. — Pont, n. 606; Laurent, XXVI, n. 383; Guil- louard, n. 254; Houpin, I, n. 98. • («) Trib. corn. Seine, 14 déc. 1891, C,„z. l'ai.. 92. 1. 407. 5 Paris. 23 janv. 1S68,S.,69. 2. 105, D.,68. 2. 244. — Aubry et Hau.IV.p. 559, 5 381; Pont, n. 609; Lyon Gaen, Noie, S., 69. 2. 105; Guillouard, n. 255. (6) Paris, 23 janv. 1868, piécité. — Conlra Aubry et Hau, Inc. cil. : Lyon-Caen, loc. cil. : ( ïuillouard, loc. cil. ISSCH I.VHoN a\ EC l N m us I il entier opposable aux tirrs, puisque c'esl cel acte qui déter- mine les proportions dans lesquelles chaque associé est tenu ; du reste le tiers <|iii traite avec les associés se prévaut, pour leur faire exécuter leurs engagements, de l'acte de société; cet acte doit donc leur être opposable. On objecte qu'à la différence des sociétés commerciales, les sociétés civiles ne sont pas soumises à une publication qui soit de nature à les faire connaître des tiers; celte objection se retourne contre ses auteurs; car on sait que, précisément, les sociétés civiles produisent de plein droit vis-à-vis des tiers les eti'ets que les sociétés commerciales ne produisent qu'à des conditions et des formalités rigoureuses. On objecte encore que, d'après 1 art. 1863, les associés sont tenus envers les tiers par parts égales si l'acte ne modifie pas cette obligation; ce texte, qui d'ailleurs s'explique fort bien, est étranger à la question, puisqu'il règle l'obligation d'associés qui contractent avec les tiers, et que notre question suppose un associé devenu en partie étranger à la société et ne contractant pas avec les tiers. Si le consentement des associés n'est (ce qui est le cas le plus pratique) donné que postérieurement à l'acte de société, ce consentement n'est opposable aux tiers qu'après avoir été porté à leur connaissance. Ici les arguments que nous venons de faire valoir perdent toute leur valeur; les tiers peuvent refuser de tenir compte d'un acte dont ils n'ont pas à avoir connaissance. 225. 3° L'un des associés n'a pas besoin du consentement des autres pour s'associer une tierce personne relativement à la part qu'il a dans la société; c'est affaire entre lui et le sous- associé qu'il a choisi. Il se forme alors une petite société dans la grande, societas societatis. Ulpien disait : « Si socius eum admisit, ei soli sociits est » ('). Les jurisconsultes de l'ancien droit se servaient d'expressions analogues (2). Le sous-associé porte le nom de croupier, parce que, dit-on, l'associé le prend en croupe et le fait chevaucher avec lui. L. 19, V.,pro soc, 17. 2. (s) Domal,liv. I.tit. VIII, sect. 2, §5; Pothier.n. 91 ; Argou.liv. III, ch. XXXII, p. 320. 142 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Il y a bien une société dans ce contrat ('), quoique certains auteurs y voient une communauté (!). Le mot s associer qu'em- ploie l'art. 1861 l'indique; les expressions par lesquelles le droit romain et les anciens auteurs caractérisaient la conven- tion en sont une autre preuve. L'intention des parties conduit au même résultat, car leur but est de se partager les béné- fices de l'association. On y trouve également l'apport réci- proque. Enfin, quoique certains partisans mêmes de notre opinion l'aient nié (et cette négation devrait conduire à recon- naître dans le contrat une communauté), le croupier joue dans le contrat un rôle actif; il n'a sans doute pas le droit de se mêler à la société principale, mais cela importe peu puis- qu'il n'en est pas membre; il suffit que le croupier, et on ne peut lui refuser ce droit, ait un droit de contrôle dans la sous- société qu'il a formée avec l'associé et puisse exiger que ce dernier lui rende compte et fasse un emploi judicieux des bénéfices qu'il louche. A plus forte raison le contrat n'est-il pas une vente ; aussi n'est-il pas, même si la société comprend des créances, sujet à signification (3). 226. Il résulte de la théorie traditionnelle, formellement consacrée par l'art. 1861, que le croupier reste étranger à la société ('). On peut donc qualifier cette société de société en participation Pothier (6)et des auteurs modernes (7)en concluent que si le rroupier commet une faute qui cause un dommage à la société, les associés ne peuvent agir directement que contre l'associé, sauf à ce dernier à se faire indemniser par le croupier. Celte conséquence nous parait inexacte. D'une part, il est certain que si les associés n'ont pas contre le croupier d'ac- (') Troplong, II, n. 757: Pont, n. 618; Laurent, XXVI, n. 3:37; Guillouard, n. 260; Iïoupin, I, n. 99. 2) Duvergier, n. 260. ;l) Bordeaux, 5 août 1868, S., 69. 2. 77, D., 69. 2. 111. — Troplong. II. n. 766 : Pont, n. 637 et 638 ; Guillouard, n. 261. (') Guillouard, n. 262; Iloupin. I. n. 99; IIuc, XI, n. 96. 5 Thaller, Noie, D.. 87. 1. 65. 6 X. 93. 7 i ïuillouard, n, 262. vssoi i \ i iu\ \\i:c l> iikhs 143 tion contractuelle, ils peuvent agir directement contre lui en vertu de l'art. 1382, «j ni oblige tous ceux qui ont causé par leur faute un préjudice à le réparer, D'autre part, nous ne voyons |»;is (juelle serait la source d'une action directe des .i^oeiés contre celui d'entre eux qui a contracté une sous- société avec un croupier. Nous ne contestons pas que si l'as- socié a mêlé son croupier aux opérations de la société et si l'intervention du troupier a été lâcheuse, l'associé n'ait com- mis une faute personnelle dont il doit réparation. Mais, cette hypothèse mise à part, l'associé ne saurait être responsable des fautes de son croupier; on n'est, en effet, responsable que des fautes de son préposé (art. 1384). Le croupier étant étranger à la société, les associés autres que celui avec lequel il a contracté ne peuvent agir contre lui pour le contraindre à payer sa part des dettes sociales ou des frais sociaux ' . Mais le cédant peut évidemment agir contre Je croupier. Aussi décide-t-on que les co-associés ont également le droit d'agir contre le croupier du chef de leur co-associé qui a contracté une société avec le croupier (*). Le croupier peut également exercer les droits du membre de la société qui se l'est associé (3J. En définitive, et dans ses rapports avec son associé, le crou- pier participe aux pertes ou aux bénéfices dans la mesure où il a acquis les droits de cet associé (* . 227. La clause de l'acte de société « qu'en cas de mort de l'un des associés la société continuera avec ses héritiers » n'est pas opposable dans les rapports entre l'associé et son croupier (5). 228. Les tiers ne peuvent agir directement pour l'exécution dos engagements sociaux contre l'associé d'un associé (6). (') Trib. com. Seine, 8 août 1889, Ann. dr. com., III, 1889, Jurispr., p. 271. Gaz. Pal., 89. 2. 480.— Tropiong, II, n.763; Pont, n. 064; Laurent, XXVI. h. 338; Ciuillouard, n. 262. Troplong, loc. cit.: Pont, loc.cit.; Laurent, loc. cit.; Guillouard, loc. cil. '■ V. infra, n. 237, à propos du cessionnaire. ( luillouard, n. 263. Thaller, Sote, D., 87. 1. 65. — Contra Lyon, 23 juin 1884, sous Cas-.. 1 mars 1886. S., 89. 1. 468, 1)., 87. 1. 65. Trib. com. Seine, 8 août 1889, Ann. dr. connu., III, 18S9, Jurispr., p. 271. Pal, 89. 2. 480. 144 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 229. La question de savoir si les causes de dissolution des sociétés sont applicables à la société formée entre l'associé et le croupier dépend de celle de savoir si ces causes sont applicables à la société en participation ('). Dans tous les cas, en cas de décès du croupier, ses héritiers ont droit aux bénéfices qui sont une suite nécessaire des opé- rations (*). 230. Dans une société de chasse comme clans toute autre société, le cessionnaire ou l'associé de l'un des associés reste étranger à la société (s). Il suit de là que s'il se livre à la chasse dans les lieux con- sacrés à la société, il peut être poursuivi correctionnellement . Les solutions qui viennent d'être données se complètent par celles que nous allons développer à propos de la cession des droils d'un associé. § II Cession des droits du l'associé. I. Validité et effet s de la cession. 231. Il faut appliquer à la cession des droits d'un associé ce que la loi dit de la sous-association conclue entre l'associé et un tiers : tous les droits étant cessibles, la part sociale peut être cédée, mais cette cession n'est pas opposable aux autres associés. Telle est notamment la solution en ce qui concerne les sociétés fromagères. Cependant il a été décidé que la cession des droits dans une société de ce genre est, en vertu de la tradition, entièrement nulle si elle n'est pas faite à l'un des associés (4). De même l'auteur d'un livret d'opéra peut céder ce livret sans l'assentiment de l'auteur de la musique (5). (')Cpr. Thaller, Note, D.. 87. 1. 65. (-') Cass. req., l'r mais 1886, S., 89. 1. 468, D., 87. 1. 65. (s) Gass. req., 24 août 1876, D., 77. 1. 196. — Liège, 23 juil.1879, Pa«cr.,80.2. il. Journ. dr. int., IX, 1882, p. 638 (et cela même si chacuo des associés s"était assi- gné un canton distinct, ce lotissement ayant lieu pour satisfaire aux convenance» de chacun, et ne supprimant pas l'intérêt commun à la conservation du gibier . i*i Besançon, l"r déc. 1897, D., 98. 2. 195. 5 Tiib. civ. Seine, 27 fév. 1891, i;s DROITS DE L'ASSOCIÉ I î> 232. Le contrat par lequel l'associé ci-At- à un tiers la tota- lité de ses droits est une vente de ses droits sociaux ('); il est impossible d'y voir une société, puisqu'il n'y a là ni apports communs, ni bénéfices à partager, ni aff'eclio societatis. La cession des droits sociaux n'est pas en elle-même sou- mise à l'art. 1090 C. civ., puisqu'elle ne porte pas sur une créance, niais sur une part de propriété (2). Toutefois la cession d'une part sociale doit être signifiée pour être opposable aux tiers si la société comprend des créances (3), conformément au principe général de l'art. 1690. Elle doit être également signifiée pour être opposable à la société, quand elle est autorisée par la convention ('). Mais la signification est inutile à l'égard de la société dans le cas contraire, puisque, même signifiée, la cession est inopposable à la société (5). 233. On admet généralement que la cession de part dans une société minière doit être effectuée par endossement, trans- fert, tradition manuelle ou signification faite conformément à l'art. 1690, suivant la forme que revêt cette part. , Il est très exact que si le titre est nominatif il sera cédé par un transfert, s'il est à ordre par un endossement et s'il est au porteur par la tradition manuelle. Sur tous ces points, il ne peutyavoir de doute : c'est l'application du droit commun. Mais ce que nous contestons, c'est qu'au cas où le droit de l'associé ne consiste pas dans un titre commercial, il faille recourir, pour parfaire la cession, aux formalités de l'art. 1690; ces formalités ne sont applicables qu'à la cession des créances, et le droit de l'associé, comme tout associé dans toute société, est un droit de propriété. En vain dit-on que, d'après l'art. 8 de la loi du 21 avril 1810, la part dans une société minière est meuble; la vente des meubles est-elle donc soumise à une signification? Du reste, la loi de 1810 (') Pont, n. 619; Guillouard, n. 260; Houpin, I, n. 99. (2) Contra Duranton, XVII, n. 444; Troplong, II, n. 755; Duvergier, n. 379; Guillouard, Tr. de la vente, II, n. 794; Houpin, 1, n. 98. (') Guillouard, n. 258 et 261. (4) Guillouard, n. 258. (*) Guillouard, n. 258 et Tr. de la vente, II, n. 794. Société, prêt, i>ki>ùt. — 2» éd. 10 146 DU CONTRAT LE SOCIÉTÉ n'a ainsi caractérisé la part dans une société de mines que pour donner la personnalité morale à la société. 234. La cession est inopposable aux associés, même lors- qu'en fait la société n'est pas contractée intuitu personss ('), car la loi s'exprime, à propos de la sous-association, en termes généraux. Ainsi lorsqu'un auteur et un éditeur ont formé une société pour l'édition d'un livre, le contrat ne se transmet pas au tiers qui a succédé à l'éditeur dans l'exploitation de son com- merce [*). 235. On a soutenu que, par exception, dans les sociétés de mines, l^s associés peuvent céder leurs droits en tout ou en partie sans l'assentiment de leurs co-associés (3); on s'est fondé sur l'idée que les sociétés minières sont des sociétés de capitaux; c'est, comme nous l'avons montré, une erreur (*). Ou a ajouté que la personne des associés importe peu à leurs coassociés; cet argument, qui n'est guère que la reproduction du précédent, n'est pas toujours exact et, en tout cas, ne répond pas aux termes généraux de l'art. 1861. On a dit encore que la durée illimitée des sociétés minières rend indis- pensable le droit de cession; mais, d'une part, l'art. 1861 ne fait pas exception pour les sociétés illimitées au principe qu'il édicté; d'autre part, l'associé qui ne veut pas être engagé d'une manière illimitée trouve dans l'art. 1869 le droit de quitter la société quand cela lui convient. Nous conclurons aussi de là qu'en cas de cession l'associé cédant n'est pas dégagé de ses obligations envers la société(5). ') Contra Nancy, 28 juif. 1891, Gaz. l'ai. 91. 2. 552 (société pour l'exploitalion en commun de terres). (') Bonnet, Concl., Gaz. /'aZ.,94. 1.731. — Tout en reconnaissant que l'exploitation d'un livre par un auteur et un éditeur en compte à demi est une véritable société, la cour de Paris (20 avril 1894, Gaz. Pal., 94. 1. 730), perdant de vue les principes, a décidé que le point de savoir si le contrat se transmettait au successeur de l'édi- teur dépendait de celui de savoir si l'auteur, en contractant avec l'éditeur, n'avait pas ou au contraire avait agi en fait intuitu personae. 3 Liège, 27 juin 1838, Pas., 38. 2. 175. — Laurent, XXVI, n. 422; Guillouard, n :'i<)7 ; Delecroix, Des sociétés de mines, n. 167 et 302 s. 4 V. supra, n. 115. s Contra Cas?., 23 vent, an VIII, S. chr. — Paris, 22 mai 1851, S., 52. 2. 577. — Laurent, XXVI, n. 422; Guillouard, n. 368; Delecroix, op. cit., n. 311 s. CESSION DES DROITS DE l' ASSOCIÉ 1 »~ 238. Il va sans dire (jue les co-associés du cédant peuvent consentira la cession comme à la sous-association; ils peu- venl aussi considérer le cessionnaire comme un associé ('). Mais de ce qu'ils l'ont autorisé à s'occuper de la gestion, on ne peut conclure qu'ils lui ont attribué les droits d'un associé (*). 237. En dehors du cas où la société a consenti à la cession, Le cessionnaire n'a aucun droit direct contre la société, par exemple pour obtenir le versement entre ses mains de la part de bénéfices appartenant au cédant; il peut seulement agir du chef de ce dernier. Ainsi le cessionnaire d'une part d'agent de change ne peut agir directement contre l'agent pour obtenir sa part de béné- lices(3;. Mais il peut agir en exerçant les droits du cédant et en vertu de l'ait. 1 1 66 G. civ. (4). 238. Le cessionnaire de l'associé ne peut pas davantage s'immiscer dans l'administration de la société (3), par exem- ple critiquer l'attribution de bénéfices faite à ce dernier et prétendre que les bénéfices auraient dû lui être remis (6). Cependant il en est autrement si l'attribution a été faite frauduleusement et pour lui nuire (7). Il agira alors en vertu de l'art. 1382 C. civ. 239. Le cessionnaire de la part d'un associé, n'étant pas lui-même associé, ne peut réclamer la communication des livres de la société (8j. Son associé ne peut même pas lui déléguer ce droit, qui est personnel (9). Le cessionnaire ne peut pas davantage critiquer les actes de la société (,0), à moins qu'ils ne soient le résultat d'un con- cert frauduleux dirigé contre lui (n). ' Paris. 14 janv. 1893, S., 9i. 2. 269 (motifs). Paris, 25 fév. 1893, Gaz. Pal., 93. 1. 576. l 'aris, 8 juiil. 1893, Loi, 26 déc. 1893. Paris. 8 juill. 1893. précité. Hue, XI, n. 96. • ' Paris, 8 juill. 1893, précité. - Paris, 7 déc. 1892, Gaz. Pal., 93. 1, 2e part., p. 18. — Paris, 14 janv. 1893, i. 2. 299. — Paris, 25 fév. 1893, Gaz. Pal., 93. 1. 576. — Lyon-Caen et Reuault, II, n. 271 ; Hue, XI, n. 96. Paris. 14 janvier 1893, précité. Paris, 7 déc. 1892, précité. 148 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 11 ne peut exercer les actions de son cédant que dans les limites où les créanciers de ce dernier peuvent le faire par application de l'art. 1166 ('). Les actions sociales ne lui appartienent pas (2). Réciproquement, aucune obligation contractuelle ne lie le cessionnaire envers la société; cependant, les droits conférés à un tiers par l'un des associés permettent aux autres asso- ciés de réclamer à ce dernier et au tiers des dommages-inté- rêts s'ils leur nuisent, en vertu de l'art. 1382 C. civ. Tel est le cas où un colocataire dune chasse confère à un tiers le droit de chasser (3). 240. L'acquéreur a le droit de se faire rembourser par son vendeur tous les bénéfices touchés par ce dernier (*). 11 peut même, en sa qualité de créancier de son vendeur, faire saisie- arrêt des bénéfices dus à ce dernier. Réciproquement il supporte" toutes les pertes. Il a donc l'obligation de les rembourser à son vendeur si ce dernier les a supportées (5). De môme pour les dettes (6). II peut même être actionné par les coassociés ou par les créanciers de la société, exerçant les droits du vendeur, leur débiteur direct. Il doit aussi rembourser h son cédant la perte causée à celui-ci par l'insolvabilité de ses associés ('•). Le cessionnaire qui n'est pas agréé par les co-associés du cédant ne peut, de ce chef, exercer une action en garantie contre ce dernier (8), car il devait savoir que ce consente- ment était nécessaire. 241. Vis-à-vis des tiers, l'associé qui a cédé sa part n'est dégagé que des dettes sociales postérieures à la signification de la cession (9). (») Trib. corn. Seine, 14 déc. 1891, Gaz. l'ai., 92. 1. 407. — Hue, XI, n. 96. (s) Paris, 25 fév. 1893, précité. (3) Trib. com. Troyes, 19 nov. 1889, Gaz. Pal., 90. 1. 75 (pour l'action des asso- ciés contre le tiers). (*) Troplong, II. n. 762 ; Duvergier, n. 380; Pont, n. 627 et 628 ; Guillouard, n. 263; Houpin, I. n. 99. (5.6.-) Mêmes auteurs. (8) Lyon, 21 juil. 1892, Gaz. Pal., 92. 2. 733 (surtout si la cession est faite ai;.v risques et périls du cessionnaire). 3 Douai, 18 juin 1883, sous Cass. req., 2 juil. 1884, S., 86. 1. 169. IlLIKAIÏ SOCIAL 149 Il peste tenu des dettes antérieures ('). Toutefois la clause contraire peut être insérée dans L'acte de société . El cette clause est opposable de plein droit aux tiers, sans qu'il doive en être fait mention dans le contrat passé avec eux ('). Vis-à-vis de ses co-associés, le cédant reste tenu même des dettes postérieures (*). II. Retrait social. 242. Le contrat social porte fréquemment que si l'un des associés trouve à vendre sa part, la société se réserve un droit de préférence, c'est-à-dire la faculté d'acquérir elle-même cette part; c'est ce qu'on appelle le retrait social, fort impropre- ment, puisque ce droit consiste aussi bien à acquérir directe- ment de l'associé sa part qu'à reprendre l'acquisition faite par un" tiers. Le contrat peut déterminer les conditions sous lesquelles la société a le droit d'acquérir cette part, le poirvt de savoir si l'associé doit notifier son désir de vendre, etc. Ces clauses sont obligatoires (5). Si le contrat est muet sur ces conditions, les tribunaux décident si la société a exercé son droit dans un délai suffisant pour qu'elle ne puisse pas être réputée y avoir renoncé (8) et si la société a été suffisamment informée (7). L'avis peut être donné par l'associé dans une forme quel- conque, même verbalement (8). 1 Douai, 18 juin 1883, précité. — Trib. corn. Albi, 15 juil. 1892, Journ. des soc, 92. 447. — Lyon-Caen, Sole, S., 69. 2. 105. (») Paris, 28 janv. 1868, S., 69. 2. 105. — Trib. corn. Albi, 15 juil. 1892, précité. — Lyon-Caen, Sole, S., 69. 2. 105; Beudant. Rev. crit., XXXIV, p. 149; Aubry et Rau, IV, p. 559, §381. 1 Paris, 28 janv. 1868, précité. — Conlrû Douai, 18 juin 1883, précité. — Lyon- Caen, loc. cil. il) Contra Trib. com. Albi, 15 juil. 1892, précité. ' I iass., 17 avril 1834, S , 34. 1. 276. — Douai, 10 janv. 1839, S., 39. 2. 495. — • iuillonard, n. 256. 6, (iuillonard, n. 256; Houpin, I, n. 98. 1 "luillouard, n. 256; Houpin, loc. cit. 8; Douai. 10 janv. 1839, S., 39. 2. 495. — Pont, n. 610 s.; Laurent, XXVI, n. 334; Guillouard, n. 256. 150 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 243. Le retrait social peut évidemment être exercé contre l'aliénation, même si elle est déguisée sous la forme d'un autre acte ('). Mais il ne peut être exercé contre l'acte par lequel l'associé s'associe lui-même à un tiers (s), puisque ce tiers reste étran- ger à la société. 11 ne peut être exercé davantage contre le tiers auquel un associé donne sa part en nantissement (3). 244. En dehors d'une convention, les associés ne peuvent exercer le retrait social. On ne pourrait soutenir le contraire qu'en appliquant à la société l'art. 841 C. civ., relatif au retrait successoral. Encore ce texte ne permettrait-il aux associés d'opérer le retrait qu'après la dissolution de la société, et pour éviter l'accès du cessionnaire au partage. Mais l'art. 841 n'est pas, malgré le renvoi fait par l'art. 1872 aux règles du par- tage de succession, applicable en matière de société ('). §111. Hypothèque. 244 bis. Si la société est une personne morale, l'associé, qui n'a qu'un droit mobilier, ne peut hypothéquer les immeubles sociaux (3). xVu contraire, si la société n'a pas de personnalité, l'associé, comme tout copropriétaire indivis (6), peut constituer sur ces immeubles une hypothèque dont le résultat est soumis au partage. En revanche le membre d'une société pourvue de la per- sonnalité peut constituer un gage sur sa part sociale comme sur tout droit mobilier (7). (') Cass., 24 nov. 1856, S., 56. 1. 516, D., 56. 1. 429. — Guillouard, n. 257. (*) Pont, n. 612; Laurent, XXVI, n. 336; Guillouard, n. 257. (») Cass., 24 nov. 1856, S., 57. 1. 516, D., 56. 1. 429. — Rouen, 2 janv. 1847, S., 48. 2. 660, D., 51. 2. 232. — Pont, n. 612; Laurent, XXVI, n. 336; Guillouard, n. 257. (*) V. notre TV. des suce, 2« éd., III, n. 2582 et les autorités qui y sont citées. — V. aussi Arnlz, IV, n. 1320; Hue, XI, n. 135. ») Thaller, n. 312. («) V. notre Tr. des suce, 2« édit., III, n. 3297, 3333 s. 7) Thaller, loc. cit. RÉPARTITION DES BÉNÉFICES KT PERTES 151 SECTION IV RÉPARTITION DES BÉNÉFICES ET DES PERTES g 1. Priticipes généraux sur la répartition des perlas et des bénéfices. 245. Après le prélèvement des sommes nécessaires à l'ac- quittement des dépenses sociales, le surplus est réparti entre les associés à titre de bénéfices. Il arrive souvent d'ailleurs que certains des associés figurent eux-mêmes parmi les personnes entre les mains desquelles sont payées les dépenses sociales. Ainsi nous avons déjà fait remarquer que si l'un des asso- ciés a t'ait un prêt à la société, ou y a versé une somme en compte-courant, il doit, jusqu'à concurrence du prêt ou du compte-courant, être considéré comme un créancier ('). Il peut donc, comme tout autre créancier, prélever les intérêts et, lors de l'échéance du capital, les sommes p/êtées avant la répartition des bénéfices. 246. On décide généralement que les intérêts des sommes avancées par un associé à la société courent de plein droit (*). 247. L'associé n'a pas d'action solidaire contre ses coasso- ciés pour les avances qu'il a faites dans l'intérêt de la société (3). 248. I) peut être convenu que les associés ou certains d'entre eux prélèveront mensuellement une somme déter- minée pour leur travail. Ces prélèvements sont de véritables salaires; le juge peut les déclarer insaisissables en tout ou en partie, à raison de leur caractère alimentaire (4). Nous avons dit également qu'un associé peut remplir vis- à-vis de la société le rôle de vendeur ou de bailleur (5). (') V. supra, n. 30 et 216. (') V. supra, a. 216. (») Cass., 16 fév. 1874, S., 74. 1. 301. — Cass. civ., 17 juil. 1889, S., 91. 1. 3'.'i. — Ruben de Couder, v<> Soc. en nom collectif, n. 420 s. ; Pont, I, n. 426 ; LaurenU XXVI, n. 280: Guillouard, n. 170. v*> Paris, 5 mars 1895, S., 96. 2. 139, D., 95. 2. 448. (8) V. supra, n. 153. 132 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 2 49. Les sommes et valeurs attribuées à un associé comme administrateur, gérant ou directeur de la société lui sont allouées à titre de louage d'ouvrage et non d'attribution de bénéfices ('). Les sommes et valeur attribuées comme prix de denrées sont un prix de vente et non une attribution de bénéfices (*). Mais il en est autrement de la part de bénéfices attribuée en rémunération d'un apport d'industrie (3). 250. On a décidé que le juge des référés peut statuer sur les prélèvements mensuels stipulés dans l'acte de société, par la raison que ce sont des appointements et non des parts de bénéfices ['). 251. Le partage doit s'appliquer tant aux bénéfices qu'à la perte (3). L'art. 1832 ne parle à la vérité que de la participa- tion aux bénéfices, parce qu'il définit la société en partant du point de vue auquel se placent les parties elles-mêmes lors- qu'elles contractent (6) ; elles s'associent pour faire un béné- fice; c'est là le but unique qu'elles poursuivent, mais elles ne l'atteignent pas toujours; cette observation a été faite aux travaux préparatoires (7). (') Sol. de la régie, janv. 1873, citée par Garnier, Ré/>. gèn. de l'enreg., v° I»>p. direct sur le revenu, n. 35 'qui en conclut exactement qu'elles ne sont pas passi- bles de la taxe sur le revenu établie par l'art. 1er (ic |a |0j du 29 juin 1872, sur les •< revenus et tous autres produits » des paris sociales). — Wabl, Note, S., 93. 1. 433. (2) Trib. civ. Cognac. 26 janv. 1875, Joum. de l'enreg., art. 20120, Rép. pér. de l'enreg., art. 4371 (même conclusion). — Wahl, loc. cit. ») Cass. civ., 26 avril 1893, S., 93. 1. 433. — Wabl, Note, S., 93. 1. 433. — L arrêt précité admet cependant que s'il est convenu que cette part atteindra un minimum déterminé à prélever sur les frais généraux, il y a jusqu'à concurrence de ce minimum louage d'ouvrage. L'affaire avait trait à l'impôt sur le revenu; la régie elle-même convenait que jusqu'à concurrence de ce minimum les sommes allouées constituaient le prix d'un louage d'ouvrage et écbappaient à l'impôt (V. les notes qui précèdent). La cour de cassation, sans y réflécbir, a donné à la régie acte de cette concession, qui n'est pas justifiée ; en effet il est faux que, comme le prétendait la régie, ce minimum, étant pris sur les frais généraux, échappait aux risques sociaux; par cela même que l'attribution est stipulée au profit d'un associé comme tel en échange de son apport, elle subit le sort de toutes les attri- butions de celte nature et ne peut avoir pour résultat de lui donner un droit de préférence sur les créanciers de la société. ') Paris, 5 mars 1895, Gaz. Pal., Table, Ie' sem. 1895, v° Référé, n. 6 et 7. t5) Guillouard, n.78. (6) V. supra, n. 9. t7, Fcnel, XIV, p. 405 el 419. RÉPARTITION l>K.s BÉNÉFICES ET PERTES 153 25L. La pari de chaque associé dans le bénéfice et dans la perte esl fixée par la convention des parties ; les parts peuvent donc être inégales ('). L'art. 1853 donne, en ne fixant la répartition des bénéfices et des pertes que si l'acte de société est muet, implicitement celte solution : elle dérive, au surplus, des principes el de la tradition (*) ; les travaux préparatoires la consacrent (3). Si le contrat ne détermine (jne la répartition des bénéfices, la répartition des pertes a lien dans la même proportion (*). Un doit, en effet, supposer que les parties ont adopté cette solution d'équité et que, si elles ne sont pas prononcées sur elle, c'est qu'elles n'ont pas songé à l'éventualité d'en- treprises malheureuses. Telle était, du reste, la règle admise dans l'ancien droit. 253. La clause qui répartit inégalement les pertes doit être observée d'une manière absolue, même si les apports des associés ont été égaux et sont perdus (5) ; il n'y a pas lieu de décider que jusqu'à concurrence du montant de ces apports les pertes doivent être réparties également' En effet, les apports suivent le sort de la société elle môme; une fois perdus, ils ne peuvent entrer en ligne de compte pour la répartition des pertes; du reste, la clause en face de laquelle nous nous plaçons est absolue. Réciproquement, la clause qui répartit également les pertes doit être observée d'une manière absolue, même si les apports des associés ont été inégaux (°); il n'y a pas lieu de décider que les parties doivent d'abord contribuer aux perles pour une V1) Guillouard, n. 218 ; Hue, XI, n. 80. («) bornât, liv. I, lit. VIII, sect. 1, §6. ',') Rapport du tribun Boutteville, Fenet, XIV, p. 410. 4) Amiens, 27 mai 1840, S., 42. 2. 213. — Gand, 7 déc. 1895, l'as., 96. 2. 265. — Duveigier, n. 240 ; Aubry et Rau, IV, p. 556, § 380, noie 9; Pont, II, n. 434; Laurent, XXVI, n. 281; Arntz, IV, n. 1295; Lyon-Caen et Renault, II, n.47: Guillouard, n. 219; Hue, loc. cit. ) Cass., 11 janv. 18rt5, S., 65. 1. 12, D., 65. 1. 9. — Duvergier, n. 15, 220 et 278; Aubry et Hau, IV, p. 557, g 380, note 10; Laurent, XXVI, n. 283; Guillouard, n. 220 bis. i6) Cass., 27 mars 1861, .S., 61. 1. 315, D., 61. 1. 61. — Cass., 11 janv. 1865, pré- cité. — Aubry et Rau, IV, p. 557, § 380, note 11; Pont, n. 460; Laurent, XXVI, n. 284; Guillouard, n. 221. 154 DU CONTRAT DK SOCIÉTÉ somme inversement proportionnelle h leur apport; l'opinion contraire équivaut à autoriser le prélèvement des apports, alors qu'en cas de perte des apports eux-mêmes, rien n'existe plus qui puisse être prélevé. 254. Il nous paraît évident que toutes les clauses qui tixent la paît des associés dans la perte sont de plein droit, à condition d'être valables, opposables aux tiers sans qu'il soit nécessaire de les rappeler dans les contrats passés avec ces derniers ('). En elFet, l'art. 18oo, en prohibant certaines clauses, édicté implicitement la validité absolue de toutes les autres, et ce serait les soumettre a une condition arbitraire que d'exiger qu'elles soient rappelées dans les contrats passés avec les tiers. La jurisprudence s'est cependant affirmée en sens contraire (*) ; elle décide, par exemple que la clause limitant la responsabilité d'un associé à ses apports est exclusivement opposable aux tiers qui en ont eu connaissance par le contrat passé avec eux-mêmes. Cette opinion a un grave tort qu'on n'a pas aperçu : elle sup- prime radicalement les clauses qui modifient la responsabilité, elle les réduit à l'état de lettre morte; elle exige en eifet que cette clause soit stipulée à nouveau dans tous les contrats pas- sés avec les tiers et il est clair que cette dernière stipulation suffirait, alors même que le contrat de société ne contiendrait aucune indication sur la limitation de responsabilité. L'argument qui séduit la jurisprudence c'est que les tiers ont le droit de compter sur la responsabilité proportionnelle des associés, établie par l'art. 1863 (3). Cet argument nous parait être d'une valeur médiocre; l'art. 1863 ne pose pas un principe absolu, il présume une convention lorsqu'il n'y a pas de convention expresse, et la preuve en est que des modifications à ce texte sont autorisées. Comment d'ailleurs les tiers pourraient-ils se plaindre? Lorsqu'ils passent un contrat avec des associés, qui disent agir au nom d'une (•) Labbé. Note, S.. 84. 1. 361. (*j Cass., 21 fév. 1883, S., 84. 1. 361, D., 83. 1. 217. — Cass., 2 juilt. 1884. S., 86. 1. 169. — Lyon, 8 août 1873, S., 74. 2. 105. — Douai, 23 mars 1878, S., 78. 2. 305. — Guillouard, n. 242. I») Cass., 21 fév. 1883, précité. — Guillouard, loc. cit. RÉPARTITION DES BÉNÉFICES KT PERTES 155 ^.»ii»''l»'-. la prudence la plus élémentaire leur commande de m faire représenter l'acte de société pour s'assurer de son existence »■( juge puisse y déroger. > art. 1853 al. 1). « Les juris- consultes romains, dit Pothier, ont donné à cette espèce de convention le nom de société léonine, par allusion à la fable du lion qui, ayant fait une société avec d'autres animaux pour aller à la chasse, s'empara seul de toute la proie » (3). Il est de l'essence de la société que chaque associé puisse espérer avoir sa part du profit en vue duquel le contrat a été formé. Aussi cette clause était-elle déjà interdite à Rome (') et dans l'ancien droit (5). Cette clause est nulle même si l'associé qui est privé des bénéfices est également déchargé des pertes (6), car la loi ne distingue pas; au surplus, cette clause est, aussi bien que celle qui n'affranchirait pas des pertes le même associé, contraire 1 Houpin, I, n. 113. I5) Cass. req., 16 nov. 1886, S., 88. 1. 423, D., 87. 1. 391 (l'associé s'était tenu éloigné de la société pendant son service militaire, qui avait duré près de cinq ans). — IIuc, XI, n. 5. ! N. 12. — V. Argou, liv. III. chap. XXXII, p. 322. 1 L. 29, § 2, D., Pro soc, 17. 2. ») Pothier, n. 12. (6i Pont, n. 438; Laurent. XXVI, n. 285; Guillouard, n. 233. CLAUSES MH LES BÉNÉFICES ET PEBTE8 163 à l'essence de la société; enfin, comme on ne songe pas, en entrant en société, aux éventualités de perte, elle ne diffère l>;i^ sérieusement, au point de vue de l'intention des parties, de cette dernière clause. 267. A la clause dont parle l'art. 1855 doit être assimilée celle par laquelle l'un des associés est privé de tout droit aux bénéfices ('). Telle est notamment celle qui lui attribue des intérêts uniquement fixes (2). 268. 11 ne faut pas, du reste, accepter d'une manière absolue la solution donnée par la loi. On n'a pas voulu inter- dire à l'un ou a plusieurs des associés de renoncer aux bénéfices dans le but de faire une libéralité à leurs coasso- ciés (3), car on est parti de l'idée que ceux des associés qui renoncent à leur part dans les bénéfices obéissent à la pres- sion exercée sur eux, et, en cas d'intention libérale, cette pression n'existe pas. Ainsi d'une part la société prétendue léonine est valable comme donation si ceux des associés qui renoncent à leur part clans les bénéfices obéissent à une intention libérale ('); cette intention doit être démontrée. Mais d'autre part une donation apparente peut déguiser une société léonine et alors elle est nulle. 269. L'art. 1855 est limitatif. Toutes les stipulations qu'il ne prohibe pas demeurent donc permises, en vertu du prin- cipe de la liberté des conventions. Ainsi la part qui est attribuée à un associé dans le gain et dans la perte peut ne pas être exactement proportionnelle au montant de ses apports (5). Toutefois, si on attribue à l'un des associés une part de bénéfices presque nulle, il va sans dire que la clause est illicite aussi bien que si cet associé était entièrement privé des bénéfices (6). O Lyon, 22 mai 1896, Mon.jud. Lyon. 13 oct. 1896. — Eck, loc. cil. * V. supra, a. 287. .'• Eck, loc. cil. 1 Eck, loc. cit. 5 Argou, liv. III, cli. XXXII, p. 322; Durantun, XVII, n. 422; Aubry et Hau, IV, i>. :>',:>. § 377, note 11; Pont, n. 464; Laurent, XXVI, n. 287; Guillouard, n. 23*; Houpin, I, n. 115; Eck, loc. cit. (6) Laurent, XXVI, n. 287. 1GÏ DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ De même, il n'est pas nécessaire que chaque associé soit appelé à supporter dans la perte une part égale à celle qui lui est attribuée dans le gain ; ainsi on peut convenir que l'un des associés aura droit à la moitié du gain et ne supportera que le quart de la perte : ce qui ne signifie pas que cet associé pourra réclamer la moitié du profit résultant des bonnes opérations et ne devra supporter qu'un quart de la perte occasionnée par les mauvaises, mais bien que lors des répartitions périodi- ques cet associé aura droit à la moitié du bénéfice résultant de l'ensemble des opérations, si la société a prospéré, et ne devra supporter qu'un quart de la perte, si la liquidation de la société l'ait apparaître un déficit. En un mot, la convention qui assigne aux associés des parts inégales dans le gain et dans la perte doit être appliquée au bénéfice net ou à la perle nette ('). C'est déjà ce qu'on admettait en droit ro- main (*) et dans l'ancien droit (3). A cette même condition on peut convenir que l'un des associés participera au gain et non à la perte (4). 270. Ces diverses clauses peuvent déguiser une libéralité et faire de la société un contrat à titre onéreux mélangé de donation (5). 271. Il peut être stipulé que tous les bénéfices de la société appartiendront au survivant des associés (6). Cette clause, qu'il faut tout d'abord distinguer de la tontine, en ce que, dans celte dernière, les parties ne se proposent pas la réalisation de bénéfices (7), ne contrarie pas l'art. 1835; sans doute, on pourrait croire qu'elle est englobée dans les termes généraux 1 Laurent, XXVI, n. 294; Guillouard, n. 2-45; Iloupin, loc. cit.; Hue, XI, n. 81 ; Lck, loc. cil. -) S 2, lnst., De soc, III, 25. (3J Doinat, liv. I, tit. VIII, sect. 1, n. G: Polhier, n. 20; Argou, loc. cil. (*) Argou, loc. cil. '> Yangerow, Lehrb. d. PandekL, III. S 651, note 4; Windscheid, Ibid., II, § 405, notes 15, 17; Sintenis, Gem. Civil/ ec/it, II, § 121, note 55. («) Rouen, 31 juil. 1867, sous Cass., 17 août 1868, S., 69. 1. 22. — Gand, 25 juil. 1879, Joum. dr. int., IX, 1882, p. 642. — Troplong, II, n. 646; Pont, n. 441 s.: Lyon-Caen et Renault, II. n. 44 ; Guillouard, n. 236; Boiieux, VI, p. 319; Pardes- sus, Cours de dr. comm., III, n. 997 ; Lyon-Caen, Note. S., 88. 2. 73 ; Houpin, loc. cit. — Contra Duvergier, n. 268 ; Laurent, XXVI, n. 288; Hue, XI, n. 81. "i V. supra, n. 10. i l.\i -l S SI H il - BÉNÉFICES Kl PERI I - !<)."> de cette disposition, mais il ne faut pas oublier que l'art. 1855 a voulu simplement prohiber la société léonine, celle ■ m l'un do ;isVh -irs iihiisc de son influence sur I ;mi t if pour v.' faire attribuer tous les bénéfices; ce n'est pas évidemmenl le cas i'i. Lyon-Caen et Renault, loc. cil.; Guillouard, loc. cit. 166 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ associés, la liquidation de la société ne sera faite qu'un an après les soins de l'associé survivant, qui, dans cet inter- valle profitera des bénéfices et supportera les pertes, ne déroge pas à l'art. 1855 (') ; elle a pour but de prolonger la gestion des affaires sociales jusqu'à la fin des entreprises en cours, et ne prolonge pas la société, laquelle est dissoute par le décès. II. Clauses relatives à la perle. 275. « // en est de même de la stipulation qui affranchirait » de toute contribution aux pertes, 1rs sommes ou effets mis » dans le fonds de la société pur un ou plusieurs des associés » (art. 1855 al. 2). Cette stipulation est donc prohibée comme la précédente. En la prohibant, le code a rompu avec la tradition. En droit romain, cette clause était valable, à la condition cepen- dant que l'apport de l'associé dispensé des pertes fût supé- rieur à l'apport des autres associés (2). Dans l'ancien droit, on admettait que certains associés pouvaient être dispensés des pertes parce que ce privilège pouvait être compensé par la supériorité de leurs apports ("). Le code a considéré cette clause comme léonine (*). Cela est difficile à comprendre, car il se peut qu'une différence dans les apports justifie une dif- férence de traitement relativement à la perle. On a aussi prétendu que le code a craint que la clause en question ne déguisât un prêt usuraire (5), mais cette clause peut fort bien s'expliquer sans prêt usuraire ; du reste le code civil ne limi- tait pas le taux de l'intérêt et au contraire l'ancien droit, qui admettait la validité de notre clause, limitait ce taux. Enfin on a dit que les associés ne seraient pas, en présence d'une clause de ce genre, suffisamment intéressés à la bonne gestion de la société (6) ; mais si la loi avait obéi à cette pen- (') Gass., 17 août 1868, S., 69. 1. 22. — Guillouard, n. 233. '-. L. 29, g 1, D., /Vosoc.,17. 2. I1) Domat, liv. I, lit. VIII, sect. I, § 9 ; Pothier, n. 20, 24, 25 et 75. (*) Discours de Gillet au corps législatif, Fenet, XIV, p. 422 ; Guillouard, n. 239. |5) Laurent, XXVI, n. 290; Delvincourt, III, p. 454, noie 4 ; Pont, n. 451. - Contra Pianiol, Note, D., 90. 1. 409. (6) Lyon-Caen et Renault, II, n. 40", Pianiol, loc. cil. CLAUSES SUH LES BÉNÉFICES El PERTES 167 tée, eHe aurait restreint la nullité au cas ou les apports de l'associé gérant sont affranchis de la perte. 276. En vertu de l'art. 1855, on décide que la clause qui garantit par une hypothèque le remboursement d'un apport est nulle (*). Mais c'est, à notre avis, aller beaucoup trop loin; ce n'est pas affranchir un apport de la perle que d'assu- rer son remboursement. 277. La seule clause interdite est celle qui soustrairait l'apport aux pertes d'une manière absolue; celle qui le sous- trairait aux pertes dans une hypothèse convenue (a), par exem- ple dans le cas où la dissolution de la société arriverait par un événement déterminé, est valable (3); cela résulte du langage de l'art. 1855 et de son but. Mais l'art. 1855 s'applique alors même qu'une partie seu- lement de la rémunération de l'apport est soustraite aux fluctuations sociales. Il en est ainsi de la clause d'après laquelle l'associé doit toucher, outre sa part dans les béné- fices, une somme fixe, qui lui sera due même dans le cas où la société ne ferait pas de bénéfices (*). , 278. La stipulation qui affranchit des pertes l'un des asso- ciés est nulle même si, par compensation, l'autre ou les au- tres associés ont une part plus forte dans les bénéfices (5). L'art. 1855 s'exprime en termes absolus; du reste, sans être sans doute aussi préjudiciable à l'associé chargé des pertes que la clause qui n'est pas corrigée par la même compensa- tion, cette clause peut être léonine. Pothier, il est vrai, en admettait la validité; il permettait à un associé de prendre les trois quarts dans le gain et toute la perte, à la condition que « l'espérance du gain se trouvant pour le moins en rai- son double du risque de la perte, le prix de l'espérance du (') Bordeaux. 3 fév. 1890, Rec. de Bordeaux, 90. 1. 225. («) Guillouard, n. 237. (3) Aix, 4 nov. 1886, S., 88. 2. 73. — Lyon-Caen, Xole, S-, 88. 2. 73. (*) Angers, 10 mai 1897, Gaz. l'ai., 97. 2. 677. Ciel arrêt paraît cependant don- ner, sur un autre point, une solution qui contredit la même idée . (s) Cass., 16 janv. 1867, S., 67. 1. 173, D., 67. 1. 153. — Paris, 15 avril 1883, L)., 84. 2. 122. — Aubry et Rau, IV, p. 545, § 377. note 10; Pont, n. 455 s. ; Lau- rent, XXVI, n. 293: Lyon-Caen et Renault, II, n. 40: Guillouard, n. 243. — Con- tra Troplong, II, n. 653. J68 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ quart dans le gain qu'il cède équipolle au prix du risque de sa moitié dans la perte dont il se charge » ('). Mais l'art. 18oo, nous le répétons, est trop général pour autoriser cette restriction. On dit, il est vrai, que l'associé qui se charge de la perte moyennant une part plus forte dans les bénéfices devient un assureur, et que, dès lors, il se mêle à la société un contrat d'assurance valable; cet argument ne répond pas davantage à l'objection tirée de l'art. 1855. 279. Ce que la loi défend, c'est de convenir qu'un associé retirera son apport intact d'une société dont les opérations se soldent en définitive par un déficit ; mais notre texte ne s'oppose nullement à ce que l'on convienne que la part d'un associé dans la perte sera limitée à son apport, ou, en d'au- tres termes, que cet associé ne contribuera pas aux pertes au-delà de sa mise (*). De même est valable, la clause qui fait supporter à l'un des associés une part dans les pertes moindre qu'aux autres associés (3), à moins que cette part ne soit absolument insi- gnifiante (*). 11 a même été décidé par la cour de cassation qu'un associé peut céder sa part de bénéfices à ses coassociés moyennant une somme a forfait, si cette somme est payable à terme et si la situation de la société peut faire craindre qu'elle ne soit pas payée (s). Si cette solution est exacte, c'est que l'apport n'est alors autre chose qu'un prêt; le motif invoqué par la cour de cassation nous parait donc erroné. V N. 23. - Cass. req.. 5 dée. 1887, S., 90. 1. 467 l'associé dont l'apport consiste dans l'abandon d'une partie de la somme qui lui est due par ses coassociés peut stipu- ler qu'il lui sera attribué un tiers des bénéfices). — Paris, 15 mars 1866, S., 66. 2. 235. — Paris, 27 juill. 1869, S., 70. 2. 47. — Pont, n. 452; Laurent, XXV1, n. 292; Guillouard, n. 242: Houpin, I. n. 117; Hue, XI, p. 83.— V. cep. Cass., 21 fév. 1883, S., 84. 1. 361, D., 83. 1. 217 (cet arrêt exige que les décharges de ce genre soient indiquées dans les contrats passés par les associés asec les tiers. V. sur ce point stti>ra. n. 25 i . 3) Cass. req.. 9 juil. 1885, S., 88. 1. 477, D., 86. 1. 301 (motifs). — Duranton, XVII. n. 417: Aubry et Rau, IV, p. 545, g 377. note 11; Guillouard, n. 240; Hou- pin, loc. cit. «i Cass., 11 avril 1837, S., 37. 1. 275.— Guillouard, n. 240. ■) Cass. req., 9 juil. 1885, précité. CLAUSES -il; LES BÉNÉFICES M PERTES 100 A plus forte raison, peut-on valablement convenir du mode de règlement de In part des associés dans les pertes ' . L'art. 1864 prévoil une clause de ce genre Lorsque l'apport de l'un des associés consiste dans la jouissance d'un capital, il peut être valablement stipulé que cel associé ne participera qu'aux bénéfices et non pas aux pertes; car il esl exposé, en réalité, par l'absence de bénéfi- ces, à perdre son apport tout entier [*). 280. La plupart des auteurs disent que la disposition de l'art. 1855 al. 2 n'est pas applicable à l'associé qui n'a apporté que son industrie dans la société * . On pourrait donc vala- blement convenir qu'il sera affranchi de toute contribution aux pertes, tandis que cette convention ne serait pas valable pour l'associé dont l'apport consiste dans des sommes ou des effets arg\ art. 1855 al. 2 . A notre avis, il y a là un malen- tendu. La situation de l'associé qui n'a apporté que son industrie à la société nous parait être exactement la même, au point de vue de la contribution aux pertes, que celle de l'associé qui a apporté une somme ou des etl'ets. L'un comme l'autre peut être dispensé de contribuer aux pertes au delà de sa mise, et ne peut pas être dispensé d'y contribuer jusqu'à concurrence de sa mise. — Mais alors, dira-ton, pourquoi la loi n'a-t-elle formulé le principe qu'à l'égard de l'associé dont l'apport consiste dans des sommes on effets (art. 1855, al. 2)? Par une raison bien simple : c'est qu'il ne peut pas être question, pour l'associé qui n'a apporté que son industrie, de la retirer à la dissolution de la société, lorsque le budget social est au-dessous du pair : par la force même des choses, cet associé perdra son apport, en ce sens qu'il se trouvera avoir fourni son industrie à la société en pure perte, et la loi a jugé inutile de le dire. — Le langage vicieux que nous venons de signaler était déjà employé dans les travaux ' Aix. 20 juil. 1896, sous i^ass. req.. 10 janv. 1898. D., 99. 1. 162. ' Y. supra, n. 255 s. Cass. req., 20 déc. 1S93, S., 94. 1. 484, D.. 94. 1. 224. — En supposant que ce soit là une société. — V. infra, n. 693 s. (*) Troplong, II, n. 654 s. : Duvergier, n. 257 ; Aubry et Rau, IV, p. 546, § 377, note 53; Pont, n. 452 s. ; Laurent. XXVI, n. 291 et 292 ; Lyon-Caen et Renault, II, n. 40 ; Guillouard, n. 241 : Houpin, I, n. 118. 170 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ préparatoires ('). Des codes étrangers le reproduisent (2). La situation est à peu près la même pour l'associé qui n'a* apporté que son crédit a la société : peut-il être question de l'autoriser à retirer son apport, en cas de faillite ou de décon- fiture de la société? Evidemment non. Il contribuera donc nécessairement aux pertes jusqu'à concurrence de sa mise, en ce sens que son crédit pourra se trouver plus ou moins forte- ment ébranlé par le désastre de la société. Mais on peut con- venir qu'il n'y contribuera pas au delà, c'est-à-dire que, dans ses rapports avec ses associés, ceux-ci supporteront seuls l'excédent du passif de la société sur son actif. 281. Lorsqu'il est convenu que le prix de l'apport d'un associé lui sera remboursé par la société, on ne peut soutenir qu'il y ait là un apport soustrait aux pertes (:1); car, comme nous l'avons montré, ce prétendu associé ne fait pas réelle- ment partie de la société. Nous avons dit, au contraire, que si le prix de tous les apports doit être remboursé par la société, les apporteurs sont des associés; mais, quoique le contraire ait été décidé (v), leurs apports n'échappent pasaux pertes et la société n'est pas nulle (b), car les apports consistent dans l'excédent de valeur de l'immeuble sur le prix et ils sont exposés aux fluctuations de la société. 282. Lutin il faut remarquer que la clause qui affranchit un apport de la perte est valable si cet apport est en réalité un prêt (6), car il est de l'essence du prêt que les mauvaises fortunes de la société n'influent pas sur lui. Aussi admettons-nous que cette clause est toujours valable si elle est stipulée au profit de l'associé commanditaire ('), ') Discours du tribun Gillet au corps législatif, Kenet, XIV, p. 422. (*) Espagne, G- civ., art. 19(31. (3) V. cep. Paris, 26 nov. 1885, S.. 87. 2. 17 (motifs). i4) Paris, 26 nov. 1885, précité. 5 Lyon-Caen, Noie, S., 87. 2. 17. («) Laurent, XXVI, n. 293; Guillouard. n. 245. (7) Trib. civ. Lyon, 12 juil. 1892, cité par Tballer, loc. cit. inf'rct (mais ce jugement est basé sur un motif erroné: c'est que la clause équivaut à mettre son apport en jouissance seulement dans la société1. — V. cep. Douai, 26 avril 1888, Ann. clr. corn., 1888. p. 204. — Bonfils, Rev. cril., XXIV, 1895, p. 545; Thaller, Ann. dr. corn., VI, 1892, Docl., p. 298. CLAUSES SUR LES BÉNÉFICES ET PERTES 171 car elle n'a d'autre effel que de supprimer la seule différence qui existe entre la commandite e( le prêt. De même, l'associé peut, en dehors de son apport, valable- ment consentir à la société un prêt qui lui sera remboursable même en cas de pertes ('). Il n'est pas moins certain, comme nous le dirons, que si l'associé ne peut se faire affranchir de la perte par ses coas- sociés, il peut s'en faire affranchir par un tiers, moyennant une prestation qu'il fournira ; c'est un contrat d'assurance dont la validité est certaine (-). 283. Les clauses qui affranchissent un associé de la perte ne sont pas nulles seulement si elles font partie de l'acte de société; elles le sont encore si elles sont contenues dans un acte postérieur (3). La loi ne distingue pas, et même dans le cours de la société on peut craindre qu'un associé ne pro- fite de son influence ou de l'utilité que présente la continua- tion de sa coopération pour se faire consentir des avantages particuliers. 284. Ces clauses sont-elles nulles quand la garanlie fournie à l'un des associés contre la perte émane de l'un de ses co- associés, et non pas de la société? La jurisprudence adopte avec raison l'affirmative (4). Cette solution est exacte même pour l'associé commandi- taire (3), alors cependant que la garantie accordée à ce der- (•) Trib. civ. Seine, 29 juin 1892, Loi, 20 août 1892. (*) V. infra, n. 285. (3) Cass. req., 16 janv. 1807, S., 07. 1. 173, D., 07. 1. 153. — Gass. req., 14 juin 1882, S., 82. 1. 423, D., 84. 1. 222. — Paris, 14 avril 1883, D., 84. 2. 122. — Guil- louard, n. 244. (*) Cass. req., 10 janv. 1807, S., 07. 1. 173, D., 07. 1. 153. — Cass. req., 14 juin 1882, S., 82. 1. 423, D., 84. 1. 222. — Cass. req., 9 juill. 1885 (motifs), S., 88. 1. 477, D., 80. 1. 301. — Cass. civ., 11 juill. 1894, S., 94. 1. 452, D., 94. 1. 531. — Aix, i nov. 1886 (impl.), S., 88. 2. 73. — Douai, 26 avril 1888, Ann. dr. corn., 1888, p. 204 (et cela même si la convention est distincte de l'acte de société). — Lyon, 11 mai 1894, Mon. jud. Lyon, 22 sept. 1894. — Pont, I, n. 488; Delvincourt, III, p. 453; Taulier, VI, p. 352; Duvergier, n. 274; Malepeyre et Jourdain, p. 83; Lau- rent, XXVI, n. 293; Lyon-Caen, Sole, S., 88. 2. 73; Planiol, Note, D., 90. 1. 409; Houpin, I, n. 120. — Contra Troplong, II, n. 053; Boileux, VI, p. 318; Pardessus. Cours de dr. com., III, n. 998; Hue, XI, n. 85. (5) Cass. civ.f 11 juill. 1894, précité. — Douai, 26 avril 1888, précité. — Lyon, 11 mai 1894, précité. — Bonfils, Rev. crit., XXIV, 1895, p. 546. 172 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ nier par la société est licite, car, tandis que clans ce dernier cas la commandite se convertit en prêt, il en est autrement quand la garantie est fournie par les associés. Certains auteurs soutiennent que la garantie de l'un des associés est valable si elle est faite dans un contrat indépen- dant de L'acte de société et nulle dans le cas contraire (!). Cela est inacceptable 285. Mais les promesses de ce genre peuvent être faites par un tiers (■), même par la femme de l'un des coasso- ciés (*); elles constituent alors simplement une assurance; l'art. 1855 n'est pas méconnu, puisque, dans les rapports entre les associés, aucun apport n'est affranchi des pertes. Il importe même peu que les promesses soient faites dans l'acte même de société " . Faites solidairement par un associé et un tiers, elles sont entièrement valables vis-à-vis de ce dernier, les codébiteurs ne pouvant opposer une exception de nullité personnelle à leur codébiteur 286. On a décidé qu'un associé ou la société contractent va- lablement auprès d'une compagnie d'assurances une assurance dont ils payeront les primes et dont le montant, égal à l'apport d'un autre ai — :ié, doit être versé à ce dernier si son apport est absorbé par les dettes et à l'associé ou à la société dans le cas contraire .Cette solution, qu'on a essayé de justifier par l'idée que l'indemnité d'assurance payable à un tiers est répu- 1 Duranton, XVII. n. ils. (') Cass. req., U juin 1882, précité. — Planiol, loc. cil. (a) Aix, 4 nov. 1886, précité. — Douai, 26 avril 1888, précité. — Delvincourt, III. p. 453; Boiteux, VI. p. 319; Duranton, XVII, n. 418: Pardessus, III, n. 998; Pont, n. 458; Lyon-Caen, Noie, S., 88. 2. 73 : Lyon-Caen et Renault, II, p. 34, note 1 ; Planiol. loc. cit.; Houpin, I. n. 120; Guillouard, n.245: IIuc, XI, n. 85. — On a cependant soutenu qu'elles sont nulles si elles sont faites à la même époque que l'acte de société, par ce motif qu'il y a contradiction à courir un risque et à s'assurer contre ce risque, Ann. dr coin., II. 1888, jurisp., p. 205. Cela est, selon nous, inexact : le but de l'assurance est précisément d'assurer une personne contre le risque qu'elle court. ' Douai, 26 avril 1888, précité. 3 Aix, 4 nov. 1886, précité. — Lyon-Caen, loc. cil. 6> Douai, 26 avril 1888. précité. i Cass. civ., 9 juin 1890, S., 90. 1. 305, D.. 90. 1. 409. — Aix. 4 tiov. 1886, S., 88. 2. 73. — Lyon-Caen, Note, S.. 88. 2. 73; Crépon, Sole, S . 90. 1. 305. CLAUSES BUB LES BÉNÉFICES ET PERTES 1 73 lée, d'après la jurisprudence, n'avoirfaitjamais partie du patri- moine «le l'assuré, ne paraît pas exacte ' . car il peste vrai qu'un associé est, par le fait de son coassocié ou u plusieurs administrateurs. La loi prévoit les deux hypothèses et règle les complications qui résulteni de la seconde. Cependant, l'art. 7 de la loi du "27 avril 1838 porte que les sociétés minières doivent, si elles en sont requises par le pré- fet, justifier que les travaux d'exploitation sont soumis à une direction unique. Mais, comme il ne s'agit là que de la direc- tion de l'exploitation, il peut néanmoins y avoir pour la ges- tion divers administrateurs ('); du reste la loi de 1838 n'a exigé l'unité de direction que pour assurer davantage la vie de l'ouvrier; or, à ce point de vue, le nombre des adminis- trateurs chargés de contracter au nom de la société, de pas- ser les marchés avec les fournisseurs ou les acquéreurs, etc., importe peu. Pour la môme raison, il peut, dans ces mêmes sociétés comme dans les autres, ne pas y avoir d'administrateurs nommés, et nous verrons qu'alors ce sont les associés qui administrent. § II. Cessation des pouvoirs des gérants. 294. Gomme la nomination du gérant statutaire est une des conditions de la société, son mandat est irrévocable, ou du moins il ne peut pas être révoqué ad nutuin comme un mandat ordinaire, mais seulement pour cause légitime. Autre est la situation du gérant nommé par un acte posté- rieur à la formation du contrat. C'est un mandat ordinaire qui lui est conféré, et ce mandat peut être révoqué confor- mément aux règles du droit commun. Ces deux solutions, déjà données par Pothier (s), résultent de l'art. 1856 (2e al.), ainsi conçu : « Ce pouvoir ne peut être » révoqué sans cause légitime, tant que la société dure; mais » s'il n'a été donné que par acte postérieur au contrat de » société, il est révocable comme un simple mandat ». Mais il n'y a là qu'une interprétation de la volonté des parties. " Cass., 15 avril 1834, S., 34. 1. o5i >. — Guillouard, n. 364. (*)N. 71. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 12 178 du co.ntiut de société D'une part on peut convenir que le mandat donné par l'acte de société est révocable ('); car évidemment les parties peuvent renoncer à une solution édictée dans leur intérêt. D'autre part on peut convenir que le gérant nommé posté- rieurement sera irrévocable (8), à condition que tous les asso-, ciés non gérants participent à cette clause (3). Car tout mandat peut être déclaré irrévocable. Dans ce cas la révocation ne pourra être faite que pour cause légitime. Nous verrons cependant, en étudiant le mandat, que les administrateurs d'une société anonyme ne peuvent être déclarés irrévocables (4;. 295. Les causes légitimes de révocation sont d'une manière générale les fautes commises dans l'administration, c'est-a- dire l'incapacité et l'infidélité, ou, en d'autres termes, la con- travention aux obligations que le contrat de société, la loi ou la bonne toi imposent au gérant (5). C'est une application de la règle qui autorise la résolution d'une convention pour inexécution des obligations. 296. De qui la révocation doit-elle émaner? Il faut distin- guer suivant qu'elle est possible sans aucun motif à l'appui ou qu'elle suppose un motif légitime. Dans le premiercas. l'intervention du tribunal est évidem- ment inutile (e).Mais on se demande si la volonté de tous les associés est nécessaire. Suivant les uns, la révocation supposerait nécessairement le concours de tous les associés non gérants (7); d'autres estiment que la volonté de la majorité serait suffisante, mais néces- saire \; d'autres encore, s'appuyant sur une interprétation arbitraire de la volonté des parties, disent que la volonté (') Cass., 25 nov. 1872, S., 73. 1. 385. — Troplong, I, n. 669; Duvergier, n. 294; Pont, I, n. 506 et II, n. 1437; Guillouard, n. 133; Lyon-Caen et Renault, II, n.5Û9; Houpin, I, n. 90 et 210. Mûmes auteurs. — Hue, XI, n. 88. (») Guillouard, n. 133. (*) V. notre Tr. des contr. aléal., du mandai, etc., n. 819. • lloupin, I, n. 90; Hue, XI, n. 88. — Gpr. Guillouard, n. 132. ',; i ruiilouard, n. 135. (7) Laurent, XXVI, n. 30»',. [9j Duvergier, n. 293; Aubry et Rau, IV, p. 562, § 382, note 1 ; Guillouard, n. 135; Houpin, I, n. 90. ADMINISTRATION l'Ali DES GÉRANTS 170 d'un seul peut révoquer le gérant nommé par le contrat, mais que lavolontéde la majorité est nécessaire pour révoquer le gérant désigné postérieurement et en exécution d'une clause du pacte social (l); enfin quelques-uns pensentque la révoca- tion pourrait résulter de la volonté d'un seul (*). Nous sommes de l'avis de ces derniers. Le gérant n'a qualité pour adminis- trer qu'autant qu'il représente tous les associés; or il cesse de représenter celui qui a révoqué son mandat; donc il n'a plus alors les pouvoirs nécessaires pour gérer. Si les parties veulent que le consentement de tous ou de la majorité soit nécessaire pour la révocation, il faut qu'elles s'expliquent sur ce point en conférant le mandat; car c'est une dérogation au droit commun, et elle ne saurait par suite être présumée. En vain les partisans de la seconde opinion objectent-ils que dans une société la majorité lie la minorité; cette considération est inexacte en elle-même, elle est, en outre, étrangère à la question, car il s'agit ici d'un acte spécial, le mandat, dont le maintien est subordonné à la volonté des mandants. Il est certain, en tout cas, que l'associé qui invoque l'infidélité ou l'incapacité de l'administrateur peut, sans le concours de ses coassociés, obtenir du tribunal la révocation de l'administra- teur; telle est, en effet, comme nous allons le voir, la solution au cas où l'administration n'est révocable que pour des motifs légitimes; il en est de même, à plus forte raison, quand la révocation n'est pas déclarée être subordonnée à l'existence d'un motif légitime. Dans le second cas, le tribunal seul peut apprécier si le motif de la révocation est légitime (3). Mais la révocation peut-elle être sollicitée par un seul associé ou faut-il le concours de tous ou de la majorité? La première opinion est la plus exacte (*); elle est adoptée même par la plupart des auteurs qui, dans le cas où la révocation dépend de la seule volonté des associés, exigent le concours de la majo- 1 Hue, XI, n. 89. • Duranton, XVII, n. 434: Troplong, II, n. 680; Pont, n. 511. I3) Cass. req.,8 déc. 1890 (motifs), S., 91. I. 68. — Cass. req., 8 mars 1892. S., 96. 1. 509. — (Juillouard, n. 134. Troplong, I, n. 676; Pont, n. 508; Guillouard, n. 134 ; Houpin, I, n. 90; Hue, XI, n. 88. — Contra Duvergier, n. *2'Jo. 180 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ rite d'entre eux. La révocation est ici fondée sur ce que l'admi- nistrateur a méconnu ses obligations, or il était tenu de ces obligations vis-à-vis de tous les associés. Le pacte social peut, d'ailleurs, donner aux associés eux- mêmes le droit de révoquer le gérant pour les causes légi- times qu'ils apprécieront 297. Lorsque le gérant cesse ses pouvoirs par l'expiration du terme fixé, les associés administrent désormais en com- mun -'". Mais divers auteurs pensent qu'en cas de révocation de l'associé nommé par l'acte de société, la société est dis- soute (s). Ils se fondent sur ce que la nomination de ce gérant a été une des conditions du pacte social. Nous n'apercevons aucune relation entre ces deux idées (4); si la nomination du gérant a été une clause du pacte social, il n'en est pas de même de son maintien. L'opinion de ces auteurs est, en outre, contraire à l'etlet ordinaire de la révocation du mandat, car cette révocation a pour seule conséquence de remettre le mandant à la tête de ses affaires. Enfin cette même opinion met les associés dans une cruelle alternative pour maintenir une société peut-être prospère; ils sont forcés de laisser à la tête de cette société un gérant incapable ou infidèle. Cette dernière observation seule démontre qu'en entrant en société les associés n'ont pas entendu subordonner le maintien du pacte social au maintien du gérant ; leur volonté, étant cer- taine, doit être observée. Nous admettrons donc que les asso- ciés prendront en commun la gestion de la société. n n'a pas soutenu d'une manière absolue que l'emprunt fui permis à l'administrateur ' . Mais certains auteurs l'ont autorisé a faire des emprunts modérés (*), par la raison inexacte que l'emprunt est alors un acte d'administration. Ils onl aussi invoqué l'art. 18.">^, qui, en obligeant la société h rembourser les sommes dépensées pour son compte par les associés, démontrerait la possibilité d'un emprunt. Il est à peine utile de faire remarquer que si l'art. 1852 avait cette signification, il autoriserait tout emprunt, quel qu'en fût le montant; du reste l'art. 1852 s'explique tout autrement : il n'est qu'une application des règles de la gestion d'affaires. Suivant d'autres auteurs, les tribunaux devraient juger en l'ait si l'emprunt est fait dans l'intérêt de la société et s'il n'est pas exagéré; ces deux conditions réunies, l'emprunt serait légitime (3). Cette opinion, comme la précédente, oublie que la capacité d'emprunter est identique à celle d'aliéner; toutes deux, en outre, soumettent la validité de l'emprunt à une condition dont le prêteur devra s'enquérir et dont l'examen est délicat. L'administrateur ne peut davantage hypothéquer (*), car, d'après l'art. 2124, la capacité d'hypothéquer est celle d'alié- ner. Nous examinerons, à propos du mandat, si le pouvoir qui confère à l'administrateur le droit d'hypothéquer doit être authentique. 11 ne peut donner main-levée que des créances soldées (5) ; (') V. cep. Paris, 26 juin 1841. II. Rép., v« Société, n. 1299. '-I Troplong, I, n. 6»4. I») l'ont, n.524. 1 Hass. req., 21 avril 1841. S., il. 1. 395, D. Rép., v° Priv. et hyp., n. 1223-3°. — Cass. civ., 7 mai 184'.. S., 45. 1. 53, D.. 51. 5. 484. — Cass. req., 3 mai 1853, S., 53. 1. 617, D., 53. 1. 186. — Cass., 27 janv. 1868, S., 68. 1. 53, D., 69. 1. 410. — Cass. civ., 29 janv. 1895 2 arrêts), S., 95. 1. 73. D., 1*5. 1. 430. — Paris, 11 déc. U., 67. 2. 165. — Paris, 5 juil. 1877, S.. 77. 2. 295, D., 77. 2. 168. — Trop- tong, II, n. 686; Pont, n. 526; Laurent, XXVI, n. 308; Guillouard, n. 126; Lyon- Caen et Renault, II. n. 260: Baudry-Lacantinerie et de Loynes, YY. du nanliss., sans gue leurs fonctions soient déterminées, ou sans qu'il . ait été exprimé gue l'un ne pourrait agir sans l'autre, ils peuvent faire chacun séparément tous 1rs uetrs de cette ad- ministration " art. 1857 . « S'il d été Stipulé que l'un des administrateurs ne pourra rien faire sans l'autre, un seul ne peut, sans une nouvelle » convention, unir en l'alise née de l'autre, lors même rjue » celui-ci serait dans l'impossibilité actuelle de concourir aux ., actes d'administration » (art. 1858). Ces solutions étaient déjà données par Pothier ('). Il ajou- tait que « si cette administration a été partagée entre eux. comme si l'un a été préposé pour taire les achats, l'autre pour vendre les marchandises, chacun deux ne peut faire que les actes qui dépendent de la partie d'administration qui lui a été confiée ». Cette dernière solution n'a pas cessé d'être exacte; elle a pu paraître assez évidente pour que les rédac- teurs du code se crussent dispensés de l'exprimer. Il résulte expressément de l'art. 1858. comme de Pothier, que les associés nommés pour gérer en commun ne^ peuvent aqir les uns sans les autres, même si certains d'entre eux sont dans l'impossibilité d'agir (2). Ce texte est trop formel pour qu'on puisse admettre une exception qui a été proposée relativement au cas urgent. Du reste, il est contraire aux règles du mandat qu'un mandataire puisse être suppléé par un autre mandataire. En vain dit-on que les associés n'ont pas songé à cette hypothèse: cela importe peu, car le mandataire ne peut se prévaloir, pour outrepasser ses pouvoirs, de ce que vraisemblablement son mandant, s'il avait prévu le cas, l'y aurait autorisé. On nous oppose l'hypothèse, sans doute émouvante, où il s'agit d'empêcher un éboulement ou une inondation. Ne remarque-t-on pas que tout tiers, même non intéressé, peut alors agir comme gérant d'affaires et que ce droit, à plus forte raison, appartient aux administrateurs (:i ? O N. 72. {*) Troplong, II, n. 707; Laurent, XXV, n. 312: Guillouard, n. 131; Hue, XI, n.91. — Contra Duranton, XVII, n. 438; Pont, n. 518; Duvergier, n. 303; Aubryet Kau, IV, p. 362, § 382, note 3; Guillouard, n. 131. ^) Hue, loc. cit. 190 DU CONTRAT DU SOCIÉTÉ 311. On a prétendu que dans les sociétés minières, même en l'absence d'une clause formelle ou en dépit de toute clause contraire, jamais un administrateur ne peut agir seul ('). Nous ne comprenons pas cette opinion : il a été entendu aux travaux préparatoires de la loi de 1810, qu'au point de vue des relations privées, les sociétés minières sont soumises aux autres règles des sociétés civiles, et du reste la loi de 1810 ne contient aucune dérogation, ni explicite ni implicite, à cette règle. En vain objecte-t-on l'unité de direction nécessaire à la sécurité dos ouvriers. La loi a exigé cette unité de direc- tion dans l'exploitation et a employé le seul moyen pratique de l'amener, c'est d'interdire la nomination de plusieurs directeurs; mais, tout le monde en convient, il peut être nommé plusieurs administrateurs; dès lors pourquoi ces administrateurs n'auraient-ils pas leurs pouvoirs ordinaires? Au surplus, la sécurité des ouvriers ne peut être compromise que par l'exploitation et non par l'administration. 8 III. Droits des associés non gérants. 312. Les associés non gérants n'ont pas le droit d'interve- nir dans l'administration (-), puisqu'ils ont délégué au gérant leur droit d'administrer. L'art. 1856 suppose cette solution, car il permet au gérant de faire les actes d'administration, malgré l'opposition des autres associés. Il en est ainsi même s'il s'agit d'un administrateur nommé au cours de la société (s); quoiqu'alors cette nomination ne soit pas une clause du pacte social, elle n'en constitue pas moins une convention faite entre les associés, et suivant laquelle ils se sont implicitement engagés les uns envers les autres à ne pas troubler l'administration du gérant. 313. Les associés n'ont pas plus le droit de s'immiscer dans l'administration du gérant étranger que dans celle du gérant associé (*). Les considérations que nous avons invoquées en i' Delecroix, Dessoc.de mines, n. 424 s.; Guillouard, n. 365. C'i Guillouard, n. 139. ( luillouard, n. 139. (') Guillouard, n. 139. àDMINISTfiATION PAB DES GÉBANT8 HM parlant du géran! associé nommé au cours de la société sap- pliquent ici entièrement ; les associés se sont engagés 1rs uns envers les autres à ne pas participer à la gestion. Par suite, si l'associé non gérant contracte envers les tiers un engagement, non seulement, comme nous le verrons, les tiers ne peuvent exiger des autres associés l'exécution de cet engagement, niais l'associé lui-même, après y avoir satisfait. ne peut pasdemander que la société l'indemnise (') : c'estceque disait Polhier (2). Il en est ainsi particulièrement s'il s'agis- sait d'une obligation que l'associé était tenu de remplir d'après ses engagements avec la société Toutefois, comme le voulait également Pothier (*), si, en dehors de ce dernier cas, l'engagement a tourné au profit de la société, une indemnité est due par cette dernière à l'asso- cié jusqu'à concurrence du profit [*). En etièt, l'associé a voulu faire l'affaire de la société et il est de règle que celui dont l'affaire a été faite doit une indemnité jusqu'à concurrence de sou enrichissement, quoique les conditions de la gestion d'affaires ne se trouvent pas réunies; si de son côté,^ comme nous le montrerons, le tiers n'a pas d'action contre la société pour l'exécution de l'engagement, c'est qu'il n'a pas songé à la société et n'a traité qu'avec l'associé. 313 bis. Mais les associés ont le droit de contrôler l'admi- nistration des gérants et de la surveiller (6), pourvu que cette surveillance ne soit pas de nature à entraver l'administra- tion c). Dans ce but les associés peuvent se faire communiquer les livres de la société r8). 1 i iuillouard, n. 265. •) N. 105. 1 Cass., 13 mai 1835, S., 35. 1. 85i. ' N. 105. i iuillouard, n. 265. I hambéry, 2 mai 1894, D., 97. 2. 119. Chambéry, 2 mai 1894. précité. • Trib. corn. Nantes, 25 nov. 1896, Rec. Nantes, 97. 12 (mais il ne peut les consulter accompagné d'une tierce personne, fut-ce de l'huissier requis pour cons- tater, s'il y a lieu, le refus de communication . 192 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ SECTION II DU CAS OU IL N'A PAS ÉTÉ DÉSIGNÉ DE GÉRANT § I. Administration de la société. 314. Dans l'hypothèse où les parties n'ont pas pourvu à l'administration de la société par la nomination d'un ou de plusieurs gérants, chaque associé est censé avoir reçu man- dat de tous les autres à l'effet de gérer. C'est ce que dit l'art. 1859 al. 1 : « A défaut de stipulations spéciales sur le mode » d'administration, l'on suit les règles suivantes : — Les asso- » dés sont censés s'être donné réciproquement le pouvoir d'ad- » ministrer l'un pour l'autre. Ce que chacun fait, est valahle » même pour la part de ses associés, sans qu'il ait pris leur » consentement, sauf h' droit qu'ont ces derniers, ou l'un d'eux, » de s'opposer à l'opération avant quelle soit conclue ». Donc, chaque associé a le droit d'administrer, mais ce droit seulement ('). Ce droit est-il égal à celui d'un administrateur nommé par les associés? On l'a pensé 2) ; mais, à notre avis, il est moindre. D'abord, l'art. 1839 ditexpressément que l'asso- cié a seulement le droit d'administrer et nous avons vu que l'administrateur a souvent des pouvoirs très étendus. Ensuite d'autres textes nous montreront que les pouvoirs de l'associé sont inférieurs à ceux de l'administrateur. Enfin il est natu- rel qu'un gérant, auquel tous les associés ont délégué leurs droits d'administration, ait des pouvoirs supérieurs à ceux d'un associé ordinaire, dont les pouvoirs sont limités par les pouvoirs rivaux de ses coassociés. 315. A défaut d'administrateurs, le droit d'administrer appartient aux associés dans toutes les sociétés, la loi ne fai- sant aucune distinction. On soutient cependant généralement que, dans les sociétés minières, les associés n'ont pas ce droit (3). Ce n'est pas, (') Cass., 4 fév. 1852, S., 52. 1. 2i5, D., 52. 1. 82. — Pont, n. 553; Guillouard, n. 141. [*] Guillouard. n. 141. 3X Laurent, XXVI, n. 423; Guillouard, n. .'iGi; Delecroix, Des soc. démines. n. 365 s. ; Féraud-Giraud, Des soc. Je mines. I, n. 214. /ADMINISTRATION \ DÉFAUT DE GÉRANT 103 comme on pourrai! le croire, parce que, dans ces sortes de Bociétés, la direction doit être unique : l'unité de direction s'entend, comme nous l'avons montré et comme tout le monde le reconnaît, dans un tout autre sens. C'est parce que, la so- ciété minière constituant une personne morale, les associés ne sont que des créanciers et non pas des propriétaires. Ce raisonnement est singulier : les associés n'ont-ils pas un droit au patrimoine commun quand la société est une personne morale? Et, en admettant qu'il en soit autrement, n'ont-ils pas le droit d'administrer? Les sociétés commercia- les sont bien des personnes morales et cependant les associés en nom collectif peuvent administrer; d'après la jurispru- dence, les sociétés civiles sont également des personnes mo- rales, et cependant la loi permet à leurs membres d'adminis- trer. Enfin, si les associés ne peuvent administrer, qui administrera? La réponse sera sans doute que l'administra- tion appartient aux administrateurs nommés par les associés, mais ils ne sont pas forcés d'en nommer. 316. Chacun des associés a notamment le droit /le pour- suivre le recouvrement d'une dette sociale ('). On a conclu de là que si l'un des associés saisit à tort, au nom de la société, des biens appartenant à un tiers, les autres associés sont responsables (2). 317. Il résulte de l'art. 1859 que l'opposition d'un seul associé suffit pour empêcher l'acte d'être accompli (3), c'est ce que décidait le droit romain (4). 318. La formule employée par l'art. 1859 parait bien con- férer a chaque associé un droit absolu d'opposition, un droit de veto (5). Malgré cela, l'opinion générale décide que la volonté de la majorité lie la minorité (6). Ce sont surtout des (') C. supr. Missouri, 1881, Journ. dr. int., 1883, p. 418. (') C. supr. Missouri, 1882, précité. (3) Trib. corn. Nantes, 17 oct. 1891, Rec. Nantes, 91. 1. 429. — Guillouard, n. 143 ; Houpin, I, n. 95. (*) h., 28, D., Comm. divid., 10. 3. (5) Trib. com. Nantes, 17 oct. 1891, Rec. Nantes, 91. 1. 429. — Laurent, XXVI, n. 144; Hue, XI, n. 93. (•) Pardessus, Cours de dr. com., IV, n. 979; Troplong, n. 720 et 721; Duver- SOCIÉTÉ, PRÊT, DÉPÔT. — 2e éd. 13 194 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ considérations d'utilité pratique qui ont dicté cette solution. Est-ce là une base suffisante ? Nous en doutons; les majorités n'ont pas d'autre droit que ceux qui leur sont conférés parla loi ou par la volonté des parties. Sans doute notre système peut offrir des inconvénients, il permet à tout associé d'entraver l'administration de la société, — encore l'objection disparaît- elle si on permet au tribunal de lever l'opposition — ; mais, dans le cas où cet associé croit préjudiciable l'acte proposé, pourquoi l'obligerait-on à l'accepter? On est bien forcé de convenir qu'un seul des associés peut empêcher l'aliénation des biens sociaux, quelqu'avantage qu'elle présente; et c'est le cas de répéter avec le droit romain : « In re pari potiorem esse causam prohibentis » ('). Que si l'opposition est faite de mauvaise foi, nous verrons que les conséquences en retom- bent sur l'associé de qui elle émane. Il est, dit-on, inadmissi- ble que la minorité fasse la loi à la majorité. N'est-ce pas ce qui se produit pour l'aliénation? Toutefois il va sans dire, comme nous le montrerons en par- lant des mesures interdites aux associés, que le pacte social ou une convention postérieure peuvent conférer à la majorité le droit de lier la minorité (2J. 319. Si l'opposition de la minorité doit être accueillie, le tribunal a-t-il le droit de la lever dans le cas où elle lui pa- raîtrait injustifiable? L'affirmative a été décidée (3), mais sans base rationnelle. 320. En supposant, contrairement à notre opinion, que la majorité fasse la loi à la minorité, il reste à déterminer la manière de calculer la majorité. Certains auteurs demandent une majorité absolue, par la raison que c'est la régie ordinaire dans les assemblées (*). Ce système repose sur une pétition du principe; il n'y a pas, en réalité, de règle absolue; la loi, dans chaque hypothèse où gier. q. 286 et 287: Aubry et Rau, IV, p. 563, § 382, note 8 ; Pont, n. 565; Guil- louard, n. 144 ; Houpin, loc. cit. ' L. 28, D., Comm. divid., 10. 3. — V. aussi L. 11, D., Sz serv. vind., 8. 5. (*) V. infra, n. 333. (3) Trib. corn. Nantes, 17 oct. 1891, Rec. de Nantes, 91. 1. 429. (4) Guillouard, n. 146; Houpin, loc. cit. ADMINISTRATION A DÉFAUT DE GÉRANT 195 elle exige la majorité, fixe la manière do la calculer. On sait même que, dans les assemblées générales des sociétés par actions, à défaut de majorité absolue obtenue dans une pre- mière réunion, la loi permet, dans une seconde, à la majorité relative de statuer. On a encore dit, en faveur de ce premier Bystème, que, dans le sens exact, la majorité désigne la majo- rité absolue. Il est, au contraire, certain pour tout le monde que l'expression de majorité, sans épithète, s'applique à la majorité relative, comme à la majorité absolue. h autres auteurs se contentent de la majorité relative, sans pins de raison. D'autres encore veulent que s'il y a plus de deux avis, les tribunaux tranchent la question; ainsi les tribunaux pour- raient adopter l'opinion qui a recueilli le moins grand nombre de voix ! Enfin certains auteurs (') obligent, s'il y a plus de deux opinions, les partisans des opinions ayant obtenu le moins grand nombre de voix, à se rallier aux deux qui en ont obtenu le plus grand nombre ; ils se fondent sur l'art. 117 C, pr., qui, en effet, impose cette obligation aux membres des tribunaux, mais qui ne peut s'étendre. La question, en somme, nous parait insoluble. 321. 11 nous parait certain que la majorité se calcule d'après le nombre de voix et non d'après l'intérêt des associés dans la société (2) ; car il résulte de l'art. 1859 qu'au point de vue du droit d'administration tous les associés, quel que soit le montant de leurs droits, sont placés sur le même rang. 322. L'acte accompli au mépris de l'opposition est entière- ment nul (3). Sans doute il est fâcheux pour les tiers de se voir opposer la nullité à raison d'une opposition qu'ils ont pu ne pas connaître; mais il ne serait pas moins fâcheux que les associés fussent obligés de se conformer à un contrat qu'ils (') Duvergier, n. 289. (*) Troplong, II, n. 722; Duvergier, n. 288; Pont, n. 566; Laurent, XXVI, n. 321 et 322; Guillouard, n. 146; Iloupin, loc. cit. — Contra Pardessus, Cours de dr. coin., IV, n. 979. (s) Pont, n. 557; Laurent, XXVI, n. 318; Guillouard, n. 143. — V. cep. Iloupin, loc. cit. 19G DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ avaient le droit d'empêcher et qu'ils ont en effet empêché. Du reste la nullité dérive de ce principe que la sanction nor- male des prohibitions de la loi, est, à défaut d'un texte spé- cial, la nullité. Enfin elle est également d'accord avec les principes du mandat; l'associé remplit le rôle d'un manda- taire de ses coassociés et l'acte interdit par le mandant au mandataire n'engage pas le premier. 323. L'opposant peut-il être condamne à des dommages- intérêts au cas où son opposition a été préjudiciable à la société? Certains auteurs admettent l'affirmative ('), par la rai- son qu'aux ternies de l'art. 1992, tout mandataire est respon- sable de la faute commise dans sa gestion. Il suffît, pour ré- pondre à cet argument, de dire que la situation de l'associé qui fait opposition n'est pas celle d'un mandataire faisant acte de gestion, mais d'un mandant révoquant le mandat qu'il a confié. D'autres pensent au contraire que l'opposant n'est tenu à aucun dommages-intérêts (2), parce qu'il a usé d'un droit. Cette dernière opinion est exacte en principe. Cependant si l'opposant a commis plus qu'une faute, un dol, c'est-à-dire a fait opposition dans le seul but de nuire à la société, il peut être condamné à des dommages intérêts, car c'est un prin- cipe reconnu qu'on ne peut user d'un droit méchamment et dans le seul but de nuire à autrui. On verra même que des oppositions répétées et mal fondées peuvent donner lieu à la dissolution de la société. 324. « Chaque associa a le droit d'obliger ses associés à » faire avec lui les dépenses qui sont nécessaires pour la con- » servalion des choses de la société » (art. 1859 al. 3). Le droit romain (3) et Pothier donnaient cette solution (*). Toutefois ils permettaient aux associés d'échapper, en aban- donnant leur part dans la société, à l'obligation de contri- buer aux dépenses. Cette restriction ne peut plus être admise aujourd'hui en l'absence d'un texte (5), car l'associé a con- (') Duranton, XVII, n. 439; Aubry et Rau, IV, p. 563, §383, note 10. (*) Guillouard, n. 147. (>) L. 12, D., Comm. cliiid., 10. 3. («) N. 86. (5) Bugnet sur Pothier, loc. cit.; Guillouard, n. 215. — Contra Troplong, II, n.135. HIN1STRA IIun \ DÉFA1 i DE GÉRAJj l 107 Iracté Implicitement, en entrant dans la société, L'obligation de contribuer aux dépenses, el nul ne peul se soustraire, do s.i propre autorité, à une obligation personnelle. (in a prétendu que, pour que la dépense soit jugée néces- saire, il faut que la majorité des associés l'ait ainsi décidé (*). Cette condition nous parait être de trop, car la nécessité d'une dépense dépend du caractère de celte dépense; il suf- fira donc qu'un seul associé ait fait ou veuille faire une dé- pense nécessaire pour qu'il puisse, sans demander l'avis de la majorité, obliger son coassocié à y contribuer. En cas de contestation, le tribunal décide si la dépense est nécessaire. On décide aussi que si une chose appartenant à la société est perdue, son remplacement n'est pas une dépense néces- saire et ne peut être voté que par l'unanimité des associés (2). Gela ne nous parait pas exact d'une manière absolue. 3 25. La question de savoir dans quelles conditions un associé a le droit d'agir en justice pour le compte de la société est réglée par la loi du pays où se trouve le siège de la société (*). § II. Actes excédant l'administration. 326. (( L'un des associés ne peut faire d'innovations sur tes » immeubles dépendant de la société, même quand il les sou- » tiendrait avantageuses à cette société, si les autres associés » n'y consentent » (art. 1859, al. 4). Cette solution est empruntée au droit romain (4) et à Po- thier (5). Elle était alors, comme elle est aujourd'hui, formulée en termes absolus. Cependant les auteurs (6) autorisent les innovations conformes au but de la société, par la raison que ce sont des actes d'administration. Que ce soient des actes d'administration, même quand ils sont nécessités par le but de la société, c'est ce que nous contestons : rien n'est plus con- ' Troplong, II, n. 736; Guillouard, n. 216. 5. 1. 652, D., 55. 1. 213. — Douai, 15 mai 1844, S., 44. 2. 403. — Orléans, 2Ûjuil.l853, S., 53. 2. 485.— Lyon, 9 janv. 1870, D., 71.2. 111. — Aubryet Rau, IV. p. 563, §382, note 9; Pont, n. 562; Laurent, XXVI, n. 320; Guillouard, n. 145. i3) Cass., 7 mai 1843, S., 45. 1. 53. — Cass., 13 mars 1878, S., 78. 1. 401, D., 78. 1. 315. — Guillouard, n. 145. 202 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ résultat d'obliger directement les autres associés envers les créanciers ('). Ceux-ci n'auront donc d'action que contre celui ou ceux qui ont figuré au contrat; du moins ils ne pourront agir contre les autres que du chef des associés avec lesquels ils ont traité, par l'action indirecte de l'art. 1166 (!). Ainsi la société n'est pas tenue de l'engagement pris par un associé vis-à-vis d'un tiers de ne pas exercer un com- merce déterminé (3). La société n'est même pas tenue des engagements de l'as- socié dans les limites où elle s'est enrichie et par une action de in rem verso (*). Cela résulte a contrario de l'art. 1864. qui n'accorde celte action contre la société que si elle s'est enri- chie par L'effet d'un engagement pris en son nom. On com- prend, du reste, que le tiers qui n'a compté avoir pour obligé que l'un des associés ne trouve pas dans l'existence de la so- ciété un droit qu'il ne prévoyait pas. Nous ajoutons que le droit commun conduit à la même solution; il va sans dire, par exemple, qu'un emprunteur n'est pas tenu envers un tiers de la restitution de la somme prêtée si cette somme avait été avancée par le tiers. Enfin Pothier était dans le même sens (5). Nous avons déjà examiné si, de son coté, l'associé qui s'est engagé peut se faire indemniser par ses coassociés (°). 335. Quand la loi parle d'un engagement contracté par l'associé en son nom personnel, elle se place évidemment en face des termes de la convention passée par lui; ainsi l'asso- cié qui contracte est tenu de son engagement pour le tout, (') Cass., 16 nov. 1870, D., 70. 1. 350. — Merlin, Quest., v° Société, § 2; Duran- ton, XV11, n. 449; Duvergier, n. 404; Anbryet Rau, IV, p. 564, § 383, note 2 ; Pont, n. 641; Laurent, XXVI. n. 343; Guillouard, n. 265. (*) Guillouard, n. 265. 1 V. cep. Trib. corn. Seine, 21 janv. 1895, Loi, 15 fév. 1895. (•) Cass., 12 mars 1850, S., 50. 1. 255, D., 50. 1. 86. — Cass., 16 fév. 1853, S., 53. 1. 209, D., 56. 1. 47. — Aix, 10 mars 1854, S., 55. 2. 245. — Troplong, II, n. 772 s. ; Delamarre et Le Poitvin, Tr. du contrat de commission, II, n. 250; Aubry et Rau, IV, p. 564, § 383, note 2; Pont, n. 651 et 652 ; Laurent, XXVI, n. 347; Guillouard, n. 265; Houpin, I, n. 101. — Contra Merlin, Duranton, Du- vergier, toc. cit. (8j N. 105. (8) V. supra, n. 313. ENGAGEMENTS DES ASSOCIÉS 203 même alors qu'il agit au nom de la société, s'il ne fait pas connaître au tiers cette circonstance ('). Il en est ainsi dans le cas même où le tiers a su que l'en- gagement était contracté pour le compte de la société, car il a été en droit de penser que l'associé voulait s'engager per- sonnellement. De même la société n'est pas engagée dans les limites de son profit, même si le tiers a su que l'engagement était con- tracté pour cette dernière, si cette circonstance n'était pas indiquée par l'associé. S II. Engagements contractés au nom de la société. 336. Si l'engagement est contracté au nom de la société, la société est-elle engagée? Deux hypothèses doivent être distinguées. I. Engagements contractés par tous les associés. 337. Si l'engagement a été contracté par tous les 'associés, la société est incontestablement obligée. Il n'est d'ailleurs pas nécessaire que l'engagement soit pris sous la signature sociale, il suffit qu'il soit pris au nom de la société (2). 338. Quand la société est tenue à raison de l'engagement contracté, dans quelle mesure chaque associé pourra-t-il être poursuivi par le créancier? L'art. 1863 répond, pour le cas d'une obligation contractée par tous les associés : « Les asso- » ciés sont tenus envers le créancier avec lequel ils ont con- » tracté, chacun pour une somme et part égale, encore que la » part de l'un d'eux dans la société fût moindre, si l'acte n'a » pas spécialement restreint l'obligation de celui-ci sur le pied » de cette dernière part ». Ainsi, pour déterminer l'étendue de l'obligation de chaque associé envers le créancier, il n'y a pas à se préoccuper de la part de chacun des contractants dans la société. Le créancier peut ignorer ces parts ; quand même il les connaîtrait, rien (») Pont, n. 646; Laurent, XXVI, n. 345 ; Guillouard, n. 266. (») Douai, 24 avril 1890, D., 91. 2. 244. 204 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ ne prouve, si le contrat ne s'explique pas à ce sujet, qu'il ait entendu avoir chaque associé pour débiteur dans la mesure de sa part sociale. Le droit commun, quand plusieurs débi- teurs s'engagent conjointement, c'est l'obligation par parts viriles. 11 doit être appliqué, à moins que les parties n'y aient dérogé par une stipulation formelle. Si les associés entendent s'obliger chacun pour sa part sociale et non pour sa part virile, il faut qu'ils le disent. Celte solution était déjà admise dans l'ancien droit('), mais elle est contraire au droit romain (2). Ainsi il ne suffirait pas, pour que la solution contraire dût être admise, que le tiers eût connaissance de la fixation des parts sociales par l'acte de société (3). Nous venons de donner la raison de celte solution ; c'est à tort qu'on l'a rattachée à la question de savoir si la clause des statuts qui permet à l'as- socié de céder sa part est opposable aux tiers; celte dernière question peift être résolue par l'affirmative sans qu'il en faille dire autant de celle qui nous occupe. Il n'en est autrement que pour une société civile à forme commerciale, régulièrement publiée : cette société est assi- milée par la loi du 1er août 1893 à une société commerciale et les clauses d'une société commerciale publiée sont opposa- bles aux tiers ('). À plus forte raison, la clause d'un acte de société qui res- treint en deçà de sa part virile (à son apport par exemple) la part d'un associé dans les dettes n'est-elle pas par elle-même opposable aux tiers (5). (') Polhier, a. 104. L. 11, § 2, D., de duob. reis, 15. 2 ; L. 14, § 1, D., de sed. éd., 21. 1. — Et en ce dernier sens le droit allemand, Eck, loc. cit. («) Cass. rcq., 21 fèv. 1883, 5.. 84. 1. 361, L)., 83. 1. 217. — Douai, 23 mars 1878, S., 78. 2. 305, ]).. 7'.». 2. 109 (créanciers qui font partie de la société). — Rouen, 16 juin 1890, S., 92. 2. 309. — Duvergier, n. 391 : Pont, n. 661 et Bev. cril., XIII, 1884, p. 524; Laurent, XXVI, n. 352; Guillouard, n. 268; Hnc, XI, n. 101. — Contra Trib. civ. Seine, 2 juin 1896, Gaz. l'ai., 96. 2. 532. — Houpin, I, n. 104. (') Trib. civ. Seine, 21 fév. 1896, Rev. des soc, 96. 435 Société de mines). — Trib. civ. Seine, 2 juin 1896, précité. — V. infra, n. 340. (3) Bruxelles, 2 fév. 1882, D., 83. 2. 1. — Rouen, 16 juin 1890, S., 92. 2. 309. — Trib. civ. Rouen, 30 mai 1888, Journ. des soc, 91. 228. — Contra Paris, 28 janv. 1868, D., 68. 2. 244. i NGÀG] MENTS DES ISS \S 203 Mais toul ce qu'a voulu dire l'art. 1863, c'est, croyons-nous, que le tiers n'est lié que par une convention passée avec lui; il n'esl pas nécessaire, malgré les termes de l'art. 1863, (pie l'acte lasse mention de cette convention spéciale (' ; il est clair que le seul but du législateur a été d'empêcher qu'on n'opposât aux tiers les clauses de l'acte de société sans les avoir prévenus; il n'a pas voulu toucher la question de preuve; ainsi, et sauf les difticultés de la preuve, les associés pourront démontrer qu'une stipulation, non inscrite dans l'acte passé avec le tiers, est intervenue pour modifier la res- ponsabilité des associés. 339. Si l'art. 1863 permet aux tiers de poursuivre les asso- ciés pour leur part virile, il ne le leur impose pas. Quoiqu'on ait soutenu le contraire (2), les tiers peuvent invoquer l'acte de société pour poursuivre chaque associé proportionnelle- ment à sa part virile, si celte part est supérieure à sa part proportionnelle. Il est, en effet, de principe que le créancier peut se prévaloir des conventions qui modifient entre les débi- teurs le poids de la dette. On objecte à tort que l'art. 1863 part de l'idée que les dettes se divisent proportionnellement entre les associés; l'art, 1863 permet aux parties de déroger à ce principe, à condition que les tiers approuvent cette dérogation. 340. L'art. 1863 s'applique dans toutes les sociétés civiles, car il ne fait aucune distinction, et on ne voit, du reste, aucune raison de distinguer. Ainsi l'art. 1863 s'applique aux sociétés de mines (3). On a cependant soutenu que les associés n'y sont tenus que pro- portionnellement à leur part sociale (;). L'art. 1863, a-t-on dit, suppose que l'engagement est contracté par tous les associés, et, dans les sociétés minières, c'est le directeur qui contracte; c'est donc la société qui est tenue, et comme c'est une société de capitaux, les capitaux sont tenus dans la proportion où ils ont été apportés. (') Contra Guillouard, n. 268. (2) Trib civ. Epernay, 19 fév. 1892, Journ. des soc, 94. 482. — Pont, Rev. ail., XIII, 1884, p. 527. (3) Guillouard, n. 370. ('; Laurent, XXVI, n. 429 ; Delecroix, Des soc. de mines, n. 444. 206 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Nous avons montré que les sociétés minières ne sont pas plus que toutes les autres sociétés civiles des sociétés de capi- taux". Nous ajoutons que la règle de l'art. 1863 est posée d'une manière générale et, par conséquent, ne souffre pas de res- triction; que l'ait. 1863 repose sur le défaut de publicité du contrat social, c'est-à-dire sur une raison commune aux socié- tés civiles ordinaires et aux sociétés minières; qu'enfin, dans ces dernières comme dans les autres, l'administrateur qui con- tracte agit au nom des associés. Nous ne croyons même pas qu'il soit nécessaire, comme on l'a prétendu (l), de distinguer en législation, à ce point de vue, les sociétés minières des autres sociétés civiles. L'art. 1863 s'appliquait même aux sociétés à forme com- merciale (!) avant la loi du 1er août 1893, qui a soumis ces sociétés aux règles des sociétés commerciales. II. Engagements contractés par un associé. 341. Si rengagement a été contracté par un seul associé, il ne suffit plus, pour que la société soit obligée, que l'enga- gement ait été contracté en son nom ; il faut en outre que l'associé qui a pris l'engagement eût pouvoir d'agir au nom des autres, ou que l'engagement ait tourné au profit de la société. Si cette condition fait défaut, l'associé qui a pris l'en- gagement sera seul obligé, bien qu'il ait parlé au nom de tous. C'est ce que dit l'art. 1864 : « La stipulation que Vobli- » gation est contractée pour le compte de la société, ne lie que » l'associé contractant et non les autres, à moins que ceux-ci » ne lui air ut donné pouvoir, ou que la chose n'ait tourné au » profit de la société » (s). Le pouvoir existera non seulement si l'associé a reçu man- dat général d'administrer, mais encore s'il a accompli un acte qu'il avait reçu mandat spécial de faire ('), ou si, à défaut de (») Guillouard, n. 370. ! Rouen, 16 juin 1890, S., 92. 2. 309. — V. supra, n. 338. (3 Allemagne, jugement dans Seuffert, Arch., XII, p. 60 et 270. — Eck, toc. cil. — I : gén. prussien, I, 17, §§ 206 à 210. ; Duvergier, n. 385; Troplong, II, n. 807; Pont, n. 047; Laurent, XXVI, n. 344; Guillouard, n. 266: Houpin, I, n. 102. ENGAGEMENTS DES ASSOCIÉS 207 gérant, il a agi dans la limite des pouvoirs appartenant a. chaque associé ('). Que si l'associé n'avait pas mandat d'administrer ou s'il a dépassé ce mandat, la société est tenue dans les limites de son enrichissement (*); c'est une dérogation à l'art. 1998, d'après lequel le mandataire n'est tenu qu'en cas de ratification de ce qui a été l'ait au-delà du mandat (3). Huant à l'associé qui a contracté au nom de la société, il n'est tenu que pour sa part, comme les autres (4). 342. Le gérant a le pouvoir suffisant pour engager ses coassociés (5); de ce qu'il a le pouvoir d'administrer, il résulte que, vis-à-vis même des tiers, il est réputé, dans ses actes d'administration, contracter pour la société; par suite il n'est engagé que pour sa part et ses coassociés sont eux-mêmes engagés pour leur part. On a cependant soutenu que le gérant qui, sans mandat formel, contracte au nom de la société, n'engage que lui vis- à-vis des tiers, mais s'engage pour toute la dette (6). On a dit en ce sens que la société est inopposable aux tiers en vertu de l'art. 1165. Mais, d'une part, par la convention les tiers se sont engagés implicitement à accepter la société pour débi- trice, de sorte que l'art. 1165 est ici sans application; d'autre paît, l'art. 1121 C. civ. permet aux tiers de poursuivre les coassociés du gérant en se fondant sur le droit qu'a ce dernier, dans ses rapports avec ses coassociés, de les engager. 343. Il résulte de l'art. 1864 que les engagements pris régu- lièrement par un associé sous la signature sociale sont obli- (' Y. supra, a. 314 s. - Oass., 7 juillet 1868, S., 68. 1. 357, D., 69. 1. 319. — Bordeaux, 11 avril 1845, S., i6. 2. 315, D., 45. 4. 482. — Trib. civ. Epernay, 19 février 1892, Journ. des sociétés, 94. 482. — Guillouard, n. 466 bis; Iloupin, I, n. 102. — Il a même été décidé qu'elle est tenue pour le tout. — Lyon, 23 mars 1S92, Droit, 29 sept. 1892. Pont, n. 648; Guillouard, n. 266 bis. — Contra Laurent, XXVI, n. 346. 1 Pont, n. 646; Laurent, XXVI, n. 345; Guillouard, n. 266; Houpin, loc. cit. 5 Dijon, 20 mars 18S9, Gaz. Pal., 89. 1. 735. — Hue, XI, n. 101. 'ont, n. 647; Laurent, XXVI, n. 344; Guillouard, n. 266; Duranton, XVII, n. 447; Mouchet, Rev. bourguignonne de Uenseign. sup., 1, 1891, p. 245 s. Le pre- mier de ces auteurs assimile au pouvoir une clause expresse des statuts. 208 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ gatoires pour la société même s'ils sont pris en réalité pour le compte de l'associé ('). Il en est autrement, bien entendu, si les tiers ont su que l'associé n'agissait pas pour le compte de la société (s). On a décidé également que ces engagements ne peuvent être mis à la charge de la société s'ils ont pour but de réduire arbitrairement l'apport de l'associé en mettant à la charge de la société la dette de l'apport (3) ; cela nous parait difficile à admettre. 344. Nous avons vu que la clause de l'acte de société qui modifie les obligations des associés vis-cà-vis des tiers est inopposable aux tiers qui contractent avec tous les asso- ciés (*). 345. Au cas où l'associé qui a parlé au nom de la société avait des pouvoirs suffisants, chacun de ces coassociés sera, sauf stipulation contraire, obligé envers le créancier pour sa part virile et non pour sa part sociale (3). 11 importe peu d'ailleurs que l'associé, qui a contracté l'engagement, fût muni d'un pouvoir exprès, donné soit par une clause du con- trat de société, soit par un acte postérieur, ou qu'il fût seu- lement investi du mandat tacite de l'art. 1859. Ici encore il faut excepter le cas où la part sociale serait supérieure à la part virile (c). Mais si le mandat conféré à l'un des associés ne lui permet d'obliger ses co-associés que dans une certaine limite, par exemple jusqu'à concurrence de leurs mises, ce mandat est opposable aux tiers (7). 345 bis. La jurisprudence a eu l'occasion de faire l'applica- tion de la règle que la société est engagée par les actes que (' Cass., 7 mai 1851. S.. 51. 1.321. — Cass. civ., 28 mai 1889, S., 92. 1. 395 (enga- gements pour assurer le payement de marchandises fournies à l'associé). (*) Cass., 21 fév. 1860, S., 60. 1. 415. — Bordeaux, 12 août 1868, S., 69. 2. 108. — Montpellier, 2 juin 1876, S., 76. 2. 320. (») Cass. civ., 28 mai 1889, S., 92. 1. 397. (*) V. supra, n. 338. (5i Trib. civ. Epernay, 19 fév. 1892, Jauni, des soc, 94. 482.— Guillouard, n. 268; Pont, Rev. oit., XIII, 1884, p. 524; Houpin, I, n. 203. (6) Contra Trib. civ. Epernay, 19 fév. 1892, précité. [ (') Trib. civ. Epernay, 19 fév. 1892, précité. ENGAGEM1 NTS Dl S ASSOCIÉS 209 rail un associé en dehors de ses pouvoirs, dans les limites où elle s'est enrichie ('). 346. Si ['associé <[iii a contracté l'engagement n'avait pas de pouvoirs suffisants pour obliger la société et que celle-ci ne snil tenue que parce que l'engagement lui a profité, alors chèque associé ne pourra être poursuivi que dans la mesure du profit qu'il retire personnellement de l'acte, par consé- quent pour sa part sociale et non pour sa part virile (!). Les associés sont, en effet, tenus, comme la société elle-même (art. 1864), pour avoir tiré profit de la dette et ils ne parta- gent le profit de la société que dans les limites de leur part sociale. 11 en est ainsi, quoique certains auteurs paraissent croire le contraire [*), même dans l'opinion qui donne à la société une personnalité civile. Si on admet ce dernier système, il en ré- sultera sans doute que la société pourra être l'objet de pour- suites dirigées contre elle, mais non pas que les associés seront tenus pour leur part virile. 347. Les actes faits par un associé au nom de la société et qui ne rentrent pas dans l'objet de la société, rendent res- ponsable envers les tiers l'associé qui les a faits (*). 348. II faut même noter qu'une personne qui, par ses agissements, se fait passer pour associé est tenue comme telle vis-à-vis des tiers qui lui attribuent cette qualité (s). Il en est autrement vis-à-vis des tiers qui ont ignoré les agissements de cette personne (6), ou ont su qu'elle n'est pas associée. (' Cass. req., G fév. 1893, D., 93. 1. 318 (une société qui, par les manœuvres frauduleuses d'un associé, a reçu, en payement des sommes qui lui étaient dues par un tiers, des sommes détournées par ce tiers d'une société dont il faisait lui- même partie, est tenue de restituer ces sommes à cette dernière société). t2) Cass. req., 18 mars 1824, S. chr. — L. 82, D., pro soc, 17, 2. — Trop- long, II, n. 820; Duvergier, n. 402; Pont, n. 659 et Rev. crit., XIII, 1884, p. 526; Laurent, XXVI, n. 353; Guillouard, n. 269; Houpin, loc. cit. t3) Guillouard, loc. cit. l«) Angleterre, Cour d'appel, 19 mai 1883, Journ. dr. int., XIII, 1886, p. 359. (5J Cour supr. États-Unis, 5 mai 1884, Journ. dr. int., XII, 1885, p. 581. (6) C. supr. États Unis, 5 mai 1884, précité. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 1 i 210 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ III. Solidarité entre les associés. 349. La solidarité entre les associés est de droit dans cer- taines sociétés commerciales; elle n'a jamais lieu dans les sociétés civiles qu'en vertu d'une stipulation formelle ('). Tel est le sens de l'art. 1862, ainsi conçu : « Dans les sociétés » autres que celles de commerce, les associés ne sont pas tenus » solidairement des dettes sociales, et l'un des associés ne » peut obliger les autres si ceux-ci ne lui en ont conféré le » pouvoir. » C'est une solution traditionnelle (2). .Mais le défaut de solidarité n'empêche pas l'indivisibilité, conformément au droit commun, dans les hypothèses où elle résulte des principes (3). Que si la société civile a une forme commerciale, les asso- ciés sont tenus solidairement, à raison de l'assimilation au- jourd'hui établie entre les sociétés de ce genre et les sociétés commerciales. Avant même la loi du 1er août 1893, qui a fait celte assimilation, cette solution était généralement ad- mise (*). Mais il ne suffit pas qu'une société civile ait la personnalité morale pour que la règle de la solidarité lui soit applicable, car l'art. 1862 fait de la solidarité une règle spéciale aux sociétés de commerce. Ainsi, quoique les sociétés minières constituent des per- sonnes morales, la solidarité n'y existe pas (5). 350. La solidarité peut être stipulée dans une convention passée avec les tiers. Elle peut également figurer dans une clause du pacte social »t les tiers peuvent se prévaloir de cette clause (6). 1 Cass., 7 avril 1886, S., 89. 1. 403. — Guillouard, n. 267; Houpin, I, n. 103. - Pothier, n. 183. i ') Cass., 10 déc. 1845, S., 46. 1. 623. — Bruxelles, 28 nov. 1806, S. chr. — Lau- rent. XXVI. n. 350; Guillouard, n. 267. « Aix. 4 juin 1868, D., 69. 2. 242. — Pont, n. 655; Laurent, XXVI, n. 350; Guillouard, n. 270. («) Laurent. XXVI. n. 420; Guillouard, n. 370. 6 Dijon, 2 juin 1893, Revue bourguignonne de l'enseignement supérieur, III, 1893, p. 891. DROITS DES CRÉANCIERS 211 SECTION II DROITS DES CRÉANCIERS sociaux ET DES CRÉANCIERS DES ASSOCIÉS SUR LES BIENS DE LÀ SOCIÉTÉ ET DES ASSOCIÉS § l. Droits des créanciers relativement à la gestion. 351. Les créanciers d'un associé ne peuvent émettre la pré- tention de s'immiscer dans la gestion ('), ni môme de la con- trôler (2), car la gestion est un acte essentiellement personnel. On verra également qu'ils ne sont pas recevables à deman- der la dissolution de la société, lorsque cette dissolution ne s'opère pas de plein droit (3). Les créanciers de la société ne peuvent pas davantage se mêler à la gestion. g II. Droits respectifs accordés aux créanciers de la société et des associés sur les biens de la société. 352. Les contlils qui peuvent s'élever entre les créanciers sociaux et les créanciers des associés relativement à leurs droits et actions sur les biens de la société sont délicats à résoudre; ils dépendent du point de savoir si la société civile forme une personne morale. On doit d'ailleurs noter qu'un créancier personnel de l'asso- cié peut être en même temps créancier de la société et reven- diquer alors, suivant son intérêt, l'une ou l'autre de ces qua- lités. Ainsi la société est censée avoir pris à sa charge les dettes qui grèvent spécialement l'apport de l'associé et qui sont en même temps charges de la jouissance, telles que les annuités d'un brevet d'invention (4). De même, dans les sociétés universelles, les dettes de l'as- socié deviennent dettes sociales. (l) Trib. corn. Nantes, 27 août 1887, Rec. Nantes, 87. 374. — Houpin, I, n. 106. ' Trib. coin. Nantes, 27 août 1887, précité. (S) V. in fra, a. 427, 470. («) Cass., 29 mai 1877, S., 78. 1. 402. — Rouen, 29 déc. 1871, S., 72. 2. 51. — Trib. civ. Seine, 26 mars 1895, Droit, 5 juin 1895. 212 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 353. Dans l'opinion d'après laquelle les sociétés civiles cons- tituent des personnes morales, les créanciers de la société ont le droit de se faire payer sur les biens dépendant de la société par préférence aux créanciers personnels des associés ' . (Jeux-ci ne sont pas, en effet, créanciers de la société. Au contraire, ce droit de préférence sera refusé aux créanciers sociaux si Ton admet que la société civile n'est pas investie de la personnalité juridique -, car alors les biens de la société devront être considérés comme biens des associés, qui en sont copropriétaires par indivis, et les créanciers sociaux comme des créanciers personnels des divers associés; or les créanciers d'un même débiteur viennent tous par concurrence, à moins qu'il n'y ait entre eux des causes légitimes de préfé- rence (art. 2093). Les créanciers de l'associé n'ont sans doute pas, comme nous le montrerons, le droit de saisir les biens sociaux (*), mais ils peuvent néanmoins, si la saisie est faite par les créanciers sociaux, concourir avec ces derniers sur la somme qui représente la part de leur débiteur. Cependant certains auteurs n'ont pas cru que la négation de la personnalité civile conduisit à cette conséquence ('). L'art. 1860, disent-ils, interdisant à l'associé d'aliéner les biens sociaux, lui interdit implicitement de s'obliger sur ces mêmes biens; non seulement donc ses créanciers ne peuvent pas saisir sa part dans les biens sociaux, et peuvent seule- ment saisir sa part d'intérêt dans la société, mais, si les biens sociaux sont saisis par des créanciers sociaux, les créanciers personnels des associés ne viennent pas en concours avec eux. 1 Paris, 9 août 1831, S., 31. 2. 259. — Duvergier, n. 406; Troplong, II, n. 865 : Houpin, I. n. 106; Tlialler, n. 28i, 285 et 304. — En ce sens pour les sociétés com- merciales, Cass., 26 août 1879, S., 79. 1. 454, et pour les sociétés minières, Lau- rent, XXVI, n. 424; Guilluuard, n. 369. (3) Cass., 2 juin 1834, S., 34. 1. 603. — Cass., 19 mars 1838, S., 38. 1. 343. — Paris, 19 avril 1831, S., 31. 2. 202. — Laurent, XXVI. n. 360; Lyon-Caen et Re- nault, II. n. 109 ; Colmet de Sanlerre, art. 1864. n. 53 bis, XI ; Meynial, Noie, S., 92. 1.74; Hue. XI, n. 27. (3) V. infra, n. 336. 1 Mongin, Elude sur la situation juridique des sociétés dénuées de personna- lité. Rev. crit., XIX, 1890, p. 700, § 1 ; Thiry, Rev. crit., V, 1854, p. 412 s. ; Déman- geât sur Bravard, I, p. 176 ; Aubry et Rau, IV, p. 566, § 383, note 7; Guillouard,. n. 273 (V. cep. n. 261). DROITS DJ S I RÉANI il. us 213 Il y a dans ce raisonnement, à notre avis, une double con- tradiction : d'une part, si l'on rejette la personnalité de la société, le droil des associés dans la société comprend uni- quement leur droit dans les biens de la société et il ne sau- rait être question d'une part d'intérêt dans la société; en disant le contraire, on fait une concession à la doctrine de la personnalité. D'autre part, si l'argument tiré de l'art. 1860 était sérieux, il ne serait pas suffisant de réduire les créan- ciers de l'associé sur les biens de la société à un droit primé par celui des créanciers sociaux ; il faudrait refuser aux créan- ciers de l'associé tout droit quelconque sur les biens de la société, car, l'aliénation étant entièrement nulle, l'engagement ne le serait pas moins. Il faut ajouter que l'art. 1860 ne dit pas ce qu'on lui fait dire; il signifie seulement, comme nous l'avons montré, que l'associé n'a pas, dans ses rapports avec ses co-associés, le pouvoir d'aliéner; il ne tranche pas la question de la validité de l'aliénation à l'égard des tiers (')• On objecte, d'autre part, que le prix des biens sociaux est lui-même un bien social et, comme tel, échappe aux créan- ciers de la société. Cela supposerait qu'il peut y avoir, dans une société qui n'a pas de personnalité, des biens sociaux, ce qui implique une contradiction dans les termes mêmes; il ne peut y avoir dans une société de ce genre que des biens indi- vis, et les sommes et créances, se divisant de plein droit entre les associés, ne sont pas indivises. En vain objecte-t-on encore que l'associé soumet son apport à toutes les éventualités de la société et consent, par consé- quent, à l'affecter aux créanciers sociaux. Une pareille affec- tation ne peut être faite au préjudice des créanciers de l'asso- cié : car il est de principe que nul ne peut, sans remplir les formalités du nantissement ou de l'hypothèque, donner à cer- tains de ses créanciers un droit de préférence sur les autres. On a dit également que le concours des créanciers person- nels entrave le fonctionnement de la société; que les créan- ciers sociaux, insuffisamment payés, recourront sur d'autres (')V. supra, n. 331. 214 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ biens sociaux et ainsi que les créanciers personnels, qui ne peuvent saisir les biens sociaux, arriveront indirectement à cette saisie. Ces considérations nous paraissent un peu puéri- les; car le point de savoir si une personne jouit d'un droit ne peut être résolu par l'examen des conséquences indirectes que produirait la concession de ce droit. D'autre part, c'est une pétition de principe que d'affirmer que les créanciers per- sonnels ne peuvent entraver le fonctionnement de la société. 354. En admettant que les créanciers sociaux aient un droit de préférence sur les créanciers des associés, ce droit de préférence survit-il à la dissolution de la société? Non, pensons-nous, dans la théorie de la personnalité civile, parce que la dissolution de la société fait disparaître cette personnalité; car, une fois la dissolution opérée, l'associé prend la place de la société disparue et c'est à lui qu'appar- tient une part des biens sociaux. Les créanciers de la société deviennent créanciers de l'associé et ne sauraient, dès lors, avoir un droit de préférence sur les autres créanciers de l'as- socié. Oui, au contraire, pour les auteurs qui, sans admettre la personnalité civile de la société, fondent le droit de préfé- rence des créanciers sociaux sur ce que l'associé a soumis ses apports aux éventualités des opérations sociales ('). C'est d'une manière définitive alors que sa part est affectée aux créanciers sociaux. 355. Le concours des créanciers personnels est également admis après la dissolution de la société par les auteurs qui veulent empêcher que les créanciers personnels entravent le fonctionnement de la société ou provoquent indirectement l'expropriation des biens sociaux (s). Car ils ont le droit de poursuivre eux-mêmes celte expropriation, non pas, sans doute, dès la dissolution de la société, mais après le partage. D'un autre côté, on ne peut les accuser d'entraver le fonction- nement d'une société qui n'existe plus. 356. Si, selon nous, les créanciers sociaux n'ont aucun droit (') En ce sens Démangeât, loc. cit. — V. aussi Thaller, n. 305. (2) Aubry et Rau, loc. cit. ; Guillouard, n. 273 ; Thiry, Rev. crit., VII, 1855, p. 289 s. ; Pont, n. 666. DROITS DKS CRÉANCIERS 215 de préférence sur les créanciers personnels, ces derniers ce- pendant n'ont pas le droit île saisir, tant que dure la société, la pari de leur débiteur dans les biens sociaux ('). Ce sont, en ellet, des biens indivis entre leur débiteur et des tiers ; or, l'art. '2'HYô défend aux créanciers de l'un des copropriétaires de Baisir et faire vendre les biens indivis. Cet argument est suf- sant et il est inutile, comme on l'a fait, d'invoquer l'art. 1860, qui n'a trait qu'à l'aliénation directe et, du reste, ne trancbe pas la question de la validité de l'aliénation. Ils ne peuvent pas davantage, avant la dissolution (*), de- mander le partage des biens sociaux, soit qu'on considère la société comme une personne morale (s), soit même qu'on lui dénie la personnalité, car c'est en leur qualité de créanciers, c'est-à-dire comme exerçant les actions de leur débiteur, que les créanciers peuvent demander le partage, et, par suite, cette action ne leur appartient que si elle appartient au débi- teur bien que, dans une certaine opinion, ils l'exercent de leur chef ('). Les créanciers d'un associé peuvent, au contraire, saisir sa part dans les profits de la société et cela même dans l'opi- nion qui attribue la personnalité aux sociétés civiles (5) ; aussi faut-il annuler la clause dont l'objet serait d'empêcher cette saisie en décidant que les prélèvements des associés ne figu- reront pas dans les écritures (6). (') Paris, 10 juin 1869, D., 70. 1. 304. — Aubry.et Rau, IV. p. 560, § 381 bis; Pont, n. 592 ; Thiry, Heu. cril., VII, 1855, p. 301 ; Laurent, XXVI, n. 360; Mongin, op. cil., p. 701 et 705, § 1 ; Lyon-Caen et Renault, II, n. 273 ; Houpin, loc. cit. ; Guillouard, n. 271 et 273. — Cpr. Thaller. n. 284. — V. cep. Hue, XI, n. 27. — Cet auteur, sans doute par inadvertance, car il se fonde sur l'art. 1860 qui n'est pas spécial aux sociétés pourvues de personnalité morale, n'accepte celte solution que pour les sociétés qui sont des personnes morales. Cependant il reproduit plus loin la même opinion (n. 95). (•) V. infra, n. 482. (3) Thaller, n. 284. (*) V. notre Tr. des suce, 2* édit., II, n. 2269 s. (5i Paris, 2 mai 1811, S. chr. — Paris. 13 août 1834, S., 34. 2. 674. — Alger, 11 juin 1866, S., 67. 2, 46. — Trib. civ. Seine, 12 juin 1834, S., 34. 2. 674. — Aubry et Rau, IV, p. 560, § 381 bis, notes 3, 4 et 5 ; Laurent, XXVI, n. 357 s. ; Mongin, op. cit., p. 702, § 1 ; Thiry, Rev. crit., VII, p. 304 s. ; Guillouard, n. 252 bis et271 ; Thaller, n. 305. (6) Trib. comm. Marseille, 13 nov. 1894, sous Cass. req., 10 janv. 1898, D., 99. 1. 162. 216 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Mais l'adjudicataire demeure étranger à la société et ne peut, par suite, s'immiscer dans son administration ni en demander la liquidation et le partage avant la dissolution ('); il acquiert seulement le droit d'agir contre la société pour réclamer la part à laquelle l'associé a droit dans le profit ('). Sa situation est identique à celle du croupier. Il peut également, comme nous le verrons, demander le partage après la dissolution de la société et peut-être aussi réclamer la dissolution en cas de déconfiture de l'associé dont il a acquis la part (3). 357. Quant aux créanciers sociaux, ils peuvent évidemment saisir les biens de la société (4). On objecte qu'ils provoque- raient ainsi la dissolution de la société. Gela n'est pas exact, car ils agissent non pas comme créanciers de l'un des associés, mais de tous les associés, et leur action, par suite, ne suppose pas le partage préalable du fonds social ni la dissolution de la société. 358. Après la dissolution de la société, et tant que le par- tage n'a pas été effectué, le droit de saisie continue à être refusé aux créanciers personnels des associés ; l'art. 2205 garde, en ellet sa valeur (5). Si on a soutenu le contraire ('), c'est en rattachant la ques- tion à l'art. 1800, qui, nous le répétons, y est étranger, et en interprétant à tort ce texte comme mettant à la charge des associés une obligation personnelle qui cesse lors de la disso- lution de la société. 359. II va sans dire que, dans toutes les opinions, les droits des créanciers personnels diffèrent par leur étendue de ceux qui appartiennent aux créanciers sociaux; les créan- (') Cass., 11 mars 1806, S. chr. — Paris, 13 août 1834, S., 34. 2. 674. — Alger, 18 juin 186(3, précité. — Aubry et Rau, loc. cit., notes 2 et 5 ; Laurent, loc. cit. ; Gnillouard, n. 271. ') Aubry et Rau, loc. cit.: Guillouard, n. 252 bis'. 1 V. infra, n. 458 et 482. (4) Mongin, op. cit., p. 706. § 1. — Contra Hue, XI, n. 88 mais cet auteur se contredit au n. 99'. (5) Aubry et Rau, IV, g 381 bis, i. f. et VIII, S 777, p. 457, note 2; Thiry, Kev. crit.. VII, 1855, p. 304 s. ; Mongin, op. cit., p. 705, § 1. •) Pont, n. 666. DR01 rS DES I RÉANCIEBS '2\1 ciers sociaux, qu'ils soient considérés comme créanciers de la société ou des associés, ont une action sur Ions les biens de la société; les créanciers personnels d'un associé n'ont d'action 76: Laurent, XXVI, n. 362 et 363; Guillouard, n. 277. n Mêmes auteurs. 1 S 8, Insl., de sociel . '■'>. 26. DISSOLUTION — EXPIRATION M TEMPS 221 cas contraire, clic ne se produit que du jour du jugement 369. Aucune notification n'est aécessaire pour opérer la dissolution qui a lieu de plein droit. Il en est ainsi, par exemple, de la dissolution résultant de la mort d'un associé (*). 370. En principe, les parties peuvent déroger aux causes de dissolution, en les augmentant ou en les diminuant. Tou- tefois cette règle comporte des exceptions : ainsi on admet que les associés ne peuvent s'obliger à maintenir la société pendant une durée illimitée (8). Ils ne peuvent pas davantage décider que leur consente ment unanime ne suffira pas à dissoudre la société, car cet engagement, [tris envers eux-mêmes, ne saurait les lier. .Nous indiquerons, à propos de chacune des causes de dis- solution, si la convention peut la modifier ou la supprimer. § I. Causes qui mettent fin à la société de plein droit. I. Expiration du temps pour lequel lu société a été contractée. 371. En assignant par leur convention une certaine durée à la société, — nous indiquerons plus loin dans quels cas une société est faite pour une durée limitée, — les parties ont voulu par cela même que la société ne dépassât pas les limites lixées; elle prendra donc fin de plein droit à l'expiration du temps convenu, même si l'affaire pour laquelle la société a été contractée n'est pas terminée ' . Toutefois il se peut qu'en fixant un terme les parties n'aient voulu qu'indiquer le délai dans lequel elles désiraient voir terminer l'affaire pour laquelle la société a été contractée; dans ce cas le juge du fait pourra décider que la société doit durer jusqu'à la consommation de l'affaire (5). En particulier, et comme nous le verrons, si la durée de la société a été fixée à raison de la durée, alors déterminée, de (') Auteurs précités. {') Pont, n. 702; Guillouard, n. 295. (3) Cass. civ., 30 nov. 1892, S., 93. 1. 73. — V. infra, n. 445. ' V. infra, n.382. (5) Troplong, II, n. 870: Pont, n. 683; Laurent, XXVI, n. 366; Guillouard, n. 280; Hue, XI, n. 107. 222 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ l'affaire pour laquelle la société a été faite, et si un acte étran- ger aux parties vient augmenter ce dernier délai, la durée de la société augmente eu même temps; on doit alors supposer que la fixation du terme de la société n'a rien d'absolu et que la volonté des parties est de subordonner ce terme à la fin de l'entreprise ('). 372. Même si la durée de la société est fixée d'une manière absolue, la volonté des parties peut l'augmenter ou la dimi- nuer. Nous parlerons ultérieurement du second cas (2). Quant à l'augmentation de la durée, les parties peuvent évidemment la décider, en convenant avant l'arrivée du terme fixé que la société survivra pendant un certain temps à l'expira- tion de ce terme. Cette convenliou demeure soumise aux règles du droit commun en ce qui concerne la preuve. Si donc aucun écrit n'a été rédigé pour constater la société, l'intérêt engagé ne dépassant pas 150 fr., un écrit ne sera pas nécessaire non plus pour constater la prorogation (3) ; mais s'il a été dressé acte de la société, il devra être dressé acte aussi de la proro- gation, et cela même quand il s'agirait de moins de 150 fr. ; car l'acte de prorogation est fait, suivant le langage de l'art. 1341, « outrer le contenu de l'acte de société qu'il modifie (arg. art. 1341 et 1834 al. 2) ('). Dans tous les cas, la prorogation pourrait être prouvée par l'aveu et par le serment; elle peut l'être aussi par témoins avec commencement de preuve par écrit (3). C'est donc, nous le répétons, le droit commun qui s'applique ici de tous points. Telle est certainement l'idée qu'a voulu exprimer l'art. 1866 ; mais il le fait en fort mauvais termes: « Lu prorogation d'une société à temps limité ne peut » être prouvée que par écrit revêtu des mêmes formes que le >-> contrat de société ». Prise à la lettre, cette disposition con- duirait notamment à décider que, si la société a été constatée i' V. infru, n. 382. V. infru, n. 437, 438 s. ') Guillouard, n. 282; Houpin, I, n. 123; Iluc, XI, n. 110. ; Y. cep. Guillouard, toc. cit.; Houpin, lue. cit.; Hue, loc. cit. (S Cass., 11 déc. 1825, S. chr. — Cass., 19 juillet 1852, S., 53. 1. 33, D., 53. 1. I".». — Duranton, XVII. n.462 ;Troplong,II, n. 914; Duvergter, d.416; Pont, n. 688 et 689; Laurent, XXVI, n. 369; Guillouard, n. 282 ; Houpin, loc. cit. DISSOLUTION — PROROGATION 223 j),n un acte sous-seing privé, la prorogation ne pourra l'être que par un autre acte sous-seing privé, non par un acte authentique : ce qui esl évidemment inadmissible ('). Le tri- luin Boutteville, dans son rapport ("), interprète l'art. 1866 connue nous venons de le faire. Huant aux tiers, ils peuvent prouver la prorogation, comme la formation de la société (8), par tous moyens ('). 373. La prorogation tacite, opérée par la simple continua- tion des affaires sociales, sans qu'une convention expresse soit intervenue entre les associés, est évidemment permise (5). M;iis elle est soumise aux conditions de preuve que nous venons d'indiquer (6). Cette dernière solution a été contes- tic ' ; on a l'ait valoir qu'il y a là non pas une convention mais un simple fait, et que, dans le droit commun, les faits peuvent toujours être prouvés par témoins. C'est, selon nous, une erreur : la prorogation de la société ne peut avoir lieu siins la volonté commune et concordante des associés; ce n'est pas là autre chose qu'une convention, quoiqu'elle n'ait pas été formelle, et qu'elle résulte, non pas de paroles ou d'écrits, mais d'opérations sociales faites de concert entre les associés. D'un autre côté les faits qui produisent des conséquences juri- diques, et celui-ci est évidemment du nombre, ne peuvent être prouvés que conformément au droit commun; nous ajou- tons que, d'après l'opinion générale, la prorogation d'un bail, qui repose, comme la prorogation d'une société, sur le con- sentement tacite des parties, n'est pas soustraite aux principes ordinaires de la preuve. : lillouard, n. 282. Fenet, XIV, p. 414. 1 V. supra, a. 40. ' I.yon-Caen et Renault, II, n. 202; Houpin, lue. cit. [* Gass. req. (et non civ.), 18 déc. 1889, S., 93. 1. 467. —Laurent, XXVI, n. 370; Guillouard, n. 284; Hue, XI, n. 110. (6 Cass. (motifs), 14 mars 1848, S., 48. 1. 708, D., 48. 1. 120. — Cass. req., 18 déc. 1889, précité. Cependant cet arrêt, qui confond laconvention avec sa preuve, parait dire dans un de ses considérants que la preuve de la continuation des affaires sociales suffit, à moins qu'il ne s'agisse d'une société ayant un objet nouveau). — Laurent, XXVI, n. 368 et 370; Guillouard, n.283; Houpin, loc. cil. i'ont, n. 690; Vavasseur, I, n. 213. 22 ï DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Ainsi la prorogation tacite ne peut être prouvée par té- moins qu'avec un commencement de preuve par écrit (!). 374. Expresse ou tacite, il résulte des développements précédents que la prorogation est subordonnée à la volonté unanime des associés, à moins de clause contraire (*). Toutefois l'usage peut être contraire ; on conçoit que si, dans une contrée déterminée, la coutume veut que toutes les sociétés d'une certaine nature seprolongent de plein droit dans des conditions déterminées, les parties sont censées s'être référées à cet usage ; l'usage constant tient, en etfet, dans les relations privées, lieu de convention. Ainsi on a pu juger sans blesser les principes que dans le Jura les sociétés fromagèrcs sont réputées se proroger d'année en année (3). Celte prorogation n'est pas soumise aux règles ordinaires de preuve ; si même la société excède 150 ft\, l'usage sert de con- vention écrite (*). Ce n'est pas, en effet, une simple conven- tion tacite que l'usage, c'est une véritable loi, puisqu'il gou- verne tous les contrats d'une certaine espèce; sans doute les parties s'y sont référées tacitement; mais ne se réfèrent-elles pas également, quand elles font un contrat quelconque et notamment une société, aux principes législatifs qui gouver- nent ce contrat? Soutiendra-ton, par exemple, que le par- tage égal des bénéfices ne peut être admis sans qu'une con- vention en ce sens soit démontrée? Nous ne voyons pas pour- quoi ce qui est vrai de la loi écrite ne le serait pas également de la loi orale qui constitue l'usage. Nous avons à peine besoin d'ajouter que notre solution a le double mérite d'être conforme à l'intention certaine des parties et de ne présenter aucun inconvénient pratique. 375. La convention de prorogation doit nécessairement intervenir avant l'expiration du temps pour lequel la société a été contractée. Après cette expiration, la société, irrévoca- (' Cass., 19 juil. 183», précité. — Cass. req., 18 déc. 1889, précité. (*) Trib. civ. Lyon, 19 mars 1894, Reo. soc, 94. 502. — Lvon-Caen et Renault, II, n.301 ; Houpin. 1, n. 123. (3) Besançon, 12 mars 1866, S., 67. 2. 281, D., 67. 2. 33. 4 Besançon, 12 mars 1866, précité. — Conlra Guillouard, n. 28j ; Houpin. I, n. 123. DISSOLUTION PROROGATION 223 blement dissoute, ne pourrai! plus être restaurée par la vo- lonté des parties; on ne saurai! revenir sur un fait accompli. Ii \olonte des parties pont bien empêcher une société de se dissoudre, mais elle ne peut pas faire qu'une société dissoute ûe soit pas dissoute. Tout ce qui serait possible désormais, ee serait de former une nouvelle société sur les mômes hases que l'ancienne, mais ce ne serait plus l'ancienne société qui continuerait ('). Au contraire, l'ancienne société continue si la prorogation est décidée avant son expiration (*); aucune interruption, en effet, ne s'est produite et les parties ont entendu conserver l'ancienne société. L'idée contraire, exprimée par Boutteville dans son rapport au tribunat '), n'a d'autre but, dans la pensée de son auteur, que de justifier les dispositions de la loi relatives à la preuve; on ne peut donc s'en prévaloir en faveur de l'opinion contraire. 376. C'est une nouvelle société qui prend naissance si l'objet de la société prorogée est différent de l'objet primitif de la société (*). Alors, dans toutes les opinions et même si la nouvelle con- vention est tacite, il faut recourir aux modes de preuves exi- gés pour la société elle-même (s). 376 bis. La durée de la prorogation doit être calquée sur la durée primitivement convenue si un terme avait été fixé : la volonté des parties est vraisemblablement en ce sens. Cependant, on soutient que, par analogie de l'art. 1844 (•), la société doit durer jusqu'à la mort de l'un des associés (7). (') Laurent, XXVI, n. 371 ; Guillouard, n. 286: Iloupin, I, n. 123.— Contra Troplong, II, n. 915 ; Pont, n. 686: Hue, XI, n. 107. (*)Troplong, loc. cit.; Pont, loc. cit.; Laurent, XXVI, n. 371; Guillouard, n. 286: Iloupin, loc. cit.; Iluc, XI, n. 55 el 107. 3 Penet, XIV, p. 634. (*) Cass. req., 18 déc. 1889, S., 93. 1. 467 (société primitivement constituée pour exploitation d'une ferme; prorogation pour l'exploitation de la même ferme, 'ouée par un nouveau bail pour une nouvelle période; nous doutons qu'on puisse lire avec la cour de cassation, que, dans l'espèce, l'objet de la société s'est modifié). — Houpin, loc. cit. (£) Cass. req., 18 déc. 1889, précité. >6, V. infiçt, n. 383. {') Hue, XI, a. 110. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 15 226 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 377. C'est la loi du lieu où le contrat est fait qui règle la durée de la société ('). II. Extinction de la chose. 378. L'art. 1865-2° dit que la société finit par l'extinction de la chose. Ce n'est qu'une application particulière du principe consacré par l'art. 1302; elle était déjà donnée en droit romain (') et dans l'ancien droit (3). Tel est le cas où la mine pour l'exploitation de laquelle la société avait été constituée est épuisée {* . 379. A la perte de la chose, il faut assimiler l'événement qui soustrait le fonds social à l'exploitation commune (5) ; la perte s'enfend donc d'une manière relative. Ainsi la confiscation du fonds social rompt la société; c'est ce que décidait le droit romain (6). Domat donnait encore comme exemple le cas où « la société était pour la ferme d'une terre prise par l'ennemi dans un temps de guerre » (7). Il y a encore perte de la chose en cas de révocation de la concession pour l'exploitation de laquelle a été formée la société (8), ou de l'autorisation nécessaire à son fonctionne- ment [•), ou d'interdiction de l'exploitation par l'autorité (10), ou en cas de cessation du bail de la chose mise en société^11), ou en cas de cession de l'exploitation à. un tiers (12) ou à un seul des associés (,3). On a également assimilé à l'extinction de la chose son («) Trib. corn. Marseille, 7 fév. i878. H L. 63, § 10, D., pro soc, 17. 2. (3) Domat, liv. 1, tit. VIII, sect. 5, § 11; Pothier, n. 140. («) Hue, XI, n. 111. (5) Guillouard, n. 288; Houpin, I, n. 125. («) L. 63, § 10, D., pro soc, 17. 2. (7) Domat, loc cit. I») Cass., 17 déc. 1834, S., 35. 1. 651. — Pont, n. 682; Guillouard, n. 293; Wahl, Noie, S., 96. 2. 57, § 2; Houpin, loc cit. (9) Cpr. Trib. civ. Seine, 14 mars 1887, Gaz. Pal., 88. 1. Suppl., 87 (assurances mutuelles). ('<>) Hue, XI, n. 111. (") Trib. civ. Lyon, 8 juill. 1893, Gaz. Pal., 93. 2. 561 (chasse). (>») Hue, XI, n. 115 (qui cite Gand, 10 août 1860, Pasicr., 60. 2. 347). (1S) Hue, loc. cit. DISSOLUTION — CONSOMMATION Dr. r.A M-':<1(h;iatIuN 227 défaut d'existence (' ; mais il est plus exact de dire que dans ce cas la société ne se forme pas ('). 380. L'art. 1865 ne parle que de l'extinction de la chose, c'est-à-dire de la disparition totale de l'objet mis en société. Cependant, comme nous le verrons, la perte partielle peut donner lieu à la dissolution judiciaire de la société (8). Nous montrerons que la perte de l'apport peut également donner lieu à la dissolution ('). On applique quelquefois l'art. 186o à la perte du capital social (5). Gela est, selon nous, inexact (6) : la loi ne vise, ainsi que le dit expressément Pothier dans le passage d'où est extrait l'art. 1865, que le cas où la société est formée pour exploiter une certaine chose et où cette chose périt. Du reste le fonds social n'est que le composé des apports et l'art. 1867 porte que la perte des apports ne met pas, en principe, fin à la société. Rien, enfin, n'empêche une société de fonctionner avec des fonds empruntés après la perte de son capital. Tout ce qu'il est vrai de dire, c'est que la dissolution judiciaire de la société peut être prononcée, si son capital n'est plus suffi- sant, en fait, pour lui permettre de fonctionner. III. Consommation de la négociation. 381. La consommation de la négociation, à laquelle fait allusion l'art. 1863, est également indiquée comme mettant fin à la société par l'art. 1844 : « S'il n'y a pas de convention » sur la durée de la société, elle est censée contractée pour » toute la vie des associés... ou, s'il s'agit d'une affaire dont » la durée soit limitée, pour tout le temps que doit durer cette » affaire ». Le droit romain (7) et l'ancien droit (8) donnaient la même solution, qui est également admise à l'étranger (9) ; (•) Trib. civ. Seine, 23 juin 1897, Droit, 7 sept. 1897. (-') V. supra, n. 65 s. 1 V. infra, n. 462. ' V. infra, n. 433 s., 462. 1 Ohss., 16 juin 1873. S., 73. 1. 386, el les auteurs précités. Wahl, Note, S., 96. 2.57, §2. 6, Inst. de soc, 3. 26; 1. 63, § 10, 1. 65, § 10, D., pro soc, 17. 2. [*, Domat, liv. I. til. VIII, sect. V, § 11 ; Pothier, n. 143. (•) Allemagne, Eck, loc cit. 228 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ elle n'est, en réalité, qu'une application de l'expiration de la société par l'arrivée du terme ('), car la consommation de l'affaire est un terme incertain que se sont implicitement pro- posé les parties. Nous tirerons de là une conséquence impor- tante en parlant de l'extinction de la société par la volonté de l'un des associés. Pothier donnait l'exemple suivant : La société formée pour l'achat de marchandises et pour leur revente à une foire dé- terminée cesse quand les marchandises ont toutes été vendues à cette foire. 382. La société constituée pour une affaire déterminée cesse évidemment une fois que cette affaire est faite, même si un terme fixe a été stipulé, lequel n'est pas expiré lors de la consommation de l'affaire. Il est, en effet, matériellement impossible qu'une société persiste quand elle n'a plus d'objet. Mais si le terme stipulé arrive avant la consommation de l'affaire, la société se dissout-elle immédiatement ou, au con- traire, se continue-t-elle jusqu'à la consommation? La ques- tion doit être résolue en fait. On ne peut adopter en règle absolue la seconde solution (■). Cependant, généralement, cette seconde solution doit l'emporter (3), car, en décidant que le terme stipulé n'est qu'une indication et formule sim- plement le vœu des associés, on méconnaît moins leur volonté qu'en mettant brusquement fin à la société, sous prétexte que le terme est arrivé et alors que l'affaire est en suspens. A plus forte raison, la société constituée pour une affaire déterminée doit-elle persister au delà de la durée fixée, si cette durée a été établie à raison du terme de l'existence même de l'affaire, et que cette existence soit prolongée par un acte indépendant des associés. Ainsi la société formée pour deux ans et destinée à l'exécu- tion de travaux publics dont l'administration exige l'achève- ment dans ce délai est considérée comme devant durer jus- qu'à l'achèvement effectif si, à raison de changements prescrits {* Guillouard, n. 291. (*) Houpin, I, n. 122 et 126: Hue. XI, n. 107. — V. cep. Guillouard, n. 280 et 292; Duvergier, n. 41 i ; Pont, n. 684; Laurent, XXVI, n. 366. ^1 Houpin, loc. cil. D1SS0L1 riO» - MORT D I SI ISSOCIÉ *22!> par l'administration, un nouveau délai d'achèvémcnl esl accordé aux concessionnaires ('). l>c même, si la concession d'un service dans une maison de détention étail faite pour une durée déterminée et a été pro- longée à raison d'avances faites par le concessionnaire, la société formée pour l'exploitation de celte concession pendant si durée primitive subsiste jusqu'à l'achèvement de la con- cession définitive (*). Mais il serait contraire à la volonté des associés de les maintenir dans une société après la consommation de l'affaire pour laquelle la société a été formée, alors que les gérants de la société ont demandé et obtenu la prolongation de cette affaire ('); l'acte ainsi fait par les gérants excède leur pouvoir, car ils n'ont pas reçu mandat de prolonger à leur gré la durée de la société. IV. Mort de l'un des associés. A. Fondement et portée de cette cause de dissolution. e 383. En général, les contrats passés par une personne se continuent au profit ou à la charge de leurs héritiers. Mais l'art. 1122, qui pose cette règle, ajoute immédiatement : « à » moins que le contraire ne soit exprimé ou ne résulte de la » nature de la convention ». La société est précisément l'une de ces dernières conventions. La considération des personnes est dominante dans ce contrat : il implique la confiance, sou- vent l'estime et quelquefois l'affection réciproques des con- tractants les uns pour les autres; il crée ou consacre entre eux un certain jus fraternitatis, une sorte de lien de solida- rité. La mort de l'un des contractants est le plus souvent une désorganisation. Faire continuer la société entre les survivants seulement, ce serait parfois la vouer à l'impuissance. Per- mettre à l'héritier de l'associé décédé de prendre sa place, serait plus grave encore; car on introduirait ainsi un inconnu Bruxelles, 13 janv. 1810, S. chr. — Guillouard, n. 292. (*) Nîmes, 2 janv. 1839, S., 39. 2. 74. — Guillouard, n. 292. ' ' Contra Trib. civ. Lyon, 19 mars 1894, Gaz. Trib., 15 juil. 1894 (si une société de chasse est formée pour la durée d'un bail de chasse, le renouvellement de ce bail par les gérants de la société proroge la société;. 230 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ dans la société ('). Ces considérations justifient la solution que l'art. 1844 donne dans les termes suivants : « S'il n'y a pas » de convention sur la durée de la société, elle est censée con- » tractée pour toute la vie des associés, sous la modification » portée en l'art. 1869 », et que reproduit l'art. 1863-3°. Cette règle existait, du reste, déjà dans le droit romain et diins l'ancien droit (*). On décidait de même pour la mort civile (3). 384. On admet que l'extinction par la mort des associés s'applique à la promesse de société comme à la société elle- même (4) ; il est plus exact de dire qu'en cas de mort de l'une des parties la promesse ne peut être suivie d'exécution. 385. Cette cause d'extinction s'applique à toutes les sociétés, même celles qui ont une durée limitée (s). Elle existe à plus forte raison dans les sociétés à durée illimitée. Notamment la société minière se termine par la mort d'un associé. On décide généralement le contraire (6), par la raison qu'il est à supposer que les parties ont entendu faire durer la société assez longtemps pour épuiser les produits de la mine. Cette interprétation de la volonté des parties est divinatoire; on pourrait, du reste, en dire autant de la société formée pour l'exploitation d'un fonds de commerce, d'une usine, etc. L'extinction par la mort d'un associé se produit même dans les sociétés qui ont pour objet l'exploitation d'immeu- bles (7). (') Guillouard, n. 294. -) Domat, lre partie, liv. I, titre VIII, sect. 5, § 14; Pothier, n. 146. (s) Domal, lT* partie, liv. I, titre VIII, sect. 5, § 15: Argou, lnstil., liv. III, ch. XXXII, p. 324; Richer, De la mort civile, 1755, p. 513. («) Paris, 24 fév. 1860, D., 60. 2. 84. — Guillouard, n. 293; Houpin, I, n. 127; Hue, XI, n. 116. (s) Aubry et Rau, IV, p. 569, § 384, note 7; Guillouard, n. 295; Houpin, toc. cil. (8) Lyon, 22 juill. 1858, D., 59. 2. 80. — Nancy, 28 juill. 1891, Gaz. Pal., 91. 2. 552. — Laurent, XXVI, n. 430; Guillouard, n. 372; Delecroix, Des sociétés de mines, n. 159 s.; Féraud-Giraud, Code des mines, I, n. 231. 0) Contra Nancy, 28 juill. 1891, précité. — Cet arrêt se fonde sur ce que la société est alors formée dans Tintérèt des biens et non des personnes. DISSOLUTION — MORT d'un ASSOCIÉ 231 Mais comme elle est fondée sur le caractère personnel du lien social, elle ne s'applique pas aux sociétés de capitaux, telles que la société anonyme ('). 386. La mort de l'associé qui dissout la société est oppo- sable aux tiers même sans publication (*). Cette solution est applicable non seulement aux sociétés civiles, mais encore aux société commerciales Toutefois il en est autrement et les tiers ont le droit d'agir contre tous les associés s'ils ont eu de justes raisons de croire que les associés survivants ont, comme ils en avaient le droit, prorogé la société, par exemple s'il était dit dans le contrat social que la société continuerait de plein droit ou si les affaires sociales ont été continuées (4). Dans cette hypothèse, le tiers se prévaut de la faute même des associés survivants qui, par leurs agissements, ont fait croire à la continuation de la société. De même, si la société continue en fait, les tiers peuvent la considérer comme subsistante (5). Les associés ne peuvent pas mettre à la charge nime héritier bénéficiaire, ne soit tenu des dettes sociales que jusqu'à concurrence de l'actif héréditaire, il ne devient pas commerçant; on admet en elïet que les associés tenus pour leur apport seulement ne sont pas des commerçants; dans le Bystème contraire ', l'objection n'est pas davantage sans réponse : le mineur ne commence pas un commerce, il le con- tinue. 396. Ce que nous disons de la minorité de l'héritier s'appli- que au cas où, lors du décès de son auteur, il est interdit; les raisons que nous venons de faire valoir s'appliquent encore ici en entier. Mais si l'héritier devient interdit après son entrée en société, la société se dissout, à moins de clause contraire, et confor- mément aux termes généraux de l'art. 1865 (5). 397. La clause que les héritiers auront le droit de continuer la société peut être invoquée au nom des héritiers mineurs aussi bien que contre eux (3). 398. La renonciation par les représentants du mineur du défunt au bénéfice de la continuation de la société n/'est pas une libéralité (*). Ce n'est pas non plus une vente de meubles à laquelle il faille appliquer les formalités de la loi du 28 fév. 1880 (s), ni une transaction f). C'est une renonciation, à laquelle il y a lieu d'étendre par analogie les conditions de validité de la renonciation à succession (7). 399. On a décidé que l'héritier mineur et l'héritier bénéfi- ciaire ne peuvent être tenus des dettes de la société au delà des forces de la succession qu'ils recueillent (8). Certains (») V. infra, n. 399. ' V. infra, n. 414 s. s) Paris, 7 avril 1887, précité. (*) Thaller, Note, D., 87. 1. 65. — Contra Trib. civ. sous Cass., 1" mars 1886, D., 87. 1. 65. (5) Thaller, loc. cit. <6I Thaller, loc. cit. 7) Thaller, loc. cit. — En tout cas il ne suffit pas d'une délibération du conseil de famille, non exécutée par le tuteur. — Cass. req., ier mars 1886, S.. 89. 1. 468, D., 87. 1. 65. — Thaller, loc. cit. 8 Cass., 2 mars 1885, S., 85. 1. 362, D., 85. 1. 441. — Grenoble, Il mars 1890, précité. — Houpin, I, n. 128. 240 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ auteurs restreignent celte solution aux dettes antérieures a l'ouverture de la succession ('). Elle nous parait inexacte sans distinction. En ce qui concerne tout d'abord les dettes postérieures k l'ouverture de la succession, on pourrait, à la vérité, pour sou- tenir que l'héritier n'en est pas tenu ultra rires, dire que la société est censée être continuée par le défunt lui-même; mais ce serait une idée inexacte : la succession n'a pas de person- nalité morale. Pour les dettes antérieures elles-mêmes, la solution doit être la même; en qualité d'héritier bénéficiaire, l'héritier n'en est pas tenu sur son patrimoine, mais il en est tenu comme associé; dès lors que la société continue avec l'héri- tier, et que celui ci y entre ainsi en son nom personnel, il est dans la situation d'un tiers qui devient associé dans le cours de l'existence de la société. 399 bis. Eu tout cas, il est valablementstipulé qu'une société sera en commandite avec l'héritier mineur de l'un des asso- ciés (8), carie commanditaire, d'une part, n'est pas commer- çant, et, d'autre part, n'est pas tenu des dettes sociales sur son patrimoine. 400. Alors même que la société doit continuer avec les héritiers du défunt, les statuts peuvent modifier les droits de ces héritiers. Ainsi ils peuvent décider que l'héritier ne pourra prendre part aux délibérations (3), qu'il ne pourra contrôler les inventaires ou vérifier les livres ('). h. Clause "> la société continuera ou pourra continuer entre les associés survivants. 401. La clause portant que la société continuera entre les associés survivants, et que les héritiers du défunt en seront exclus, est formellement autorisée par l'art. 1868. En droit romain, quoique la personnalité du lien social fut d'ordre (>) Lyon-Caen, Sole, S., 88. 2. 145: Lyon-Caen et Renault. Traité, II, n. 231. (2) Lyon-Caen et Renault, Traité, II, n. 231. — Confia Hue, XI, n. 118. ») Trib. civ. Boulogne, 19 janv. 1893, Loi. 5 avril 1893. (*) Trib. civ. Boulogne, 19 janv. 1893, précité. — Décidé cependant que l'héritier peut faire vérifier la comptabilité, mais à ses frais et sous peine de dommages-inté- rêts en cas d'allégations maheillantes. Trib. civ. Boulogne. 19 janv. 1893, précité. WSS0L1 TION - MORT lu \ ïSSOl IÉ ->\ | public, ce principe étail également admis (»). Il en était de même dans l'ancien dn.il •). Ces! qu'en réalité celle clause ne rael pas en échec le principe de la personnalité, elle n'en est au contraire qu'une application, puisqu'elle écarte les héritiers de la société en stipulant le maintien de la société entre 1rs associes existants, les seuls qui soient en état de se connaître et de s'apprécier. La clause permettant aux héritiers de rester ou non dans la société est également valable ('). Ces clauses doivent être expresses suivant l'art. 1868. Mais s'il est convenu que les héritiers pourront sortir de la société les parties ont suffisamment exprimé que, dans le cas où les héritiers se retireraient, la société continuerait entre les sur- vivants (4). 402. S'il a été stipulé que la société continuerait après le décès de l'un des associés, la société ne peut, après ce décès conserver sa raison sociale, quand, dans celte raison sociale' figure le nom de l'associé défunt. Toutefois la société peut, dans ce même cas, garder sa rai- son sociale en la faisant précéder des mots : successeur de (s). 402 bis. Il peut être stipulé de même qu'en cas de décès de l'un des associés la société appartiendra au survivant (6). 403. Si la continuation est laissée au choix de l'associé ou des associés survivants, on a prétendu qu'il va là une double condition suspensive, le prédécès d'un associé pendant la du- rée de la société et l'option des survivants (7). Il est peut-être plus exact d'y voir un droit alternatif, dans le sens de l'art. 1189 C. civ., subordonné à une condition sus- pensive, le prédécès de l'associé (8). (')L. 65, §9, D.,prosoc, 17. 2. (*) Despeisses, Des contrats, 1" part., tit. III, sect. 3, § 4; Polluer n 144 (3) V. infra, n. 412. [♦) Hue, XI, n. 117 (qui cile Bruxelles, 13 avril 1878, Pasicr 78 2 *27) (« Tnb. corn. Lisbonne, 20 avril 1874, Joum. dr. inlern., II. 1875 n 70 (6) Cass. civ., 30 nov. 1892, S., 93 1 73 n 94 1 83 r„ cl \> ' Win ISO'. ~ «o« xi ' ' «3. — Bonfils, fley. cnt., AAin, 169^, p. b2b. — V. supra, n. 10. Honfils, op. cit., p. 626. clause383' req" 2° j,lln 1887' S-' 90" L 515- ~ Ce' arrôt affirme la va,idité de " Société, prêt, dkpùt. — 2» éd ■* 16 2-42 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 404. Cette clause est opposable aux héritiers mineurs (l). La cession des droits du prédécédé, en effet, remonte au jour même où elle est consentie, et elle est faite, en conséquence, par le défunt. 405. Les opérations qui sont faites à l'avenir sont entière- ment étrangères aux héritiers, qui ne participent ni aux bé- néfices ni aux pertes en résultant. Telle était déjà la solution de Pothier ! ; elle est reproduite par l'art. 1868. Cet article ajoute qu'il en est autrement toutefois pour les opérations qui sont une suite nécessaire de ce qui s'est fait avant la mort de l'associé. C'est là évidemment une question que les tribunaux doivent résoudre en fait (3). De même, les héritiers participent aux actes faits par un associé dans l'ignorance du décès de leur auteur (v). C'est l'application d'un principe que nous développerons en par- lant des actes faits dans l'ignorance de la fin de la société. 406. Les héritiers sont même tenus de continuer l'acte commencé par leur auteur (*), par application des règles du mandat et de la gestion d'affaires. 407. 11 résulte de l'art. 1868 que les héritiers de l'associé dé- cédé peuvent demander la liquidation de la société d'après son état à l'époque du décès. Cela n'est pas sans inconvénient pour les associés survivants, qui courent le risque de se trou- ver ainsi soumis à une véritable inquisition. Aussi stipule-t-on fréquemment que la part des héritiers du prédécédé sera réglée d'après le dernier inventaire ou état de situation. Dans ce cas, les héritiers peuvent ils réclamer immédiate- ment la part de leur auteur dans le fonds de réserve constitué par la société? C'est une question de fait (6).Mais en principe, la négative doit être admise (7),car le fonds de réserve, étant (!)Cass. civ., 30 nov. 1892, S., 93. 1. 73, D., 94. 1. 83 (impl.). — Bonfils, op. cit.. p. 626. (*) N. 144. . ■') Guillouard, n. 305; Houpin, n. 129. i*l Guillouard, n. 307; Houpin, loc. cit. (s) L. 35, L. 40, D., pro soc, 17. 2; Eck, loc. cit. {*) Guillouard, n. 306: Houpin, loc. cit. ' Paris. 22 janv. 1877, S., 80. 2. 104. — Guillouard, n. 306; Houpin, loc. cit. — Contra Hue, XI, n. 119. DISSOLUTION — MORT HO àSSOCIÉ 2Î3 destiné à faim disparaître ou à atténuer les pertes que pourra su I tir la société, doit, dans la pensée des associés, être maintenu pendant le cours de la société. 408. La clause d'après laquelle les droits de l'associé décédé seront constatés par le dernier inventaire social anté- rieur au décès est valable (') et opposable môme aux héritiers mineurs de l'associé décédé ('). 409. Il en est de môme de la clause portant que l'inven- taire sera dressé à l'amiable (*). On objecte que l'art. 451 exige que l'inventaire dressé lors de l'ouverture de la tutelle soit judiciaire. Mais cet inventaire est indépendant de celui qui est dressé après la dissolution de la société; il suffit que le premier mentionne les valeurs attribuées au mineur par le second, car il a pour seul but de déterminer les valeurs sou- mises à la gestion du tuteur; pour le second, la loi n'exige aucune formalité. 410. S'il est convenu que les droits des héritiers seront fixés par le dernier inventaire, ces derniers peuvent-ils récla- mer, en outre, la part du défunt dans les bénéfices faits de- puis l'inventaire jusqu'à son décès? C'est une question de fait (4), qui nous parait, en général, devoir être résolue par la négative. Le dernier inventaire est le plus récent de ceux qui ont été faits avant le décès (3). 411. Dans le cas où la part des héritiers est fixée par le dernier inventaire, les héritiers ne peuvent réclamer en ar- (') Trili. com. Seine, 18 avril 1889, Loi, 8 mai 1889.— Houpin, loc. cit.; Bonfils, Rev. cril., XXIII, 1894, p. 628. (2) Bonfils, loc. cit. (J; Cass. civ., 30 nov. 1892, S., 93. 1. 73, D., 94. 1. 83. — Pic, Ann.dr. com., VII, 1893, doctr., p. 410. — Conlra Montpellier, 11 fév. 1891. Droit, 29 mars 1891, et sous Cass., 30 nov. 1892, précité. — Bonfils, op. cit., p. 628. ') Trih. com. Seine, 31 mars 1894, Droit, 19 mai 1894, Rev. soc, 94. 354. — Houpin, loc. cit. — Si cette part n'a pas été comptée, on doit supposer que les parties ont interprété la question dans le sens de la négative, et les héritiers ne peuvent demander un redressement de compte. Trib. com. Seine, 31 mars 1894, précité. (*) Ainsi l'inventaire commencé avant et terminé après le décès n'entre pas en ligne de compte. Lyon, 22 mai 1891, Loi, 27 août 1891. — Lyon, 8 mai 1891, Mon. jud. Lyon, 10 juill. 1891. 2H DU CONTRAT DK SOCIÉTÉ cent la part de leur auteur: ils sont obligés de se contenter de valeurs d'inventaire, c'est-à-dire dune part en nature dans les biens sociaux ('). Car la règle générale est que, dans le partage qui s'opère à la dissolution de la société, les associés sont lotis en nature. Or la clause qui autorise la continuation de la société après le décès d'un associé, moyennant le rem- boursement de sa part à ses héritiers, ne fait, en ce qui les concerne, qu'anticiper le partage. Les héritiers remboursés de la part de leur auteur peuvent exercer un commerce similaire à celui de la société (2). o. Clause que la société pourra être dissoute ou continuer entre les associés ou avec les héritiers. 412. Très fréquemment, le contrat social porte que les associés survivants pourront, en cas de décès de l'un des associés et à leur choix, soit dissoudre la société, soit la con- tinuer entre eux, soit la continuer avec les héritiers. Cette clause est valable 3 . Elle ne déroge pas aux art. 1 170 et 1174 C. civ., qui annulent les obligations contractées sous une condition purement potestative de la part de celui qui s'oblige. On ne peut, quoique le contraire ait été affirmé (*), nier que la condition ne soit, en réalité, purement potestative, puisque la seule volonté des associés détermine quel sera le sort de la société; c'est bien là la condition si voluero, si cela me plait, que la loi annule. Répondre que la volonté des asso- ciés n'est pas libre, qu'elle dépend des événements, qui les amèneront à prendre l'un ou l'autre parti, c'est, à notre avis, nier et le sens naturel des termes employés — car, quand on dit que les associés sont libres de décider comme ils l'enten- dent, on donne uue force absolue à leur caprice — et l'exis- tence même de la condition potestative, car peut-on dire jamais que la condition si voluero laisse l'obligé entièrement ('} Cass.. 10 nov. 1857, S., 59. 2. 31. D., 59. 2. 50. — Guillouard, n. 352; Iku- pin, loc. cit. (s V. infra, n. 505. i3i Cass., 20 juin 1887, S., 90. 1. 515. — Guillouard, n. 304 ; Houpin, I, n. 129; Hue. XI. n. 117. (4) Guillouard, n. 304. DISS0L1 H"\ LNTERDICTIOM 01 FOLIE 245 libre el que su décision ne dni\<- pas lui être dictée par h's circonstances ? La véritable raison de valider la clause dont nous parlons, c'est qu'il n'y a [>as obligation sous condition purement potes- tative, mais bien droit stipulé sous cette condition; en effet, les associés se réservent non pas de contracter une obligation envers les héritiers, mais d'user ou non du droit de les com- prendre dans la société ; or la condition potestative de la part de celui qui s'oblige est la seule qu'interdise l'art. 1 174. V. Absence de l'un des associés. 413. L'absence de l'un des associés, même déclarée, ne dissout pas de plein droit la société (') ; l'absence, en effet, ne fait pas présumer la mort, et la mort de l'associé, qui mettrait fin à la société, doit être prouvée par les associés qui l'invo- quent; d'un autre coté, l'absence n'est pas, par elle-même, donnée par la loi comme une cause de dissolution. Nous verrons seulement que l'absence d'un associé peut quelquefois donner lieu à la dissolution judiciaire (*}. VI. Interdiction ou folie de l'un des associes. Nomination d'un conseil judiciaire. 414. L'interdiction légale d'un associé entraine la dissolu- tion de la société, aussi bien que son interdiction judiciaire (3), la loi ne distingue pas('). Du reste, les raisons de décider sont les mêmes : on est parti de l'idée que l'interdit, étant en tutelle, est incapable de rendre service à la société et que son inter- diction, à cause des autorisations qu'elle nécessite, entrave l'administration (5); or ces raisons s'appliquent aux deux inter- dictions. Certains auteurs rattachent cette dissolution à la (l) Demolombe, II, n. 144; Font, n. 707; Guillouard, n. 309; Houpin, I, n. 132; Hue, XI, n. 120. 1 V . infra, n. 463. (3) Duvergier, n. 443; Pont. n. 722; (luillouard, n. 312; Houpin, I, n. 133; Hue, XI, n. 121. (*) V. supra, n. 367. ;3) Pont, n. 721; Laurent, XXVI, n. 384; Guillouard, n. 311. 216 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ volonté présumée des parties, qui vraisemblablement n'ont pas voulu rester en société avec un fou ou un criminel ('). 415. Nous n'en dirons pas autant de la nomination d'un conseil judiciaire à l'un des associés vs) ; elle pourrait seule- ment, suivant les cas, comme nous le verrons, servir de fon- dement à une demande en justice, tendant à obtenir que la dissolution de la société fût prononcée (arg. art. 1871) (3), mais elle ne dissout pas la société de plein droit, caries causes de dissolution sont indiquées limitativement par la loi. Du reste, la dation d'un conseil judiciaire n'a pas pour la société les mêmes inconvénients que l'interdiction. L'administration n'est entravée que par la nécessité imposée à l'associé pourvu d'un conseil judiciaire d'obtenir, pour accomplir les actes de la vie civile, l'assentiment de son conseil ; or cela est moins compliqué que les autorisations dont a besoin le tuteur d'un interdit ; d'un autre côté, le pourvu de conseil jouit de sa raison et peut être utile à la société. 416. Le placement d'un associé dans un établissement public d'aliénés ne donne pas non plus lieu à la dissolution de la société [4). Ici encore le texte limitatif de l'art. 1863 n'autorise pas la solution contraire. Du reste, l'incapacité de l'aliéné n'est pas aussi absolue que celle de l'interdit. Toute- fois, comme nous le dirons, ce fait peut, suivant les circons- tances, autoriser les coassociés de l'aliéné à provoquer une dissolution judiciaire (5). 417. Comme la dissolution provenant de l'interdiction opère de plein droit, le représentant de l'associé qui est en état d'interdiction peut lui-même l'invoquer (6). Il en est ainsi même pour l'interdiction légale, quoiqu'il (') Hue, loc. cit. (') Arntz, IV, n. 1316; Aubry et Rau, IV. p. 570, § 384, note 9 ; Pont n. 723; Laurent, XXVI, n. 385: Guillouard, n. 313; Houpin, I, n. 134; Hue, XI, n. 122. — Contra Cass. belge, 17 oct. 1889, Jurispr. belge, 89. 316. — Bruxelles, 1e' mars 1880, Pasicr., 80. 2. 178. — Duranton, XVII, n. 474: Duvergier, n. 443 et 444; Lyon-Caen et Renault, II, n. 321. (}) V. infra, n. 463. (4) Guillouard, n. 313; Houpin, I, n. 135 ; Hue, XI, n. 122. 5) V. infra, n. 463. (•) Guillouard, n. 314; Houpin, 1, n. 133. DISSOLUTION — DÉCONFITURE OU FAILLITE 247 puisse paraître singulier de voir un individu se prévaloir de sa propre déchéance; la loi n'admet pas de tempérament à la règle absolue qu'elle a édictée ('). 418. On peut convenir que la société continuera entre les associés même si l'un d'eux vient à être interdit (*;. En prin- cipe, l'interdiction ne met pas fin aux contrats antérieurement passés par l'interdit ; l'interdit reste tenu des obligations qu'il a contractées et investi de ses droits ; la clause dont nous par- lons n'a donc d'autre effet que d'appliquer le droit commun aux sociétés. Il serait inexact d'objecter que la dissolution de la société par l'interdiction d'un associé est fondée sur ce motif d'ordre public, que l'associé interdit ne peut prendre part à l'admi- nistration et que l'interdiction entrave cette administration ; car la société peut bien continuer avec les héritiers mineurs ou interdits d'un associé, et cependant on pourrait dans cette hypothèse reproduire la même objection ; du reste, il n'est aucunement nécessaire que tous les associés puissent prendre part à l'administration de la société. La' vérité est que cette cause de dissolution est uniquement fondée sur la volonté présumée des parties ; la loi a supposé qu'elles n'en- tendent pas continuer la société, alors que Tune d'elles est pri- vée des facultés qui rendent sa collaboration utile; cela étant, rien n'empêche les associés de déclarer une volonté contraire. 419. L'interdiction est une cause d'extinction de toutes les sociétés civiles. Cela est vrai notamment pour les sociétés minières. L'opi- nion générale est contraire (3). Elle se fonde sur des raisons que nous avons réfutées en parlant de la mort d'un associé ('). VIL Déconfiture, faillite ou liquidation judiciaire. 420. La dissolution de la société par la déconfiture d'un associé est empruntée au droit romain; la société était dissoute (') Bravard, I, p. 403; Pont, n. 72 i ; Guillouard, n. 314; Houpin, toc. cil. (!) Guillouard, n. 318 ; Hue, XI, n. 121. (J Laurent, XXVI, n.430; Guillouard, n. 372 ; Delecroix, Des sociétés de mi- nes, n. 159 s. ; Féraud-Giraud, Code des mines, I, n. 231. {*) V. supra, n. 385. 218 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ quand l'un des associés tombait dans la misère (') et notam- ment quand son patrimoine faisait l'objet d'une bonorum ven- dit io ou d'une bonorum distractio (8). De même, dans l'ancien droit, la dissolution résultait de la cession de biens faite par un associé à ses créanciers (*), de la vente de tous ses biens ('), de sa misère (") ou du désordre de ses affaires (6). Comme aujourd'hui, la dissolution s'opérait de plein droit (7). 421. A la différence des autres causes de dissolution, la déconfiture, ne résultant pas d'un fait visible et incontesté, ne met, au cas où elle est niée, fin à la société que si son exis- tence est reconnue par un jugement (8). Cette solution ne con- tredit par l'idée que la déconfiture opère de plein droit, car encore faut-il qu'il y ait réellement déconfiture. 422. La saisie et la vente d'une partie du patrimoine n'est pas la déconfiture; il en est ainsi, par exemple, pour la saisie et la vente de la part sociale de l'associé. Certains codes étran- gers décident le contraire (•) et on a proposé d'introduire la même solution dans notre législation ('"). Il ne nous parait pas, pour noire part, désirable de multiplier les causes de dissolution; en particulier, la saisie de la part sociale n'a pas d'inconvénient pour la société, puisque l'adjudicataire n'a pas le droit d'intervenir dans l'administration ; en tous cas ces inconvénients ne sont pas plus grands que ceux d'une vente amiable de part sociale. [') L. 4, s 1, D., pro soc, 17. 2. (S)L. 65, § i, I)., pro soc. 17. 2. (3) Despeisses, Des contrais, lre p., lit. III, sect. 3, n. 9. (u! Despeisses, loc cit.: Domat, liv. I, til. VIII, sect. 5, S 12. (5) Domat, loc. cit. ;«) Domat, loc. cit.; Argou, liv. III. cli. XXXII, p. 324; Pothier, n. 14s. C) V. les textes et les auteurs précités. — Cep. Domat, loc cit., dit que, les con- ventions ne pouvant être anéanties sans le fait des parties, l'ancien associé reste associé tant que les autres associés l'admettent dans la société ; il ne résulte pas de là, comme le pense M. Guillouard (n. 315;, que, dans l'opinion de Domat, les coas- sociés puissent seulement demander la dissolution : tout ce que dit le jurisconsulte, c'est qu'il dépend des intéressés de ne pas se prévaloir de la dissolution; or celte idée est d'une exactitude certaine. (8) Laurent, XXVI. n. 287; Guillouard, n. 315; Houpin, I, n. 136; Hue, XI, n. 123. («) Espagne, C. civ., art. 17u0. (10) Guillouard, n. 320. DISSOLUTION — DÉCONFITURE OU FAILLITE 219 423. Bien « j tic la loi ne parle que de la déconfiture, il ne faut pas hésiter à considérer la faillite de l'un des associés comme une cause de dissolution de la société ' . Il y a pour le décider ainsi un argument a fortiori: non seulement, comme la déconfiture, la faillite est une preuve que l'on ne peut faire face à ses engagements, mais elle dépouille le failli de l'administration de son patrimoine et, par suite, entrave plus que la déconfiture la gestion des affaires sociales ; en outre, elle diminue la confiance que les tiers pouvaient avoir dans les associés et celle que les co-associés du failli avaient en lui ; elle nuit encore à ces derniers dune autre manière, en leur donnant la crainte d'avoir à supporter seuls les per- tes sociales, un recours contre le failli devant être illusoire. D'autre part, cette solution a été formellement donnée dans les travaux préparatoires (*). Il faut ajouter qu'elle est implicitement consacrée par l'art. .")ï de la loi du 24 juillet 1867, qui se donne la peine de déci- der expressément que les sociétés à capital variable ne seront pas dissoutes par la faillite ou la déconfiture d'un associé. On doit supposer que si le code civil n'a pas expressément donné cette solution, c'est parce qu'il la tenait pour évidente ou parce qu'il considérait la question comme peu pratique, les membres des sociétés civiles n'étant pas généralement des commerçants susceptibles d'être déclarés en faillite. (*) Cass. req., 7 déc. 1858, S., 59. 1. 619, D., 59. 1. 135. — Cass. rcq., 4 août 1880. S., 81. 1. 56, D., 81. 1. 464. — Cass. req., 10 mars 1885 (inipl.), S., 86. 1. 410, D., 85. 1. 441. — Paris, 5 janv. 1853, S., 54. 2. 341, D., 5i. 5. 708. — Lyoo,3 juil.1862 motifs), S., 63. 2. 139.— Poiliers, 26 déc. 1892, S., 94. 2. 297, D., 94. 2. 73. — Merlin, Quest., v° Société, n. 59: Boileux, VI, art. 1865; Duianton, XVII, n. 474; Aubry et Rau, IV, p. 570, § 384, note 10; Troplong, II, n. 905: Bédarride, Soc. I. n. 66; Pardessus, III, n. 1066; Persil, Des soc. com., p. 348s. ; Malepeyre et Jour- dain, Tr. des soc. comm., p. 303; Ueloison, Tr. des soc.com., I, n. 91; Rousseau, ibid., I, n. 569; Delangle, II, n. 660 et 661 ; Alauzet,3' éd., II, n.483; Pont, n. 720: Laurent, XXVI, n. 386; Démangeât sur Bravard, 2e éd., I, p. 411 ; Vavasseur, 1, n. 230; Rivière, Répét. écrites sur le C. com., p. 157 ; Duvergier, I, n. 444 ; Guil- louard, n. 316 ; Lyon Caen et Renault, Traité, II, n. 323; Boistel, n. 374 ; Ruben de Couder, v° Société, n. 161 et v° Soc. en nom co//.,n.485; Frémont et Camber- lin, Code prat. des faill., I, n. 465; Uevilleneuve, Massé et Bulruc, Dicl. du conl. com., Il, vo Soc, n. 487 ; Note, S., 94. 2. 297, n. 1 ; A?in. dr. com., VII, 1893. ■lurispr., p. 113 ; Houpin, I, n. 137 ; Hue, XI, n. 123. (2) Exposé des motifs de Treilbard, Locré, XIV, p. 527. 250 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 424. La liquidation judiciaire de l'un des associés doit être assimilée à la faillite et à la déconfiture (*). Elle ne diffère de la faillite, quant à ses conditions, que par la bonne foi du commerçant mis eu état de liquidation ; elle suppose, aussi bien que la faillite ou la déconfiture, un embarras dans les affaires du commerçant, elle enlève ainsi la confiance que ses associés et les tiers avaient en lui et inspire aux premiers les mômes craintes au sujet de l'avenir que la faillite et la décon- fiture elles-mêmes. Il est vrai que le liquidé reste à la tête de ses affaires et qu'ainsi la liquidation judiciaire n'entrave pas les affaires sociales au même degré que la faillite ; mais, outre que l'entrave existe cependant, à raison du contrôle exercé sur les affaires du liquidé par ses créanciers, cette considération, fût-elle entièrement exacte, ne détruit pas la portée de toutes celles qui précèdent. 425. La faillite et la déconfiture mettent fin à toutes les sociétés, même celles où les associés n'ont tenu aucun compte de leurs personnes et de leurs capacités respectives (*). On admet cependant qu'il en est autrement dans les socié- tés minières (»). Nous ne pouvons accepter cette opinion, dont nous avons déjà réfuté l'argumentation en parlant de la mort des associés (*). En tout cas ces événements ne mettent pas fin aux sociétés de capitaux, notamment à la société anonyme (*). 426. La faillite ou la déconfiture de la société elle-même ne mettent pas fin à son existence (6j. S'il en est autrement de (') Poitiers, 26 déc. 1892, S., 94. 2. 297, D., 94. 2. 73. — Lyon-Caeo et Renault, Traité, II, n. 324 ; Houpin, I, n. 138 ; Frémont et Lamberlin, op. cit., n. 467 ; Note, S., 94. 2. 297, n.2; Ann. de. comm., VII, 1893, Jurispr., p. 113; Hue, XI, n. 123. — Contra Pic, Noie, D.,92. 2. 306. (*) Paris, 5 janv. 1853, S., 54. 2. 341. D., 54. 5. 708. — Grenoble, 1" mai 1894, S., 94. 2. 277, D., 95. 2. 221 société en nom collectif). — Guillouard, n. 318. (3) Laurent, XXVI. u. 430 : Guillouard, n. 372 : Uelecroix, Des sociétés des mines, n. 159 s. ; Féraud-Giraud, Code des mines, I, n. 231. (') V. supra, n. 385. (5) Lyou-Caen, Note, S., 99. 1. 481. i6) Cass., 9 mai 1854, S., 54. 1. 673. — Lyon, 3 juil. 1862, S., 63. 2. 139. — Paris, 10 juil. 1894, S., 96. 2. 57. — Démangeât sur Bravard, 2« éd., V, p. 676 ; Alauzet, 3<- éd., II, n. 486 ; Boistel, n. 376 ; Lyon-Caen et Renault, II, n. 325 ; Thaller, Ann. dr. comm , VIII, 1894, Uoctr.. p. 132; Pont, II, n. 1909; Wahl, Note, S., 96. 2. 57, § 2 ; Hue, XI, n. 123. DISS0L1 riOH — DÉCONFITURE 01 FAILLITE 2.')l la faillite < > i ■ Soc, n. 52 s. ; Alauzet. II. n. 483; Démangeât sur Bravard, loc. cit.; Bédarride. I, n. 66 bis et 66 1er; Pont. n. 728 et 730 et Tr. des soc. corn., n. 1908; Boistel.n 374; Laurent, XXVI, n.390; Ruben de Couder, \° Soc, n. 161 et \° Suc. en nom coll., n. 487; Frémont et Oamberlin, loc. cit.: Note, S., 94. 2. 297; Delangle, n.661 ; Xote, Ann.dr.comm., 1893,/ttràpr.,p. 114: Hue, XI. n. 123. — Contra Trib. comm. Nantes, 27 août 1887, Rec Santés, 87. 374. — Pardessus, IV, n. 1065 et 10%: Troplong, II, n. 906 et 907; Malepeyre et Jourdain, Soc, p. 298. (*) Poitiers, 26 déc. 1892, précité. — Duranton, XVII, n. 445; Aubry et Rau. IV, p. 560, §381, note 4; Pont, n. 729; Laurent. XXVI, n. 390; Guillouard, n. 319 ; Hue, XI, n. 123; Tballer. n. 305. — Contra Pardessus, IV, n. 1065 et 1066; Trop- long, II, n. 906 et 907. 2.'J2 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ prévues par l'art. 1871, été subordonnée à un jugement et n'aurait pas opéré de plein droit. On comprend très bien que la loi ait songé à l'intérêt non seulement des associés du failli, mais de ce dernier et de ses créanciers ; cet intérêt est que la société, désormais entravée dans sa prospérité, ne continue pas des opérations préjudi- ciables à ses membres. 428. L'adjudicataire ou l'acquéreur de la part sociale d'un associé peut donc invoquer la dissolution de la société en cas de faillite ou de déconfiture de son auteur ('). Il est, en effet, créancier de son auteur pour l'action en garantie et peut, dès lors, comme tout créancier, exercer les actions de ce dernier. 429. Mais la société se dissout-elle nécessairement en cas de faillite ou de déconfiture et la clause contraire de l'acte de société serait-elle nulle? Nous ne le pensons pas (-) ; toutes les considéra lions que nous avons invoquées en examinant la même question ;i propos de L'interdiction peuvent être repro- duites ici : la dissolution est fondée sur une intention présu- mée des parties, elles peuvent donc manifester l'intention contraire. Toutefois une distinction est nécessaire. Les parties peuvent convenir qu'en cas de faillite ou de déconfiture de l'une d'elles, la société continuera entre les autres (:t). Mais elles ne peuvent convenir qu'elle se continuera avec l'associé même qui serait en état de faillite ou de déconfi- ture ' . Une pareille clause ne heurterait pas les principes (■) Aubry et Etau, loc. ., 99. 1. 1 Houpin, loc cit. ; Lyon-Caen, loc. cit. B) Cass. req., 29 avril 1897, S., 99. 1. 481. - Cpr. Lyon-Caen, loc. cit. DISSOLUTION — VOLONTÉ un ASSOCIÉ 259 » faitr à contre-temps lorsque les choses ne sont />l/ts entières, n et qu'il importe à la société que sa dissolution soft différée » (art. IS7D . Il était déjà admis on droit romain (') et dans l'ancien droit (*) que, dans les sociétés à durée illimitée, les associés pouvaient se retirer de la société. (le n'est là qu'une application de la règle admise dans tous les contrats successifs ; elle existe par exemple en matière de bail ; elle repose non pas seulement, comme le disait Po- lluer (3), sur la confiance réciproque qui doit exister entre associés (car alors pourquoi ne pas donner la même solution dans les sociétés à terme fixe?), non pas davantage, comme on le dit aujourd'hui ('), sur ce que la discorde est plus intoléra- ble quand elle est plus prolongée, mais principalement sur ce que la solution contraire aboutirait à faire de l'engagement d'un associé un engagement perpétuel ; or, dans notre droit, les engagements perpétuels sont nuls ; cependant cette idée ne doit pas être poussée trop loin (5). 439. Une société est à durée illimitée quand les associés entendent rester engagés indéfiniment (6). Une société dont le terme n'est pas indiqué n'est pas à du- rée illimitée si les parties ont entendu, sans le stipuler for- mellement, ne se lier quepourun terme, délerminéou non(7). Elle n'est pas non plus à durée illimitée si les parties ne se sont pas entendues sur la durée; dans ce cas la société est nulle faute de consentement (8). 440. Une société contractée pour une durée fixe supérieure à la durée de la vie humaine n'est pas une société à durée illimitée (•). Le sens naturel des termes répugne à l'opinion i1' L. 4, § 1, L. 63, § 10. \).,pro soc, 17. 2. miat, lîv. I. lit. VIII, sect. 5, § 2; Pothier, n. 149. Lo . cit. (l Guillouard, n. 323. Y. iiif'ra, n. -iif). (6) Ainsi décidé pour une société fromagére. — Lyon, 1er déc. 1898, S., 99. 2. 265. '■ Ainsi décidé pour la société relative à l'exploitation d'un bail de chasse. — Trib. civ. Lyon, 8 juil. 1893, Gaz. Pal., 93. 2. 561. ib. civ. Lorient, 27 fév. 1895, D., 99. 2. 266. (9) Ly< n-Ca^n et Renault, II. n. 328. — Contra Guillouard, n. 324 ; Houpin, 1, n. 139; Hue, XI, n. 123. 260 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ contraire. En vain dirait-on que notre opinion a le tort de permettre aux associés de renoncer indirectement d'avance au droit de quitter la société ; il n'y a là rien de cho- quant, puisque les associés peuvent directement renoncer au même droit. C'est au contraire l'opinion de nos adversaires qui produit des résultats choquants, car si une société d'une durée supérieure à celle de la vie humaine est une société à durée illimitée, elle ne se terminera pas, comme les sociétés à terme, par l'expiration du temps fixé et cette solution contre- dira la volonté des associés. Au surplus, on peut imaginer les difficultés de fait qu'offrirait la détermination du point de savoir si la durée d'une société excède ou non celle de la vie humaine. Xe voit-on que, suivant l'âge des associés ou suivant leur état de santé, la vie humaine peut être présumée devoir être plus ou moins longue? Nous admettons notamment qu'une société contractée pour une durée de 99 ans n'est pas à durée illimitée (J). 441. Si les sociétés formées pour une durée supérieure à la vie normale sont des sociétés à terme soustraites à l'applica- tion de l'art. 1871, il en est de même à plus forte raison des sociétés à vie, c'est-à-dire contractées pour toute l'existence des associés (*). Nous disons, ici encore, que la société est à terme. 442. lue société est à durée illimitée si le terme de son expiration est tellement éloigné et incertain qu'on ne puisse le prévoir. Ainsi une société formée pour l'exploitation d'une mine est à durée illimitée quoique toutes les mines soient destinées à s'épuiser 443. Nous avons déjà remarqué que la société contractée pour une affaire déterminée est une société à terme incertain et non une société à durée illimitée. (') Contra Guillouard. n. 324 ; Iloupin, loc. cit. 1 Bravard, I, p. 104. — Conlra Démangeât sur Bravard, loc. cit.; Troplonu, II, n. 967 ; Duvergïer, n. 453; Aubry et Ilau, IV. p. 570, § 384, note 13; Po::t, n. 737 et 738 ; Laurent, XXVI, n. 3(J5; Guillouard, n. 326 ; Iloupin, loc. cit.; Hue, XI. n. 125. (3) Cass., 1er juin 1859, s., 61. 1. 113, D., 59. 1. 244. — Trib.civ. Saint-Etienne, 16 juin 1891, Mon. jud. Lyon, 20 juin 1891. — Guillouard, n. 324, 326 et 372; Iloupin, loc. cil. — Contra Bravard, loc. cil. DISSOLUTIC» - VOLONTÉ h'i \ ASSOCIÉ "2<>l Il suil de là «| u<* les associés ne peuvenl s'en retirer s;ins le consentement de leurs coassociés (' . L'opinion contraire de Pothier u<' peut plus rire soutenue eu présence 'les textes. Elle a été reproduite cependant par des auteurs, qui voient là lr seul moyen de ne pas restreindre l'application r. si d'autres textes montrent que le législateur a eu constamment cette pensée à l'esprit, ils montrent également que des clauses diverses peuvent manifester chez les associés l'intention de relâcher ou de supprimer la personnalité du lien. Sans doute Doinat décide que l'associé ne peut renoncer au droit de se retirer (') et nous voulons bien admettre que c'était peut-être l'opinion dominante dans l'ancien droit Mais on sait que la personnalité du lien social était alors, pour certains auteurs, beaucoup plus rigoureuse qu'aujourd'hui et qu'elle avait, suivant eux, un caractère d'ordre public (2). 445 Ins. Nous déciderons de même que l'usage, qui est une convention tacite, peut interdire de se retirer au membre d'une société à durée illimitée (3). 446. On admet généralement que si les associés se sont réservé le droit de céder leur part sociale, la volonté d'un seul ne peut mettre fin à la société (*), parce que la cession de leur part les rend, aussi bien qu'une renonciation, étran- gers à la société. Cette opinion est d'autant plus singulière que tous ses partisans considèrent, d'autre part, te droit de quitter la société comme étant d'ordre public et ne pouvant être abrogé par la convention. Pour nous, qui cependant permettons aux associés de re- noncer au droit de se retirer, nous n'admettons pas que cette renonciation résulte nécessairement du droit accordé aux associés de céder leur part sociale (5). Ce sont là, en effet, deux droits distincts, puisque par le premier l'associé obtient la dissolution de la société et sa part dans le fonds social, tandis que, par le second, il obtient seulement le prix de ses droits sans mettre fin à la société. Dès lors, si ce dernier droit est accordé par la convention, il n'en résulte pas que le premier, qui dérive de la loi, disparaisse. (') Liv. I, tit. VIII, sect. 5, § 2. (2) V. supra, n. 388. (') Contra Lyon, 1" déc. 1898, précité (société fromagère). (') Rennes, 4 janv. 1894, D., 94. 2. 120. — Trib. corn. Seine, 18 mai 188G, Loi, 30 mai 1886. — Trib. civ. Saint-Etienne, 16 juin 1891, Moji. jud. Lyon, 20 juin 1891. — Aubry et Rau, IV, p. 571, § 384, note 16; Pont, n. 720 s.: Guillouard, n. 333; Houpin, loc. cit.; Hue, XI, n. 126. »] Laurent, XXVI, n. 333. 264 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Dans tous les cas, quand le droit de céder leur part sociale n'est accordé aux associés que s'ils ont obtenu l'agrément de la société, on admet que chaque associé peut se retirer de la société '), parce qu'alors le droit de cession n'est pas l'équi- valent du droit de se retirer. 447. Partant de l'idée que le membre d'une société minière peut céder sa part, on lui interdit de se retirer de la société (2 . Nous avons réfuté l'idée, nous n'acceptons donc pas sa con- séquence. En tout cas, l'art. 1869 redevient applicable aux sociétés minières quand les droits sociaux sont incessibles en vertu de la convention (3). Il n'y a plus alors aucune raison de dis- tinguer la société minière des autres sociétés. 11 est, sans doute, fâcheux pour les associés restants que le caprice de leur coassocié puisse mettre fin à la société, lors peut-être qu'elle allait entrer dans une période de prospérité; mais nous ne concevons guère qu'on ait tiré de cette considération une objection contre notre doctrine, car n'en est-il pas de même à des degrés divers dans toutes les sociétés? 448. Si la société est divisée en actions, l'associé ne peut se retirer. L'opinion générale est en ce sens(*); mais nous ne nous fondons pas, comme elle, sur l'idée que le droit de cession exclut le droit d'abandonner la société; nous n'avons pus, en eil'et, accepté cette idée (6). Si, dans la société par actions, l'associé ne peut se retirer, cela tient à cette raison que le droit de se retirer est fondé en grande partie sur la confiance qui doit régner entre associés, et que cette confiance est inu- tile dans une société de capitaux. D'un autre côté, le capital Cass., 1er juill. 1859, S.. 61. 1. 113, D.. 59. 1. 244. — Pont, Sole. S., 61. 1. 113; Guillouard, a. 333; lloupin, lue. cit.; Hue, loc. cil. (l) Tri!), civ. Sainl-Elienue, 16 juin 1891, précité. — Pont, Xote, S., 61. 1. 113; liuillouard, n. 313; Féraud-Giraud, Code des mines. I, a. 232; lloupin, lue. cit. (*) Guillouard, n. 375. (♦) Cass., 6 déc. 1843. S., »4. 1. 22. — Cass.. 1er juin 1859, S., 61. 1. 113, D., 59. 1. 244. — Cass., 13 juill. 1868, S., 68. 1. 449, D., 69. 1. 137. — Cass. req., 29 avril 1897, S.. '.'9. 1. 4SI. — Alauzet. Corr.ment. des lois sur les soc, \, n. 489 s.; Boistel, n. 370; Aubi y et Hau, IV, p. 571, § 384, note 16; Guillouard, n. 333; Houpin, loc. cil. : Lyon-Caen et Renault, II, n. B97 1er.— Conlta Pont, I, n. 741 et 11, n. 1913 et Note, y., 61. 1. 113. (5) V. bupra, n. 446. DISSOLUTION VOLONTÉ d'uM kSSOCIÉ 2G6 de ces sortes de sociétés rst fixé d'une manière définitive par des actes rendus publics, H la l<>i détermine elle-même les conditions très rigoureuses suivant lesquelles le capital peut être réduit. Les parties ne peuvent échapper à ces conditions par une simple renonciation. Aussi faut-il refuser à l'actionnaire le droit de se retirer alors même que les statuts restreignent ou entravent la cessi- bilité des actions ('). Il en est autrement si l'on fonde unique- ment sur la cessihilité des actions la solution que nous venons de donner. B. Conditions auxquelles est subordonnée cette cause de dissolution. 449. La volonté de l'associé est subordonnée, pour pro- duire la dissolution de la société, à deux conditions, indiquées par l'art, 1869 : la bonne foi de l'associé qui se relire, l'op- portunité de la renonciation. Le droit romain disait déjà que la renonciation faite par fraude {doio malo) libérait les coas- sociés du renonçant vis-à-vis de lui, mais ne le libérait pas vis- a-vis de ses coassociés [sochim a se, non se a socio libéral) (-j et qu'une renonciation intempestive donnait lieu à l'action pro socio (3). Ces deux mêmes conditions étaient reproduites dans l'ancien droit ('). Le code n'en exige pas d'autres, il est donc inutile que l'associé ait un motif légitime de se retirer (3). Voici des cas de renonciations faites en fraude : l'associé se retire de la société pour faire à son compte un marché que la société allait faire (art. 1870) (8). Le droit romain (7) et l'an- cien droit (8) étaient en ce sens. Un membre d'une société universelle renonce à la société pour empêcher d'y faire tomber les fruits d'une succession (') Contra Cass. req., 29 avril 1S97, précité (sol. implic). — Lyon Caen, loc. Cl/. (*) L. 05, § 4, D., pro soc. 17. 2. (sj L. 14, D., pro soc, 17. 2. '. bornât, liv. I, tit. VIII, sect. 5, § 2; Pothier, n. 150. — bans le même sens, droit allemand; Eck, loc. cit. (5) Lyon, 1er déc. 1898, S., 99. 2. 265. («) Guillouard, n. 328. C; L. 65, § 4, b., pro soc, 17. 2. (8) bornât, loc cit. 266 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ qu'il est sur le point de recueillir ('). C'est encore ce qu'on décidait en droit romain ' et dans l'ancien droit ('). Ln associé se retire de la société parce qu'il abandonne la profession pour l'exercice de laquelle les opérations sociales lui étaient utiles (*). Mais il peut être convenu que la renonciation, môme inop- portune, sera valable (5);car les associés ont le droit de renon- cer à une solution législative édictée en leur laveur. On dit à tort que nul ne peut se faire autoriser à commettre un dol : ce n'est pas commettre un dol vis-à-vis de ses coassociés que d'accomplir un acte autorisé par eux. 450. Les termes formels des art. 1869 et 1870 montrent que la renonciation faite à contretemps se distingue de la renon- ciation fiiite de mauvaise foi: déjà le droit romain faisait cette distinction, que Domat avait abandonnée ; cet auteur considé- rait la renonciation faite à contre-temps comme une applica- tion de la renonciation faite de mauvaise foi, et il résultait de là que la renonciation faite à contre-temps, mais de bonne foi, était valable. On ne peut plus admettre cette dernière solution aujourd'hui. L'art. 1870 explique lui-même ce qu'il faut entendre par une renonciation faite à contre-temps. On peut donner les exemples suivants : L'époque n'est pas favorable à la vente du patrimoine social, laquelle est nécessitée par la dissolution (6j; la société a de gros approvisionnements à écouler ('); elle a l'espoir prochain d'importants bénéfices. 451. La renonciation ne donne pas lieu à des dommages- intérêts si elle cause simplement un préjudice aux coassociés du renonçant, tout en étant régulière. 1 Guillouard, a. 328. ; 1.. 65, § 5. D., pro soc, 17. 2. > Polluer, n. 150. (*) Lyon, 1' déc. 1898 précité (membre d'une société fromagère qui se relire parce qu'il a vendu ses vaches et aliéné ses immeubles). ' Contra Hue, XI, n. 127. {*) L. 65, § 3, D., pro soc. 17. 2; Pothier. n. 151; Laurent, XXVI, n. 398; Guillouard, n. 329. .Mêmes auteurs. DISSOLUTION — VOLONTÉ D'UN kSSOClÉ 267 Ainsi on oe peul reprocher au renonçant d'avoir sol licite ses coassociés de contracter société et de leur avoir i';iit aban- donner un emploi lucratif ') ; car c'est à eux qu'il apparte- nait de prendre leurs précautions en demandant que la so- ciété lût contractée pour an tonne déterminé. 452. L'art. 1869 veut que la renonciation de l'associé soit notifiée à ses coassociés. Comme il ne détermine pas la forme de cette notification, elle peut être faite d'une manière quelconque, même verba- lement (*) ; à plus forte raison un exploit d'huissier n'est pas nécessaire (s). Nous admettons même que si les coassociés ont connais- sance autrement de la renonciation, la notification est inu- tile ; tout ce que veut la loi, c'est que les coassociés ne soient pas exposés à faire des opérations qu'ils ne feraient pas s'ils connaissaient la retraite de l'un d'eux; or si ce but est atteint, la notification n'a plus de raison d'être. Il est vrai que nous nous mettons ainsi en dehors des termes de l'art. 1869, mais c'est pour nous conformer à son esprit ; du reste., si l'art. 1869 exige une notification, c'est qu'il prévoit le cas le plus usuel, celui où les associés n'ont pas connu la renonciation. Cette observation, comme nous allons le voir, est très im- portante à raison des conséquences qu'elle produit au sujet de la preuve. 453. Certains auteurs soutiennent que la preuve de la noti- fication ne peut être faite qu'au moyen soit d'un acte authen- tique, soit d'un acte sous seing- privé rédigé, conformément à l'art. 1325, en autant d'originaux qu'il y a d'associés (*j ; l'associé qui se retire veut, dit-on, prouver que sa retraite a été agréée par ses coassociés; il s'appuie donc sur une con- vention, et la convention ne peut être démontrée que par ce moyen. Ce raisonnement contient, à notre avis, une double erreur: (') Conlra Paris, 18 nov. 1803, Gaz. Pal., Table, i«* sem. 1894, vSoc. coin., n. 4. (') Duranton, XVII, n. 477; Duvergier, n. 459 ; Pont, n. 746 : Guillouard, n. 331 ; Iloupin, loc. cit.; Hue, XI, n. 127. (s) Lyon, Ie* déc. 1898, S., 99. 2. 265 lettre recommandée . — Mêmes ailleurs. (') Pont, n. 746. 268 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ d'une part, il comprend mal l'art. 1869, qui subordonne la renonciation de l'associé non pas au consentement de ses co- associés, mais seulement à une notification qui doit leur être laite: d'autre part, en fût-il autrement, que les principes géné- raux commanderaient d'admettre la preuve de cette conven- tion par témoins, s'il y a un commencement de preuve par écrit ou jusqu'à 150 fr. Aus^i la plupart des auteurs admettent-ils que la notifica- tion peut être prouvée par témoins dans les conditions qui viennent d'être indiquées ' . Nous allons même plus loin : nous croyons que l'associé qui a renoncé peut toujours, une fois sa renonciation démon- trée, établir par témoins que sa renonciation a été connue de ses coassociés; nous avons, en effet, décidé que la notification os| inutile si la renonciation a été connue des coassociés; or cette connaissance est un simple fait dont l'associé renonçant n'a pu se procurer une preuve par écrit arg\ art. 1348). 454. La renonciation qui n'obéit pas aux conditions fixées par la loi est nulle ' , car l'art. 1869 subordonne expressé- ment la validité de la renonciation à l'accomplissement de ces conditions. Mais, comme ces conditions sont exigées dans le seul inté- rêt des associés du renonçant, ce dernier ne peut se prévaloir de leur inaccomplissement et ses coassociés peuvent considé- rer la société comme dissoute 455. Si la notification est faite à certains seulement des associés ou si la renonciation a été portée à la connaissance de quelques-uns, elle est nulle (' : ceux-ci même pourront se prévaloir de la nullité résultant de ce que les autres asso- ciés n'ont pas été prévenus; on ne peut réserver à ces der- niers le droit de demander la nullité, car la loi exige la noti- fication à tous les associés et considère ainsi cette formalité comme indivisible. i Laurent. XXVI. n. 399; Guillouard, n. 331; Hue, XI. n. 127. 1 Du ver gi ex, n. 460; Pont. n. 751: Laurent, XXVI, n. 398; Guillouard, n. 330. (3> Duranton. XVII. n. 477; Uuver^ier, n. 450 et Î60; Pont, n. 751; Laurent, XXVI, n. 398; Guillouard. n. 330 et 331: Houpin. loc. cit. 1 Hue, XI, Q. 127. DISS0L1 riOM .11 STK8 MOTI1 8 20!) Cette s<.liili<>n est exacte alors même que les associés, aux- quels la notification n'a pus été faite, renoncent à se préva- loir de l;i nullité ('). 456. Dans 1rs sociétés fromagères u s m- a la renonciation des conditions etdes caractères spéciaux II. Dissolution judiciaire pour justes motifs. 457. « La dissolution des sociétés à terme ne peut être » demandée par l'an . sup. comm.empiie Allemagne, 3 cet. 1876, Journ. dr. int., VI, lv79. p. 193. DISSOLUTION — JUSTES HOTIFS 271 est laissée « à l'arbitraire du juge ». File est donc appréciée souverainement | > «- » t - le juge du f;iil et ne peut être contrôlée par la cour de cassation ('). ( In peut cependanl classer ces faits en plusieurs catégories : 1° la mauvaise situation actuelle ou future des affaires socia- les; 2" l'impossibilité où se trouve l'un des associés de con- sacrer sou temps aux affaires sociales ; 3° un désaccord entre les associés; i" l'inexécution des engagements de l'un des associés; 5" des faits entachant l'honorabilité de l'un d'eux. Dans toutes ces hypothèses la marche de la société est mora- lement ou matériellement entravée. 462. 1° Nous avons vu que la perte totale de la chose dis- sout de plein droit, d'après l'art. 1865, la société (2). La perle partielle du fonds social pourrait, suivant les cir- constances, autoriser le juge à prononcer la dissolution de la société (3). Voyez pour les sociétés anonymes l'art. 37 de la loi du 24 juillet 1867. (Test une application de l'art. 1871 et non de l'art. 18(>o ' . Quand le fonds social est réduit de ma- nière à entraver le fonctionnement de 1.» société, la société doit être dissoute; le juge examinera donc si la perte est de nature à empêcher ce fonctionnement (s). far exemple, quand le capital social a été réduit à une somme insuftisante pour constituer le fonds de roulement nécessaire aux opérations de la société, il y a lieu de pro- noncer la dissolution (6). lass., 15 juin 1853, S.. 53. 1. 700, D., 53. 1. 249. — Cass.. 16 juin 1873. S.. ~:\. 1. 386, D., 74. 1. 61. — Cass., 15 nov. 1876, S., 78. 1. "251. I).. 78. 1. 124. — Cass., 15 mars 1881, S., 81. 1. 221, D., 82. 1. 421. — Cass. req., 21 fév. 1888, S., 88. 1. 152, D., 89. 5. 429. — Cass. req., 4 fév. 1895, S., 95. 1. 120, D., 95. 1.183.— Cass. req., 11 nov. 1896, S., 97. 1. 8, D.. 97. 1. 231. — Cass. req , 24 janv. 1899, 1 I . '.'9. 1. 260. — Limoges, 15 juin 1895, D., 97. 2. 276. — Trib. civ. Seine, 4 fév. S., 89. 2. 47. — Pont, n. 772; Laurent. XXVI, n. 406: Guillouard, n. 335; Houpin, I, n. 140; Hue, XI. n. 129. • V. supra, n. 433. 1 Paris, 7 juin 1886, Jovrn.des soc, 86.712. — Paris, 17 fév. 1890, Bev.dessoc, 67.— Lyon, 18 mai 1893, sous Cass., 4 fév. 1895, D., 95. 1. 183.— Pont, n. 65 i et 771: Laurent. XXVI. n. 372; Guillouard, n. 289 et 375; Houpin, I, n. 125 et 140. ( Mêmes auteurs. — V. cep. Cass., 16 juin 1873, S., 73. 1. 386, D., 74. 1. 61. Trib. com. Nantes, 15 avril 1896, Hec. Saules, 96. 203. — Mêmes auteurs. (6 Cass., 16 juin 1873. précité. — Cass. req.. 11 nov. 1896, S.. 97. 1. s. D.. 97. 1. 231. — Trib. civ. Seine, 4 fév. 1889, S., 8'.». 2. 47. 272 DU CONTRAT DE SOCIETE La société peut être dissoute si l'objet principal pour lequel elle a été fondée fait défaut, par exemple si elle avait pour but l'exploitation d'un brevet qui n'a pas été accordé ('), ou d'une concession de travaux publics qui ne lui a pas été faite (!), alors môme qu'elle a d'autres objets accessoires (3). La perte partielle d'un apport, avant que la société n'en ait acquis la propriété, à la différence de la perte totale, n'en- traîne pas de plein droit la dissolution de la société ; mais elle peut donner lieu à la dissolution judiciaire si elle est suffisante pour empêcher le fonctionnement de la société (*). Certains ailleurs admettent également la dissolution judi- ciaire si la partie périe est très importante par rapport à l'en- semble de l'apport s . Nous ne voyons aucune raison de décider en ce sens. D'autres pensent que, par application de la théorie des ris- ques, la société peut, au choix des associés autres que celui qui avait promis l'apport, continuer sans diminution des droits de ce dernier associé, ou être dissoute c . Cette théorie nous parait reposer sur une confusion; il s'agit ici de savoir non pas à qui la perte partielle de la chose doit nuire, mais si le fonctionnement matériel de la société reste possible. L'absence de bénéfices peut être une cause de dissolution de la société Le changement du siège de la société peut motiver une demande en dissolution judiciaire s'il est de nature à com- promettre l'avenir de la société (8). 463. 2° Si un conseil judiciaire est donné a l'un des asso- ciés et que cela entrave la marche de la société, ses coasso- ciés peuvent demander la dissolution judiciaire de la société (9). l'i C. d'appel Angleterre, 24 fév. 1882, Journ. dr. int., X, 1883. p. 199. (*) Cass. req., 11 dov. L896, s.. 97. 1. 8, I».. 97. 1. 231. [3j G. d'appel Angleterre, 24 fév. 1882, précilé. 1 Houpin, I, n. 125. Aubry et Rau, IV. p. 569, 5 384, note 9: Guillouard, n. 290. (•) Une, XI. n. 114. C) Cass.. 15 juin 1853, S., 53. 1. 700, D.. 53. 1. 249. — Trib. corn. Seine, lôavril 1887, Droit, 27 avril 1887. — Cass. Autriche, 30 juin 1887. Pand. franc., 87. 5. 39. — Guillouard. I, n. 334 et 375; Houpin. I, n. 140: Hue, XI. n. 129. - Lyon, 18 mai 1893, sous Cass., 4 fév. 1895, D., 95. 1. 183. (•, Guillouard, n. 313 et 334; Houpin, I, n. 140; Hue, XI. n. 122 et 129. DISS0L1 ll"\ .il Ml g MOTIFS 273 Nous avons vu que colle dissolution ne s'opère pas de plein droit '). De même le placement d'un associe dans un établissement d'aliénés peut, suivant les circonstances, motiver une demande en dissolution de la société (*). Il en est de même encore pour l'absence (3) ou la maladie grave d'un associé ('). 464. 3° l ne mésintelligence entre les associés justifierait une demande en dissolution (5). On peut citer : Les injures proférées par l'un des associés contre l'autre (6) ; L'adultère de l'un des associésavec lafemme de l'autre (7) ; Les mauvais traitements par l'un des associés envers Tau- tre(8); La surveillance excessive par l'un des associés surlacomp- tabilité de l'autre (9), ou réciproquement les manœuvres em- ployées par un associé pour se soustraire au contrôle des autres (,0) ; i1 1 V. supra, a. 415. (*) Guillouard. n. 313. (s) Guillouard, n. 309 et 334 : Houpin. loc cil. {*) Guillouard, n. 338; Hue, XI, n. 129. {5) Cass. req., 16 juin 1873, S.. 73. 1. 386, D., 74. 1. 61. — Cass. req., 11 nov. 1896, S., 97. 1. 8, D., 97. 1. 231. — Cass. civ.,24 janv. 1899, D., 99. 1. 260. — Aix, 18 juin 1822, S. chr. — Grenoble, 20 mars 1863, S., 63. 2. 108, D., 63. 5. 237. — Lyon, 12 janv. 1882, S., 82. 2. 118, D., 83. 2. 12. — Chambéry, 14mars 1887, Rec. soc, 87. 377. — Orléans, 19 nov. 1887, D., 88. 2. 162. — Bordeaux, 14 août 1889, Rev. soc, 90. 28. — Rennes, 7 déc. 1893, D.,94. 2. 87. — Sénégal, 6 juil. 1894, Gaz. Pal., 94. 2. Supp., 29. - Lyon. 21 juil. 1894, Gaz. Pal., 94, 2, Suppl., 29. — Limoges, 15 juin 1895, D.. 97. 2. 276. — Montpellier, 19 nov. 1897 (2e arrêt), sous Cass. civ., 15 mai 1899. D., 99. 1. 353. — Trib. corn. Seine, 3 nov. 1892, Gaz. Pal.. 93. 1. 72. —Trib. com. Nantes, 20 avril 1896, Rec Nantes, 96. 203. — Trib. féd. suisse, 6 juil. 1894. Ann. rfr. com.. 1894, Boctr.. p. 152. — Argou, loc cit.; Guillouard, n. 334; Houpin, loc. cil ; Hue, XI, n. 129; Sarrut, Note, D.,99.1. 353. («) Rennes, 7 déc. 1893, précité. (7) Trib. sup. com. Empire d'Allemagne, 8 janv. 1879, Journ. dr. inl., VII, 1880, p. 211. (8) Trib. com. Nantes, 8 sept. 1894, Rec Xarites. 95. 1. 92. — Même si ces mau- vais traitements ont une cause légitime, comme l'adultère de l'associé maltraité avec la femme de l'autre. — Trib. sup. com. Empire d'Allemagne, 8 janv. 1879, précité. 9 Lyon, 9 juil. 1894, précité. (,0) Lyon, 18 mai 1893, sous Cass., i fév. 1895, D., 95. 1. 183. Société, prêt, dépôt. — 2" éd. 18 27 ï DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Le désaccord sur une mesure importante à prendre ('); Les oppositions nombreuses et mal fondées faites par un associé aux actes de ses coassociés (*) ; La mésintelligence entre les associés entraînera la dissolu- tion de la société, même si elle ne compromet pas sa mar- che ('). Mais la guerre entre deux pays ne met pas fin à. la société entre personnes des deux nations belligérantes (4). 465. 4° La loi cite elle-même, comme cause de dissolution judiciaire, le cas où un des associés manque à ses engage- ments; l'ancien droit était déjà en ce sens ;5). Nous avons dit que ce fait peut également entraîner l'exclusion de l'asso- cié coupable (6). Par exemple, l'associé désigné comme gérant statutaire n'administre pas la société. L'hypothèse où l'associé commet des malversations '• ou même simplement des actes de négli- gence (8), et celle où il fait des prélèvements exagérés (9) ren- trent dans la même catégorie de faits. 466. 5" La conduite de l'un des associés, si elle est de nature à compromettre les intérêts de la société, légitime, motive, comme on le décidait déjà dans l'ancien droit (l0), une demande en dissolution ("). Tel est le cas où l'un des associés se livre au jeu de manière à faire disparaître la con- fiance du public dans la solvabilité de la société (12). ' Trib. civ. Lyon, 19 mars 1894, Gaz. Pal., 15 juil. 1894. (-) Aubry et Rau, IV, p. 564, § 382; Guillouard, n. 148 et 334; Hue, XI, n. 129. (3) V. cep. Bordeaux, 14 août 1886. A.o).r>janv. 1SS7. — Trib. civ. Seine, 21 mars 1893, Gaz. l'ai.. 93. 1. 178. * V. Cour supr. Etats-Unis, Journ. dr. inL, III. 1876, p. 205. (5) Argou, liv. III. ch. XXXII, II, p. 324. (8) V. supra, n. 207. (") Guillouard, n. 334. (8) Paris, 2i janv. 1895, Gaz. l'ai., 95. 1. 321. —Alger, 6 avril i89b, Journ. trib. alg., 30 oct. 1895. v9) Cass. req., 21 fév. 1888. S., 88. 1. 152, D., 89. 5. 429. — Guillouard, loc. cil.; Hue, XI, n. 129. (i0) Argou, loc. cit. " Rennes, 7 déc. 1893, D., 94. 2. 87.- Trib. féd. suisse, 17 oct. 1890, Ann. dr. com., V, 1891, Doctr., p. 45. - Trib. féd. suisse, 17 oct. 1890, précité. DISSOLUTION — JUSTES MOTIFS 275 C. Conventions écartant la dissolution pour justes motifs. 467. On décide d'une manière générale que le droit de demander la dissolution de la société pour c;iuse légitime est d'ordre public et, par conséquent, <|ue les parties ne peuvent y renoncer d'avance ('). On ne comprendrait pas, dit-on sim- plement à L'appui de cette opinion, qu'il en fût autrement. Nous admettrons, en effet, que, conçue en termes généraux, celte renonciation est nulle; car une telle renonciation expo- serait les associés à rester en société alors que l'absence de bénéfices actuels et l'impossibilité des bénéfices futurs ren- draient très onéreux le maintien de la société. Mais nous ne voyons pas pourquoi les associés ne pour- raient pas renoncer au droit de demander la dissolution dans des hypothèses déterminées où le maintien de la société n'au- rait pas des inconvénients très grands. Ainsi pourquoi ne pourrait-on pas convenir que la dation d'un conseil judiciaire à l'un des associés ne dissoudra pas la société, alors qu'on peut faire la même convention au sujet de la mort et peut- être aussi de l'interdiction des associés? De même nous n'ad- mettons pas qu'on prohibe la convention portant que la société sera maintenue malgré la mésintelligence des asso- ciés, alors qu'aujourd'hui la confiance réciproque n'est pas de 1 »'»sencede la société. De même encore on pourra renoncer au droit de demander la dissolution pour le cas de malversations, puisque ces malversations peuvent être autrement punies. En tout cas, il n'est pas contraire à l'ordre public que les associés contient exclusivement à d'autres pouvoirs qu'aux tribunaux, par exemple à la majorité d'entre eux, le droit de dissoudre la société (2). I). Personnes qui peuvent invoquer les motifs //raves. 468. Si la cause de dissolution est la faute d'un des asso- ciés, ses coassociés seuls pourront demander la dissolution; 1 Lyon. 18 mai 1893, sou? Cass. req., 4 fév, 1895, D., 95. 1. 183. — Aubry et Rau, IV. p. 571. i 384, note 20; Guillouard, n. 336; Massé el Vergé sur Zacharice, IV. |> 150, § 720, noie "Ji: Delangle, I. n. 677: Pont, I, n. 755; Vavasseur, I, n. 47: Hoopin, I, n. 140; Hue, XI. n. 129; Lyon-Caen, Note, ^..'.'fJ. !. - \ . supra, n. 208 et 460. 276 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ il ne pourra la demander lui-même (*), car l'art. 1871 est l'application de l'action en résolution et la résolution ne peut être demandée par la partie qui n'exécute pas ses engage- ments. D'un autre coté, l'art. 1871 n'admet la dissolution judi- ciaire que pour juste cause et la cause de dissolution n'est évidemment pas juste quand elle est invoquée par l'associé dont la faute y a donné lieu. Enfin il suffirait, dans l'opinion contraire, qu'un associé refusât de remplir des engagements pour que ce même associé pût faire dissoudre la société, et ainsi les sociétés à terme seraient sujettes à dissolution par la volonté d'un seul des associés, alors que l'art. 1869 res- treint aux sociétés à durée illimitée cette cause de dissolution. Ainsi l'associé qui refuse d'exécuter ses obligations ne peut demander la dissolution de la société ('). Il en est de même de celui dont les agissements ont fait naitre la mésintelli- gence (3 , ou qui apporte un trouble quelconque au fonction- nement de la société (A). 469. Si la cause de dissolution naît chez un associé, maïs sans faute, cet associé pourra, comme les autres, demander la dissolution (5). En ce cas on ne peut plus objecter ni que la dissolution de la société est laissée ;'i l'arbitraire des parties, ni cjue la eaux- n'esl pas juste. Il ne serait pas plus exact de dire que cette solution est contraire aux principes de l'action en résolution; l'associé invoque un cas fortuit, qui, quoique ne en sa personne, ne lui e^t j>,i-> imputable, et par l'etfet duquel, le fonctionnement de la société étant entravé, ses coassociés ne peuvent remplir leurs obligations envers lui. (l) Paris, 29oct. 1892, Gaz. l'ai.. 93. 1. 2' p., 5. — Sénégal, 6 juil. 1894, précité. — Paris, 27 mars 1895, D.. 95. 2. 319. — Trib. l'éd. suisse. 5 mars 1886, cité par . Ann. 'osoc, 17. 2. — Troplong, II, n. 901; Uuvergier, n. 438; Pont, n. 703; Laurent, XXVI, n. 376; Guillouard, n. 307. (6)L. 65, § 10, D., pro soc, 17. 2. ") Despeisses, Des contrats, l'e part., til. III, § 5, n. 4. (») Cass. civ., 13 mai 1890, D., 90. 1. 474. — C. de l'Ohio, 1874, Journ. dr. in- lern., II, 1875, p. 393. DISSOLUTION — SCELLÉS ET INVENTAIRE 279 Il en est cependant autrement vis-à-vis des créanciers qui oui connu la retraite de l'associé (1). 474. Si la société a continué en fait, les associés sont tenus des engagements postérieurs à la dissolution de la même manière que si la société avait persisté (*). S III. Scellés et inventaire. 475. L'apposition des scellés peut être ordonnée par le juge pour empêcher les détournements (3). Gomme elle n'a pas un caractère obligatoire, aucun texte ne l'exigeant, le juge peut la refuser, par exemple si elle est de nature à entraver l'achèvement d'opérations commencées ('). Le juge peut aussi, en autorisant l'apposition des scellés, ordonner les mesures nécessaires pour empêcher qu'elle n'entrave les affaires sociales, par exemple, la remise des livres ou des valeurs appartenant à la société, après descrip- tion (5). Il peut être convenu dans l'acte de société que les scellés ne peuvent être apposés après la dissolution. Cette clause est valable en ce sens que les associés ou leurs représentants sont liés par elle (6). Notamment, les créanciers des associés, qui n'ont que les droits de leur débiteur, ne pourront faire apposer les scellés. 476. Il en est de même des créanciers de la société (7),soit qu'on accorde, soit qu'on refuse à la société la personnalité morale, car ces créanciers n'ont que les droits de la société, laquelle a renoncé à l'apposition des scellés. De même encore pour les héritiers. Cependant, il en est autrement des héritiers réservataires, qui prétendent exercer l') G. de l'Ohio, 1874, précité. (') C. supr. des Etals-Unis, 1875, Journ. dr. intern., II, 1875, p. 394. ;3j Troplong, II, n. 1057; Pont, n. 787; Laurent, XXVI, n. 412: Guillouard, n. 342; Hou pin. I, n. 143. •) Mêmes auteurs. 3; Cass., 23 juil. 1872, S., 72. 1. 324, D., 73. 1. 335. — Laurent, XXVI, n. 412; Guillouard, a. 342; Houpin, loc. cit.; Hue, XI, n. 134. (6) Houpin, I, n. 143; Hue, XI, n. 134. 7) Gass. civ., 30 nov. 1892, S., 93. 1. 73, D., 94. 1. 83. — Conlra Cass., 23 juil. 1872, S., 72. 1. 324, D., 73. 1. 335. — Guillouard, n. 342; Houpin, loc. cit. 280 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ un droit personnel ('), mais il n'y a pas d'exceptions à faire pour les héritiers mineurs (!). 477. Chacun des associés peut exiger qu'il soit procédé à un inventaire du patrimoine social. Cependant il peut être stipulé que la dissolution de la société ne sera pas suivie d'inventaire. 11 peut également être stipulé que l'inventaire sera amia- ble ('). 478. Nous avons déjà examiné si la clause d'après laquelle la part d'un associé décédé sera constatée par un inventaire antérieur au décès ou par un inventaire amiable est opposa- ble aux héritiers mineurs de l'associé décédé (*).' l IV. Du partage du fonds social. 479. La liquidation et le partage du fonds social sont la conséquence normale et la plus importante de la dissolution; comme nul n'est tenu de rester dans l'indivision, chaque associé a le droit de demander le partage. Aux termes de l'art. 1872 : « Les règles concernant le par- ut tage des successions, la forme de ce partage, et les obliga- » lions qui en résultent entre les cohéritiers, s'appliquent aux » partages entre associés ». 480. Nous savons déjà qu'on peut demander le partage même d'une société nulle, et sans attendre l'arrivée de l'évé- nement qui doit y mettre fin (3). 481. On peut convenir, conformément à l'art. 815, qu'on restera dans l'indivision cinq ans après la dissolution de la société (6). En fait, la société a pu persister après l'événement qui y a t1) Nancy, 24 janv. 1846, P., 46. 2. 735, I)., 16. 2. 119. — Guillouard, n.343; Houpin, loc. cil. (!) Cass. eiv., 30 nov. 1892, précité. (3) Cass. civ., 30 nov. 1892, S., 93. 1. 73, L)., 94. 1. 83. — Pic, Ami. dr. corn.. VII, 1893, Doctr., p. 410. — V. supra, n. 408 et s. 1 V. supra, n. 409. (s) V. sup?-a, n 87 s. (6) V. notre Tr. des suce, 2» éd., Il, n. 2175 s., 2195 et les autorités qui y sont citées: Houpin, I, n. 149. DISSOLUTION — PARTAGE 281 mis lin; le juge peut donc fixera une époque ultérieure le point de départ de la liquidation ('). 482. L'action en partage peut être intentée, comme en matière de succession, non seulement par les associés, mais encore par leurs créanciers, conformément à l'art. 1166 (*). Ainsi le droit de demander le partage appartient à l'adju- dicataire de la part sociale saisie sur l'un des associés pen- dant l'existence de la société (3). 483. Les créanciers peuvent-ils intervenir au partage de la société? Peuvent-ils en demander la révocation s'il est fait en fraude de ses droits? Cette question revient à savoir s'il faut appliquer à la société l'art. 882 G. civ., d'après lequel les créanciers peuvent former opposition au partage de succes- sion, y intervenir, mais non pas, une fois qu'il est achevé, en demander la révocation (4). La jurisprudence décide que l'art. 882 n'est pas applicable aux partages de société. Nous avons réfuté cette opinion dans notre Traité des successions (6). 484. La demande en partage ne peut avoir pour objet que le fonds social tout entier, elle ne peut avoir pour objet cer- tains des biens sociaux (6). En effet, les associés sont copro- priétaires d'une masse unique et indivisible. Du reste, on admet généralement que, de même, les héritiers ne peuvent demander que le partage de la succession tout entière. Mais il va sans dire que si certains associés ont fait pour leur propre compte une opération indépendante des opéra- tions de la société, ils peuvent entre eux demander le partage du produit de cette opération (7). 485. Pour la forme du partage, on aura recours aux règles du titre des successions. 1 Gass. civ., 7 mars 1888, S., 88. 1. 305 (pour l'interdiction). — Lacointa, fiole, S., 88. 1.305. (*) Guillouard, n. 342; Houpin, I, n. 150. (») Guillouard, n. 271. (*) V. notre Traité des suce, n. 4261 et les autorités citées. (*) 2e éd., III, n. 3267. — V. encore dans le sens de la jurisprudence, Hue, XI, n. 135. (») Bordeaux, 25 avril 1831, S., 31. 2. 314. — Laurent, XXVI, n. 406; Guillouard, n. 343; Houpin, I, n. 150. (7) Cass., 1er mars 1853, S., 53. 1. 298, D., 53. 1. 65. — Guillouard, n. 343; Hou- pin, loc. cit. 282 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Il en est de même des conditions, fixées par l'art. 827, suivant lesquelles la licitation doit avoir lieu. Il y a lieu, notamment, d'observer la règle d'après laquelle chaque associé doit recevoir des biens de toute nature ('). Toutefois il peut être convenu que l'un des associés (l'as- socié survivant par exemple, si la dissolution est causée par la mort de l'un des deux associés) prendra tout l'actif et en payera la valeur à l'autre ou à ses représentants. Cette clause est opposable, même aux héritiers mineurs de l'associé prédécédé (J). Car on sait que, par application de l'art. 1122, toutes les clauses du contrat de société édictées contre les héritiers des associés peuvent être opposées aux héritiers mineurs. 486. S'il y a des mineurs (c'est-à-dire si l'un des associés est décédé laissant des héritiers mineurs), le partage aura lieu, conformément au droit commun, dans la forme exigée pour le partage des biens des mineurs (3). Toutefois le contraire peut être stipulé par le contrat social; en etlêt nous savons que les règles de ce contrat peu- vent être déclarées opposables aux héritiers, et qu'en ce cas elles doivent être observées même par les héritiers mineurs. Bien plus, et pour la même raison, si le contrat détermine les formes du partage, ces formes doivent être employées quoique les héritiers soient mineurs (*). 487. Les art. 829 et 830, relatifs au rapport de dettes, s'appliquent entre associés, au moins d'après l'opinion géné- rale (5). Au contraire, nous savons que les règles du retrait succes- soral ne s'y appliquent pas (8 . 11 en est de même des peines du divertissement et du recel (7). (•) Hue, XI, n. 135. 2 Gass. civ., 30 nov. 1892, S., 93. 1. 73, D., 94. 1. 83. — V. supra, n. 404. (3j Houp'm, I, d. 149. O Cas*, civ., 30 nov. 1892, S., 93. 1. 73, D., 94. 1. 83. (5j V. notre 7Y. des suce, 2» éd., III, n.30U et les autorités citées. — V. dans le même sens Cass. civ., 6 août 1*95, S., 99. 1. 402. — Hue, XI, n. 134. (6, V. supra, n. 242 s. P V. notre Tr. des suce, 2e éd., II, n. 1782. — V. aussi Hue, XI, n. 135. DISSOLUTION — PARTAGE "283 D'après l'opinion générale, les associés doivent les intérêts et fruits des choses sujettes à rapport d;ius les conditions du droit commun, c'est-à-dire, suivant qu'il s'agit de sommes d'argent ou d'autres choses, à partir de la demande en justice ou de la mise en demeure : l'art. 856 C. civ. qui, en matière de succession, décide que les fruits des objets rapportés sont dus seulement à partir de l'ouverture de la succession, ne peut être étendu à la société ('). 488. Pour les comptes entre associés, les livres de la so- ciété font preuve (2), ainsi que le disait déjà Pothier (*). Il est vrai qu'en matière civile les registres et papiers domestiques ne font pas preuve (art. 1331); mais il ne s'agit pas ici de papiers domestiques ; il s'agit de livres dressés par la société, c'est-à-dire par tous les associés, ou en leur nom, pour faire titre entre eux; par suite, en opposant à l'associé débiteur le livre qui constate sa dette, on lui oppose son propre aveu. 489. Le tribunal désigne, s'il y a lieu, une personne chargée de liquider la société ; le liquidateur peut être l'un des asso- ciés; souvent, il est désigné par l'acte de société. ' La désignation, dans l'acte de société, d'un associé comme liquidateur, pour le cas du décès de l'un de ses coassociés, est opposable même aux héritiers mineurs de celui-ci (4). Mais le droit de procéder à la liquidation peut être refusé à l'associé que le contrat social a désigné à cet effet, s'il y a de justes raisons pour cela (5). Le juge du fait apprécie si les raisons sont suffisantes (6). 490. Le partage porte non seulement sur le fonds social mais aussi sur les bénéfices réalisés, déduction faite toutefois de la portion qui, en exécution d'une clause des statuts, aurait (1) V. sur ce point notre Traité des suce 2e éd., III, n. 2832 et les autorités citées. — Houpin, I, n. 156; Hue, XI, n. 134. (s)Cass.,17 rév. 1869, S., 69. 1.160, D.,70. 1. 40. — Pont, n. 779; Laurent, XXVI. n. 409; Guillouard, n. 346; Hue, XI, n. 134. »)N. 167. («) Bonfils, Rev. cril., XXIII, 1894, p. 628. (s) Cass., 30 avril 1873, S., 74. 1. 123. — Cass. civ., 27 mars 1893, S., 94. 1. 174, D., 93. 1. 440. — Pont, Soc. corn., n. 1945: Huben de Couder, v° Soc. en nom coll., n. 552; Lyon-Caen et Renault, II. n. 374 bis. (' Cass. civ., 27 mars 1893, précité. 284 DL" CO.NTR.VT DE SOCIÉTÉ été répartie entre les associés pendant la durée delà société. Le fonds social à partager comprend non pas seulement les biens corporels qui appartiennent à la société en propriété, mais encore tous ceux sur lesquels elle a un droit quelconque, par exemple : l'exploitation du brevet d'invention pris au nom de la société ('), le droit au bail de l'immeuble loué par la société (! , le nom ou le titre de la société (3). Nous avons étudié déjà les règles suivant lesquelles se répar- tissent les gains et les pertes (*). 491. L'effet déclaratif du partage de succession s'applique au partage de société avec toutes ses conséquences ('). La question de savoir si cet effet remonte au jour de la for- mation ou au jour de la dissolution de société dépend de ceLle de savoir si la personnalité civile est refusée ou accor- dée aux sociétés (6). lui tout cas, la rétroactivité ne fait pas obstacle à la validité des actes définitivement passés au cours de la société par les gérants : . 492. La loi du 30 avril 1880 art. I"r interdisant « l'usage de médailles, diplômes, mentions, récompensesou distinctions honorifiques quelconques décernés dans des expositions ou concours et à d'autres qu'à ceux qui les ont obtenus person- nellement ou à la maison de commerce en considération de laquelle ils ont été décernés », aucun associé ne peut, après la dissolution de la société, faire usage de ces récompenses (8), et cela même en vertu d'une convention formelle (9). (») Aix. 7 avril 1865, S., 6t',. 2. 357. — Guillouard, n. 345. ['-) Rouen, 15 mars 1*27. S. chr. — Guillouard. n. 345. (s) Cass., 28 mars 1838, S.. 38. 1. 304. — Rouen. 15 mars 1827, S. chr. — Guil- louard, n. 345. (*) V. supra, n. 245. (5) V. notre Tr. des suce. 2e édit., III, n. 3297 et les autorilées citées. — Hue, XI, n. 137. ^6) V. notre Tr. des suce, 2» édit., III, n. 3388 et les autorilées citées. — Y. aussi en ce sens Hue, XI, n. 29 et 137 ; Hue, loc. cil. ' Guillouard, n. 356. — V. notre Tr. des suce, 2» édit., III, n. 3342 et 3367. (8) Paris, 30 oct. 1890, S., 91. 2. 137. — Contra Trib. corn. Nantes, 14 fév. 1891, Bec. Scmles, 91. 1. 80. (9) Paris, 30 oct. 1890, précité. — Contra Trib. corn. Seine, 2 août 1888, Gaz. Pal., £8. 2. 404. DISSOMTION — PARTAGE 28.') La question de savoir si, dans le cas où la maison de com- merce exploitée par la société est attribuée à l'un des associés, cet associé peut taire usage des récompenses dépend du point de savoir si le successeur d'un commerçant a ce droit ('). Considérés dans leur matérialité, les médailles et diplô- mes n'ont plus, après la dissolution de la société, d'autre valeur que celle du parchemin et du métal. On peut donc exiger qu'ils soient tirés au sort entre les associés ou licites entre eux (2). 492 bis. Les brevets d'invention peuvent être attribués à, l'un ou à l'autre des associés; l'enregistrement de l'acte qui constate celte attribution est nécessaire si le brevet apporté par l'un des associés est attribué à un autre (3). 493. S'il n'a rien été convenu sur les marques de fabrique, chacun des associés peut en faire usage (;j ; toutefois, si (ce qui est le cas habituel) le fonds de commerce exploité par la société est attribué à l'un des associés ou vendu à un tiers, on doit, en général, supposer que la marque de fabrique qui distinguait les produits de ce fonds suit le sort du fonds lui- même (5). Ces deux solutions n'empêchent pas l'associé dont le nom tigurait dans la marque de fabrique de reprendre l'usage de ce nom, le nom étant inaliénable (6); les juges du fond détermineront les moyens d'éviter, si cet associé fonde un établissement similaire, la confusion entre les deux maisons, par des modifications apportées à l'une ou à l'autre des mar- ques (7). 494. Celui auquel le fonds social est attribué reçoit les (') V. Cass., 16 juil. 1889, S., 00. 1. 16. — Bordeaux, l"juin 1887, S., 89. 2.107. (') Il a été décidé, pour les médailles et distinctions honorifiques décernées à une compagnie de sapeurs-pompiers dissoute, qu"elles ne peuvent être attribuées à ses membres et que le maire peut exiger qu'elles soient déposées entre ses mains. — Trib. civ. Lyon, 19 fév. 1895, Loi, 18 mars 1895. (3) V. notre Traité des suce , 2e éd., III, n. 3277. (*] Paris, 21 fév. 1895, Ann. propr. industr., 95. 123. — Trib. corn. Marseille, 3 sept. 1890, Rec. Mai-seille, 90. 1. 307 le dépôt qu'en ferait l'un ne lui donne pas le droit de défendre à l'autre de s'en servir). (6) Gass. civ., 20 avril 1896 r arrêl), S., 96. 1. 325. (6; Cass. civ., 20 avril 1896 (2* arrêt), S., 96. 1. 325. — V. infra, n. 50LÎ. j Gass. civ., 20 avril 1896, précité. 28G DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ livres de commerce et les anciens coassociés ne peuvent l'obliger à leur en donner communication ('). 495. L'art. 541 C. proc. interdit aux parties de demander la révision du compte intervenu entre elles, saut' pour certains motifs qu'indique ce texte même. 11 suit de là qu'un associé ne pourrait agir contre ses coas- sociés en raison de ce que son lot a compris des créances qui, en fait, étaient irrecouvrables (8). De même l'un des associés qui sera parvenu à recouvrer des créances comprises comme irrécouvrables dans son lot ne pourra, de ce chef, être actionné par ses coassociés. 496. Mais l'obligation de garantie édictée en matière de partage de succession par l'art. 88i s'applique avec toutes ses conséquences au partage de société ^3). De même, la rescicion du partage de sociétés est faite dans les mêmes conditions et produit les mêmes effets que la res- cision du partage de succession. Il y a lieu notamment d'ap- pliquer au partage de sociétés la règle de l'art. 887 (*). Le partage n'est rescindable pour cause de lésion que si la lésion est de plus du quart. Cette solution s'applique au cas même où Jes lots sont faits par un tiers que les parties ont désigné; on ne peut appliquer ici l'art. 1854 C. civ. (5), d'après lequel le règlement fait par un tiers et contraire à l'équité peut être attaqué, car l'art. 1854 vise exclusivement l'hypo- thèse où le tiers a été désigné pour déterminer la proportion dans laquelle chaque associé doit participer aux bénéfices et contribuer aux pertes (6). Il faut également appliquer l'art. 889, qui exclut l'action en rescision dans le cas de vente de droits successifs entre héri- i'i Cas. req., 25 fév. 1895, D., 95. 1. 238. Aix. :i iléc. 1887, Recueil d'Aix, 87. 1. 302. — V. à propos de la même ques- tion, dans le cas de louage d'ouvrage avec participation aux bénéfices, notre 7V. du conlr. de louage, lre éd., 11, n. 1411. (3, Y. nuire Tr. des suce, 2e éd.. III, n. 3433. — Houpio, I, n. 157 ; Hue, XI, n. 135. (') V. notre Tr. des suce, 21' éd., III, n. 3495 et les autc.rités citée s; Houpin, l »c. cit.; Hue, XI. n. 135. 5 V. s n pi n, n. 255 s. ass. req., 26 mai 1897, s.. 98. 1. 347, h.. 98. 1. 99. DISSOLUTION — REPRISE I>IS APPORTS 287 liers; la vente de droits sociaux entre associés n'est donc pas rescindable pour cause de lésion ('). 497. Le tribunal compétent ratione personœ pourtrancber les contestations relatives au partage de la société est le tri- bunal du lieu où la société est établie (*) ; en effet, l'art. 822 attribue compétence au tribunal de l'ouverture de la succes- sion pour les contestations T. ^'.» brevet d'invention . — Besançon, 26 oct. 1892, S.. 94. 2. 4'j est valable la clause d'après laquelle l'associé qui apporte un commerce et une agence d'assurances se réserve de les reprendre, et une action en dommages-intérêts lui est ouverte contre son coassocié qui, lors de la dissolution, sollicite et obtient cette agence). — Tiib. corn. Seine, 15 oct. 1885, Journ. Irib. co/ii., 87. 25 brevet d'invention). — Houpin. I, n. 44 (brevet d'invention). i •' I iuillouard. n. 346. 3 V. supra, a. 168. («)Troplong, II, n. 590; Duvergier, n. 180; Pont, n. 393: Laurent, XXVI, n. 274. — Contra Duranton, XVII, n. 4".». (5) Pont, n. 395; Laurent, XXVI. u.274;Guillouard, n. 161. — Contra Troploiig, II, n. 591. DISSOLUTION — REPBIS1 DES APPORTS 289 de la société sans lui donner le droit de garder pour elle les chances favorables. 501. La valeur des choses qui se détériorent par l'usage, et dont le montant doit être restitué, se calcule évidemment au jour de la constitution de la société, si ces choses ont été estimées ('). C'était déjà la solution de Pothier (2). L'estima- lion ne peul avoir d'autre but que de fixer le montant de l;i restitution. Du reste, l'art. 18.'il donne cette solution mémo pour les choses non tangibles qui ont été estimées. Il en est de même, quoique cela soit plus douteux, si aucune estimation n'a été faite (3) ; il n'en reste pas moins vrai que, dès le jour de la société, la chose apportée est devenue la propriété de la société; elle lui a donc été immédiatement transmise et, comme le transfert a eu lieu à titre onéreux. c'est la valeur qu'avait alors la chose qui doit être considérée, dans la pensée des parties, comme son prix. Il ne peut donc être question, pour calculer la valeur de la chose, de se placer au jour de la dissolution de la société. 501 bis. L'art. 1851, répétons-le, décide que la valeur des choses estimées est établie d'après l'estimation (4). 502. Chaque associé reprend son apport en industrie (5) ; en d'autres termes, il ne doit aucune compensation à ses coassociés, en raison de ce que ses apports, ne consistant pas en argent ou en objets, lui reviennent en entier. 503. L'associé qui a fourni son nom le reprend (6). 504. L'associé n'a, pour assurer la restitution de son ap- port, aucun privilège (7). L'apport, en effet, ne constitue pas une vente dont la valeur à restituer serait le prix. Nous avons ') V. les auteurs cités in fia, note 3. (!t N. 126. s Troplong, II, n. 590; Pont, n. 394; Laurent, XXVI.n.27i; Guillouard, n. 160. — Contra Duvergier, n. lv:i. (*) V. supra, n. 168. 1 Argou, liv. III, ch. XXXII, II, p. 232: Pont, n. 304; Laurent, XXVI, n. 252 ; Uuillouard, n. 196; Houpin, I, n. 51. '-:ass., 6 juin 1859, S., 59. 1. 657, D., 59. 1. 248. — Cass. civ., 20 nov. 1896 (2 arrêts), S. ,96. 1.325. — Pont, n. 304; Laurent, XXVI, n. 252; Guillouard, n. 196 ; Houpin, I, n. 50. — V. supra, n. 163 et 493. (7) Cass., 13 juillet 1841, S., 4L 1. 631. — Aubry et Rau, III. § 263, note 11 ; Pont, Tr.des priv.et hyp., I, n. 197: Guillouard, n. 1*5 : Houpin, I, n. 4L Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 19 290 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ vu qu'au contraire, si l'apport est fait moyennant un prix, l'associé jouit d'un privilège pour le recouvrement de ce prix ('). 9 VI. Droit d'exercer un commerce similaire. 505. Chacun des associés peut, après la dissolution de la société, exercer un commerce ou une industrie analogues h ceux de la société (2). Il en est de même des héritiers qui, après la mort de leur auteur, ont reçu le remboursement de la part de ce dernier (8). Ils ont simplement fait acte de copartageant, ils n'ont pas fait une cession les obligeant à garantie. De même encore pour le donataire ou légataire de la part de l'associé défunt (*). 506. Il est souvent convenu soit dans l'acte de société, soit dans un acte postérieur à la dissolution, qu'après cette disso- lution ou leur exclusion, les associés ne pourront exercer un commerce ou une industrie analogues a celui qui faisait l'ob- jet de l'exploitation sociale. La validité de cette clause est soumise aux mêmes conditions que celle de la clause impo- sant une interdiction analogue au vendeur d'un fonds de com- merce et à l'employé (:i). Si donc l'interdiction doit s'appliquer à quelque époque et en quelque lieu que ce soit, elle est nulle (*). (') V. supra, n. 154. [*) Gass., 5 fév. 1855, S., 56. 1. 417. — Cass., 2 mai 1860. S., 60. 1. 308. - Cass. civ., 15 mai 1893, D., 95. 1. 171. — Hue, XI, D. 127. — V. cep. Cass., 30 mars 1885, S., 85. 1. 216. — Lyon, 18 juin 1895 (l'associé qui s'est obligé à garantie ne peut créer un commerce similaire en lace île rétablissement vendu ni abuser de sa situation de liquidateur pour détourner la clientèle). — L'associé ne peut faire une concurrence déloyale à la société, par exemple en créant une confusion préjudi- ciable à cette dernière. — Paris, 16 juill. 1891, Gaz. Pal., 91. 2. 171. (3) Trib. coin. Seine, 31 mars 1894, Droit, 19 mai 1894, Rev. soc, 94. 454 (alors ne que le défunt s'était engagé à ne pas se rétablir après la dissolution de la société). * Trib. com. Seine, 31 mars 1894, précité. ' V. notre Tr. du conlr. de louage, 1" éd.. II, n. 1263 s. («) Paris. 6 juill. 1893. S., 94. 2. 100. — Paris, 8 juill. 189:!. Loi, 26 déc. 1893.— Trib. com. Seine, 14 août 1890, Loi. 31 août 1890. — L'associé peut demander la nullité de cette clause même si son droit n'est pas actuellement contesté'. Paris, 8 juill. 1893. précité. COMMUNAUTÉ — ACTES QUI LA CONSTITUENT 201 Elle est valable, au contraire, si elle s'applique à un rayon déterminé (M. CHAPITRE XII DE LA COMMUNAUTÉ OU INDIVISION SECTION PREMIÈRE DISTINCTION DE LA COMMUNAUTÉ AVEC LES AUTRES FAITS JURIDIQUES. ACTES QUI LA CONSTITUENT 507. A la différence de codes étrangers plus récents, le r la propriété ne reçoit aucune atteinte des événements qui frappent le propriétaire dans sa personne. .Mais si, à ce point de vue, la communauté est plus résis- tante que la société, die l'est moins sous d'autres aspects. Notamment chaque communiste peut demander quand il lui plaît qu'il soit mis fin à l'indivision par un partage art. 815); '), tandis qu'un associé n'a pas ce droit : ce dernier est obligé de subir l'indivision tant que dure la société, sauf les cas rares où il lui est permis de demander à la justice qu'elle en prononce la dissolution anticipée. 512. On a dit que la communauté est une situation de t'ait J). Cela ne nous parait pas exact ; elle dérive, selon nous, nécessairement de la volonté des parties (s). Cette volonté peut consister à maintenir l'état d'indivision suivant lequel des biens sont devenus la propriété de certai- nes personnes; legs de succession, société dissoute, etc. Mais, quoi qu'ait dit Pothier [*) qui voyait là le principe de diffé- rences entre la société et la communauté), la communauté n'est pas nécessairement un quasi-contrat et peut également résulter d'une convention formelle ,3), par exemple, comme nous l'avons dit, d'un achat fait en commun; le droit romain admet- tait ce point de vue ' . 513. Lorsque les héritiers laissent en commun les biens héréditaires pour les exploiter, il y a société (7). 514. Au contraire l'achat fait en commun d'un immeuble ou d'un meuble destiné à être partagé et non à être exploité, constitue la communauté et non la société (8). (') V. infra, n. 550. : Guillouard, n. 20. 1 V. cep. Guillouard. n. 30. ' l,r append., n. 181 et 182. — V. aussi Ferrière, Dict. dedr., v° Communauté. Guillouard, n. 20 et 376 ; Thaller, n. 239. I6) L. 31, D.,prosoc, 17. 2. " Cass. req., 28 mars 1892, S., 93. 1. 461. • 'iass., 22 nov. 1852, S.. 53. 1. 73, D., 52. 1. 325. — Aix, 30 nov. 1853, D., 55. 2. 117 — Trib. paix Paris, 11 déc. 1890, Loi, 18 janv. 1891 alors même qu'en fait 294 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ C'était déjà la solution d'Ulpien f). Nous donnerons, à propos du mandat, un exemple de cetle hypothèse en étudiant la convention par laquelle un proprié- taire charge un tiers d'acheter un immeuble contigu à leur propriété respective avec la clause que cet immeuble sera partagé entre eux ('). Mais, si l'immeuble est destiné à être vendu avec bénéfices, il y a société (2). La réunion de personnes qui ont pour but d'acquérir un immeuble en commun pour le mettre à la disposition d'une congrégation dont elles font partie est une association et non pas une communauté (s). 515. La communauté doit être distinguée du mandat; c'est à propos du mandat que nous examinerons, comme nous l'avons dit, s'il y a communauté ou mandat dans la conven- tion par laquelle un propriétaire charge un tiers d'acheter un immeuble qui sera ensuite partagé entre eux (*). 516. Dans l'hypothèse où la communauté consiste dans une chose indispensable aux immeubles voisins des divers communistes (cour, passage, puits, vestibules, escalier, etc. , on a dit, pour justifier certaines solutions, — notamment celle qui interdit l'action en partage, — qu'il y a, non pas indivi- sion proprement dite, mais « servitude réciproque » d'indivi- sion (5). C'est dénaturer les sens des termes; il est certain que d'une part, il s'agit d'un immeuble; que, d'autre part, cet immeuble est la propriété de diverses personnes; qu'enfin il est indivis entre elles; or, ce sont là les caractères de l'indi- vision (8). l'immeuble a été revendu avec bénéfice). — Troplong, I, n. 28; Duvergier, n. 40 ; Pont, n. 75; Guillouard, n. 17, 376 et 377 ; Wahl, Xote, <., 95. 2. 87; Houpin, I, n. 10. (l) L. 31, D.,prosoc, 17. 2. (') V. notre Tr. des contr. aléat.. du mandat, etc., n. 402. (s) Trib. paix Paris, 11 déc. 1890, précité. — Contra Hue, XI, n. 6. («) Wahl, Note, S., 95. 2. 87. — Contra Trib. civ. Guingamp, 15 juill. 1892, S., 95. 2. 87 (au sujet de l'impôt d'accroissement). (&) V. notre Tr. des contr. aléat., du mandat, etc., n. 402. (•) Cass., 10 déc. 1823, S. chr. — Cass., 10 mars 1845. S., 46. 1. 487. - Pardes- sus, Tr. des ser-vit., n. 190 s. ; Duranton, V, n. 149. C) Carré de Malberg, Xote Pand. franc., 95. 1. 481. COMMINVl !K — ACTES QUI LA CONSTITUENT 295 Certains auteurs, tout en convenant qu'il y a indivision dans l'espèce, soutiennent qu'il y a en même temps servitude d'indivision, c'est-à-dire que la copropriété indivise est grevée d'une servitude au profit de tous les fonds à l'utilité desquels elle est destinée ('). Cette argumentation soulève d'aussi gra- ves objections que la précédente : comment le copropriétaire d'un fonds pourrait-il en même temps avoir une servitude sur ce fonds? La servitude, étant un démembrement du droit de propriété, ne peut exister au profit de la même personne, concurremment avec lui. Et quand on ajoute que cette servi- tude d'indivision s'exerce à titre de propriété, nous avouons ne plus comprendre. 517. Les auteurs qui, dans ces hypothèses, voient des cas de servitudes, sont forcés de reconnaître que ces servitudes, conformément à l'art. 637, ne peuvent être stipulées qu'au profit de fonds et non au profit de personnes (') ; l'intérêt pratique de cette observation nous échappe. Mais, en dehors de là. on admet généralement que, le caractère de co propriété l'emportant, les règles relatives à la propriété sont applicables. Aussi on ne pourra ni" réclamer le changement d'assiette delà servitude si le propriétaire servant otfre une assiette plus favorable art. 701) (3), ni se plaindre d'une aggravation de la servitude (art. 702] (*), ni se prévaloir de la prescription par le non-usage de 30 ans (art. 706) (5;. La même idée, comme nous le verrons, produit des con- séquences au point de vue des actions possessoires, de la prescription, des droits des co-propriétaires, et de la faculté accordée aux co-propriétaires de céder leur part. 518. Il y aurait co-propriété avec servitude d'indivision dans les hypothèses suivantes : (') Demolombe, XI, n. 444 et 445 ; Aubry et Rau. II, § 221 ter, note 1; Laurent, VII, n. 482: Guillouard, n. 385. 2 Pardessus, Tr. des servitudes, n. 196; Demolombe, XI, n. 444: Guillouard, n. 387; Aubry et Rau, II. § 221 ter. note 4 ; Carré de Malberg. loc. cit. (») Cass., 17 nov. 1840, S., 41. 1. 150. — Cass., 15 fév. 1858, S., 58. 1. 347. — Paris. 15 mars 1856, S., 57. 2. 61. — Guillouard, n. 387. (*) Cass., 10 nov. 1845, S., 46. 1. 487. — Cass., 31 mars 1851, S., 51. 1. 404. — Guillouard, n. 387. 5 Cass., 25 avril 1855, S., 56. 1. 396. — Grenoble, 17 mars 1888, Rec. Grenoble, bi>. 139 corridor). — Guillouard, n. 387. 296 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Puits («). Fosses d'aisance (*). Allées (3). Chemins d'exploitation (*). Ruelles (5). Avenues ,^6). Sentiers (7). Cours (8). Corridor (9). 519. La co-propriété avec certitude d'indivision peut être acquise par la prescription même si la certitude, considérée isolément, ne présente pas les conditions qui la rendent pres- criptible, car on sait que, d'après les auteurs qui, en pareille hypothèse, admettent que la copropriété est mélangée de servitude, le caractère de copropriété l'emporte. Ainsi la copropriété d'un passage peut être acquise par la prescription, quoique la servitude de passage soit discontinue et, comme telle, non susceptible d'être acquise par la pres- cription (10). SECTION II USAGE DK LA CHOSE COMMl M 520. Chaque communiste a le droit de se servir de la chose commune, mais il ne peut s'en servir qu'à la condition de l'em- ployer suivant sa destination (") et les intérêts de la commu- nauté (12j. :') Guillouard, n. 385 bis. 2) Guillouard, n. 385 bis. '\i Guillouard, n. 385 bis. l) Cass., 28 fév. 1866, S., 66. 1. 193. — Guillouard, n. 385 bis. (5) Pau, 20 fév. 1867, S., 67. 2. 356. — Guillouard, n. 385 bis. (6) Guillouard, n. 385 bis. 'J) Guillouard, n. 385 bis. ■ Guillouard, n. 385 bis. (*) Grenoble, 17 mars 1888, Bec. Grenoble, 88. 139. ^,0; Aubry et Rau, II, § 221 ter, noie 6 ; Guillouard, n. 387. (»-«) Cass. req., 8 fév. 1897, S., 97. 1. 279. — Aix,28 mai 1887, Bull. ci 'Ai. p, 88. 128. — Grenoble, 19 mars 1889, Bec. Grenoble, 89, 116 'Je copropriétaire d'un canal peut y placer des conduites pour isoler la portion d'eaux qui lui appartient). — Caen, 1er aout 1879, S., 80. 2. 13. — Bordeaux, 31 mai 18S7, S., 88. 2. 127. — Poitiers, COMMUNAUTÉ — USAGE l>K LA CHOSE 297 Il ne peut pas non plus user de la chose de manière à nuire à ses communistes el •> les empêcher d'user également de la chose ' . Mais les communistes ne peuvent se plaindre que l'usage normal l'ait par chacun d'eux diminue l'usage des autres ('). 521. La jouissance des copropriétaires sur les choses dont l'utilité est commune à leurs fonds, — celles qu'on ditgénéra- lemeut être affectées de servitude d'indivision. — comporte un droit plus plein que la jouissance desautres choses communes. Cette solution est d'abord acceptée par l'opinion qui consi- dère ces choses comme affectées de servitudes d'indivision (3): Kl le se fonde sur ce que, l'indivision étant forcée, les parties sont censées avoir voulu trouver une compensation dans la faculté de retirer de la chose tous ces avanlanges, et on en conclut que chacun des copropriétaires peut se comporter comme propriétaire unique à la charge de ne pas nuire à ses copropriétaires. Sans adopter l'idée de la servitude d'indivision et sans imputer sans raison aux copropriétaires une intention dont rien ne démontre l'existence, on doit motiver le droit particulière- ment plein des copropriétaires sur la chose accessoire dont l'utilité leur est commune par l'idée qu'ici la copropriété est née d'un besoin commun et, par suite, doit offrir tous les avantages nécessaires à la satisfaction de ce besoin (4). 25 janv. 1893, Gaz. l'ai.. 93. 1. 2e p., 40. — Grenoble, 29 mai 1894, Rec. Grenoble, 94. 215. — Nancy, 29 avril 1899, Gaz. l'ai., 99. 2. 80(un copropriétaire ne peut faire de la cour commune un lieu de stationnement pour observer les autres coproprié- taires). — Trib. civ. Lyon, 18 juin 1890, Mon. jud. Lyon, 11 jnill. 1890. — Trib, civ. Chambéry. 14 avril 1892, Rec. Grenoble, 92. 2. 177. — Pothier, n. 207 ; Demo- lombe, XI, n. 44(5; Aubry et Rau, II, § 221, note 13 ; Laurent, XXVI, n. 436; Guil- louard, n. 381 et 382 ; Carré de Malberg, Sole, Pand. franc., 95. 1. 481. — V. aussi les autorités citées dans les notes suivantes. ■) Poitiers, 25 janv. 1893, précité. — Lyon, 27 avril 1898, Loi, 15 oct, 1898. — Caen, 15 juil. 1898, Rec. Rouen, 98. 2. 187. — Trib. civ. Saint-Etienne, i juin 1890, Droit, 1er oct. 1890 (carrière '.. — Trib. civ. Lyon, 18 juin 1890, précité. — Trib. civ. Chambéry, 14 avril 1892, précité. — Pothier, n. 207; Demolombe, XI, n. 246; Aubry et Rau, II, § 221. note 13; Laurent, XXVI, n. 436; Guillouard, n. 381. (*) Paris, 14 juin 1890, Droit, 1er juil. 1890. ' i laen, 24 août 1842, S., 43. 2. 78. — Paris, 6nov. 1863, S., 64. 2. 36. — Aubry et Rau, II, § 221 ter, uote 9; Guillouard, n. 388. O Laurent, VII, n. 483. 298 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Ainsi le copropriétaire peut faire des innovations sur la chose sans le consentement de ses copropriétaires (l). Il en est ainsi à plus forte raison dans l'opinion qui donne cette solution pour la communauté ordinaire. 522. En principe, l'un descopropriétairesd'une chosecom- mune ne peut faire, sans le consentement des copropriétaires, aucuneinnovation ou modification à lachosecommune (*). L'art. 18594° donne cette solution en matière de société et il faut l'étendre à la communauté, parce qu'il serait choquant de voir des communistes avoir plus de droits que des associés; en vain dit on qu'à la différence de la société, la communauté ne nécessite pas que chacun sacrifie ses intérêts aux intérêts communs ;c'est une erreur absolue, puisque, d'après l'opinion générale, le droit de chacun est, dans la communauté, limité par le droit des autres. Du reste, et cela surtout est décisif, cette solution était donnée par le droit romain (3) et l'ancien droit ('). Le consentement des copropriétaires peut, d'ailleurs, être tacite (sj. Par exception, nous avons dit que, lorsqu'il s'agit de la copropriété d'un de ces objets qui sont nécessaires à l'exploi- tation des propriétés voisines, ou admet que chacun des co- propriétaires peut faire les innovations qui ne sont pas con- traires à la destination (6). 1 V. in fra, n. 522. 3 Cass. req., 27 juin 1893, S . 96. 1. 86 (constructions). — Cass. req., 21 nov. 1898, S., 99. 1.314 (établissement d'un chemin de fer . — Grenoble, 12 janv. 1818, S. chr. — Paris, 19 nov. 1898, ] blissement d'un atelier, par exemple d'un atelier de chau-: dronnerie (l), ou par un dépôt permanent de fumier - ou de voitures (•), ou en y laissant vaguer des bestiaux ou de- volailles ('). Ils ne peuvent pas davantage, par une clôture impossible à ouvrir, empêcher la circulation (";. Les copropriétaires d'un puits commun ne peuvent, sans le consentement de leurs copropriétaires, édifier dans ce puits ou un mur séparatif (8) ou y substituer une pompe (7). Ils ne peuvent, si le puits est destiné au puisage, y faire abreuver des bestiaux (8J ; ils ne peuvent pas enfin absorber toute l'eau du puits (9). 527. Le copropriétaire d'un passage peut y pratiquer des ouvertures (10). 528. Chacun des copropriétaires peut user de la chose qui fait l'objet de l'indivision forcée non seulement pour le ser- vice de son immeuble immédiatement contigu, mais pour le service de tous ses immeubles, à la condition de ne pas nuire à ses copropriétaires ("). Mais si la chose indivise a été établie ou exécutée pour le service de certains immeubles, les copropriétaires ne peuvent en user pour d'autres immeubles (12). 529. Si l'un des immeubles auxquels servait la chose com- (') Cbambéry; 14 mai 1810, D., 71. 2. 32. — Guillouard, n. 389: Carré de Mal- berg, loc. cit. Caen. 24 uov. 1856, S.. 57. 2. 304. — Poitiers, 16 janv. 1889, Gaz. l'ai.. 89. 1. 234. — Guillouard, n. 389; Carré de Malberg, loc. cit. H Lyon, 22 fév. 1888, Mon.jud. Lyon, 3 mars 1888. — Poitiers, 1G janv. 18S9, précité. 4 Poitiers, 16 janv. 1889, précité. Cass., 28 juin 1876, S., 76. 1. 344, D., 78. 1. 127. — Dijon, 13 déc. 1873, I>.. 77. 5. 365. — Cuillouard, n. 389. 6 Cass. req., 17 mai 1887, S., 90. 1. 315, D., 88. 1. 60. — Guillouard, n. 389 : Carré de Malberg, loc. cit. (7) Trib. civ. Bordeaux, 6 mars 1895, S., 97. 2. 218. (8j Poitiers, 16 janv. 1889, Gaz. l'ai., 89. 1. 234. 5 Poitiers, 16 janv. 1889, précité. 1(1 Trib. civ. Grenoble, 6déc. 1886, Rec. Grenoble, 87.138. 1 Paris, 6 nov. 1863, S , 64. 2. 36. - Bordeaux, 31 mai 1887, S., 88. 2. 127. — Grenoble, 17 mars 1888, Rec. Grenoble, 8S. 139. (,s) Bourges, 13 nov. 1838, S., 39. 2. 84 puits). — Trib. civ. Grenoble, 6 déc. 1886, Rec. Grenoble, 87. 1. 38 ^passage';. — Carré de Malberg, loc. cit. 302 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ mu ne est démoli et remplacé pur un autre, elle sert au nou- vel immeuble, dès lors que la jouissance des autres copro- priétaires n'en est pas entravée ('). 530. Chacun des copropriétaires peut réprimer les attein- tes d'un tiers à la propriété ' . L'action possessoire est admise contre les tiers même dans les cas qu'on regarde généralement comme des servitudes d'indivision, et sans que ces servitudes présentent, comme l'exige le droit commun en matière de servitude, la continuité et l'apparence v3 . Car, en admettant qu'il y ait servitude, il y a en même temps copropriété. Ainsi un chemin commun peut donner lieu à l'action pos- sessoire quoique la servitude de passage, étant discontinue, n'y donne pas lieu (*). 531. L'un des copropriétaires ne peut autoriser un tiers à chasser sur le terrain commun, même concurremment avec lui (5), car il entraverait la jouissance de ses communistes. Il ne peut introduire dans l'immeuble un tiers qui habitera avec lui (6). 11 ne peut pas davantage constituer des servitudes sur le fonds commun (7) ou aliéner la chose. Les constitutions de servitudes et les aliénations sont subordonnées au résultat du partage (8). 532. Mais le communiste aliène librement son droit (9). L'acquéreur n'est même pas sujet au retrait de la part des autres communistes ^10). Quant aux hypothèques qui grèvent l'immeuble du chef 1 Cass. civ., 13 mars 1894, s . 98. I. B59, D., 94. 1. 329 cel arrêt décide même que si la maison nouvelle est réunie à une autre maison, à laquelle elle était con- tinue, de manière à ne former qu'un avec elle, la rue commune dessert la maison entière, si la jouissance des autres copropriétaires n'est pas entravée. — En ce sens sur ce dernier point. Carré de Malberg, loc. cit.). irdeaux, 17 avril 1888, Re . B deaux, 88 1. 243. '-' Guiilouard, n. Cass., 19 juin 1875, D., 77. 1. 237. — Guiilouard, n. » Toulouse, i janv. 1875, s.. 75. 2. 68. — Guiilouard, n. g " Limoges, 25 avril 1888,D.,89 2.288. — Guiilouard, n. 382. —V. infra, n. 553. ' V. notre Tr. n'es suce, 2« éd.. III. n. 3337 s. — V. infra, a. '■ ■ Aubry et Rau, II. § 221, note -i : Guiilouard, n. 393; Thaller, n. 239. " Aubry et Rau, loc. cit. ; Guiilouard, lue. cil. COMMUNAUTÉ — ADMINISTRATION 303 des communistes, nous verrons qu'elles sont subordonnées au résultat du partage ('). 533. Le copropriétaire peut céder même sa part dans la co- propriété de ces immeubles que l'opinion générale considère comme grevés d'une servitude d'indivision. Cela va de soi à nos yeux, puisque nous ne voyons pas que celte copropriété ait rien de spécial ; mais il n'en est pas autrement dans l'opi- nion générale (-), et on ne peut opposer en sens contraire la règle qui défend de détacher la servitude d'un fonds pour l'attacher à un autre fonds. En ell'et, ici la servitude n'est que l'accessoire de la copropriété ; si elle ne peut être cédée d'une manière principale, la copropriété, qu'aucun texte ne défend de transmettre, est, par là même, susceptible d'être cédée ; la servitude, en sa qualité d'accessoire, suit la propriété. C'est ce qui a été décidé pour la copropriété de pressoirs (*). 11 va sans dire que la cession est nulle si elle aggrave la jouissance des copropriétaires. 534. On peut, pour apprécier l'étendue des droits des co- propriétaires sur la chose nécessaire à l'usage commun de leurs fonds, consulter l'ancienneté de cet usage (l). 535. Le juge des référés est compétent pour statuer, en cas d'urgence, sur les abus commis par un communiste (5). Il peut, par exemple, expulser le tiers que l'un des commu- nistes aura introduit sur l'immeuble (6). SECTION III ADMINISTRATION DE LA CHOSE COMMUNE 536. Si l'objet indivis est entre les mains de l'un des com- munistes, il est, vis-à-vis de ses copropriétaires, tenu d'en ' V. infra, n. 553. Guillouard, n. 387. — Contra DemolomLe, XI, n. 444 ; Aubry et Rau, II, § -221 ter, note 17; Carré de Malberg, Noie, Panel, franc., 95. 1. 481. Caen, 16 avril 1839, Rec. de Caen, 39. 373. — Caen, 6 janv. 1841, Rec. de Cacn, 41. 70. — Caen, 25 fév. 1841, Rec. de Caen, 41. 114. — Caen, 13 nov. 1841, Rec. de Caen, 41. 393, cités par Guillouard, loc. cit. infra. — Guillouard, n. 387. Caen, 1er aout 1879, S., 80. 2. 13. — Guillouard, n. 389. Guillouard, n. 384. Toulouse, 4 janv. 1875, S., 75. 2. 68. — Guillouard, n. 384. 304 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ prendre soin ('). — Il est donc responsable des fautes qu'il commet dans la gestion (2). Il doit compte à ses copropriétaires des fruits qu'il a per- çus (3) on du profit qu'il a retiré de la gestion (*). 537. Si le mandat d'administrer la chose commune a été confié à l'un des copropriétaires, ce mandat, étant donné dans l'intérêt des mandants et du mandataire, ne peut être révo- qué que de leur consentement à tous (°). 538. Le règlement de jouissance entre copropriétaires est un bail si celui des copropriétaires qui jouit de l'immeuble paye un loyer (6). 539. Dans le cas où aucun mandat n'a été conféré relative- ment à l'administration, on ne peut appliquer à la commu- nauté l'art. 1859-1°, d'après lequel, en matière de société, et s'il n'a pas été nommé d'administrateur, les associés se sont réciproquement donné mandat d'administrer ('). Cette dispo- sition, en effet, repose sur une idée de mandat tacite et, par cela même qu'elle supplée une convention, ne peut s'étendre au cas de communauté, où d'ailleurs les mêmes raisons de décider n'existent pas : en effet, on ne peut supposer que les communistes, qui ne sont pas unis par un lien personnel et qui souvent sont en désaccord les uns avec les autres, se soient reposés les uns sur les autres pour la gestion désinté- rêts communs. Par exemple si un des communistes donne à bail la chose commune, le bail n'est pas opposable à ses copropriétaires (8). Il ne peut recevoir le prix de vente de la chose; si le prix lui est payé, la partie du prix appartenant aux autres est (») Domat, liv. II, lit. V, sect. 2, § 1 : Guillouard, n. 395. (2) L. 8, § 1, D., Comm. divid., 10. 3; Guillouard, n. 395. i îuillouard, n. 395. (*) Guillouard, n. 395. (5) Cass. civ., 13 mai 1885, S., 87. 1. 220. («) Orléans, 7 janv. 1888, D., 88. 2. '.'95. — V. notre Tr. du contr. de louage. 2c éd.. I, n. 117. r, Cass., 22 nov. 1852. S.. 53. 1. 73. — Aubry et Rau, II. § 221, note 9 ; Ponl, n. 77 et 82; Laurent, XXVI. n. 440: Guillouard, n. 391. — Contra Bordeaux, 11 avril 1845, S., 46. 2. 315, D., 45. 4. 482. * V. notre Tr. du contr. de louage, 2e éd., I, n. 117, 132 s. COMMUNAUTÉ — ADMINISTRATION 303 indûment payée. L'acquéreur n'est donc |>;is libéré vis-à-vis de ces derniers ('). On convient généralement que les actes de disposition exigent l'assentiment de l'unanimité des associés ('). Il en est ainsi pour les défrichements (3), les constructions (') et, d'une manière générale, toutes les innovations (5). Les mesures d'administration ne peuvent être elles-mêmes prises que par l'unanimité des associés ; la majorité ne peut lier la minorité (6). Nous avons démontré l'exactitude de cette solution pour les actes de disposition en matière de société (7), et toutes les rai- sons que nous avons fait valoir peuvent être reproduites ici. Mais, dans l'opinion même qui rejette cette solution en matière de société, elle doit, croyons-nous, être admise en matière de communauté (8) et y être étendue aux actes d'admi- nistration ; il n'y a pas ici de principe analogue à celui de la société, d'après lequel les associés se représentent les uns les autres et d'après lequel il existe au-dessus des intérêts indivi- duels un intérêt commun en vue duquel les associés se sont unis: les communistes ne songent qu'à leur intérêt personnel et aucun lien ne les unit que celui résultant de la copropriété même. L'opinion contraire se fonde donc sur une raison inexacte, quand elle affirme que la communauté des intérêts doit permettre à la majorité d'exercer une pression sur la minorité. Notre solution n'a pas les inconvénients pratiques qu'on lui impute, car, si l'un des communistes résiste de mau- vaise foi, une indemnité peut lui être demandée. Les partisans de l'opinion que nous venons de défendre 1 Cass., 22 nov. 1852, précité. ' Goillouard, n. 392. » Guillouard. n. 392. (4) Guillouard, n. 392. (s) V. svpra, n. 522. Thaller, n. 239. — Ainsi décidé pour un bail de chasse. — Trib. civ. Lii -•■. 23 déc. 1885. Pasicr., 86. 3. 214. — Hue, X. n. 275. " V. supra, n.317 s. (8) Cass., 31 oct. 1811, D.. Rép.. v° Société, n. 514. — Cass., 13 mars 1866, 1)., 67. 1. 222. — Laurent, XXVI, n. 443: Thaller. loc. cit. — Contra Guillouard, n. 392. Société, i>i\kt, dépôt. — 2e éd. "0 306" DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ l'abandonnent quand il s'agit de réparations. Ils permettent à chaque communiste de forcer les autres à y contribuer^); la raison qu'ils invoquent est qu'il s'agit ici non pas d'obli- gation, mais de charge pesant sur la propriété. C'est là une erreur évidente : le droit d'abuser, qui est un des caractères de la propriété, fait que le propriétaire est libre de faire ou non à son immeuble les réparations dont cet immeuble a besoin et, du reste, personne n'a jamais soutenu que les répa- rations fussent, comme l'impôt par exemple, une charge de la propriété ; il n'y a donc pas à ce sujet d'obligation réelle et, comme on convient que les communistes ne sont pas tenus d'une obligation personnelle l'un envers l'autre, le droit qu'on accorde aux uns de faire contribuer les autres aux réparations manque entièrement de base. 540. On admet cependant souvent que le copropriétaire d'une chose commune peut obligerses copropriétaires à contri- buer aux dépenses nécessaires, notamment aux réparations (2) et même aux reconstructions s), sauf, comme nous le verrons, le droit d'abandon généralement accordé à ces derniers. Nous ne voyons pas sur quoi repose cette action ; il faudrait, pour qu'elle existât, qu'un lien personnel se fût formé entre les copropriétaires. On prétend, il est vrai, que l'obligation des copropriétaires est réelle l, mais nous venons de montrer le contraire. Certains codes étrangersadmettentcependantcelteaction(5). En tout cas, les dépenses d'amélioration ne peuvent être faites par l'un des communistes sans le consentement des autres (*). 541. Mais le communiste qui a fait des dépenses sur la chose commune a une action en gestion d'affaires contre ses co- (l) Laurent, XXVI, n. 437. (») Chambéry, 22 nov. 1892, Gaz. Pal., 93. 1, 2e p., 44. — Guillouard, n. 397 'cet auteur dit le contraire au n. 391 . — Contra Hue, XI, n. 8. (3) Gaen, 4 nov. 1891, Gaz. Pal., 91. 2, Suppl., 38. (*) Chambéry, 22 nov. 1892, précité 'au lieu d'en déduire que l'action est réelle, cet arrêt dit qu'elle est mixte, parce qu'elle conclut principalement au payement dune somme d'argent . (5) Espagne, C. civ., art. 395. — Italie, C. civ., art. 676. — V. Guillouard, loc. cit. t6,. Rennes, 22 janv. 1894, Rec. d'Angers, 94. 162. COMMUNAUTÉ — ADMINISTRATION 307 propriétaires pour le remboursement de leur part dans la dépense, si cette dépense a été utile et que l'auteur de la dépense ail agi dans l'intérêt de ses copropriétaires ('). 542. Il va sans dire que les dépenses faites dans l'intérêt commun sont supportées, non pas également par chacun, mais proportionnellement aux parts respectives des copro- priétaires dans la chose commune (2). C'est, en effet, dans cette proportion que les dépenses sont utiles à chacun. Du reste, l'art. 664 donne cette solution pour les parties communes d'une maison dont les étages appartiennent à différents co- propriétaires. 543. Les copropriétaires d'un immeuble peuvent-ils se dis- penser de contribuer aux dépenses en abandonnant à leurs copropriétaires la portion de l'immeuble qui leur appartient? I>;ms l'ancien droit, Pothier (3) et Desgodets (*) adoptaient l'affirmative, que rejetait Goupy (8). La première opinion est généralement adoptée aujour- d'hui (6). Pothier l'exprimait sans donner de motifs et n'y faisait exception que pour les murs de clôtures dans les villes où l'usage en impose la construction. Aujourd'hui on donne pour motifs de cette solution qu'il n'y a pas obligation per- sonnelle des copropriétaires, mais simplement charge grevant la propriété. Ces considérations ne nous paraissent pas déterminan- tes (7). Dune part, il est, selon nous, inexact que l'obligation de contribuer aux dépenses soit une obligation réelle; elle n'est pas plus réelle qu'en matière de société (8); elle est l'applica- (') Rennes, 22 janv. 1894, Rec. d'Angers, 94. 162. — Domat, liv. II, tit. 5; Fer- rière, Dict. de dr., v° Communauté ; Pothier, n. 187; Laurent, XXVI, n. 440; Guillouard, n. 391 et 395. (*) Cass., 2 fév. 1825, S. chr. — Lyon, 5 fév. 1834, S., 34. 2. 224. — Guillouard, n.397. (•] N. 192. (*) Les lois des bâtiments, sur l'art. 211 de la coût. (•) Sur Desgodets, loc. cit. ' Caen, 4 nov. 1891, Gaz. Pal., 91. 2, Suppl., 738. — Pardessus, Tr. des serv., n. 192; Anbry et Rau, IV, p. 406, § 221, note 15; Laurent, XXVI, n. 437 et 438. (7) Guillouard, n. 398. (8) V. supra, n. 539. 308 DU CONTRAT DK SOCIÉTÉ tiou de l'idée que le communiste qui fait la dépense agit dans l'intérêt des autres et fait leur affaire; or la gestion d'affaires fait naitre des obligations personnelles. D'autre part, il n'est pas plus vrai de dire que le proprié- taire puisse s'affranchir de ses obligations réelles en aban- donnant son immeuble; une obligation réelle est celle qui est due à raison de la propriété ou de la possession d'un immeuble, mais, en réalité, elle est personnelle, car un débi- teur est nécessairement une personne. Ainsi la dette de l'im- pôt sur les immeubles est réelle et cependant, en dehors des hypothèses où le propriétaire reçoit d'un texte législatif le droit d'abandonner l'immeuble pour se dispenser du paye- ment de l'impôt, le droit d'abandon ne lui est pas accordé. On n'osera jamais soutenir que le propriétaire unique d'un immeuble puisse se dispenser de rembourser à son gérant d'affaires les réparations ou abandonnant l'immeuble. De même on n'hésitera sans doute pas à admettre que l'abandon ne peut servir aux copropriétaires indivis à échapper au paye- ment des réparations faites par les soins d'un tiers, leur gérant d'aflaires. Pourquoi alors décider le contraire quand le gérant d'affaires est l'un des co-propriétaires? La solution contraire a pour les propriétaires auxquels l'abandon est fait les plus graves inconvénients; elle leur impose une dépense nouvelle, qui n'est compensée par aucun avantage. En effet, le puits ou le passage qui leur est aban- donné ne leur sera pas désormais plus utile qu'il ne le leur était autrefois : ils ne puiseront pas ou ne passeront pas davantage ; mais désormais ils payeront toutes les dépenses dont une partie seulement leur incombait. Leur situation est donc beaucoup plus fâcheuse que celle de la commune à la- quelleunpropriétaireabandonne son immeuble pour échapper au paiement de l'impôt foncier; car la commune trouve dans cette propriété même une compensation, et cependant il a fallu un texte pourautoriser l'abandon en pareille hypothèse. En vain objecte-ton que, d'après les art. 656 et 699, un propriétaire peut, pour échapper à l'entretien de la mitoyen- neté ou de la servitude, abandonner sa part de mitoyenneté ou le fonds servant. Nous pourrions, au contraire, tirer argu- COMMUNAUTÉ ADMINISTRATION 309 ment do ces textes, qui seraient inutiles s'ils étaient l'appli- cation du droit commun, pour soutenir que le principe géné- ral est tout opposé. Du reste, les règles de la mitoyenneté sont exceptionnelles à d'autres points de vue, puisqu'on peut ache- ter la mitoyenneté d'un mur contre le gré du propriétaire, et, par suite, ne peuvent servir d'argument ; et quant à l'art. 699, tout le monde reconnaît qu'il est contraire au droit commun. 544. On décide généralement que l'art. 1846 C. civ., d'après lequel les associés doivent de plein droit les intérêts des sommes qu'ils ont prises dans la caisse sociale, n'est pas applicable en matière de communauté (*). Cela est exact : l'art. 1846 repose sur l'idée que les associés se sont implici- tement engagés à employer les fonds sociaux dans l'intérêt de la société. Or, il n'existe rien de pareil en matière de com- munauté; on appliquera donc l'art. 1153 C. civ., d'après lequel les intérêts des sommes dues ne courent que du jour de la demande en justice. Toutefois, si le communiste emploie dans son intérêt les sommes qu'il a été chargé de percevoir, il est tenu, dès le jour de l'emploi, des intérêts, car il est pour ces sommes un mandataire et le mandataire doit de plein droit les intérêts des sommes qu'il emploie à son usage personnel. 545. Il n'y a pas lieu d'appliquer à la communauté l'art. 1848, suivant lequel l'associé qui touche une somme de son débiteur, lequel est en même temps débiteur de la société, doit imputer cette somme sur la créance de la société {-). Ce texte repose sur une idée étrangère à la communauté, à savoir sur l'obligation imposée aux associés de consacrer tous leurs efforts à la satisfaction des intérêts sociaux. De même, et pour la même raison, l'art. 1849, qui oblige l'associé à rendre compte a la société des sommes reçues d'un débiteur social, depuis devenu insolvable, n'est pas applicable à la communauté (3). 546. L'engagement pris par l'un des communistes ne peut Cl Laurent, XXVI, n. 444; Guillouard, n. 396; Hue, XI, n. 8. I*) Duvergier, n. 37; Pont, n. 78; Laurent, XXVI, n. 442; Guillouard, n. 396; Hue, XI, n. 8. ») Pothier, n. 189; Laurent, XXVI, n. 441: Guillouard, n. 3%; Hue, XI, n. 8. 310 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ évidemment êlre poursuivi contre les autres communistes ('); c'est la solution donnée en matière de société par l'art. 1861 et on doit l'étendre à la communauté, car elle est l'applica- tion du droit commun (*). Il en serait ainsi par exemple de la créance résultant de travaux faits sur la chose commune (3). Mais les créanciers peuvent, conformément au droit com- mun et à l'art. 1861, agir contre les autres communistes jusqu'à concurrence du profit que leur ont donné les travaux effectués. Ils peuvent aussi, dans les cas où leur débiteur est muni d'une action en gestion d'affaires contre ses copropriétaires, exercer cette action en leur qualité de créanciers, conformé- ment à l'art. 1166. 547. Lorsque des travaux sont commandés par les copro- priétaires, ils n'en sont pas tenus solidairement, mais seule- ment pour leur part divise (4). 548. Les créanciers peuvent-ils saisir et faire vendre la part de leur débiteur dans un immeuble commun? Ils ne le peuvent pas certainement pour les immeubles qui, dans une certaine opinion, font l'objet d'une indivision for- cée (5), si on accepte cette opinion. Si, comme nous l'avons fait, on la rejette, la question devient identique pour ces immeubles et pour tous les immeuble communs. La difficulté nait de l'interprétation de l'art. 2205 C. civ., qui défend aux créanciers « d'un cohéritier » de saisir la part indivise de leur débiteur dans les immeubles de succession. Certaines autorités appliquent ce texte à la communauté (6), d'autres sont d'avis contraire (7). («) Polluer, n. 187; Laurent, XXVI, n. 440: Guillouard, n. 391 et 395. (2) C'est donc à tort que M. Guillouard, loc. cit., rattache cette solution à l'idée, d'ailleurs exacte, que les communistes, à la différence des associés, ne se repré- sentent pas les uns les autres. (') Auteurs précités. *) Trib. civ. Seine, 16déc. 1893, Gaz. Trib., 23 fév. 1894. (») Guillouard, n. 394. (•) Pau, 10 déc. 1832, S., 33. 2. 240. — Lyon, 9 janv. 1833, S., a3. 2. 381. — Lyon, 14 fév. 1839, S., 40. 2. 321. — Douai, 2 mai 1848, S., 49. 2. 393, D., 49. 2. 184.— Bordeaux, 19 juil. 1882, S., 83. 2. 150. — Chauveau, Lois de la procéil., quest. 2198; Golmet de Santerre, IX, n. 200 6/5, II et III. (7) Liège, 23 janv. 1834, S., 34. 2. 683. — Bordeaux, 7 avril 1840, S., 40. 2. COMMUNAUTÉ FIN \i I l Lu toul cas l'art. 22().i se restreint, par son texte même, aux immeubles; les créanciers d'un communiste peuvent donc saisir sa part indivise dans un meuble commun ('). SECTION IV FIN DE LA COMMUNAUTÉ 549. Potbier (-) disait que la communauté ne peut pren- dre fin que de trois manières : Par le mariage ; Par l'abandon ou cession que ferait l'un des associés à I autre; ajoutons : ou, s'il y a plusieurs communistes, par l'abandon que feraient tous les communistes à l'un d'eux ; Par l'extinction des choses communes. On doit ajouter une quatrième cause de cessation de la communauté : sa transformation en société. Ainsi la communauté ne prend pas fin, comme la société, par le décès, la faillite ou la déconfiture, l'interdiction d'un communiste (8). Cela tient à ce que, la communauté étant Un état passif, la personnalité des associés n'y est pas en jeu. La communauté ne prend pas tin davantage par la volonté d'un seul, ni même par la volonté de la majorité (*) ; en ad- mettant que la majorité puisse même imposer à la minorité les actes d'administration, on ne peut considérer comme telle l'extinction de la société. 550. L'art. 815 s'applique en matière de communauté ; les communistes peuvent, à toute époque, demander le partage des objets indivis (5). On fait cependant, en général, exception pour les objets 521. — Grenoble, 15 mars 1855, S.. 55. 2. 196, 1)., 55. 2.301. — Pont, Tr.de l'expr. forcée, n. 8 et 9; Aubry el Hau, VIII, p. 462, § 778, noie 20. (») Pau, 22 mai 1888, D., 89. 2. 263. — Guillouard, n. 394. - N. 193. I3) Rouen, 15 mai 1880, D., 81. 1. 177. — Pont, n. 79; Laurent, XXVI, n. 445 et 446; Guillouard, n. 400; Hue, XI, n. 8. * Aix, 20 mars 1873, S., 75. 2. 103. — Pont, n. 80 ; Laurent. XXVI, n. 447 Guillouard, n. 400. *) Houpin, I, n. 10; IIuc, XI, n. 7: Thaller, u. 239. — V. notre Tr. des suce, 2« éd., II, n. 2150 s. 312 DL CONTRAT DE SOCIÉTÉ qui. comme les cours, les puits, les vestibules, les passages, etc., sont d'un usage nécessaire aux immeublesvoisins appar- tenant aux copropriétaires : en un mot, pour ceux qu'on dit grevés d'une servitude d'indivision ('). 551. La forme du partage est également réglée par le cha- pitre du partage de sticcession. 552. L'art. 882 C. civ. s'applique à la communauté ('). 553. L'effet déclaratif du partage s'applique à la commu- nauté aussi bien qu'aux indivisions de toute nature (:î). • Par suite, les hypothèques qui grèvent l'immeuble du chef d'un communiste, ainsi que les aliénations et constitutions de servitudes qu'il a consenties, sont subordonnées au résultat du partage (*). CHAPITRE XIII DES ASSOCIATIONS 554. Les associations sont les réunions de personnes dési- reuses, non (comme les membres d'une société) de réaliser un gain, mais de se protéger contre une perte (5), de se pro- curer des jouissances immatérielles ou d'être utiles ou agréa- bles à autrui (6). Endroit romain, les associations n'existaient pas; comme nous lavons montré, on les faisait rentrer dans les sociétés, puisque la recherche d'un bénéfice n'était pas une condition essentielle à l existence de ces dernières (7). Dans l'ancien droit, on appelait association, d'après Fer- ') V. sur ce point, notre Tr. des suce, loe cil. — V. aussi Demolombe, II, h. 414; Pardessus, Tr. des servitudes, n. 191; Carré ,. I. 303, D. fie/)., v° Société, n. 108. — Lau- rent, XXVI, n. 149: Guillouard, n. 75. — Contra Hue, XI, n. 5 (sur l'opinion de cet auteur, v. la note suiv.). (!) Rouen, 5 mars lsiti. s., kù. 2. 4S4. D., 47. 2. 115. — Guillouard, n. 75. — Contra Hue, XI, n. 5. — L'opinion de ce dernier auteur se rattache a la doctrine, inexacte suivant nous, d'après laquelle l'assuciation faite pour diminuer les frais est une société. — V. in fret, n. 558. i3, V. supra, n. 10. («) Cass., 1" juin 1858. S.. 58. 1. 61 i. — Walil. Note, S., 94. 2. 319. Autorités citées aux notes suivantes. — Contra Hue, XI, n. 5. — Cpr. Thal- ler, n. 227, d'après lequel c'est un contrat spécial qui, sans être une société, n'est pas davantage une association et auquel ne s'applique pas, notamment, l'art. 291 G. pén. |V. in/ra, n. 566). («) Pont, n. 68 et 71 ; Guillouard. n. 68. (7) Cass., 26 mars 1878, S., 79. 1. 17. D., 78. 1. 303. — XYahl, Des emprunts con- tractés par les sociétés au moyen d'une émission de titres négociables, Journ. des soc, 1898, p. 294, n. 24. — V. cep. Paris, 5 déc. 1885, sous Cass., 3 déc. 1889, S., 91. 1. 525. — M. Guillouard (n. 55) y voit un contrat innommé. s, Cass. civ., 3 déc. 1889, S., 91. 1. 525, D., 90. 1. 105. — Pont, n. 61 ; Guil- kSSOCIATIOFi — FAITS 011 LA CONSTITUENT 315 Le contrai entre deux propriétaire» qui doivent réparer leurs immeubles ('), élever un mur mitoyen sur leurs proprié- tés . ou refaire le ruisseau qui sépare leur propriétés (3) est encore une association. 559. Les sociétés hippiques ou de courses sont des asso- ciations et non des sociétés, puisqu'elles ne se proposent pas pour but la poursuite d'un gain (*). Il en est de même des sociétés formées pour l'organisation d'une exposition universelle, lorsque les associés ne cherchent pas un bénéfice (5). 560. Le syndicat professionnel n'est pas une société (6). 561. Mais les sociétés créées pour la direction d'une mai- son d'éducation sont de véritables sociétés (') : il est certain, en etfet, que ces sociétés, par la rétribution qu'elles exi- gent de leurs élèves et par la répartition des bénéfices entre les associés, ont tous les caractères d'une société. On a fait à cette doctrine une singulière objection : « ceux qui se propo- sent comme but, dans l'accomplissement de ce rôle si grand, l'occasion de faire un gain, constituent fort heureusement de rares exceptions, flétries à juste titre par l'opinion publi- que » i^8). Il ne nous coûte pas de reconnaître qu'au contraire les maîtres de pension se proposent de faire des bénéfices et, loin de songer à les flétrir, nous trouverons ce calcul très légitime; est-il blâmable de chercher dans son activité, son louard, loc. cit. — Cpr. Aix, 8 avril 1878, S., 79. 2. 313. — Paris, 7 août 1880, S , 81. 2. 93. — Cass., 27 juin 1881. S., 83. 1. 218. — Bourges, 8 mars 1888, Pand. franc., 88. 1. 161. — Trib. civ. Seine, 15 juin 1887, Fr. jud., 1887, p. 353. '; Il a été décidé cependant que ce contrat a un caractère commercial. — Cass. req., 23 oct. 1889, S., 92. 1. 63, D., 89. 1. 479. — Mais cela est inexact. Thatler, Ann.dr. comm., IV, 1890, Doct., p. 199. (*) Aubry et Hau, IV, p. 544, § 377, note 7 ; Pont, n. 69; Guiliouard, n. 66 et 76; Houpin, I, n. 54. — Contra L. 52, § 13, D., pro soc, 17. 2. — Troplong, n. 13. (8) Guiliouard, n. 66 et 76. — Contra L. 52, § 12, D., pro soc, 17. 2. — Trop- long, n. 13. (•) Cass. req., 2 janv. 1894, S., 94. 1. 129. D., 94. 1. 81. — Cotcllc, Happort sous Cass. req., 2 janv. 189i, précité ; Houpin, loc cit. (5) Rouen, 18 nov. 1897, Gaz. Trib., 98, 2« p., 1. 273. (•) Caen, 30 mai 1892, S., 94. 2. 139, D., 93. 2. 245. — Houpin, I, n. 54. (7) Paris, 23 juill. 1852, D., 54. 2. 102. — Pont, n. 115: Laurent, XXVI, n. 229. — Contra Guiliouard, n. 99. (8) Guiliouard, loc. cit. 316 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ travail ou son intelligence les moyens de gagner sa vie? Jamais l'opinion publique ne pensera à flétrir ceux qui obéiront à ces sentiments. Nous avons déjà examiné si ces sociétés sont civiles ou commerciales ('). Toutefois, l'association conclue pour l'exploitation d'écoles libres ou religieuses sans intention de faire des bénéfices ou de les partager n'est pas une société (-). 562. Les sociétés de secours mutuels sont des associations et non des sociétés (3). L'art. 1er de la loi du 1er avril 1898 dit en ce sens : ■< Les sociétés de secours mutuels sont des associations de pré- voyance... » Il eu est de même des caisses de secours établies entre les employés d'une société * Les sociétés coopératives sont également des associations, lorsqu'elles vendent exclusivement à leurs membres (5). L'assurance mutuelle n'est pas davantage une société (6). Dans l'assurance mutuelle, en effet, les parties ne se propo- sent pas pour but de réaliser des bénéfices, mais seulement (■) V. supra, n. 122. (*) Cass. req., 29 nov. 1897, I).. 98. I 108. (3) Paris, 7 déc. 1882. Rev. soc, 83. 547.— Cbavegrin, Note, S., 91. 2. 41;Thal- ler, n. 237. — V. cep. Thuller, Ann. dr. corn., V, 1891, Doct., p. 188 (sociétés civiles). (*) Cass., 18 juin 1872, S., 72. 1. 286, D., 72. 1. 172 (société minière). — Greno- ble, 9 juil. 1866, S., 67. 2. ii (chemina de fer). — Fuzier-Herman, C. civ. annoté, sur l'art. 1106, n. 3. (3) V. supra, n. 121. («) Cass., 16 août 1870. S., 71. 1. 15. — Cass., civ., 17 juin 1879, D., 79. 1. 34.:. — Douai, 29 juil. 1850, S., 52. 2. 709, D., 54. 5. 12. — Douai, 15 nov. 1851, S.. 52. 2. 58, D.,54. 2. 116. — Paris, 25 mars 1873, D., 75. 2. 17. — Aubry et Rau, IV, p. 513. §377, note 5; Pont, n. 71 ; Laurent, XXVI, n. 147; Lyon-Caen et Renault, II, n. 34 bis; Guillouard, n. 74, 97 et 98; Lyon-Caen, Note, S., 87. 2. 122; Hue, XI, n. 3 ; Thaller, n. 237. — Décidé cep. que c'est une société civile. Cass. req., 15 juil. 1884, S., 85. 1. 348. — Cass. req., 28 déc. 1886, S., 88. 1. 08, D., 87. 1. 311. — Dijon, 10 juin 1889, Iiev. des soc, 90. 91. — Paris, 18 fév. 1890, S., 92. 2. 310, D., 92. 2. 307. — Trib. corn. Seine, l"r déc. 1885, Joum. trib. corn., 87. 53. — Trib. civ. Seine, 30 oc.t. 1893, iourn. des assur., 1894. p. 191. — Trib. civ. Seine, 31 oct. 1892, Loi, 23 nov. 1892, Gaz. l'ai., 92. 2. 570. — Trib. corn. Seine, 2 déc. 1890, Joum. trib. com.,92. 116. — Trib. corn. Seine, 9 mars 1890, Loi, 4 juin 1890 et les autorités citées infra, p. 317, note 4. ASSOCIATION — FAITS QUI LA CONSTITUENT 317 de se prémunir contre certaines pertes, par exemple contre les pertes résultant de l'incendie : chacun s'engage à contri- buer pour sa pari aux sinistres que les autres éprouveront. Le contraire a été cependant décidé pour l'assurance ayant pour objet l'entretien des immeubles bâtis appartenant aux assurés (') et pour celle qui a pour objet la réparation de pertes subies dans L'exercice du commerce (2). En tout cas l'assurance mutuelle est une société si. en même temps que l'assurance, elle a un autre but; par exemple si elle entreprend des constructions dans un but de spécula- tion 562 bis. A plus forte raison les assurances mutuelles ne s<>nt pas des sociétés commerciales; en admettant même qu'elles constituent des sociétés, ce sontdes sociétés civiles (4), elles n'ont aucun but de spéculation. Toutefois on a soutenu que l'assurance mutuelle, sans deve- nir une société, est une association commerciale quand elle intervient avec un commerçant qui s'assure contre les pertes résultant de sa profession (5). Cette opinion a été rejetée . Paris, 19 avril 1893, D., 93. 2. 441. — V. aussi Cass., 12 mai 1857, S., 58. 1. 129. D., 57. 1. 201. — V. la note qui précode. - Paris, 20 avril 1886, S., 87. 2. 121. Cass. req., 23 oct. 1889, S., 92. 1. 63, D , 8.'. 1. 474. — Gnillouard, n. 97. \ Cass., 8 fév. 1860, S., 60. 1. 207. - Cass.. 3 juil. 1877, S., 77. 1. 417. — Cass., 15 juil. 1884, S.. 85. 1. 348. — Cass. req., 28 déc. 1886. S., 88.1. 68, D ,87. 1.311. — Cass.. 23 oct. 1889, S., 92. 1. 63. D., 89. 1. 174. —Amiens, 27 août 1858, S., 58. 2. 702. — Paris, 23 mars 1873, D.. 75. 2. 17. — Paris, 30 mars 1878, S., 78. 2. 171. — Paris. 4 fév. 1886, S., 87. 2. 121. — Paris. 20 avril 18S6, S., 87. 2. 121. — Di- jon, 10 juin 18S9, Rev. des Soc, 90 91. 54. — Paris, 18 fév. 1890, préciié (même si elle se fait payer une prime d'avance et se réserve une retenue à l'effet de se constituer un fonds de réserve). — Trib. corn. Seine, 1er déc. 1885, précité. — Trib. corn. Seine, 9 mars 1890, précité. — Trib. corn. Seine, 2 déc. 1890. pré- cité. — Trib. civ. Seine, 31 oct. 1892, précité. — Trib. civ. Seine, 30 oct. 1893. précité. — Cass. Autricbe. 7 sept. 1876, Journ. dr. rai., IV. 1877, p. 65. — Trib. civ. Bruxelles, 24 juil. 1877, l'aster., 78. 3. 153, Journ. dr. int., IX. 1882, p. 641. — Trib.com. Anvers. 13 avril 1873, Jurispr. d'Anvers, 78. 1. 151, Journ. dr. in/., IX, 1882, p. 439. — Gnillouard, n. 97; Huben de Couder, Dict. dr. com.. v° Â8S. mut. mur., n. 6, et v» Ass. mut. lerr., n. 3; LyonCaen, Noie, >., 87. 2. 121. (3) Lyon-Caen, Note. S., 87. 2. 121 ; Cuillouard, n. 98. (6) Cass., 8 fév. 1860, S., 60. 1. 207. — Paris, 28 mars 1857, S., 58. 2. 197. — Paris, 4 fév. 1886, S., 87. 2. 121. — Paris, 20 avril 1886, S., 87. 2. 121. — Paris. 18 fév. 1890, précité. 318 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ et, croyons-nous, avec raison. Sans cloute le coutrat passé par un commerçant pour un risque dérivant de sa profession est, en général, commercial. Mais il s'agit ici de déterminer le caractère d'une association, et ce caractère ne peut dériver (jue du but poursuivi. On s'est donc à tort fondé sur la théorie de l'accessoire admise en jurisprudence, et d'après laquelle tous les actes accomplis par un commerçant dans l'exercice de son com- merce sont réputés commerciaux, alors même qu'ils ne sont pas inspirés par un désir de spéculation. L'assurance mutuelle a un caractère commercial, dans le cas, que nous avons déjà examiné, où elle constitue une société ayant un but de spéculation, par exemple où elle a charge de l'entreprise des travaux ('). En tout cas on admet que le caractère de l'assurance mu- tuelle n'empêche pas que la division de l'exploitation en actions auxquelles des bénéfices seront attribués ne soit une société commerciale Aux sociétés d'assurances mutuelles il faut assimiler les sociétés de reconstitution des capitaux, qui ont un but analo- gue : elles capitalisent les versements des associés et les leur restituent sous forme de sommes plus élevées ou de pensions; ce sont donc des associations, à moins qu'elles ne soient éta- blies pour reconstituer les capitaux confiés à la société (3) par des tiers, c'est-à-dire ne soient pas des mutualités ; dans ce dernier cas, ce sont des sociétés; ces sociétés sont civiles, car leur objet ne rentre pas dans les actes de commerce énu- mérés par le C. com. ('). 563. Les sociétés d'agrément sont des associations et non de véritables sociétés (5). On peut citer comme rentrant dans cette catégorie : (') Cass. req., 23 oct. 1889, S., 92. 1. 63, D., 89. 1. 474. — Guillouard, n. 97. \^) Cass. req., 28 déc. 1886, précité. — V. sur ce point infra, n. 571. (') Gass. civ., 20 fév. 1888, D., 89. 1. 361. — Wahl, Des sociétés d'épargne et de capitalisation, Jour», des soc, 1899, p. 197, n. 6. [*) Wahl, op. cit., n. 5. (s] Trib. civ. Bruxelles, 7 mars 1894, Pasicr., 94. 3. 332. — Guillouard, n. 68 (cet auteur, n. 69, les qualités de contrats innommés) ; Houpin, I, n. 54; Hue, XI, n.3. ASSOCIATION — FAITS QUI LA CONSTITUENT 319 Les cercles ('); les sociétés de musique ('); les orphéons, etc. ; La société par laquelle plusieurs propriétaires ou conces- sionnaires du droit de chasse mettent leur droit de chasse respectif en commun (',. En vain dit-on qu'il y a ici la recher- che d'un bénéfice représenté par le produit de la chasse. En fait, ce u'esl pas là un bénéfice, puisque le produit de la chasse est couvert et au-delà par les frais. En droit (et cela surtout est important] les associés recherchent la satisfaction de leurs goûts, et non pas un bénéfice. Les associations de charité sont des associations et non des sociétés (*). Il en est de même des associations philanthropiques, telles que les sociétés de francs-maçons (R). Il en est de même encore des sociétés de spiritisme (6). Les associations religieuses ne sont pas des sociétés. Elles se proposent pour but une bonne œuvre et non la réalisation de bénéfices (7). En tout cas, elles ne se proposent pas la ré- partition des bénéfices entre leurs membres. |») Cass. req., 29 juin 1847, S , 48. 1. 212, D., 47. 1. 342. — Cass., 25 juin 1866, - 6. 1. 358, D., 66. 1. 334. — Cass., 7 déc. 1880, S., 81. 1. 244, D., 81. 1. 148. — Aix, 2 juil. 1844, S., 46. 2. 29, D., 45. 2. 61. — Lyon, 1<* déc. 1852, D., 53. 2. 99. — Paris, 31 déc. 1855, S., 90. 2. 146 (note). — Aix, 20 mars 1873, S., 75. 2. 103, D., 74. 1.38. — Nîmes, 20 janv. 1877, sons Cass., 19 nov. 1879, S., 80. 1. 56, D., 80. 1. 84. — Paris, 9 avril 1897, D., 99. 2. 244. — Trib. civ. Sens, 20 mai 1847, D., 47. 3. 112. — Trib. civ. Seine, 16 avril 1879, D., 80. 2. 12. — Trib. civ. Cusset, 11 fév. 1897, Gaz. trib., 2 oct. 1897. — Vavasseur, I, n. 24 ; Pont, n. 69; Troplong, I, n. 32; Guillouard, n. 68 ; Houpin, loc. cit. — Les cercles ne sont même pas des associations entre les fondateurs et les membres, si les fondateurs en assurent le fonctionnement à leurs risques et périls; les membres du cercle ne sont pas les associés des fondateurs, qui seuls, par conséquent, sont tenus vis-à-vis des tiers. Paris, 24 janv. 1888, Ann. dr. comm., II, 1888, p. 132. — Pour le cas où le cercle est institué dans un but de spéculation, v. supra, n. 123. : Nîmes, 4 juin 1890, D., 91. 2. 163. — Cass. belge, 2 déc. 1875, Poster., 76. 1. 37, Journ. dr. int., III, 1876, p. 485. — V. les décisions précitées. 1 Laurent, XXVI, n. 150; Guillouard, n. 68; Houpin, I, n. 54; Hue, XI, n. 3. — Contra Cass., 18 nov. 1865, S., 66. 1. 415, D., 66. 1. 455. — Cass., 24 avril 1876, S.. 77. 1. 6. (') Trib. civ. Les Andelys, 17 juin 1884, D., 85. 3. 38 (association pour rendre les derniers devoirs aux morts). — Guillouard, loc. cit., id.; Houpin, I, n. 54, id. Trib. civ. Dunkerque, 2 mai 1862, Houpin, I, n. 54. — Sic Houpin, loc. cil. Hue, XI, n. 3. — V. infru, n. 581. "i Guillouard, n. 68; Houpin, I, n. 54; Hue, XI, n. 3. 320 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ SECTION II VALIDITÉ DES ASSOCIATIONS 564. Les associations sont valables lorsqu'elles ne sont pas contraires a. une loi prohibitive ; en d'autres termes, les associés sont tenus de remplir les engagements qu'ils ont pris (*). Ainsi une association contractée entre obligataires d'une société pour défendre leurs intérêts communs, notamment pour prendre l'inscription d'une hypothèque qui leur est col- lectivement consentie par la société, est valable (*), car elle n'a rien d'illicite. On a, pour soutenir le contraire, l'ait observer qu'il n'y a dans une association de ce genre ni fonds commun, ni béné- fices à partager . Mais tout ce que cela prouve, c'est que l'association entre obligataires n'est pas une société. De même les sociétés d'agrément sont licites (*). Il en est encore ainsi des sociétés d'épargne et de capitali- sation v5). 565. Parmi les exceptions, nous citerons la suivante : La loi du 2 juin 1891. après avoir décidé art. 1er) « qu'au- cun champ de courses ne peut être ouvert sans l'autorisation préalable du ministre de l'agriculture » . ajoute : « Sont seules autorisées les courses de chevaux ayant pour but exclusif l'amélioration de la race chevaline et organisées par des socié- tés donf les statuts sociaux auront été approuvés par le minis- 1 Houpin, I. n.ôr). — V. les n suiv. (») Cass. civ., :', déc. 1889, S., '.'1. 1. 525, D.. 90. 1. 105. — Paris. 5 déc. 1885, Journ. des soc, 1886. p. <'>38. — Paris. 4 nov. 1887, Journ. des soc, 1890, p. 319. — Trib. civ. Seine, 22 avril 1886, Journ. des soc, 1888, p. 561. — Trib. com. Seine, 15 juin 1887, Journ. des soc. 1888, p. 525, Ann. dr. comm., 1886-87. 1. 187. — Trib. civ. Bourges, 8 mars 1*88. Hev. des soc. 1891, p. 252. — Trib. com. Seine, 25 mars 1888, lier, de.- i ■ .. 1888, p. 333, Journ. des soc, 1888, p. GÛ1. — Walil, Journ. des soc, 1898, p. 19."> s. 3 Trib. civ. Lyon. 0 mai lsy6. lier, des soc, 1886, p. 594. — Thaller, Construc- tion du droit des obligataires sur la notion d"une société qui existerait entre eux, Ann. dr. connu., Vlll, 1894, p. 67. s. (*] Trib. civ. Bruxelles, 7 mars 189-4, Pasicr., 94. '■'■. 332. — Laurent, XXVI, n. 191 et 192; Guillouard, n. 7". 3 Y. sur les conditions de validité de ces associations. Wabl, Journ. des soc, 1899, p. 241 s., n. 14 s. ASSOCIATIONS — NATURE 321 trc de l'agriculture après avisdu conseil supérieur des haras » (art. 2). Toute société de course créée en dehors de ces condi- tions serait donc illicite ('). 566. Quand elles sont composées de plus de vingt person- nes, les associations ne peuvent se constituer sans autorisa- tion ; sinon, elles sont illicites (C. pén., art. 291 et 232). SECTION III CARACTÈRE JURIDIQUE DES ASSOCIATIONS 567. Les associations n'ont pas, en principe, d'existence légale (2). Elles ne constituent qu'une union de personnes, de sorte que tous les actes faits au nom de l'association sont censés faits au nom de ses membres. A ce point de vue, il en est de même des sociétés civiles, du moins dans l'opinion qui leur refuse la personnalité civile. Mais la loi édicté pour la gestion des sociétés civiles un certain nombre de règles; ces règles ne doivent être étendues à l'association que si elles sont l'application absolue du droit commun. Cette différence entre les sociétés et les associations est, du reste, difficile à justifier (3) ; on ne comprend guère que les associations obéissent à d'autres règles que les sociétés, puis- que la seule différence entre ces deux sortes de contrats se rapporte aux bénéfices; toutes les autres solutions que la loi donne relativement au contrat de société, notamment pour la gestion, la situation des associés entre eux et vis-à-vis des tiers, devraient s'appliquer aux associations. 568. Parmi les associations n'ayant pas d'existence légale, nous citerons : Les loges maçonniques (l ; Les sociétés d'agrément (5); (') Laya, Loi du S juin 1891. Lois nouvelles. 91. 1. 439. (*) Guillouard, n. 28 ; Hue, XI, n. 1. (S) Guillouard, n. 67 et 99. (*) Montpellier, 17 avril 1893, D., 94. 2.329. — Trib. civ. Rodez, 8 fév. 189», Droit, 10 juin 1892. (s) Trib. civ. Seine. 21 fév. 1889, Gaz. Trib., 8 mars 1889 (société musicale . — Trib. civ. Narbonne, 31 oct. 1893. Rev. soc, 9i. 175 (société orphéonique . — Trib. civ. Liège, 15 nov. 1894, Poster., 95. 3. 19. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 2 322 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Les cercles ' . 569. Si les associations n'ont pas d'existence légale, à plus forte raison n'ont-elles pas la personnalité civile. Il ne peut y avoir de doute sur ce point (!). Et cela est vrai même des associations fondées dans un but d'intérêt général (3). Ainsi l'association formée entre obligataires d'une société pour défendre leurs intérêts communs ou réaliser une hypo- thèque collective n'a pas de personnalité (l). Il en est de même des sociétés d'agrément (5). De même encore pour les sociétés de courses (6), sauf peut- être celles qui sont, comme nous le verrons, autorisées con- formément à la loi du 2 juin 1891 (7). 570. La société d'assurances mutuelles n'est pas une per- sonne morale (8), quoique les sociétés civiles aient, au moins quand elles revêtent la forme commerciale, la qualité de per- sonnes morales, car les assurances mutuelles sont non des sociétés, mais des associations. (') Trib. civ. Argentan, 13 déc. 1886, Rec. Caen, 87. 226. — Trib. corr. Meaux, 10 fév. 1888. Gaz. Pal., 88. I. Suppl., 79 (cercle catholique d'ouvriers). (*) Cass. req., 29 oct. 1894, S., 95. 1. 65 (société de spiritisme). — Cass. req., 29 nov. 1897, 1)., 98. 1. 108 (écoles libres). — Trib. corr. Langres, 9 nov. 1887, S., 88. 2. 119 (association de chasseurs). — Trib. civ. Liège, 15 nov. 1894, précité. — Guillouard, n. 28 et 70; Aubry et Rau, .1, § 54; Van den Henvel, Sit. lég. des assoc. sans but lucratif, p. 63; Lyon-Caen, Notes, S., 88. \. 161, et S., 95. 1. 65; Iloupin, I, n. 55; Cotelle, Rapport, sous Cass. req.. 2 janv. 1894, D., 94. 1. 81; Cruppi, Concl. sous le même anèt; Iluc. XI, n. 1; Thaller, n. 227 et 229. (») Paris, 12 nov. 1889, S., 90. 2. 243. ') Cass., 3 déc. 1889, S., 91. 1. 525, D., 90. 1. 105. — Wahl, loc. cit. (5) Trib. paix Podensac, 12 juin 1894. Rev. just. pair, 95. 47 société musicale). — Trib. paix Thonon-les-Bains, 16 ocl. 1894, Rev. just. paix, 95. 48 (société cho- rale). — Trib. civ. Liège, 15 nov. 1894, précité. — Guillouard, n. 70. (6) Cass. req., 2 janv. 1894, S., 94. 1. 129, D., 94. 1. 81. — Trib. civ. Lyon, 6 mai 1886, Rev. suc, 86. 594. — Cruppi, Concl. sous Cass. req., 2 janv. 1894, précité; Cotelle, Rapport sous le môme arrêt; Bailly et Thaller. Ann. dr. comm., I, 1886- 87, doct., p. 400. 7 Y. infra, n. 574. ») Massé et Vergé. IV, p. 723, §713, note 3; Bédarride, n. 16; Rousseau, n. 71; Vavasseur, I, n. 24; LyQn-Caea, Noie, s., 87. 2. 122. — En Belgique, il résulte de la loi du 11 juin 1*74. art. 2. d'après lequel ces associations sont représentées en justice par leurs directeurs, et 571. Les associations n'acquièrent pas la personnalité même lorsqu'elles revêtent la forme d'une société commer- ciale (!). (ici te forme, en effet, n'a été organisée par la loi que pour les sociétés et, adoptée par les associations, elle ne peut leur être d'aucune utilité. Il est, du reste, inadmissible qu'une association puisse, en adoptant la forme commer- ciale, acquérir la personnalité que la loi lui a refusée à raison de sa nature et par crainte de dangers divers. Celte solution était généralement admise avant que la loi du Ier avril 1893 eût rendu commerciales les sociétés civiles (jui répondent à ces conditions. Elle nous parait tout aussi certaine aujourd'hui. Si l'on appliquait aux associations la loi de 1893, il faudrait recon- naître qu'elles deviennent de véritables sociétés commercia- les ; ce serait une solution des plus étranges, puisque les asso- ciations ne sont même pas des sociétés et n'ont pas pour but la recherche d'un bénéfice. Il faudrait également donner aux associations constituées dans la forme commerciale tous les droits d'une société commerciale, leur permettre d'acquérir ou d'aliéner sans autorisation du gouvernement, etc. Ce serait pour ces associations un moyen trop commode d'échapper aux dispositions législatives qui, dans un intérêt général, res- treignent leur capacité; ce serait également pour les asso- ciations un moyen de méconnaître la défense qui leur est faite de se constituer sans autorisation. Il faut ajouter que la loi de 1893 a un caractère exceptionnel qui contraint de la res- treindre aux sociétés civiles, seules visées par elle. 572. Certaines législations étrangères admettent la person- nalité civile des associations qui accomplissent les formalités de constitution et de publicité des sociétés commerciales (*). ') (Jass. req., 29 oct. 1894, S., 95. 1. 65, D., 96. 1. 145. — Caen, 28 mars 1887, S ,88. 2. 231 (école de dressage). — Lyon-Caen, Noies, S., 88. 1. 161, et S., 95. I. 65; Thaller, Noie, D., 96. 1. 145; Guillouard, n. 28; Hue, XI, n. 3. (2) Angleterre : L. sur les sociétés de 1862, art. 21 et de 1867, art. 23 (cep. res- triction de la faculté d'acquérir des immeubles ; de plus, le ministre du commerce fixe les conditions auxquelles la responsabilité des associés peut être limitée). — Suisse : Les sociétés ayant un but scientifique, artistique, religieux, de bienfaisance ou de récréation, ou tout autre but intellectuel ou moral peuvent, en se faisant inscrire sur le registre du commerce, acquérir la personnalité civile iC.féd., 716 s.). 326 DU CONTRAT DK SOCIÉTÉ On a demandé que le même système fût introduit en France ('). Il aurait sans doute certains avantages. Mais un grand inconvénient serait d'ouvrir la porte aux fraudes et de permettre aux associations de tourner les dispositions et les principes qui, dans un intérêt d'ordre public, empêchent leur formation ou restreignent leurs droits. 573. Le décret qui reconnaît une association comme étant d'utilité publique lui confère la personnalité morale (s). En ellet,il est de principe que les lois et décrets peuvent créer des personnes morales, et, donner un caractère d'utilité publique à une association, c'est reconnaître (pie cette association a une existence spéciale, indépendante de la personne des associés. 574. La jurisprudence attribue également une sorte de personnalité civile, leur permettant d'ester en justice, aux associations qui sont fondées avec la permission de l'autorité dans un but d'intérêt général et public, distinct de l'intérêt des particuliers qui les composent (*). En réalité ce dernier caractère est celui de toutes les asso- ciations, car, n'ayant, en vertu de leur essence même, aucun but lucratif, elles ontnécessairement pour objet ; l'intérêt géné- ral. Cette solution a été appliquée aux sociétés hippiques, qui, par conséquent, pourraient ester en justice (4) : on sait qu'une «) Guillouard, n. 28; Lyon-Caen, Xotes. S., 88. 1. 161 et S., 95. 1. 65 ; Dareste. Heu. des Deux-Mondes, 15 oct. 1891. (*) Guillouard, n. 29. ») Cass., 30aoûl 1859, S., 60. 1. 359, D., 59. 1. 365 (association pour la fertili- sation). — Cass., 6juil. 1864. S., 64. 1. 327, D., 64. 1. 424 (»/.). — Cass. civ., 25 mai 1887, S.. 88. 1. 161, D., 87. 1. 289. — Cass. req., 2 janv. 1894, S., 94. 1. 129, D., 94. 1. 81. — Dijon, 11 juil. 1889, l'and. franc., 90. 2. 263 (sociétés pour l'amélioration de la race chevaline;. — Dijon, 30 oct. 188'J, S., 90. 2. 16. — Paris, 12 nov. 1889 (motifs), S., 90.2.243. — Nîmes, 18 juil. 1892, S., 93. 2. 45.— Limoges, 23 déc. 1895, S., 99. 2. 246. — Trib. coin. Seine, 2 août 1888, Gaz. Pal.. 88. 2. 466 (société d'organisation pour la participation à une exposition étrangère,. — Trib. civ. Langres, 5 déc. 1888, S., 89. 2. 175 (ce jugement parait leur attri- buer une personnalité complète, mais ne s'occupe que de la représentation en justice). — Trib. civ. Bourg, 28 juin 1889, Mon. jud. Lyon, 7 janv. 1890 (société de prévoyance de médecins). — Cotelle, Rapport sous Cass., 2 janv. 1894, précité ; Cruppi, L'oncl., sous Cass., 2 janv. 1894, précité. ») Cass., :j.0 août 1859, 25 mai 1887 et 2 janv. 1894. précités. — Nîmes, 18 juil. 1892, précité. — Limoges, 23 déc. 1875, précité. — Cruppi, loc. cit.; Cotelle, lue. cit. ; Laya, L. du 2 juin 1891, Lois nouvelles, 1891. p. 435. ASSOCIATIONS — N'A il RE 'M' loi du '2 juin 1801 (art. 2) autorise le fonctionnement des sociétés hippiques dont les statuts ont été approuvés par le ministre de l'agriculture. Le même principe a été appliqué aux sociétés de secours mutuels, aux sociétés d'arrosage ('), aux sociétés de tir et de gymnastique (!). En somme, cette théorie revient à reconnaître la personna- lité de toutes les associations régulièrement constituées et comprenant plus de vingt membres, car les associations de plus de vingt membres ne sont licites que si elles sont consti- tuées avec autorisation. Gela nous parait inexact (3). Nous avons dit pour quelles raisons une association est dépourvue de personnalité civile; l'autorisation nécessaire à la constitution, par cela même qu'elle est indispensable, nesaurait rien changera ces raisons. Du reste, le système de la jurisprudence présente cette grande injustice qu'elle distingue entre les associations qui ne peu- vent se former sans autorisation et celles qui, n'ayant pas plus de vingt membres, se constituent sans autorisation. Car il va sans dire que l'autorisation sera toujours refusée, comme inutile, à ces dernières, qui se trouveront ainsi dans l'impos- sibilité d'acquérir une personnalité civile. Il est permis de trouver très insuffisants les arguments qu'invoque la jurisprudence ; ces associations, dit-elle, « tien- nent, tant de la nature de leur objet que de l'adhésion de l'au- torité publique à leur institution, une individualité véritable ». C'est une pétition de principe. On invoquait encore la loi du 15 juillet 1850, qui donnait aux sociétés de secours mutuels, reconnues par l'administration, le droit d'ester en justice: mais c'était là un texte spécial qui ne pouvait être étendu. «) Cass., 30 août 1859 et 6 juil. 1864, précités. I1) Dijon 30 ocl. 1S89, S., 90. 2. 16 (ce que cet arrêta de singulier c'est que, pour attribuer une « véritable individualité » à la société, lui permettant d'ester en jus- lice, il se fonde sur ce que le concours de l'autorité publique lui a élé donné soit par l'arrêté préfectoral qui a approuvé ses statuts, soit par les remises d'armes que lui a (ailes l'autorité militaire en vertu de décisions minisléi ielles). — Trib. tiv. L;mgies, 5 déc. 1888, précité. ') Lyon-Caen, Soles, S., 88. 1. 161 et S., 94. 1. 129; Lyon-Caen et Renault, H D. 136; Guillouard, n. 29 bis, Hue, XI, n. 4. î}'28 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 575. Dans tous les cas, la jurisprudence n'admet pas que l'autorisation administrative donne aux associations d'intérêt général une complète personnalité civile ('). Ainsi elles ne peuvent recevoir les dons et legs (s). Et cela seul suffit à con- damner la solution de la jurisprudence, car la loi n'admet pas, en règle, deux sortes de personnalités morales, l'une complète et l'autre incomplète. SECTION IV DROITS ET ORLIGATIONS DES ASSOCIÉS 57 6. Il ne sera ici question que des associations qui n'ont pas de personnalité morale, l'étude des autres associations rentrant dans le domaine du droit administratif. 577. Les associations qui ne sont pas des personnes morales ne peuvent ester en justice comme telles et par l'intermédiaire de leur président ou de leur administrateur (3). C'est la princi- pale application de la règle « nul ne plaide par procureur ». Le président d'une association de fait ne peut donc agir ni être actionné pour le compte de l'association (*). 1 Cass. req., 2 janv. 1894, S., 94. 1. 129, D., 94. 1. 81. — Nime3, 18 juil. 1892, S., 93. 2. 45. — Gruppi, Concl. sous Ca>s., 2 janv. 1894, précité, D., 94. 1. 81 ; Gotelle, Rapport sous le même arrêt, I)., 94. 1. Si ; Lyon-Caen, Noies, S., 88. 1. 161 et S., 94. 1. 129. — Cuntru Paris, 12 nov. 1889, précité (motifs). • Cass. req., 2 janv. ls'.ii, précité. —Mines, 18 juil. 1892, précité.— Gruppi, loc. cit. ; Gotelle, loc. cit. (3) Cass. req., 19 nov. 1879, S., 80. 1. 56, D., 80. 1. 8i. — Paris, 12 nov. 1889, S., 90. 2. 243. — Paris, 10 nov. 1894 (impl.)., S., 95. 2. 135. — Trib. civ. Bordeaux, 27 janv. 1890, Loi, 5 sept. 1890 ; congrégation non autorisée). — Gotelle, loc. cit.; Iloupin, I, n. 55, et les auloiités précitées. (*] Cass., 21 nov. 1875, if., 76. 1. 166 (comp. de sapeurs pompiers). — Cass., 30 janv. 1878, 5., 78. 1. 265 (comices agricoles). — Gass. civ., 7 déc. 1880, S., 81. 1.244, 1).. 81. 1. 148 (sociétés musicales). — Gass. req., 30 janv. 1883 (motifs), S., 83. 1. 252 (concours musical). — Nancy, 20 janv. 1S77, sous Gass., 19 nov. 1879, >.. 80. 1. 56, U., 80. 1. 84. — Paris, 12 nov. 1889, 8., 90. 2. 243. — Nîmes, 4 juin 1890, D., 91. 2. 163. — Lyon, 26 mars 1891, S., 92. 2. 289. — Rouen, 18 nov. 1897 Gaz. trib., 98, 2e p., 1. 273 (société d'organisation d'une exposition). — Trib. civ., Lille, 17 juin 1883,8., 85.2. 206 (société de libre pensée). — Trib. civ. Langres,9déc. 1887, D., 88. 3. 136. —Trib. civ. Seine, 29 janv. 1889, Loi, 12 fév. 1889 (comité d'organisation d'un concours,. — Trib. civ. Seine, 21 fév. 1889, Gaz. Trib., S mars 1889 (société musicale,. —Trib. civ. Bordeaux, 27 mai 1889, Rec. Bordeaux, 89. 2. 90 (société musicale). —Trib. civ. Seine, U avril 1892, Droit, 30 avril 1892. — ASSOCIATIONS — DROITS KT OBLIGATIONS DKS ASSOCIÉS 329 Les sociétés de secours mutuels notamment, quand elles ne sont pas des personnes morales, ne peuvent être assignées on la personne du président et ce dernier ne peut assigner >,ius mandat de tous les associés ('). Mais une action en justice peut être intentée au nom des associés pour l'administration de la société si la majorité des associés y consent (*). D'autre part les associés peuvent nommer des gérants ou administrateurs qui les obligeront par les actes (:i), pourront être actionnés par les tiers (') et agir en justice. Mais la règle « nul ne plaide par procureur » reste applicable dans ce cas : le gérant demandeur doit désigner dans les actes de la procédure ses mandants; si le tiers demandeur n'a pas à dési- gner les mandants du gérant, c'est que les tiers peuvent renoncer à la règle précitée. 578. Les associations ne peuvent ni avoir un patrimoine, ni contracter en leur nom personnel. On a décidé cependant, mais à tort, que lorsqu'un contrat est passé avec une association de fait, ce contrat ne peut être résolu que si l'association ne se forme pas dans un délai que lixeront les tribunaux (5). 579. Les dispositions législatives relatives aux obligations des associés vis-à-vis des tiers sont l'expression du droit com- mun, car elles sont fondées sur l'intention des parties ; elles sont donc applicables aux associations (6). Trib. civ. Lyon, 10 juin 1892, Mon. jud. Lyon, 22 juil. 1892. — Trib. civ. Liège, 15 nov. 1894, I'asicr., 95. 3. 19. — Trib. civ. Avesnes, 25 juin 1896, Mon. jud. Lyon, 8 août 189b' (société musicale^ — Trib. paix Villeneuve-Larchevêque, 4 fév. 1887, Mon. des juges de paix, 87. 166 (société musicale). — Trib. paix Valenciennes, 9 août 1887, Mon. des juges de paix, 87. 512 (société nautique). — Décidé cependant que le président d'un concours musical peut réclamer à une ville la subvention promise s'il a stipulé en son nom personnel. — Cass. req., 30 janv. 1883, précité. ') Trib. civ. Mont-de-Marsan, 30 juin 1887, Droit, 13 oct. 1888. — Trib. civ. Lille, 12 avril 1888, Loi, 31 mai 1888. — Trib. civ. Seine, 11 avril 1892, précité. — Trib. civ. Toulouse, 7 déc. 1893, Gaz. Trib., 23 fév. 1894. i2, Trib. civ. Liège, 15 nov. 1894, précité. (s) Trib. civ. Bruxelles, Pasicr., 94. 3. 125. (*) Trib. civ. Avesnes, 25 juin 1896, précité. (5) Lyon, 26 mars 1891, S., 92. 2. 289. (6j Dijon, 20 mars 1889, Gaz. Pal., 89. 2. 735. — Mouchet, Rev. bourgitîgn. de l'enseign. sup., 1891, p. 244. 330 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ Ainsi les créanciers de l'un des associée ne peuvent pas plus qu'en matière de société (') saisir avant la dissolution de l'asso- ciation la part de leurs débiteurs clans les biens communs (2). 580. Il est certain que les membres d'une association ne peuvent revendiquer au nom de l'association des biens acquis pour elle (s). Mais les membres de l'association peuvent, au contraire, revendiquer en leur propre nom les biens acquis ('). En vain dirait-on qu'ils n'ont pas entendu acquérir pour leur propre compte, car ils ont voulu acquérir pour l'association, c'est-à- dire pour un être qui, s'il existait aux yeux de la loi, n'aurait qu'une existence fictive et dissimulerait les associés eux- mêmes; c'est donc pour leur propre compte que les associés ont voulu acquérir. En fût-il autrement, que notre solution serait encore exacte, car lorsqu'une personne stipule pour le compte d'un tiers et que ce tiers ne peut ou ne veut se prévaloir du droit que le stipulant entend lui conférer, c'est à ce dernier que la stipu- lation profite. L'opinion contraire a ce grave inconvénient que si, en fait, l'association possède, personne des associés n'aura qualité pour lui enlever la possession, ce qui consacre une illégalité, ce qui rend, en outre, la personnalité civile inutile, et ce qui enfin donne aux associations qui n'ont pas de personnalité une supériorité sur les associations pourvues de la personna- lité, cette dernière entraînant des restrictions à la capacité; elle a cet autre inconvénient que, comme nous Talions voir, toute personne peut dépouiller l'association sans avoir rien à craindre. Enfin elle laisse l'immeuble sans propriétaire. (') V. supra, n. 350. *) Hue, XI, n. 1. (*) Montpellier, 17 avril 1893, D., 94. 2. 329. * Cass. req., 4 mai 1859, S., 59. 1. 377, D., 59. 1. 314. — Paris, 8 mars 1858, S.. 58. 2. 145, D., 58. 2. 49. — Van den Heuvel, De la situât, lég. des assoc. sans but lucratif, 2e éd., 1884; de Vareilles-Sommières, Du conlr. d'assoc, p. 4 s. ; Beudant, Sole, D., 94. 2. 329: Houpin, loc. cit. — Contra Cass. req., 5 juill. 1842, S., 42. 1. 590, D. Rép., v° Disp. entre vifs, a. 325. — Cass. req., Ie' juin 1869, S-, 70. 1. 57, D., 69. 1. 313. — Cass. civ., 30 mai 1870, S., 70. 1. 342, D., 70. 1. 277. — Montpellier, 17 avril 1893, D., 94. 2. 329. — Trib. civ. Rodez, 8 fév. 1892, Droit, 10 juin 1892. &8S0CIATI0NS — DROITS ET OBLIGATIONS DES ASSOCIÉS 331 L'un des associés, mandataire des autres, <>u tous les asso- cies réunis peuvent, comme en matière de société, acquérir un immeuble pour le compte de l'association, c'est-à-dire pour leur compte commun [*). 581. Les membres d'une congrégation religieuse non auto- risée peuvent également demander la consécration des droits leur appartenant comme propriétaires d'une chose achetée pour le compte de la société. Ainsi ils peuvent demander au propriétaire voisin, conformément à l'art. 558G.civ., l'exhaus- sement d'un mur mitoyen (*). A plus forte raison l'acquisition faite par les membres d'une association est valable s'ils ont entendu acquérir pour leur propre compte (3). 582. Dans l'opinion d'après laquelle des associés n'acquiè- rent pas plus pour leur propre compte que pour le compte de la société, les biens acquis, s'ils se trouvent en la possession d'un tiers, appartiennent-ils à ce dernier? On l'a dit (*), par le motif que la possession fait présumer la propriété. L'argu- ment est insuffisant, car la possession ne fait présumer la propriété que jusqu'à preuve contraire, et cette preuve est ici facile, le tiers n'ayant rien acquis. Un autre argument est plus sérieux : c'est que personne n'a qualité pour déposséder le tiers. 583. Les membres dune association sont tenus, propor- tionnellement à leurs mises, des dettes contractées au nom de L'association et avec leur mandat (3). Ils n'en sont pas tenus si la dette a été contractée par le chef de l'association, même au nom de cette dernière, mais sans leur participation (8). (•) Hue, XI, n. 1. (*) Paris, 21 fév. 1879, S., 80. 2. 177. — Barboux, Discours el plaidoyers, I, 1889, p. 163 s. (») Gand, 17 juin 1893, Poster., 94. 2. 78. •) Montpellier, 17 avril 1893, D., 94. 2. 329 (molirs;. (5) Paris, 19 avril 1893, Loi, 12 mai 1893. — Trib. civ. Blois, 18 juil. 1890, Loi, 31 août 1890. — Trib. civ. Seine, 30 oct. 1893, Jour», des assur., 94. 11. — Trib. civ. Seine, 5 déc. 1893, Gaz. Pal., 94. 1. 161 (comité de souscription). (6) Conlra Nîmes 4 juin 1890, D., 91. 2. 163. — Trib. civ. Tours, 23 juin 1891, Gaz. Pal., 91. 2. 241. 332 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 584. Ils ne sont jamais tenus des dettes solidairement ('). Mais ils peuvent être poursuivis pour les dettes tout entiè- res, et non pas seulement jusqu'à concurrence de leurs apports ou cotisations (?), h moins de convention contraire, expresse ou tacite (3). 585. Les membres de la congrégation non autorisée sont responsables des engagements pris au nom de la congréga- tion (*) ou des délits quelle a commis (5). D'une part, la con- grégation n'existant pas juridiquement, ce sont, en réalité, ses membres qui ont contracté; d'autre part, il est inadmis- sible que les associés puissent trouver dans la faute qu'ils ont commise, en se constituant illégalement, un argument pour se soustraire à leurs engagements. 586. Réciproquement, lorsqu'un délit commis contre l'asso- ciation qui n'est pas une personne morale atteint en réalité les sociétaires, chacun d'eux peut agir pour son compte en répression de ce délit ('). 587. Les engagements pris par les associés vis-à-vis de l'association sont valables, si celle association n'est pas illi- cite, car ils sont réputés avoir été pris envers les autres asso- ciés. Les associés sont notamment tenus de fournir l'apport promis (7). Ainsi les membres d'une société d'assurances mutuelles sont tenus de payer les ternies des cotisations qu'ils ont pro- mises, môme si la société se dissout avant que l'assurance contractée par ce membre ait pris fin (8). 588. De même, les membres de toute autre association licite sont tenus de satisfaire à leurs engagements, parexem- (') Contra Trib. civ. Tours, 23 juin 1891, précité. (*) Trib. civ. Blois, 18 juil. 1890, précité. I3) Paris, 19 avril 1893, Loi, 12 mai 1893 (assurances mutuelles). 4 Cass., 30 déc. 1857 (motifs), S., 58. 1. 225. 5 Cass., 30 déc. 1857, précité. — Oscar de Vallée, Conclusions et réquisitoire*, 1883, p. 70. (6) Trib. corn. Meaux, 10 fév. 1888. tlaz. l'ai., 88. 1. Suppl., 79. (diffamation d'un cercle catholique d'ouvriers). (") Hue, XI, n. 1. (») Cass., 18 nov. 1885, S., 86. 1. 111. — Cass. civ., 2 août 1893, S., 94. 1. 278. ASSOCIATIONS — DROITS BT OBLIGATIONS MIS ASSOCIÉS 333 pic de payer les amendes qu'ils ont encourues pour contra- ventions aux statuts ('). 589. Les principes qui précèdent ont été appliqués notam- ment aux sociétés d'agrément. Dans les rapports avec les tiers, la société d'agrément ne peut contracter (•). Elle ne peut devenir propriétaire ('). L'associé qui a contracté avec le tiers peut seul agir ou être actionné (*). Cependant si un associé a agi avec mandat de ses coassociés, ceux-ci peuvent être actionnés également par les tiers (5). Est-il nécessaire pour cela que les tiers aient connu la qualité de mandataire de celui qui a contracté avec eux? On l'a prétendu (6), mais à tort; car le mandant peut être actionné, même par un tiers qui n'a pas connu la qualité du mandataire. Quant à l'associé qui a agi avec mandat de ses coassociés, il ne peut être actionné que pour sa part (";, mais à condition qu'il ait indiqué aux tiers en quelle qualité il agissait (8). De même les associés peuvent agir contre le tiers qui a con- tracté avec l'un d'eux si ce dernier était leur mandataire (9). Dans les limites où les associés sont tenus, ils le sont indé- finiment et non pas seulement jusqu'à concurrence de leurs cotisations (10). Les associés agiront contre les tiers pour leur part (!1), ou, si l'obligation est individuelle, pour le tout ("). Le président de la société n'a pas qualité pour agir en justice (13). (l) Contra Cass. belge, 2 déc. 1875, Pasicr., 76. 1. 37, Jovrn. dr. int.. III, 1876, p. 483. (si Guillouard, n. 70. Pj Guillouard, n.70. (l) Laurent, XXVI, n. 189; Guillouard, n. 70 et 71. (5) Cass., 29 juin 1847, S., 48. 1.212, D., 47, 1. 342.— Ai.x, 2 juillet 1844, S., 46. 2. 29, D., 45. 2. 61.— Lyon, 1" déc. 1852, D., 53. 2. 99. — Guillouard, n. 70 et 71. (6) Guillouard, n. 71. (7) Trib. civ. Bruxelles, 7 mars 1894, I'ascr., 94. 3. 332. (") Trib. civ. 7 mars 1894, piécité. (9) Guillouard, n. 71. (,0| Lyon, 1" déc. 1852, précité. (") Guillouard, n.71. (n) Guillouard, n. 71. (") Trib. civ. Narbonne, 31 oct. 1893, précité. 334 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 590. Les membres fondateurs d'un cercle sont personnelle- ment tenus des engagements contractés au nom du cercle ('). Il en est autrement des abonnés (2). 591. Dans leurs rapports réciproques, les membres d'une société d'agrément sont liés par leurs conventions (3). Ainsi chaque associé doit compte à ses coassociés des biens et des créances qu'il a acquis pour leur compte commun (4). De même les associés doivent s'indemniser mutuellement des dettes payées pour le compte de la société (5). 592. Au point de vue de la compétence, on suit les règles générales. Comme la société d'agrément n'est pas une personne mo- rale, ni même une société, il n'y a pas lieu d'appliquer l'art. .'>(.t C. pr. et le défendeur doit être assigné devant le tribunal de son domicile (6). 593. Les associations qui n'ont pas de personnalité morale ne peuvent recevoir de libéralités (7). SECTION V DISSOLUTION DES ASSOCIATIONS 594. Les associations se dissolvent ou non par la mort d'un associé, suivant que la personne des associés est entrée ou non en considération. On admet même que les assurances mutuelles ne se dissol- vent pas par la mort de l'un des associés, quoique les per- sonnes n'y soient pas indifférentes; on se fonde sur ce que la prospérité de l'association exige que le paiement des cotisa- tions soit assuré (s). 1 Trib. civ. Troyes, 7 déc. 1892, Gaz. Pal., 93. 1. Suppl., 46. i-i Trib. civ. Troyes, 7 déc. 1892, précité. |3) Laurent, XXVI, n. 192; Guillouard, n. 70. («) Guillouard, n. 70. (3) Guillouard, n. 7U. 8) Laurent, XXVI, n. 190; Guillouard, n. 71. (7) Cass. req., 29 oct. 1894, S., 05. 1. G5 (société de spiritisme). — Lyon-Caen, Note, S., 95. 1. 65. (8) Cass., 12 janv. 1842, S., 42. 1. ii. — Larombière, 77/. et prat. des obliy., art. 1122, n. 31. ASSOCIATIONS — DISSOLUTION 335 Lorsqu'aucuii terme n'est fixé pour la fin de l'association, il faut autoriser chacun des associés à se retirer à tout mo- ment, suivant la règle admise pour la société; car celle règle se fonde soit sur la volonté présumée des parties, soit sur le caractère illicite des engagements perpétuels ('), et ce sont là des idées qui peuvent èlre également appliquées à l'associa- tion (•). Mais si un ternie est fixé, l'un des associés ne peut se reti- rer avant ce ternie; on ne doit pas plus appliquer aux asso- ciations qu'aux sociétés l'art. 815 C. civ., d'après lequel chacun des copropriétaires peut demander à toute époque le partage en dehors d'une clause contraire, laquelle ne peut être faite pour plus de cinq ans(3). 594 bis. Les effets de la dissolution sont les mêmes qu'en matière de société; les biens de l'association sont donc parta- gés entre les associés (•). Cependant on admet quelquefois que ces biens appartien- nent à l'Etat, comme biens sans maître, les associés les ayant définitivement affectés à une œuvre d'utilité générale que l'Etat seul peut continuer (5). Mais d'une part les associations n'ont pas toujours pour but, suivant nous, une œuvre d'uti- lité générale ; d'autre part les associés ne se sont engagés que les uns vis-à-vis des autres à donner aux biens indivis une affectation spéciale et la dissolution même de la société se résume en une convention ou un événement par lesquels ils Ise dégagent réciproquement de cet engagement. (*) V. supra, n. 438. -) Contra Trib. civ. Gusset, 11 fév. 1897, Gaz. trio., 2 oct. 1897. <3) Hue, XI, n. 1. 4, Trib. civ. Gusset, 11 fév. 1897, Gaz. Irib., 2 oct. 1897, précité. 5) Thaller, n. 131. DU PRÊT CHAPITRE PREMIER CARACTÈRES GÉNÉRAUX DU PRET 595. Le prêt est un contrat par lequel lune des parties le prêteur) livre une chose à l'autre (l'emprunteur), qui ac- quiert le droit de s'en servir, à charge de la restituer après un temps déterminé ou indéterminé, en nature ou par équi- valent. Il résulte de celte définition que le prêt est un contrat réel, c'est-à-dire un contrat qui ne devient parfait que par la prestation de la chose ('), ce qu'indique d'ailleurs le nom même du contrat, dérivé du mot latin pr&stare. On pourrait penser que c'est par la force même des choses que le prêt a ce caractère; en effet, dirait-on, l'obligation qu'il engendre est une obligation de restituer; or, on ne peut être tenu de restituer qu'autant qu'on a reçu. 596. Cependant le caractère réel du prêt à usage n'a plus aucune raison d'être aujourd'hui, puisque la promesse de prêterestdevenue obligatoire. II serait conforme aux principes généraux de considérer le prêt à usage ou de consommation comme un contrat consensuel prenant son point de départ au moment où la promesse de prêter est faite. La solution con- traire du code est due à une reproduction inintelligente de Pothier. Pothier/2), donteertains auteurs modernes ont adopté l'argument (3), se fondait sur ce que « l'obligation de rendre la (i) Cass. req., 15 mars 1886, S., 8(3. 1. 296, D., 87. 1. 28. — Troplong, Tr. du prêt, n.l82s.; Aubry et Rau, IV, p. 598, §394: Colmet de San (erre. VIII, n. 96 bis; Guillouard, Tr. du prêt, n. 8. (!) N. 6. (3) Guillouard, n. 8 et 9. Société, vuîct. dépôt. — 2' éd. 22 ÎWS DU PRÊT chose ne peut naître avant que la chose ait été reçue ». C'est évident; mais encore faudrait il démontrer que l'obliga- tion de rendre doit avoir pris naissance pour que le contrat se forme. Au surplus, n'est-il pas également certain que l'obli- gation de rendre une chose louée ne peut prendre naissance avant que la chose ne soit livrée ? Et cependant le contrat de louage est un contrat consensuel. Aussi certains codes étrangers, beaucoup mieux avisés, ont-ils considéré comme prêt le contrat par lequel le prêteur « s'oblige » à livrer (' . Nous reviendrons sur ce point à propos des deux espèces de prêts. 597. En tous cas, s'il ne peut y avoir prêt tant que la tra- dition de la chose qui est l'objet du contrat n'a pas été effec- tuée, il peut y avoir avant cette tradition une promesse obli- gatoire de prêt. Ainsi je m'engage envers une personne, qui m'en a fait la demande, à lui prêter une somme dans un délai déterminé. Cette promesse m'oblige; et si je refuse de l'exé- cuter volontairement, l'exécution forcée pourra en être obtenue contre moi par les voies de droit. Mais il n'y aura prêt que lorsqu'en exécution de la promesse les fonds auront été ver- sés, et c'est seulement à dater de ce moment que l'emprun- teur sera obligé. 598. La tradition est d'ailleurs faite, et les risques, tels que la loi les détermine, sont pour le compte de l'emprunteur, dès que l'objet est remis à un tiers pour son compte (2). 599. Il résulte également de notre définition que le prêt est un contrat unilatéral. Il n'engendre en effet d'obligation que d'un seul côté, du côté de l'emprunteur qui s'oblige à restituer. Quant au prêteur, il ne contracte aucune obliga- tion ; il se borne à accomplir un t'ait. Avant que la prestation soit effectuée, il n'y a pas encore prêt; au moment où elle s'effectue le contrat se forme, et nous voyons ainsi que l'em- prunteur se trouve immédiatement obligé envers le prêteur, mais que celui-ci n'est nullement obligé envers le premier. ') Suisse, C. féd., art. 321 et 329. ass. req., 15 mars 1886, précité (remise au notaire rédacteur de lacté). i \ii\i:ri;iii:s GÉNÉRAUX 339 Nous reprendrons celte idée à propos de chaque espèce de prêt. 600. Nous avons dit que l'emprunteur acquiert le droit de ge servir «le la chose, d'en user : c'est précisé ment le but qu'il se propose en empruntant*. Mais il y a plusieurs manières d'user des choses. Tel usage n'altérera pas la substance de la chose; tel autre la détruira. Quel usage l'emprunteur a-t-il le droit de l'aire de la chose? Tout dépend de l'intention des parties. S'il a été entendu que l'emprunteur n'aura le droit de se servir de la chose que pour un usage déterminé qui n'en altère pas la substance, et qu'il devra ensuite la restituer dans son identique individualité, on est dans l'hypothèse du prêt à usage ou commodat. Le prêteur reste propriétaire, et l'emprunteur devient débiteur d'un corps certain. Si. au coud aire, il a été convenu que l'emprunteur pourra faire de la chose un usage définitif, un usage qui ne sera plus susceptible de se renouveler, alors il en devient propriétaire, car il faut être propriétaire d'une chose pour pou-voir en dis- poser ou la consommer, et il devra restituer, non pas la chose même qu'il a reçue, mais une chose ou des choses semblables. C'est l'hypothèse àuprêt de consommation, qui transfère la propriété à l'emprunteur et le rend débiteur d'une quantité. Ainsi il existe deux variétés de prêt; le prêt à usage ou commodat, qui oblige l'emprunteur à restituerla chose même qu'il a reçue, après en avoir retiré l'usage convenu, et le prêt de consommation, ou de consomption, comme dit Pothier, qui rend l'emprunteur propriétaire, sous l'obligation de restituer des choses semblables à celles qu'il a reçues. 601. Nous avons dit également que c'est la volonté des parties qui détermine la nature du prêt. Comment connaitra- t-on cette volonté ? Si les parties l'ont exprimée, il n'y aura pas de difficulté. Dans le cas contraire, les circonstances de la cause serviront à la découvrir. Parmi ses diverses circons- tances, l'une des plus importantes à considérer est la nature de la chose qui l'ait l'objet du prêt. Presque toujours, dans l'intention des parties, le prêt qui porte sur une chose non consomptible, par exemple une montre, un cheval, de l'ar- 340 DU PRÊT genterie, sera un prêt à usage ; presque toujours au contraire celui qui a pour objet des choses consomptibles, comme de l'argent, des denrées, sera un prêt de consommation. C'est eu se plaçant à ce point de vue que l'art. 1874 dispose : « // » g a deux sortes de prêt : — Celui des choses dont on peut » user sans les détruire, — Et celui des choses qui se consom- » ment par l'usage qu'on en fait. — La première espèce s'ap- pelle prêt à usage ou commodat; — La deuxième s'appelle » prêt de consommation, ou simplement prêt. Ce texte revient à dire : « le prêt à usage est celui quia pour objet des choses non consomptibles; le prêt de consommation celui qui a pour objet des choses consomptibles ; l'art. 1894 porte de même: « On ne peut pas donnera titre de prêt de » consommation des choses qui, quoique de même espèce, dif- » fèreitt dans l'individu, comme des animaux ; alors c'est un » prêt à usage », et c'est également la distinction expressé- ment faite dans les travaux préparatoires (') et qu'on retrouve chez la plupart des auteurs anciens (*). Mais cette formule n'est pas d'une exactitude rigoureuse. En effet il peut arriver exceptionnellement, parce que telle est la volonté des parties, qu'un prêt ayant pour objet des choses consomptibles soit un commodat, et en sens inverse qu'un prêt ayant pour objet des choses non consomptibles soit un prêt de consommation. C'est ce que nous allons démontrer, et nous prouverons du même coup qu'à la for- mule de la loi il aurait fallu substituer celle-ci : « Le prêt à usage est celui qui a pour objet des choses non fongibles ; le prêt de consommation celui qui a pour objet des choses fon- gibles ». Le législateur a confondu les choses consomptibles avec les choses fongibles (3). Nous disons d'abord qu'un prêt ayant pour objet des cho- ses consomptibles peut exceptionnellement être un commo- 1 Kapport de Boutteville au tribunal, Fenet, XIV, p. 157. (*, Argou, 9« éd., 1762, II, liv. III, ch. XXX, p. 309. (»] Trib. civ. Bruxelles. 27 déc. 1882, l'asicr., 83. 3. 184 (actions de société). — Pont, Tv. des petits contrats, I, n. 7, 11 et 39; Hue, XI, n. 155. — On a essayé Troplong, n. 9; Laurent, XXVI, n. 451 ; Guillouard, n. 3) de justifier la loi en di- sant qu'elle n'avait à se préoccuper que du cas le plus pratique. CARACTÈRES GÉNÉRAI \ 341 (ht l1 . Pothier (*), cite comme exemple le cas où un compta- ble de deniers publics, qui a un déficit dans sa caisse, emprunte à un ami, au moment où un inspecteur va passer, la somme nécessaire pour combler le déficit, a la charge de restituer les mêmes espèces identiquement, aussitôt la vérifi- cation faite. On peut encore citer le prêt ad pompam et ostentationem, par exemple celui de pièces de monnaie fait à un changeur qui doit les exposer à sa vitrine (3), de denrées prêtées à un négociant dans le même but (') (c'était déjà la solution du droit romain) (5), de titres au porteur destinés à être donnés en nantissement et qui doivent être restitués en nature (° i, de titres destinés à être déposés par un administrateur de société en garantie de sa gestion (7). Nous avons ajouté que le prêt qui porte sur des choses non consomptibles peut exceptionnellement être un prêt de con- sommation. Ainsi un libraire, auquel on demande un livre qu'il n'a pas clans son magasin, en emprunte un exemplaire à son confrère pour ne pas manquer la vente. C'est un prêt de consommation ; car l'intention commune des parties a été que le libraire emprunteur restituât, non pas l'exemplaire même qui lui a été livré, mais un exemplaire semblable i8). On voit en résumé que le prêt de consommation est celui qui a pour objet des choses fongibles, c'est-à-dire des choses que les parties considèrent au point de vue de leur espèce plutôt qu'à celui de leur individu, quarum una alterius vice fitngittir; l'emprunteur deviendra propriétaire de la chose (', Duranton, XVII, n. 503; Troplong, n. 35; Pont, Tr. des petits contrats, I, n. 39; Aubry et Rau, IV, p. 594, § 391, note 4 ; Colmet de Santerre, VIII, n. 98 bis; Guillouard, n. 15, 79 et 80; Rivier, loc. cit. infra (n. 606). — D'après cer- tains de ces auteurs, il ne peut en être ainsi que si le prêt est fait ad pompam et vitentationem; Guillouard, n. 15 (mais cet auteur revient à une opinion plus saine au n. 80). C'est certainement une erreur. I1) Du prêt à usage, n. 17. [rj Guillouard, n. 3. (') Guillouard, n. 3. [s) L. 3, § 6, I. 4, D., Comm. tel contra, 13. 6. 6) Cass. crim., 31 janv. 1895, S., 95. 1. 160. H Trib. civ. Bruxelles, 27 déc. 1882, précité. — Hue, loc. cit. (*) Guillouard, n. 3 et 66. 342 DU PRET reçue et en restituera une semblable. Au contraire, le prêt à usage est celui qui a pour objet des choses non fongibles ; le prêteur demeurera propriétaire de la chose prêtée et l'em- prunteur devra la restituer dans son identique individualité, après en avoir retiré l'usage convenu. Celte formule est plus exacte que celle de l'art. 1874, qui, se plaçant à un point de vue empirique, s'attache, pour distinguer les deux variétés de prêt, à cette circonstance que la chose qui en fait l'objet est ou non consomptible ; c'est fongible qu'il aurait fallu dire v'), c'est cette expression qu'emploient les codes étran- gers (2). Tout ce qui exact dans la définition de l'art. 1874, c'est qu'à moins d'intention contraire, exprimée ou résultant des circonstances, le prêt de choses consomptibles doit être réputé être un prêt de consommation, et le prêt de choses non con- somptibles un prêt à usage (s). A cet égard, il faut considérer comme fongibles : 1° Les choses qui se consomment naturellement par le pre- mier usage qui en est fait, comme les graines, le vin, l'huile, le bois à brider, etc. ('). 2U Les choses qui se consomment civilement par l'usage, c'est-à-dire qui sont destinées à sortir des mains de l'em- prunteur, comme l'argent (5), ou à perdre leur nature, comme le papier (6). 602. Voici maintenant les différents intérêts qu'il y a à déterminer si, en fait, un prêt est un prêt à usage ou un prêt de consommation. 1° Le prêt de consommation a pour objet, en principe, des choses consomptibles, le prêt à usage des choses non con- somptibles; 2° Dans le prêt de consommation, l'emprunteur devient propriétaire des choses prêtées et doit restituer des choses (•) Guillouard, n. 80. (*) Suisse, C. féd., art. 3*29; Allemagne. C. civ., art. 607. ') Guillouard, n. 3. \k) Pothier, Du prêt de consomption, n. 23; Guillouard, n. 79. !) Pothier, n. 24; Guillouard, toc. cit. ,8) Pothier, lue. cil .Guillouard, toc. cit. I \n\i mu:s <;k\kh.\i \ :} i.'{ semblables; il est donc débiteur «l'une quantité, e< par suite les risques sont pour sou compte. Dans le prêt à usage, au contraire, le prêteur demeure propriétaire de la chose prê- tée; l'emprunteur est tenu de la restituer dans son identique individualité, in specie; il est donc débiteur d'un corps cer- tain, et les risques sont supportés par le prêteur ('). 3° Le prêt de consommation n'est gratuit que de sa nature ; le prêteur peut donc stipuler une rémunération pour le ser- vice qu'il rend à l'emprunteur (prêt à intérêt). Au contraire, le prêt à usage est essentiellement gratuit. Si le prêteur sti- pule une prestation quelconque comme contre-valeur de l'avantage qu'il procure à l'emprunteur, la convention devient un louage de choses (2). Si c'est l'emprunteur qui reçoit une rémunération, le contrat est un louage d'ouvrage. 4° Celui qui a fait un prêt à usage peut, s'il lui survient un hesoin pressant et imprévu de sa chose, en obtenir la restitu- tion avant l'expiration du terme convenu (art. 1889 . Le même droit n'appartient pas à celui qui a fait un prêt de consom- mation, car aucun texte ne le lui accorde. Cette différence se justifie facilement : la chose qui fait l'objet du prêt à usage doit être restituée in specie, et comme, d'autre part, l'em- prunteur ne doit s'en servir que pour un usage personnel, il l'aura toujours sous la main; à toute époque il lui sera donc facile de la restituer, et la restitution ne lui causera pas d'au- tre dommage que la privation du droit d'user de la chose: au contraire, s'il s'agit d'un prêt de consommation, l'emprun- teur aura le plus souvent consommé ou aliéné la chose qui en fait l'objet, et l'obligation de restituer avant l'époque con- venue pourrait lui créer des difficultés graves et déranger toutes ses combinaisons. 603. Des deux espèces de prêt, on doit supposer que le prêt à usage est le plus ancien (' ; il présente, en effet, un caractère plus élémentaire. (') Duranton, XVIII, n. 484: Laurent, XXVI, n. 452; Guillouard, n. 4. (■) V. infra, n. 606. (*) Guillouard, n. 1. 344 DU PRÊT A USAGE CHAPITRE II DU PRÊT A USAGE OU COMMODAT 604. « Le prêt à t/sagc ou commodat est un contrat par » lequel l'une des parties livre une chose à l'autre pour s'en •' servir, à la charge par le preneur de la rendre après s'en » être servi » (art. 1875). Le prêteur ne peut pas exiger la restitution de sa chose avant l'expiration du temps expressé- ment ou tacitement accordé à l'emprunteur pour s'en servir. Le commodat diffère par là du précaire, dans lequel, comme nous le verrons, tout est laissé à la discrétion du prêteur, qui peut à tout instant reprendre sa chose. SECTION PREMIÈRE CARACTÈRES DU PRÊT A USAGE. ACTES QUI LU CONSTITUENT. PROMESSE DE PRÊT 605. Comme tout prêt, le prêt à usage est unilatéral ('); or le code civil reconnaît l'existence d'obligations, non seule- ment à la charge de l'emprunteur, mais aussi à la charge du prêteur. N'est-ce pas dire que le prêt à usage est un con- trat synallagmalique (art. 1102? Voici l'explication. Sans doute le prêteur peut être tenu d'obligations envers l'emprun- teur; mais elles ne résultent pas du contrat de prêt. Ce con- trat ne rentre donc pas dans la définition de l'art. 1102 : « Le contrat est synallagmatique ou bilatéral lorsque les » contractants s'obligent réciproquement les uns envers les » autres ». Au moment où le contrat se forme, l'emprun- teur s'oblige bien envers le prêteur, mais celui ci ne s'oblige pas envers l'emprunteur. Pour s'en convaincre, il suffit de passer en revue les obligations que la loi met à la charge du prêteur. L'obligation de rembourser à l'emprunteur cer- taines dépenses qu'il a faites à l'occasion de la chose prêtée (') Troplong, n. 7 ; Demolombe, XXIV, n. 21 et 22; Laurent, XXVI, n. 456, 481 et 585; Guillouard, n. 10; Hue, XI, n. 156. — V. supra, n. 599. CARACTÈRES - ACTES QUI LE CONSTITUENT 3-io ne nait pas du contrat, mais de faits postérieurs qui peuvent ne pas se produire. Quant à l'obligation consacrée par Part. 1891, elle a sa source, non dans le prêt mais dans le dol du prêteur. Il reste l'obligation de ne pas retirer' la chose avant le terme convenu ; celle-là est de nature à faire hésiter un ins- tant, car elle semble bien résulter du contrat. Mais, si l'on va au fond des choses, on voit qu'elle n'est autre que l'obligation, qui s'impose à tout homme, de respecter le contrat qu'il a fait, de ne pas commettre de dol envers son semblable : le prêteur se rendrait coupable d'un dol avec l'emprunteur, si, après lui avoir livré une chose en l'autorisant à s'en servir, il allait la lui retirer immédiatement. En définitive, la situa- tion est celle-ci : jusqu'à l'expiration du temps fixé par la con- vention, la loi refuse toute action au prêteur pour rentrer en possession de sa chose, et le droit commun lui défend de se mettre en possession de sa propre autorité par des voies de fait. Peut-on dire qu'il y a là une obligation résultant du contrat ? Il faut donc rejeter l'opinion soutenue par Pothier (') et certains auteurs modernes (*), et d'après laquelle, à raison des obligations que les suites du contrat peuvent mettre à la charge du prêteur, le prêt à usage serait un contrat synallag- matique imparfait. La loi ne reconnaît pas cette troisième classe de contrat. La question a une certaine importance au point de vue de la forme et de la preuve du contrat. 606. Le prêt à usage appartient, en général, à la famille des contrats de bienfaisance (arg. art. 1105). « Ce prêt est es- senliellement gratuit », dit l'art. 1876, reproduisant la solu- tion donnée par Pothier (*). Si le preneur stipule de l'emprun- teur quelque prestation, comme contre-valeur de l'avantage qu'il lui procure, la convention ne sera pas nulle pour cela, niais elle ne constituera plus un commodat : ce sera un louage si la rémunération stipulée consiste dans une somme d'ar- ('] N. 7. (*) Larombière, Théor. el prul. des oblig., art. 1102, n. 2; Aubry et Hau, IV. p. 285, § 341, note 2 ; Pont, T, n. 28. (3; n. 3. 346 DU PRÊT A USAGE gent (*); ce sera un contrat innommé si elle consiste en toute autre prestation ^!), à moins qu'on ne considère que le prix du louage peut consister en autre chose qu'une somme d'ar- gent (»). Aussi rapproche-ton souvent le commodat de la donation; il est essentiel de l'en distinguer à raison des solutions inexactes auxquelles une identification trop complote a pu conduire sur certains points, notamment en ce qui concerne la capacité du prêteur. Tout d'abord il importe de remarquer que le commodat n'est pas nécessairement, comme la donation, un contrat ins- piré par une pensée libérale; nous citerons des hypothèses où le commodant ne recherche que son intérêt personnel. D'autre part, et même si ce qui est le cas le plus usuel) le commodant veut rendre service au commodataire, le contrat ne peut être qualifié de donation : la preuve qu'il en est ainsi, c'est que la loi n'a pas subordonné la validité du com- modat à l'emploi des formes exigées pour les donations ; le service rendu est trop insignifiant pour qu'on puisse le con- sidérer comme une libéralité; il constitue un de ces actes de bon voisinage ou de bonnes relations que la vie sociale rend fréquents et par lesquels on procure, sans privation person- nelle, ou moyennant une privation insignifiante, un avantage à autrui. Aussi n'a-t-il jamais été question de soumettre le commodat au rapport et à la réduction. Le commodat se distingue, en somme, de la donation par les circonstances dans lesquelles il intervient et la pensée qui y préside. Il ne suffit pas de dire que le commodat porte sur « la jouissance temporaire d'un objet, tandis que la donation porte sur la propriété ou du moins sur l'usufruit ou l'usage »(*). Nous ne saisissons pas la différence qu'il peut y avoir entre la jouissance temporaire et l'usage. La vérité est que la con- cession d'une jouissance temporaire est une donation et non i Pû'.liier. Du prêt à usage, n. .'?: Argou, liv. III, ch. XXX, p. 310; Guillouard, n. 11: Rivier, HoItzendorfT'sitec/i/s/eWÀ-û/i. v° Commodalum. (*) Polhier. n.3; (ïuillouard, n. 11; Rivier, loc. cil. (*) V. notre TV. du louage, 2e éd., I, n. 814 s. (', V. cep. Guillouard, n. 26. CARACTÈRES — ACTES doctr. de lajurispr. civ., XXIII, 1894, p. 83; IIuc, X, n. 345. («) Planiol, Note, D., 93. 1. 161. («) Esmcin, Note, S., 93. 1. 185. CARACTÈRES — ACTES Ql'l LE CONSTITUE!»! 341) nion; elle repose sur 1 idée que le 1 > : * i I de chasse lui-même est la constitution d'une créance, et nous avons examiné cette conception dans notre Traité du contrat de louage ('). Les raisons pour lesquelles la réserve du droit de chasse doit être regardée comme un bail, c'est qu'on y trouve, au fond, exactement les mêmes conditions que dans le louage de choses, et notamment dans le bail de chasse : une jouis- sance temporaire (si la jouissance était perpétuelle, l'acte sc- iait nul, comme nous l'avons montré en étudiant le louage de choses), le caractère onéreux de l'acte (car évidemment le vendeur a consenti à uue diminution de prix pour garder le droit de chasse), un loyer représenté par cette même dimi- nution de prix). C est donc à tort qu'on s est fondé, pour nier que ce con- trat soit un bail, sur ce que le loyer y fait défaut. Sans doute, comme on le dit, le commodat peut s'appliquer aux immeu- bles, mais il est essentiellement gratuit et on ne peut consi- dérer comme une convention gratuite, celle par laquelle un acquéreur permet au vendeur la jouissance de Ja chose ven- due. L'idée de commodat entraînerait certaines conséquences dont quelques-unes sont inadmissibles; il n'y a peut être rien à redire au droit qu'aurait, à ce qu'on prétend, le sous-acqué- reur de ne pas respecter la réserve du droit de chasse, quoi- que cette solution ait l'inconvénient de ne pas répondre à l'intention des parties et qu'on puisse, par conséquent, pré- férer la solution contraire, que la cour de cassation, fidèle à son principe, a admise avec raison ('). Mais on sait que le commodant peut obtenir l'autorisation de reprendre la jouissance de la chose prêtée, s'il lui en sur- vient un besoin pressant. Evidemment, on ne peut aller jus- qu'à appliquer celte solution à l'espèce : il n'est pas admissi- ble que l'acquéreur, qui n'a été mu par aucune pensée libérale et a reçu des avantages équivalents à ceux qu'il a concédés, puisse, sans compensation, anéantir ces derniers. (') N. 34 à 36. 5 V. in f ra, n. 679. 350 DO PRÊT A USAGE On a prétendu que si la réserve émane d'un donateur, elle n'est pas un bail (■'), parce qu'elle n'est pas achetée par une diminution de prix et ne présente pas, par suite, le caractère onéreux; mais ce n'esl pas davantage un commodat; que sera ce donc alors? Nous ne voyons, pour notre part, aucun inconvénient à la traiter de bail, car si le vendeur fait un acte onéreux pour lui, la donation est beaucoup plus onéreuse encore pour le donateur; elle n'est gratuite que pour le dona- taire. Tout ce que nous venons de dire s'applique également à la réserve d'un droit de jouissance sur l'immeuble entier, si cette réserve a lieu à titre de droit personnel (2). 612. Nous examinerons à propos du mandat comment le prêt a usage se distingue du mandat. Nous montrerons également, à propos du dépôt, en quoi il se dislingue «lu dépôt. G 13. Il est certain que la promesse de prêter à usage est obligatoire (s). Néanmoins, le prêt à usage est un contrat réel (*). C'était déjà la règle adoptée par le droit romain et les termes de l'art. l Colmar, 8 mai 1815. S., 17. 2. 117. D., 46. 2. 219. — Pothier, loc. cit.; Guil- louard, ". 8 : Etivier, loc. cit. ; Troplong, n. 6; Duvergier, n. "25 s.; Demolombe, XXIV. n. 30 s.; Laurent, XXVI, n. 453 et 154; Hue, XI, a. 156: N Pothier, op. cit., n. 6; Guillouard, n. 8; Rivier, loc. cit.; Une, XI, n. 156. — V. supra, n. 51*5 s Duranton, XVII: n. 556: Laurent. XXVI, n. 453 et i54; Guillouard, n. 9. '•) Y. supra, n. 595 s. CONSENTEMENT El VICES Dl CONSENTEMENT •'{>! aucune raison juridique pour dérogera l'art. 1138; quoique, d'après lestermesde l'art. 1875, le prêta usage soit un contrat réel, il l'an l appliquer à la promesse do prêt l'art. 1138, que l'opinion contraire restreint sans molifs, et malgré la généra- lité de ses ternies, aux contrats consensuels ('). SECTION 11 DU CONSENTEMENT ET DE SES VICES 614. Il n'y a, au sujet du consentement et des vices, qu'à appliquer les règles du droit commun. Cependant on a discuté la question de savoir quels sont les effets d'une remise d'objet que l'une des parties entend faire à tilrc de donation, et l'autre recevoir à titre de commodat. Il est certain que la donation ne se forme pas, puisqu'il n'y a pas eu accord de volontés sur ce point (-). Mais, pour la même raison, il n'y a pas davantage de prêt à usage (*). Les auteurs qui ont soutenu le contraire (*) se sont fondés sur ce que la personne qui veut faire Tme donation entend, à plus forte raison, se dépouiller de l'usage de la chose. Celte considération ne répond pas à notre argument ; il est, du reste, de droit commun que si les deux parties ne se sont pas accordées sur la nature de la convention, cette con- vention est nulle. Donc celui qui a livré la chose peut la revendiquer 5, entre les mains, soit de celui auquel il l'a livrée, soit des tiers non protégés par la prescription ou par la règle en fait de meu- bles possession vaut titre. Si la chose a péri, il ne peut plus rien réclamer, à moins que la perte n'ait lieu par la faute de celui qui détenait la chose et qui savait ne pas en être propriétaire (6). 1 (ipr. Duvergier, d. 146. - Guillouard, n. 26. Pont, I, n. 135; Guillouard, lue. cit. •■ Troplong, n. 195; Duvergier, n. 139 s. Guillouard, n. 26. V. cep. Guillouard, n. 26. — Cet auteur donne en toute hypothèse une action nnelle en cas de perte de la chose par la raison que « nul ne peut s'enrichir au\ dépens d'autrui ». La perte de la chose enrichit-elle donc celui qui en était dé- 352 DU PRÊT A USAGE SECTION III CAPACITÉ EN MATIÈRE DE PRÊT A USAGE § I. Capacité du prêteur. 615. La capacité d'administrer est suffisante chez le prê- teur (') ; le prêta usage, en effet, n'appauvrit pas le prêteur, et, quoiqu'il soit en général un contrat de bienfaisance, ne peut être assimilé a une donation; personne ne soutient que les profits qui en résultent soient réductihlesou rapportables, et, s'ils en est ainsi, c'est que le eommodat ne fait rien perdre au prêteur et par suite ne constitue qu'un acte d'administra- tion (2). L'opinion contraire se fonde sur la perte que le prêt à usage, quand ils est prolongé et porte sur une valeur impor- tante, comme une maison, fait éprouver au prêteur. Nous nous contenterons de répondre qu'en pareil cas le contrat constituera une véritable donation, réductible et rapporlable. Le juge du fait doit examiner si, en fait, le prétendu prêt k usage ne déguise pas une libéralité, mais, dans le cas de la négative, la capacité d'administrer doit suffire. Les conséquences du système que nous combattons mon- trent l'inexactitude de ce système, car, personne n'ayant le pouvoir de faire une donation au nom d'un mineur même émancipé ou d'une femme dotale, ces personnes ou leurs représentants n'auraient pas le droit de prêter un meuble, une charrue, en nu mot aucun de ces objets dont le prêt est un acte de bonnes relations ou de bon voisinage. Aussi les partisans de l'opinion contraire ne paraissent-ils exiger la capacité de donner, mais se contenter de celle de tenleur? Au surplus, contre qui existerait laction personnelle? Est-ce contre la personne à qui la ebose avait été remise, ou contre celle entre les mains de laquelle la chose a péri? A cet égard, M. Guillouard donne, en cas de perte de la chose. « une action personnelle contre celui qui l'a détruite >■. (') Duranton, XVII, n. 509 s. : Pont. I, n. 55 et 50 ; Aubry et Rau, IV, p. 5?5, § 391, note 6. — Contra Laurent. XXVI. n. 45s ; Duvergier, n. 46 s. ; Guillouard, n. 20 : Hue, XI, n. 154. [*) Hue. loc. cit. CAPACITÉ Dl PBÉTE1 n XY.l disposera titre onéreux, <-l c'esl là une contradiction. D'autres décident que si le commodat ne sort pas des actes de poli- tesse, il peut être fait par un simple administrateur ('); cette distinction, qui ne repose pas sur les textes, donne lieu à de grandes difficultés de fait. Ainsi l'individu pourvu de conseil judiciaire peut jouer le rôle de commodant 'j. Il en est de même du mineur émancipé (:t). De même encore pour la femme séparée de biens (*). Dans l'opinion qui exige du prêteur la capacité de disposer, la femme séparée de biens ne peut prêter à usage même ses meubles, quoiqu'elle ait le droit de les aliéner (5), car cette aliénation est la conséquence de son droit d'administrer et le prêt à usage n'est pas, par hypothèse, un acte d'administra- tion. Le tuteur peut prêter a usage les biens du mineur (6j. Il en est de même du mari pour les biens de la femme dont il a l'administration ('). 616. L'usufruitier peut donner à commodat" la chose sou- mise à son usufruitier^). Le locataire peut également prêter l'objet loué (*), à moins que le bail ne lui interdise cette convention (,0). Il en est de même du créancier gagiste ("). 617. Ces diverses personnes peuvent valablement consen- tir le prêt au propriétaire lui-même (12). (') V. supra, n. 606. (*) Pont, loc. cit. — Conlra Duvergier, loc, cil. : Laurent, loc. vil..- Guillouard, loc. cit. : Hue, b 3">4 DU PRÊT A USAGE § II. Capacité de l'emprunteur. 618. La capacité pour emprunter à usage est celle d'admi- nistrer ; cela signifie que tous ceux qui peuvent administrer peuvent emprunter à usage et que ceux qui ne peuvent pas administrer ne peuvent pas emprunter à usage. La première de ces deux propositions se justifie par l'idée que l'emprunteur reçoit un service gratuit sans rien fournir en échange ; le contrat ne peut donc avoir pour lui que des avantages (1). Du reste, la capacité d'administrer suffit pour prendre une chose à bail et cette solution fournit un argu- ment a fortiori, car le prêt ù usage ne diffère du bail que par sa gratuité, c'est-à-dire par une circonstance toute favo- rable à l'emprunteur. Ainsi la femme séparée de biens peut emprunter à usage (*). Il en est de même du mineur émancipé (8) et de l'individu pourvu d'un conseil judiciaire (*). On ne peut tirer une objec- tion sérieuse des art. 483 et 513 qui interdisent l'emprunt à ces deux personnes; il ne s'agit, dans ces textes, que de l'em- prunt assimilable à un acte d'aliénation, c'est-à-dire de l'em- prunt de consommation. On ne voit pas pourquoi la loi aurait traité de même l'emprunt à usage, lequel ne peut avoir pour 1 emprunteur que des avantages. (Juant aux personnes qui n'ont pas la capacité d'adminis- trer, elles ne peuvent remplir le rôle de commodataires (5). La raison en est que tout acte de la vie civile leur est inter- dit, fût-il essentiellement profitable à leur patrimoine; elles ont un représentant qui leur est entièrement substitué et agit en leur nom. Il est inutile et dangereux de fonder notre solu- tion, comme on l'a fait (6), sur ce qu'éventuellement la dété- (*) Troplong, n. 55 s.; Guillotiard, a. 19; I lue, XI, n. loi. is) Guillouard, n. 19. (s) Troplong, loc. cit.; Guillouard, loc. cil. 4 Troplong, loc. cit.: Guillouard, loc. cit. (s) Troplong, n. 19 s. ; Duvergier, n. 37 s.; Laurent, XXVI, n. 458; Guillouard, n. 18. (*) Guillouard, loc. cit. OBJET il CJM -l 355 rioratioD de la chose peut rendre le commodat nuisible à l'emprunteur; car s'il fallait, pour apprécier l'utilité du con- tr.it, tenir compte des éventualités, on serait conduit à dire que le commodat n'est pas, pour l'emprunteur, un acte d'ad- ministration, et se trouve interdite toutes les personnes dont l,i capacité est limitée à l'administration. L'emprunl esl donc interdit k la femme mariée non séparée de biens ('), au mineur non émancipé (2). 618 bis. L'emprunt contracté par un incapable est nul. Mais rineapable seul peut en demander la nullité, confor- mément à l'art. 1123 C. civ. (3). Lms de la restitution, il n'est pas tenu de la détérioration ou de la perte résultant de sa faute (4), sauf si cette faute est lourde ' ou constitue un dol ("), car, en principe, l'incapa- ble n'est pas tenu de sa faute. SECTION IV DE L'OBJET ET DE LA CAUSE 619. « Tout ce qui est dans le commerce, et qui ne se con- » somme pas par l'usage, peut être l'objet de cette convention » (art. 1878). Les immeubles eux-mêmes peuvent faire l'objet d'un commodat (7 , ainsi que le disait déjà Pothier (8) ; par exemple, je puis prêter ma cave à un voisin pour y déposer des marchandises 9) ; on peut également prêter un apparte- ment dans une maison (10). Troplong, loc. cit.; Duvergier, loc. cit.; Laurent, loc. cit. ; Guillouard, loc. cil. ■ Mûmes auteurs. (') Troplong, loc. cil.; Duvergier, loc. cit.; Laurent, XXVI, n.458: Guillouard, n. 18. (*] Mômes auteurs. 5 Mêmes auteurs. (6) Mêmes auteurs. C) Duranton, XVII, n. 501; Troplong, n. 36; Pont) I, n. 37; Aubry etRau, IV, p. 594, § 391, note 1: Laurent, XXVI, n. 454 et 460; Guillouard, n. 15; Planiol, Note, D.. 93. 1. 161 ; Rivier, loc. cit. 1 Potliier. n. 14. ' Pothier, loc. cit. ; Guillouard, n. 15. ,"' Polluer, loc. cit.; Guillouard. n. 15. 356 DU PRÊT A USAGE Comme nous l'avons montré, les choses qui se consomment par le premier usage peuvent elles-mêmes faire l'objet d'un cummodat ('). 619 bis. Seules les choses qui sont dans le commerce peu- vent faire, d'après la loi, l'objet d'un commodat. !1 s'agit ici des choses qui sont dans le commerce au point de vue de l'usage ou de la jouissance, puisque le commodat ne transfère que l'usage ("-). Il faut donc, à ce point de vue, assimiler le commodat au louage de choses, qui porte également sur la jouis- sance ('). 620. La validité du commodat entre les parties contrac- tantes n'est pas subordonnée au droit de disposition du com- inodant (*). Car, dans le cas contraire, le commodant peut néanmoins s obliger à faire jouir le commodataire de la chose. Au surplus, on admet d'une manière générale que les con- trats portant sur la chose d'autrui (et notamment le contrat de louage, dont le commodat ne diffère que par la gratuité | sont valables, sauf l'exception édictée par la loi pour la vente. Enfin celte solution était celle du droit romain (5) et de Pothier (6). On ne peut opposer en sens contraire l'art. 1877 C. civ., d'après lequel « le prêteur demeure propriétaire de la chose prêtée ». Tout ce que veut dire ce texte, c est qu'à la diiïérence du prêt de consommation, le prêt à usage n'emporte pas trans- fert de la propriété, et que, par suite, si le prêteur est pro- priélaire ce qui est le cas le plus usuel), il reste propriétaire. S'il fallait l'interpréter autrement, on devrait refuser à l'usu- fruitier le droit de prêter la chose soumise à son usufruit, et cela serait absurde. 621. Le voleur lui-même peut valablement prêter l'objet 1 V. supra, n. 601. aj Guillouard, n. 16; Hue, n. 155. [*) V. notre Tr. du luiiuye, 2« édit., I, n. 122 s. 1 Troplong, n. 38; Duvergier, n. 33: Pont. I, n. 44 et 83; Laurent, XXVI. n. 461 ; Rivier, Hollzendoiff's Iiechlsle.t ikon, v° Commodalum ; Guillouard, n. 17: Hue, XI. n. 155. (s; L. 15 et 16. D., Comm. tel contra, 13. 6. l«J N. 18. OBJET Kl CÀUS1 357 volé ('); c'était également la solution du droit romain (' et celle de Pothier ('). Toutefois, on applique généralement au commodatairc l'art. 1938, qui oblige le dépositaire, s'il connaît le véritable propriétaire de l'objet volé, à lui dénoncer le dépôt, avec sommation do le réclamer dans un délai déterminé ' . 622. Lorsque nous disons qu'on peut prêter k usage la chose d'autrui, nous n'entendons pas qu'un semblable prêt soit opposable au propriétaire; évidemment il est pour lui res inter aliosacta (5). Nous voulons dire seulement que le contrat est valable dans les rapports du prêteur et de l'em- prunteur et que, par conséquent, il fait naître entre les parties les obligations résultant du prêt (art. 1880 s.). En outre, si le véritable propriétaire oblige l'emprunteur à restituer la chose avant le terme fixé expressément ou taci- tement, le prêteur peut être condamné à indemniser l'em- prunteur, mais à la condition d'avoir été de mauvaise foi (6). 623. Le contrat ne se forme pas si la chose appartient au commodataire (7). 624. Un immeuble dotal peut faire l'objet d'un commo- dat (8). 625. Ne peuvent faire l'objet d'un commodat les écrits dont les magistrats ont ordonné la suppression (9), car, comme le disait Pothier (,0), « l'arrêt qui défend à toute personne de les retenir et enjoint de les porter au greffe de la cour défend à plus forte raison de les prêter ». Pothier considérait comme illicite le prêt « des mauvais livres dont on ne peut se servir pour aucun usage honnête, tels que ceux qui ne contiennent rien autre chose que des <) Guillouard, n. 17 ; Hue. XI, n. 155. (*) L. 16, I)., Comm. vel contra, 13. 6. (») N. 18. (') Dnvergier, n. 3i et 89; Guillouard, n. 17 et 50; Hue, loc. cit. (3) IJuranton, XXII, n. 547 ; Guillouard, n. 47. ' Pothier, u. 79; Pont, I, n. 125; Aubry et Rau, IV, p. 598, § 393, note 4; Guil- louard, n. 47 et 60; Hue, XI, n. 165. 1 Rivier, loc. cit. - Guillouard, n. 16; Hue, XI, n. 155. (9I Guillouard, n. 16. (,0) N. 16. 358 DU PRÊT A USAGE ordures et des impuretés » (*). Cette solution est reproduite par les auteurs modernes (2). 626. La détention des armes de guerre étant interdite, le commodat qui a un tel objet est nul (3). Il en est de même du commodat portant sur des objets de contrebande (4). 627. Le nom patronymique peut faire l'objet d'un prêt à usage, aussi bien que d'un bail et sous les mêmes restric- tions; nous nous référons aux développements que nous avons donnés à propos de ce dernier contrat (3). 628. On admet que le prêt d'objets destinés à un but illicite connu du prêteur est nul comme ayant un caractère immo- ral (6). La question se présente de la même manière pour le prêt de consommation, i\ propos duquel nous l'étudierons. On décide, par exemple, la nullité du prêt d'armes ou d'échelles pour commettre un crime (7). 629. En tous cas le prêteur qui a connu la destination immo- rale du prêt a néanmoins une action en restitution de l'objet prêté (8). En vain oppose-t-on que cette action a un caractère immoral : le prêteur se fonde simplement sur le contrat de prêt, lequel n'a, en lui-même, rien d'immoral, et c'est, au contraire, l'opinion qui rejette l'action en restitution qui aboutit à une immoralité, car elle permet à l'emprunteur, pour échapper à l'action en restitution, de se prévaloir d'une infraction aux lois qu'il a commise lui-même. Au surplus, on admet généralement aujourd'hui que les objets livrés en exé- cution d'une convention illicite peuvent être répétés et notam- ment que l'associé peut répéter les objets apportés par lui dans une société dont le but est illicite. Il résulte de là que la seule particularité du commodat dont la destination est illicite est que le prêteur peut refuser (•) N. 16. s) Guillouard. n. 16. 3) Guillouard, n. 16. (*) Guillouard, n. 16. (") V. notre Tr. du louage, n. 115. i6) Duranton, XVII, n. 505 ; Troplong, n. 34; Guillouard, n. 16. (') Guillouard, n. 16. (9) Duvergier, n.32; Pont, I, n. 43; Guillouard, n. 16.— Contra Troplong, n.3i. PREI M 339 (le livrer la cbose promise et peut en exiger la restitution avant le terme convenu. SECTION V PREUVE F.N MATIÈRE DE PRÊT A LSAGE 630. Le prêl à usage est soumis aux principes généraux «Je la preuve; il ne peut donc être prouvé par témoins si la valeur de L'objet prêté dépasse 150 fr. ('). Plusieurs auteurs, dans l'ancien droit, admettaient au con- traire la preuve testimoniale, quelle que fût la valeur de L'objet prêté (-), et leur opinion avait été consacrée par quel- ques arrêts (*). Elle se fondait sur ce que le commodat est un contrat de bonne foi, qui, d'ordinaire, ne se rédige pas par écrit; L'observation est exacte, mais n'est pas de nature à modifier une règle posée en termes absolus par les textes. On ajoutait que le commodat exige, outre le consentement, la tradition, laquelle est un simple fait, susceptible, comme tous les faits, d'être prouvé par témoins; c'était oublier que les faits juridiques, à la différence des faits purs et simples, sont soumis aux règles générales de la preuve et qu'en tout cas, si la tradition s'ajoute au consentement, elle ne le fait pas disparaître et, par suite, n'en rend pas la. preuve inutile. Aussi Pothier appliquait-il ici les règles générales ('). 631. Le prêt à usage, étant un contrat unilatéral, n'est pas soumis à la formalité des doubles prescrite par l'art. 1325 G. civ. pour les contrats synallagmatiques (5). L'exactitude de cette solution est d'ailleurs reconnue par les auteurs mêmes qui considèrent le prêt à usage comme un contrat synallagmatique imparfait (6). .< Duranton, XVII, n. 493; Troplong, n. 58 s. ; Duvergier, n. 51 s.; Pont, 1, n. 30; Aubry et Rau, IV, p. 595, § 391, note 7; Laurent, XXVI, n. 462; Guil- louard, n. 22. — Conlra Colmar, 18 avril 1806, S. chr. (*) Danty sur Boiceau, TV. des preuves, ch. VII, n! 5, s. ; Despeisses, Du commo- dat, § 3, n. 7. — V. Guillouard, loc. cil. (') Arrêts de Paris cités par Danty. loc. cit. (»)N.8. «) Guillouard, n. 10 et 22. 6; Pont, I, n. 27 et 28. 360 DU PRÊT A USAGE SECTION VI OBLIGATIONS DE L'EMPRUNTEUR 632. Le prêt à usage fait naître à la charge de l'emprun- teur trois obligations principales : celle de veiller à la chose et de répondre de sa perte et de sa détérioration, celle de ne se servir de la chose que pour l'usage convenu et de payer les dépenses nécessitées par l'usage, celle de restituer la chose. £ 1. Responsabilité de l 'emprunteur ■. 633. « L'emprunteur est tenu de veiller en bon père de » famille à la garde et à la conservation de la chose prêtée » (art. 1880, 1" partie). L'emprunteur est donc tenu de la culpa levis in abstracto ('). C'est le droit commun. L'art. 1882 vient toutefois aggraver cette responsabilité dans une certaine me- sure, ainsi que nous le montrerons. Polhier admettait môme que le commodalaire était tenu de sa faute très légère : « Il ne suffit pas, disait-il, qu'il y apporte un soin ordinaire, tel que celui que les pères de famille ont coutume d'apporter aux choses qui leur appartiennent; il doit y apporter tout le soin possible, c'est à-dire celui qu'ap- portent à leurs affaires les personnes les plus soigneuses et il est tenu à cet égard, non seulement de la faute légère, mais encore de la faute la plus légère (2). Cette opinion a été reproduite parquelques auteurs moder- nes ('), mais elle est complètement inadmissible. L'autorité de Pothier tourne contre elle, car, alors que Pothier exigeait du commodataire les soins du meilleur père de famille, le code ne lui demande que ceux d'un bon père de famille et mani- feste ainsi l'intention de rompre avec la solution de Pothier. D'un autre côté, d'après le droit commun, dont l'expression (') Troplong, n. 77 s.; t'ont, I, n. 7(5 s.; Laurent, XXVI, n. 471; Guillouard, n. 33 et 34; Hue, XI, a. 157. ('-) N. 48. — Dans le môme sens Argou, loc. cit., p. 310. — Certains textesdisent simplement que l'emprunteur est tenu. Anciens usages de Bourgof/ne (XlVe ou XV" s.), Kev. hist. du dr., III, 1857, p. 542, ch. XVI. 3} Durauton, XVII. a. 121 s. ; Duvergier, n. 55 s. RESPONSABILITÉ DE L'EMPRUNTEUR «%1 se trouve dans Part. 1137, un débiteur quelconque n'est tenu que de sa faute légère, et ce texte prend soin de se référer, en particulier, au cas où l'acte n'a pour objet que l'utilité de l'une des parties. Enfin la solution de Polhier se compren- drait aussi peu aujourd'hui qu'elle se comprenait bien dans l'ancien droit, où on admettait que celui qui recevait un ser- vice était, d'une manière générale, tenu de sa faute très légère. En tout cas, si la perte ou les détériorations sont le résul- tat d'une faute légère commise par l'emprunteur, il va de soi qu'il en est responsable : c'est le droit commun, et l'emprun- teur est tenu de la faute que ne commettrait [\as un bon père de famille, de la culpa levis in abstracto. 634. Gomme tout débiteur, l'emprunteur ne doit réparer que les suites immédiates de sa faute ('). 635. L'emprunteur n'est pas responsable des pertes et dé- tériorations résultant d'un cas fortuit ou de la force majeure; c'est le droit commun (*). C'est à l'emprunteur qu'il appartient, comme à tout débi- teur (C. civ., art. 1302), de prouver le cas fortuit qui le li- bère (3). Il peut le prouver soit directement en alléguant un événe- ment déterminé qui constitue le cas fortuit ('), soit indirec- tement en établissant qu'il a apporté à la chose les soins d'un bon père de famille (:1), ou qu'elle était affectée d'un vice qui vraisemblablement explique la détérioration ou la perte (6). 636. L'incendie n'est pas, par lui-même, un cas fortuit dont la preuve libère l'emprunteur; ce dernier doit établir la 1 Trib. civ. Liège, 24 août 1894, Pasicr., 94. 3. 328 (le prêteur d'une voilure ne peut réclamer ce qu'il a dû payer pour location d'une autre voiture, pendant que la voiture prêtée était en réparation). (2) Cass. req., 28 janv. 1890, D., 91. 1. 24 Colmot de Santerre, VIII, n. 82 bis, II et III; Guillouard, n. 37. RESPONSABILITÉ DE l.'l.Mllil M M R 363 Dans tous les cas. l'emprunteur est, comme le disait Po- thier ' . responsable de la perte de la chose m. dans le but d'employer exclusivement l'objet prêté, il a dissimulé .ni préteur l'existence de sa propre chose (*). Mais l'emprunteur u'encourl aucune responsabilité s'il a été formellement autorisé à employer exclusivement la chose prêtée. Il en est de même s'il a prévenu le prêteur que l'emprunt était destiné à lui éviter l'emploi de sa propre chose (3). 641. Le second cas prévu par l'art. 1882 est assimilé par la loi au premier. La chose prêtée et une autre chose appar- tenant à l'emprunteur sont en danger de périr par suite d'un même cas fortuit, une inondation par exemple; ne pouvant sauver que l'une des deux choses, l'emprunteur sauve la sienne. Il sera responsable de la perte de l'autre, parce qu'il est en faute de ne pas l'avoir sauvée. En effet, tenu envers le prêteur, qui lui a procuré un avantage purement gratuit, du devoir de reconnaissance, l'emprunteur devait se préoc- cuper d'abord des intérêts du prêteur * . 11 a.donc manqué aux lois de la délicatesse en mettant ses propres intérêts au premier plan. Ce ne serait pas une faute dans un contrat ordinaire; c'en est une ici, à cause du caractère particulier du comniodat, qui est un contrat de bienfaisance. Celle solution était également donnée par le droit ro- main 5 et par Polluer ° . Ce dernier auteur la rattachait à l'idée que le commodataire est tenu de sa faute très légère : cette idée est aujourd'hui inexacte et, d'ailleurs, elle est étran- gère à la question, car le meilleur père de famille ne peut être blâmé, ni être réputé avoir commis une faute, s'il pré- fère sa chose à celle d'autrui. 642. 11 n'y a faute de la part de l'emprunteur qu'autant qu'il a préféré sauver sa propre chose.: ce qui suppose qu'il ('] N. 59. (*) Colmet de Santerre. VIII, n. 82 bis, II et III: Guillouard, n. 37. i3 Guillouard, n. 37. li Troplong, n. J16; Duvergier, n. 66: Laurent, XXVI, n. 474; Guillouard, n. 38; Hue, XI, n. 160. K') L. 5, § 4, D., Commod. vel contra, 13. 6. (•) N. 56. 360 bC PRET A USAGE a pu choisir cuire sa chose cl celle du prêteur. Si doue, au milieu du désordre et du tumulte causé par un cas de force majeure, l'emprunleur a pris, pour les sauver, tous les ob- jets qui se sont présentés sous sa main, et que la chose prêtée ne se soit pas trouvée comprise dans le lot formé par le hasard autant et plus que par la volonté de l'emprunteur, il ne sera pas responsable de la perte ('). C'est ce que disait déjà Polhier v-). 643. .Mais s'il a librement choisi sa propre chose, nous croyons qu'il n'échappera pas à la responsabilité que la loi lui inflige, en prouvant qu'elle était d'une valeur plus consi- dérable que la chose prêtée, bien qu'en la sauvant de préfé- rence il n'ait fait que ce qu'aurait fait un bon père de famille. C'était la solution admise par Pothier (•}, et c'est celle que parait commander encore la généralité des termes de la loi (v). Le motif sur lequel est fondé l'art. 1882 y conduit également, car si la reconnaissance, qui est un devoir pour l'emprunteur, lui impose de sauver la chose prêtée au détriment de la sienne propre, la valeur comparative des deux choses n'est d'aucune importance. C'est donc a tort qu'on se récrie devant l'énor- mité de ce sacrifice. 644. Nous croyons, quoique ce ne soit pas aussi certain, (pie l'art. 1881 doit être considéré comme se rattachant au même principe. Voici tout d'abord le texte : « Si l'emprunteur emploie la » chose à un outre usage, ou pour un temps plus long qu'il » ne le devait, il sera tenu de la perte arrivée, même par cas » fortuit ». Cette solution était donnée par l'ancien droit (5). L'emprunteur qui emploie la chose à un autre usage ou pour un temps plus long qu'il ne le devait, commet une faute. Si la chose prêtée périt par suite d'un cas fortuit, auquel elle ne se serait pas trouvée exposée sans cette faute, la perte est ■) Guillouard, n. 39. H N. 56. N.56. • Troplong, n. 117 ; Pont, I, n.95; Guillouard, n. 39; Hue, XI, n. 160. — Con- tra Duranton, XVII, n. 527 ; Duvergier, n. 68; Laurent, XXVI, n. 174. Argou, lue. cil., p. 310 (cheval prêté pour faire un voyage de deux heures et auquel on fait faire un voyage de trente heures pendant lequel il est volé). aESPONSABILITÉ DK L 'EMPRUNTEUR 'M\l la conséquence au moins indirecte do la Cuite do l'emprunteur, el il est juste de l'en rendre responsable. Mais on ne voit pas trop comment l'emprunteur pourrait être déclaré responsable s'il n'existe aucun lien entre la faute qu'il a commise et le cas fortuit qui a fait périr la chose. Aussi croyons-nous «pie l'article sous-entend que ce lien doit exister. Kn d'autres termes, il nous paraît que l'emprunteur, qui est en faute pour avoir employé la chose à un autre usage ou pour un temps plus long qu'il ne le devait, pourrait échapper à la responsabilité de la perte par cas fortuit, en démontrant que la chose eût péri alors même qu'il n'aurait pas commis la faute ('). On peut invoquer par analogie en ce sens l'art. 130:2 G. civ., qui le décide ainsi d'une manière géné- rale pour toute personne en demeure de restituer une chose, et qui n'admet le contraire que pour le voleur. Ainsi, ayant emprunté un cheval pour un voyage déterminé, je lui fais faire un autre voyage, l'employant ainsi à un autre usage que celui pour lequel il m'a été prêté; ou bien ayant emprunté un cheval pour huit jours, je continue à m'en servir après l'expiration du délai. L'animal périt par cas fortuit. Si c'est par le feu du ciel, je serai responsable de la perte; car l'animal n'aurait pas été victime de ce cas fortuit, si je l'avais employé pour faire le voyage convenu ou si j'avais cessé de m'en servir après l'expiration du temps fixé. Mais, si l'animal est mort subitement d'une maladie qui l'aurait aussi bien fait périr dans son écurie, je ne serai pas responsable. Et toutefois celte interprétation est contestée : plusieurs pensent que l'article doit être entendu comme rendant l'em- prunteur responsable de tous les cas fortuits indistinctement, même de ceux qui n'ont aucun lien avec la faute commise. — Nous ne nous expliquerions pas que la" loi eût déployé une pareille rigueur contre l'emprunteur, d'autant plus que bien souvent il aura pu penser que le prêteur ne désapprouverait pas sa conduite. l' i Duranton, XVII, n. 520; Troplong, n. 101 ; Duvergier, n.64; Laurent, XXVI, n. 470; Colmet deSanlerre, VIII, n. 81 bis, II et III; Guillonarri, n. 30: Hue. XI, n. 158. — Contra Font, 1, n. 73; Aubry et Rau, IV, p. 596, § 392, note 2. 308 DU PRÊT A USAGE Notre solution est admise par certains codes étrangers ('). 615. L'emprunteur qui a employé la chose prêtée en dehors de l'époque ou de l'usage convenus est responsable du cas fortuit même alors qu'il n'a pas été mis en demeure (2); l'art. J881 est, en effet, muet sur la nécessité d'une mise en demeure; du reste, il est souvent impossible au prêteur de savoir quelle a été la destination de la chose. On ne peut opposer le droit commun, d'après lequel le débiteur n'est tenu du cas fortuit qu'à partir de sa mise en demeure (C. civ., 1302), car cette dernière solution n'est donnée que pour le débiteur' qui s'abstient de payer lors de l'échéance. Il y a sur ce point une grande confusion dans les explications des au- teurs. La plupart se demandent, d'une manière générale, s'il est nécessaire que l'emprunteur soit mis en demeure pour qu'on puisse lui appliquer l'art. 1881. La question n'a pas de sens, parce qu'on ne peut songer à mettre en demeure qu'un débiteur qui est en retard d'exécuter son obligation et qu'on veut rendre responsable de toutes les conséquences préjudi- ciables de son retard. Or, dans les cas prévus par l'art. 1881, l'emprunteur peut n'être pas en retard; et, s'il est en retard, on ne le recherche pas à raison de son relard, mais à raison d'une faute qui consiste à avoir employé la chose à un autre usage que celui qui était convenu ou à s'en être servi après l'expiration du temps fixé. Il ne peut donc pas être question de mettre le débiteur en demeure. Il ne faut pas confondre cette hypothèse avec celle où l'emprunteur, sans se servir de la chose, la garde au-delà du temps convenu [3). 646. La faute que prévoit l'art. 1881 et à raison de la- quelle L'emprunteur est rendu responsable du cas fortuit, consiste, soit à s'être servi de la chose pour un usage autre que celui qui était convenu, soit à en avoir usé après l'expi- ration du temps fixé. La loi ne prévoit pas le cas où l'em- prunteur, après s'être servi de la chose pour l'usage convenu, la garderait au-delà du temps fixé, sans continuer à s'en ser- (') Suisse, C. féd., ait. 322. 1 Laurent. XXVI, n. 469; Guillouard, n. 31 : Hue, XI, n. 159. 3 V. infra, n, 646 et 658 bis. OBLIGATIONS DE L'EMPRUNTEUR USAGE 369 vir, le cas, en d'autres termes, où il n'j aurait rien autre à lui reprocher qu'un retard dans la restitution. Celle hypothèse resterai! donc de tous points soumise aux règles du droit, commun, c'est-à-dire que l'emprunteur ne deviendrait res- ponsable des cas fortuits qu'à partir du moment où il aurait été mis en demeure de restituer ('); et encore ne répondrait- il, conformément à l'art. 1302, que de ceux qui seraient une conséquence de sa demeure, à l'exclusion de ceux qu'il prouve être de telle nature qu'ils se seraient également produits chez le prêteur (2). 647. Dans le cas où l'emprunteur est tenu de la perte ou de la détérioration de la chose, il peut exercer les actions qui, dans le cas où il n'en aurait pas été tenu, auraient pu être exercées contre les tiers par le prêteur. Ces actions lui appartiennent de plein droit. Dans certaines législations, il est obligé de requérir la ces' - si on ) Guillouard, n. 4(J. (s) Guillouard, n. 40 ; Hue, XI, n. 115. (3) Allemagne, Rivier, lac. cit. (M Rivier, loc. cil. (Cet auteur parle de la restitution des dommages-intérêts ou de la chose elle-même, sans dire à qui appartient le choix). Société, prêt, dépôt. — 2e éd. '-' i 370 DU PRÊT A USAGE il pourra s'en servir pour transporter du fumier; mais si je la prête à un marchand de comestibles, il n'aura pas le droit de l'employer à cet usage. Tout ce que nous venons de dire est contenu en substance dans la deuxième partie de l'art. 1880, qui formule en outre une sanction sur laquelle nous allons avoir à nous arrêter. « // [l'emprunteur] ne peut .s'en servir [de la chose prêtée^ » qu'à l'usage déterminé par sa nature ou par la convention; » le tout à peine de dommages-intérêts, s'il ij a lieu ». Les mots s'il y a lieu signifient : si l'usage abusif de la chose par l'emprunteur a causé un préjudice au prêteur. Il n'est plus possible aujourd'hui d'admettre avec le droit romain (l) et Pothier (*) que l'emprunteur puisse donner à la chose un usage non déterminé par la nature de la chose ou de la convention, s'il pouvait légitimement croire «pie cet usage aurait été autorisé par le prèleur M. Ouoique le commodat soit, en général, un contrai de bienfaisance, les principes interdisent à l'emprunteur de substituer à la convention sa simple volonté, et les termes formels de l'art. 1880 défendent également d'assimiler cette volonté unilatérale à la volonté commune. Nous verrons plus loin que l'emprunteur ne peut conférer à un tiers le droit de se servir de la chose (*). 649. Là question de savoir si, en cas d'usage abusif, le prêteur peut demander la résolution du contrat se rattache à un problème plus général, celui de savoir si le droit de réso- lution accordé par l'art. 1184 contre la partie qui n'exécute pas ses obligations, existe non seulement dans les contrats synallagmatiques, mais encore dans les contrats unilatéraux. (') L. 76, D.. De furt., 47. 2. (*) « Si quelqu'un m*a prêté à Orléans un cheval pour aller à Beaugency, je ne puis pas m'en servir pour aller plus loin. Mais si. étant arrivé à Beaugency, il m'est survenu une affaire plus loin, que je n'avais pas prévue lorsque j'ai emprunté le cheval et que les relations d'amitié que j'ai avec celui qui me l'a prêté, et la con- naissance que j'ai de son caractère obligeant me donnent lieu d'être persuadé qu'il ne m'aurait pas refusé son cheval pour aller jusqu'au lieu où celle affaire m'est sui\enue, je uis m'en servir pour aller jusque-là ». Pothier, n. 98. (') Duranton, XVII, n. 518; Pont, I, n. 70; Guillouard, n. 28. — Contra Trop- long, n. 98. («) V. infra, n. 680. OBLIGATIONS DE l'eMPRI m il R RESTITUTION .'{"1 L'affirmative est généralement admise; ainsi, la résolution est permise {*). 650. Si l'emprunteur se sert de la chose prêtée pour un usage autre que l'usage voulu par les parties, il commettait en droil romain un furtum usas. Cette solution était égale- ment admise dans l'ancien droit; elle est consacrée par le droit commun allemand (-). Elle n'est plus exacte dans notre droit. Dans ce cas, le profit qu il tire de l'usage illicite appartient au commodant (3). Nous avons vu enfin que l'emprunteur qui use de la chose contrairement à sa destination est tenu de la perte même fortuite (4). 651. L'emprunteur contracte l'obligation de supporter les dépenses nécessitées par l'usage; nous reviendrons sur ce point (sj. § III. Restitution de la chose. I. Epoque de la restitution.' 652. « Le prêteur ne peut retirer la chose prêtée qu'après » le terme convenu, ou, à défaut de convention, qu'après » qu'elle a servi à l'usage pour lequel elle a été' empruntée » (art. 1888) (6). Ainsi je vous prête une cuve pour faire cuver vos raisins ; je ne pourrai la reprendre que lorsque le vin sera fait. De son côté l'emprunteur doit restituer la chose après en avoir fait l'usage convenu, ou même avant de s'en être servi, si le prêt a été fait pour un certain temps et que ce temps soit écoulé. Dans le cas même où un terme a'été fixé, la restitution peut, si l'usage a été terminé avant ce délai, être immédiate- (') Duvergier, n. 54; Guillouard, n. 32; Hue, XI, n. 159. — Contra Laurent, XXVI, n. 467. - llivier, loc. cit. (:,j Rivier, loc. cit. ' V. supra, n. 644. (5j V. infra, n. 664 s. [6i Pour la sanction, v. supra, n. 646. 372 DU PRÊT A USAGE ment exigée ^.C'était la solution de Pothier(*); il en donnait cette excellente raison que le délai a été fixé comme un maxi- mum de temps au bout duquel l'usage devrait être terminé. Nous dirons plus loin que la mort de l'emprunteur ne rend pas en principe la chose restituable (s). 653. Si la chose n'a pas été prêtée pour un usage déter- miné et que la durée de l'usage n'ait pas été fixée, le com- inodant peut réclamer la chose quand cela lui convient (4). Toutefois il ne peut la réclamer intcmpestivement (3), et cela même s'il en a besoin (6). Le commodat se distingue en cela du précaire . 654. Si la durée du prêt n'a pas été fixée, il n'en résulte pas, quoi que puissent faire croire les termes de l'art. J888, que l'emprunteur puisse éternellement la prolonger en retar- dant l'usage; les tribunaux détermineront le terme au bout duquel l'usage devra être effectué ^). Par exception, comme nous l'avons montré, il peut arriver que la restitution doive avoir lieu avant le terme fixé, si le prêt portait sur la chose d'autrui ('). 655. Il va sans dire que le commodant peut se réserver la faculté de reprendre, au moment où il le voudra, la chose prêtée (10). Dans ce cas. le commodat se rapproche du précaire et même, d'après certains auteurs, s'identifie avec lui ("). (■) Guillouard, II, n. 46. -' n Si je vous ai prêté un manuscrit pour quinze jours, alin d'en tirer une copie et qu'au bout de huit jours vous ayez achevé cette copie, je puis vous demander que vous me rendiez mon manuscrit sans attendre la tin des quinze jours », n. 46. (s) V. infra, n. 676. (*) Guillouanl, n. 55: Rivier, loc. cit.; Hue. XI, n. 104. — M. Guillouard, loc. cit., trouve l'hypothèse très peu pratique, ce n'est pas encore notre avis : il arrive fréquemment que l'emprunteur n'indique pas au prêteur l'usage qu'il entend faire de la chose. ^5) Rivier, loc. cil. (6) Rivier, loc. cil. [') Rivier, loc. cil. (8) Laurent, XXVI, n. 478; Guillouard, n. i6. — Cpr. Colmar, 8 mai 1845, S., 47.2. 117, D., 46. 2. 219. (9) Y. supra, n. 622. (10) Troplong, n. 28: Duvergier, n. 124: Pont, I. n. 115: Aubry et Rau, IV, p. 594, §391, note 5; Colmet de Santerre, VIII, n. 75 bis; Laurent, XXVI, n. iTn'. : Guillouard, n. 21. (") V. infra, n. 682. OBLIGATIONS DE [/EMPRUNTEUR RESTITUTION 373 656. L'art. 1880 porte : « Néanmoins, si, pendant ce délai h ou avant que le besoin de l emprunteur ait cessé, il survient « au prêteur un beso in pressant et imprévu de sa chose, le juge ■• peut, suivant les circonstances, obliger l'emprunteur à la lui » rendre •>. Cette solution est empruntée à Pothier '). La justification qu'il en donnait, et qui a été reproduite par les travaux pré- paratoires (!), est que personne n'est « présumé vouloir faire plaisir à un autre à son préjudice », de sorte que la règle de l'art. 1880 peut être considérée comme reposant sur la con- vention tacite des parties. On l'a critiquée cependant (3) en rappelant que le donateur ne peut, sous prétexte qu'il a be- soin de la chose donnée, revenir sur la donation. Mais les situations ne sont pas les mêmes : le donateur transmet la propriété, c'est-à-dire fait un acte définitif; le commodant ne consent qu'à une transmission temporaire et rend un service qui ne lui cause aucun préjudice; du jour où ce service lui préjudicie, il peut, sans injustice, y mettre fin. Le rôle du juge consiste tout d'abord à -apprécier si, en etl'et, le commodant a besoin de sa chose; et le tribunal qui ordonnerait la restitution de la chose prêtée sans constater ce besoin, ou en déclarant que le besoin n'existe pas. encourrait la censure de la cour de cassation. Mais le juge est également chargé d'apprécier la nature et le degré du besoin et peut dispenser l'emprunteur de la res- titution si le besoin du prêteur lui parait insignifiant. Ce droit du juge résulte des termes généraux de l'art. 1880 et aussi des travaux préparatoires; ils constatent que, même en cas de besoin du prêteur, la restitution « dépend du juge, par qui elle peut être ou non accordée suivanties circonstances qu'il doit peser » (;). 657. La disposition de l'art. 1880 repose sur cette considé- ration que le prêteur n'a pu vouloir rendre service à ses pro- pres dépens; aucune considération semblable ne peut être 1 N. 25; Guillouard, n. 48; Pont, I, n. 117 s. ^'-) Exposé des motifs de Galli, Fenet, XIV, p. 451. (») Laurent, XXVI, n. 479; Hue, XI, n. 164. 4i Exposé des motifs de Galli, Fenet, XIV, p. 451. 374 DU PRÊT A USAGE invoquée en faveur de l'emprunteur; ce dernier ne peut donc garder la chose après le terme fixé, même avec l'autorisation du tribunal, si l'usage n'en est pas terminé, si la restitution doit lui causer un préjudice sérieux, et si la prolongation du prêt ne cause aucun préjudice au prêteur (') ; l'emprunteur est, du reste, lié par le contrat, qui lui impose la restitution au terme fixé; enfin l'équité ne milite pour lui qu'en appa- rence, caril est injuste, alors que le prêteur a rendu un service purement gratuit, de l'obliger à rendre un service plus grand encore. C'est une objection bien singulière que de dire que le tribunal interprétant le contrat dans un sens différent ne fait qu'apprécier la volonté des parties; on ne peut, sans dénatu- rer cette volonté, prolonger une convention au delà du ternie expressément fixé. Songerait-on à donner le même droit au tribunal dans le contrat de louage? Evidemment non; et l'on sait que le commodat n'est qu'un louage où le locataire reçoit un service gratuit et, par suite, doit être tenu beaucoup plus scrupuleusement encore que dans le louage de respecter la convention. L'autorité de Pothier (2), qu'on a invoquée en sens contraire, est insignifiante, car Pothier n'était pas lié par un texte; d'autre part, il se basait « sur les devoirs de l'amitié qui ont porté le prêteur à faire le prêt » ; ce qui revient à dire que par cette seule raison que le prêteur s'est montré généreux, il doit se montrer plus généreux encore. En parlant du raisonnement de Pothier, on doit admettre que, même alors que la prolongation de l'usage nuit au prê- teur, cette prolongation peut être ordonnée par le juge si la restitution immédiate est de nature à causer un préjudice plus grand à l'emprunteur: c'est en effet ce que décidait Pothier et ce que décident encore les partisans modernes de son opi- nion, mais ces derniers, comme sur la question précédente, dispensent l'emprunteur de toute indemnité (3), tandis que Pothier exigeait une indemnité. (') Troplong, n. 148 s.; Laurent, XXVI, n. 477. — Contra Pont, I, n. 111 ; < iuillouard, n. 49 (*) N. 28. (») Guillouard, n. 49. OBLIGATIONS DE I. l HPRI M Kl H -- RESTITUTION •'{'•"> 658. Dans ions les cas, il est certain que l'emprunteur ne peut jamais être autorisé à garder la chose prêtée pour des besoins nouveaux qui lui sont survenus en dehors «le l'usage en vue duquel le prêt a eu lieu ('). 658 bis. L'emprunteur qui garde la chose au delà du temps convenu n'est tenu de dommages-intérêts, conformément au droit commun, que s'il est mis en demeure de restituer (') ; il en est autrement cependant, comme nous l'avons dit, si l'em- prunteur se sert de la chose après le terme fixé (3). II. Personnes, à qui la restitution est faite. 659. La restitution doit être faite au prêteur lui-même ou à ses représentants (*). V a-t-il exception pour le cas où l'em- prunteur découvre que la chose est à autrui? C'est ce que nous avons déjà examiné (5). III. Lieu de la restitution. 660. Sur le lieu de la restitution la convention est évidem- ment souveraine (*); à défaut de convention, la restitution doit être faite au domicile du prêteur, par interprétation de la volonté des parties (7). Cependant, avec Pothier (8), divers auteurs (9) admettent que si, depuis le prêt, le prêteur a transporté son domicile dans un endroit éloigné, l'emprunteur n'est pas obligé d'y opérer la restitution, car c'est là un fait étranger au débiteur, et ce dernier ne peut être tenu au delà des obligations qu'il a contractées. Ce sont là des considérations inexactes, car elles aboutissent à une solution qui contredit les principes et, au surplus, elles pourraient être invoquées avec la même force par tout débiteur. [*) (iuillouard, n. 49. ri V. supra, n. 646. (3) V. supra, n. 645. (*) Guillouard, n. 50. (5) V. supra, n. 621. (s) Guillouard, n. 50. C) Guillouard, n.50. (8) Pothier, n. 37. . (9) Troplong, n. 109; Guillouard, n. 50. 37G DL' PRÊT A USAGE D'un autre coté, si, au lieu d'être remis à l'emprunteur. l'objet prêté a été cherché par lui dans l'endroit où l'objet se trouvait, on admet, toujours avec Polluer ('), que la restitution doit être faite en cet endroit, parce qu'elle doit être opérée de manière à causer les moindres ennuis au prêteur (-). IV. Actions en restitution. 661. Pour obtenir la restitution de la chose prêtée, le prê- teur a dans tous les cas une action personnelle née du prêt. Cette action ne peut être exercée que contre l'emprunteur et ses ayants cause universels (arg. art. 1122 et 1105) ; elle se prescrit par trente années (arg\ art. 2262). En outre, si le prêteur est propriétaire de la chose prêtée, il peut la réclamer par l'action en revendication; car le prêt ne lui fait pas perdre son titre de propriétaire, ni les avanta- ges attachés à ce titre. L'action en revendication du prêteur peut être exercée, non seulement contre l'emprunteur et ses ayants cause universels, mais aussi contre les tiers détenteurs. Le défendeur, quel qu'il soit, ne peut y échapper qu'autant qu il est en mesure d'invoquer la prescription acquisitive. C'est dire que l'action pourra réussir même après trente ans contre l'emprunteur ou ses héritiers, qui ne peuvent pres- crire par quelque laps de temps que ce soit, à cause de la précarité de leur possession art;, art. 2230 et 2237 . Autre est la situation du tiers détenteur : il prescrit d'après les règles du droit commun, c'est-à-dire, suivant les cas, soit par trente ans art. 2202 . soit par dix à vingt ans (art. 2265 . Il peut même invoquer la maxime En fait de meubles la posses- sion vaut litre art. 2279], s'il ajuste titre et bonne foi et qu'il s'agisse d'un objet mobilier corporel. Dans tous ces cas, l'ac- tion en revendication du prêteur pourra se trouver paralysée. j; IV. De la solidarité entre les emprunteurs. 662. Aux termes de l'art. 1887 : « Si plusieurs ont eonjoin- » tement emprunté la même chose, ils en sont, solidairement N. 36. - Bordeaux, 29 août 1897, D.,9^. 2. 22s. — Troplong, n. 108; Otiillouard, n. 50. 0BL1GA riONS DO PBÊTE1 n I SAGE 377 - responsables envers le prêteur ». C'esl une règle tradition- nelle ('). Cette solidarité existe notaihmenl en cas de faute commise par l'une des parties. (2). La solidarité n'existe pas entre les différents héritiers du débiteur (*) ; c'est l'application du droit commun, elle était déjà faite par Pothier (*). g y. Droit 'international. 662 bis. Conformément aux principes généralement recon- nus, on doit appliquer aux obligations de l'emprunteur la loi qui régit les effets des conventions, c'est-à-dire la loi nationale commune des parties et, si elles n'appartiennent pas à la même nationalité, la loi du lieu où le contrat a été passé (3). SECTION VII DROITS ET OBLIGATIONS DU PRETEUR £ I. Obligations relatives à V usage. 663. La première obligation du prêteur, sur laquelle nous avons suffisamment insisté déjà, est de n'apporter aucun obs- tacle au droit, qui appartient à l'emprunteur, de faire usage de la chose pendant le temps expressément ou tacitement convenu; cette obligation résulte des art. 1888 et 1889. Mais le prêteur n'est pas obligé de faire jouir, ni même de faire user l'emprunteur de la chose (6). Au reste, il ne s'agit pas là d'une véritable obligation (7), ') L. 5, § 15, D., Commod. vel contra, 13.6: Pothier, n. 05. '-', Cpr. Guillouard, n. 4i. (••») Pont, I, n. 106; Guillouard, n. 44. 1 N. 65. \*} V. cep. Albéric Rolin, l'rinc. du dr. inl. priv., III, n. 1343, d*après lequel il y a lieu d'appliquer la loi nationale ou du domicile du prêteur parce que, le prê- teur rendant un service gratuit, on doit avoir égard à ses intentions. i,6) Pothier, n. 76. (7) Laurent, XXVI, n. 456 et 481 ; Colmet de Santerre, VIII, n. 91 bis; Guil- louard, n. 55. 378 DU PRÊT A. USAGE mais bien d'une absence de droit, de ce que Polhier (') appelait « une obligation négative ». S'il en était autrement, la con- vention serait synallagmatique, puisque l'interdiction dont parle l'art. 1888 est inhérente au commodat. § II. Droits et obligations relatifs aux dépenses. I. Cas où tes dépenses incombent au prêteur ou à l'emprunteur. 664. « Si », porte l'art. 1890, « pendant la durée du prêt, » V emprunteur a été obligé, pour la conservation de la chose, » à quelque dépense extraordinaire, nécessaire , et tellement » urgente qu'il n'ait pas pu en prévenir le prêteur, celui-ci » sera tenu de la lui rembourser ». Il semblerait résulter de là que si l'emprunteur avait le temps de prévenir le prêteur, et a fait la dépense sans en informer ce dernier, cette dépense reste toute entière à sa charge. Cette solution est trop contraire au droit commun pour pouvoir être acceptée; l'art. 1890 vise les dépenses nécessaires : or il est de principe que les dépenses nécessaires doivent être remboursées pour leur intégralité à celui qui les a faites (!). Telle était, du reste, la solution de l'ancien droit (3). Ce sont par exemple les frais de maladie de l'animal prêté (*). 665. 11 n'y a entre l'hypothèse expressément prévue par 1 art. 1890, et celle où l'emprunteur n'a pas eu le temps de prévenir le prêteur qu'une seule différence, et c'est elle peut- être qui explique la rédaction de l'art. 1890. Si l'emprunteur n'a pu prévenir le prêteur, il a contre lui une action en indem- nité, même si le prêteur a, avant que le remboursement ne soit etTectué, abandonné la possession à un tiers reconnu pro- priétaire de l'immeuble; c'est à cette solution que conduisent les termes généraux de l'art. 1890. Au contraire si l'emprunteur, pouvant prévenir le prêteur, ne l'a pas fait, il n'a pas, dans cette même hypothèse de délaissement, le droit d'agir contre le prêteur; il ne peut agir ■)N.77. (2) Conlra Guillouard. n. 56. (*) Argou, loc. cil., p. 310. ') Argou, loc. cit. OBLIGATIONS l>l PRÉTEUR — 6ÉPEN8E8 379 que contre le véritable propriétaire; c'est l'application des règles de la gestion d'affaires. 666. Il semblerait, d'après l'art. 1890. que 1rs dépenses uti- les, par exemple lés dépenses d'amélioration, ne sont pas sujettes à remboursement; cette solution nous parait éga- lement Irop contraire au droit commun pour pouvoir ôtre admise; l'emprunteur a donc le droit d'exiger le rembour- sement de la plus-value procurée à la chose par les dépenses utiles qu'il a faites ('). 667. Mais les dépenses ordinaires, « qui sont, comme le disait Pothier (-), une charge naturelle du service que l'em- prunteur tire de la chose », c'est à-dire les dépenses d'entre- tien, demeurent à la charge de l'emprunteur, alors même qu'elles seraient nécessaires pour la conservation de la chose. » Si, pour user de la chose, l'emprunteur a fait quelque dé- pense » dit l'art. 1886, « il ne peut pas la répéter » (3). « Par exemple dit Pothier ('», si je vous ai prêté mon cheval pour faire un voyage, vous êtes obligé de le nourrir et de l'entre- tenir de fers à vos dépens, celte dépense ordinaire étant une charge de la jouissance que vous en avez ». II. Action en paiement des dépenses. 668. Le prêteur est tenu sur tous ses biens, conformément à l'art. 2092, de L'obligation de rembourser les dépenses; il ne peut donc y échapper en abandonnant à l'emprunteur la chose prêtée (3) ; c'est ce que disait Pothier i^6). 669. Pothier s'exprime ainsi (7) : » L'emprunteur, pour le remboursement qui lui est dû des impenses extraordinaires qu'il a faites pour la conservation de la chose qui lui a été prêtée, a un privilège sur celte chose pour ses impenses; il a même le droit de la retenir, veluti quodam pignoris jure, }us- (l) Contra Guillouard, n. 50. (*) N. 8) . — Guillouard, n. '»5 et 56. (3) Allemagne, Rivier, lue. cit. — Espagne, C. civ., ait. 1889. — Suisse. C. fétl., art. 323. (*) Loc. cil. — Argon, loc. cil., p. 310 ; Guillouard, n. 45. (8) Troplong, n. 162; Pont, I, n. 123: Guillouard, n. 57. (•) N. 83. (7) N. 43 et 82. 380 DU PRÊT A USAGE qu'à ce que le prêteur qui demande la restitution de la chose les lui ait remboursées ». Ainsi Pothier accorde ici à l'emprun- teur un privilège, et. comme auxiliaire de ce privilège, un droit de rétention. Notre législateur a maintenu le privilège (au moins lorsque la chose prêtée est mobilière, ce qui arrive presque toujours; voyez l'ait. 2102-3') ' . A-t-il maintenu aussi le droit de rétention? Aucun texte ne le consacre. De là une controverse. Parmi ceux qui veulent que le droit de rétention ne soit pas accordé à l'emprunteur, quelques-uns invoquent l'art. 1885, qui selon eux aurait été écrit tout exprès pour refuser ce droit à L'emprunteur. Ce texte est ainsi conçu : « L'em- » nrunteur ne peut pas retenir la chose par compensation de » ce que le prêteur lut doit •>. Xous croyons que l'art. 1885 est tout à fait étranger au droit de rétention ; il parle de compensation (»), et n'est, ànotre avis, qu'une répétition inutile d'une disposition inutile elle-même, celle de l'art. 12932°. Si le législateur avait écrit ce texte, comme on le prétend, en vue de refuser à l'emprunteur le droit de rétention, que Pothier lui accordait pour les dépenses nécessaires faites en vue de conserver la chose, il l'aurait vraisemblablement placé, non dans la section consacrée aux obligations de l'emprunteur, mais dans celle qui a trait aux engagements du prêteur, à la suite de l'art. 1890, dont l'art. 1885 auiait formé le complément naturel. On ne peut donc se fonder, en sens contraire, sur un passage des travaux pré- paratoires t^; où se trouve relatée une loi romaine qui refuse à l'emprunteur le droit de rétention (*). Pothier (8) citait d'ail- leurs cette loi et l'interprétait comme ayant simplement pour objet de rendre la compensation impossible : il est certain que les travaux préparatoires ont voulu exprimer la même idée. 1 Laurent, XXVI. a. 480; Guillouard, n. 61. (*j Dans une autre opinion, il concerne la demande reconventionnelle et défend au commodataire d'opposer une demande de ce genre avant que la demande prin- cipale en restitution soit jugée. Appleton, Hist. de la compensation en droit romain, p. 504. (* Exposé des motifs de Galli, Fenet, XIV, p. fôl. (*) L. 4, C, De commo'l.. i. 23. ») X. (i. OBLIGATIONS l»l PRÊTEUR — DÉPENSES .'{SI L'ail . 1885 . puisse causer du préjudice à celui gui s'en sert, le prêteur » est responsable, s'il Connaissait les défauts et n'en a pas » averti l'emprunteur » ^art. 1891) ('*). C'est une solution tra- ditionnelle (5). Ainsi je vous prête sciemment un cheval morveux, sans vous prévenir de la maladie dont l'animal est atteint; il la communique, ainsi qu'il était facile de le prévoir, à vos che- vaux, avec lesquels vous le mettez en contact, et tous meurent, •le serai responsable envers vous de ce préjudice, car il résulte de ma faute et même de mon dol. De même, comme le décidait le droit romain (6), la respon- sabilité du prêteur est engagée en cas de prêt de vases ou récipients gâtés (7). 672. Il résulte de l'art. 1891 que le prêteur n'est pas tenu du vice qu'il ignorait (s). Pothier était déjà en ce sens et il en était de même du droit romain (9). 673. Il faut, en outre, quoique la loi ne le dise pas, que 1 N. -ii. Troplong, n. 128; Duvergier, n. 91; Aubryet Rau, IV, p. 596, § 392, note 4; Colmet de Santerre, VIII, n. 85 bis, I s. ; Guillouard, n. 53. (3) Loc. cit. (♦) Allemagne, Ri\ ier, loc. cit. (•) L. 18, § 3, D., Commod. tel contra, 13. 6; Polhier, n. 84. (8) L. 18, § 3, D., Commod. tel contra, 13. 6. (; Guillouard, n. 58. (•; Loc. cit. SciensJ loc. cit. OBLIGATIONS D1 PftiTEUB — POSSESSION 383 l'emprunteur ;iif ignoré le vice, car, dans le « as contraire, il ne ['fui imputer qu'à s,» négligence le préjudice qu'il a sup- porté. La solution es! la même si l<> vice était apparent ' ; carie commodataire a dû le connaître: on peut, en outre, tirer un argument de l'art. 1642, qui dispense le vendeur de toute responsabilité à l'égard des vices apparents, quoique l'acqué- reur contractant à titre onéreux soit plus favorable que le commodataire. 674. Dans le cas exceptionnel où le prêt a été consenti dans l'intérêt exclusif du prêteur, ce dernier est tenu de sa faute légère, c'est-à-dire même des vices qu'il ignorait, l'art. 1891 ne s'expliquant que par la gratuité du service rendu (*). Il en est de même si le prêt a été fait en partie dans son intérêt (3). 674 bis. Nous avons déjà examiné si l'emprunteur a, pour la créance dont nous venons de parler, un droit de rétention sur la chose ('). § IV. Obligation relative à la restitution de la chose. 675. La loi, comme nous l'avons vu, range au nombre des obligations du prêteur la défense de demander la restitution de la chose avant le temps fixé (5). Il est donc responsable de ce que, la chose appartenant à autrui, l'emprunteur a dû la restituer avant Je temps fixé (6). § V. Possession de la chose. 676. L'art. 1877 porte que « le prêteur demeure proprié- taire de chose prêtée ». Cette disposition n'est applicable, (») Limoges, 12 nov. 1859, D., 60. 2. 51. — Troplong, n. 68; Pont, I, n. 130: Aubry et Rau, IV, p. 597, § 393, note 3 ; Laurent, XXVI, n. 483; Guillouard, n. 59; Hue, XI, n. 165. (- Rivier, loc. cit. (3I Rivier, loc. cit. * V. supra, n. 670. V. supra, n. 652. '" V. supra, n. 622. 384 DU PRÊT A USAGE comme nous l'avons fait remarquer, que si le prêteur était effectivement propriétaire de la chose prêtée. Le prêteur à usage ne conserve pas seulement la propriété de la chose prêtée, il en conserve aussi la possession. Le commodataire n'est qu'un possesseur précaire ; son titre im- plique, en effet, la reconnaissance du droit d'autrui : il pos- sède, non pas sibi, mais alii; aussi est-il du nombre de ceux qui, aux termes de l'art. 2236, « ne prescrivent jamais, par quelque laps de temps que ce soit ». Pour la même raison, si le prêteur n'est pas propriétaire, il conserve sur la chose le droit qui lui appartenait. Ainsi, un voleur prête la chose qu'il a volée; il continue à la pos- séder par l'intermédiaire de l'emprunteur et il pourra se pré- valoir de cette possession pour arriver à la prescription, qui ne s'accomplirait ici ;'i son profit que par trente ans, sa mau- vaise foi ne lui permettant pas d'invoquer l'art. 2279. Néanmoins, le commodataire peut, au nom du commodant, et comme ayant reçu la détention de la chose pour le compte du commodant, intenter les actions de ce dernier. Ainsi le commodataire peut revendiquer entre les mains d'un tiers la chose prêtée qui lui a été enlevée ('). 677. Le droit de jouissance de l'emprunteur sur la chose prêtée est un droit personnel comme celui du preneur et non pas un droit réel comme celui de l'usufruitier (*). Cette solu- tion, déjà donnée par Pothier (8), résulte de l'analogie que nous avons maintes fois signalée entre le bail et le commo- dat. S VI. Droit international. 677 bis. On appliquera, en matière de droit international, tout ce que nous avons dit à propos des obligations de l'em- prunteur (4). (') Trib. civ., Libourne, 0 mai 18U1, . — Douai, 23 août 1882, D., 85. 2. 1U5. — Grenoble, 18 mars 1887, précité (le prêt à un associé moyennant une part dans les bénéfices est une association). — Paris, 15 déc. 1892, Gaz. l'ai.. 93. 1, 2e p , 28 (est un prêt l'avance par un établis- sement financier à une société qui se l'onde, moyennant l'abandon d'une part des bénéfices au-dessus d'un certain chiffre; par suite, la réserve statutaire ne peut être augmentée au préjudice du prêteur). — Paris, 21 fév. 1891, Gaz. Trib., 30 août 1891. — Paris. 18 janv. 1893, Gaz. l'ai., 93. 1,2» p., 35 (est un prêt l'avance des frais d'installation d'un fonds de commerce avec la clause qu'après un an le fonds sera vendu et le prix partagé par moitié). — Trib. corn. Seine, 27 sept. 1890, Gaz. Val., 91. 1., Suppl., 41. — Trib. corn. Marseille, 13 août 1889, liée. Marseille, 90. 1. 19. — Trib. corn. Marseille, 24 nov. 1890, Bec. Marseille, 91. 1.45. — Trib. corn. Marseille, 20 avril 1891, Rec. Marseille, 91. 1. 150. — V. cep. Paris, 16 juil. 1891, Gaz. Trib., 19 juil. 1891. — Hue, XI, n. 77. ACTES QUI SONT l»K> PRÊTS Df CONSOMMATION 393 C'était également la solution adoptée dans l'ancien droit ('). Le juge du fait ;■ cependant an rôle souverain au point de vue do savoir si les parties ont voulu ou non participer aux pertes (*). 693 bis. Ainsi, dans le cas même où le bailleur do fonds participerait à la direction de l'entreprise et aurait le droit d'assister aux inventaires sociaux et de se faire communiquer les livres, il y aura prêt si la somme prêtée ne participe pas aux pertes (*). Il y a société si le capital apporté participe au partage des biens sociaux et aux pertes, alors même que l'associé renonce aux bénéfices annuels (4). Si le capital affranchi des pertes n'est apporté qu'en jouis- sance, le juge du fait peut y voir une société aussi bien qu'un prêt (5). La société n'est, en effet, pas nulle, par application de l'art. 1855, puisque l'absence de bénéfices entraînera la perte de l'apport tout entier. Si le capital apporté donne lieu à un intérêt fixe, et, en outre, à une part de bénéfices, on considère tantôt qu'il y a prêt ("), tantôt qu'il y a prêt mêlé de société (7). 694. Le juge du fait est, d'ailleurs, libre de voir dans le contrat une société, même si cette interprétation doit con- duire à la nullité du contrat (8). i'i Chorier, La jurispr. il? Guy-Pape, 2« éd., 1769, tiv. IV, sect. VII, art. 5, p. 249, quest. 186, qui en conclut que le prêt à moitié perle et profit ne saurait être u suraire. (*) Paris, 25 mars 1891, Droit, 23 juil. 1891. V. cep. Cass., 11 avril 1850, D., 54. 5. 719. — Paris, 10 août 1807, S. clir. — Lyon, 20 août 1849, D. Rép., v° Société, n. 142. — Douai, 3 Tév. 1875. D., 77. 2. 140. — Grenoble, 18 mars 1887, D., 88. 2. 305. —Paris, 18 janv. 1893, précité (motifs . — Pont, loc. cit.; Lyon-Caen et Renault, loc. cit.; Guillouard, loc. cit. *) Cass. req., 9 juil. 1885, précité. <'.ass. req., 20 déc. 1893, S., 94. 1. 484, D., 94. 1. 224. — Contra Bonfils, loc. cit.. p. 548. 6 Trib. corn. Seine, 4 août 1886. Journ. trib. corn., 88. 42. " Cpr. Cass. req., 5 déc. 1887, S., 90. 1. 467, D., 88. 1. 430. 8 Trib. com. Seine, 20 mai 1892, Gaz. Pal., 93, 1, Suppl., 27 (est une société le contrat entre un banquier et ses clients portant que les fonds versés par ces derniers serviront à des opérations de bourse, que 10 p. 100 des bénéfices leur seront alloués et leur capital leur sera restitué. Ce jugement est d'ailleurs erroné). — V. cep. Cass. req., 20 déc. 1893, S., 94. 1. 484, D., 94. 1. 224 (impl.). 394 DU PRÊT DE CONSOMMATION 695. La distinction entre le prêt et la société présente les intérêts suivants : 1° Comme nous l'avons dit, l'associé participe aux pertes et le prêteur n'y participe pas, de sorte qu'en cas de mauvaises affaires, le prêteur aura le droit de réclamer la somme prêtée en concurrence avec les autres créanciers et même, s'il a eu soin de se faire consentir une hypothèque, par préférence à eux. 2° Oh prétend que le taux de l'intérêt, en matière civile, ne pouvant dépasser 5 p. 100, le bailleur de fonds ne pourra exiger davantage. En parlant de l'intérêt, nous étudierons cette question. 3° L'art. 1855 n'est pas applicable au prêt. 4° La capacité en matière de prêt ou de société est différente. 5° Si la société est commerciale, elle est soumise à l'obser- vation de certaines formes; aucune formalité n'est exigée pour le prêt, même en matière commerciale. 6° Les causes de dissolution de la société diffèrent des évé- nements qui mettent lin au prêt. 7° En règle générale, l'emprunteur peut rembourser le prêt avant l'échéance; il ne peut mettre tin à la société. 8° Le prêt donne lieu au droit proportionnel d'enregisl re- nient de 1 p. 100 (L. 22 frim. an VII, art. 69); le contrai de société au droit de 20 cent. p. 100 (L. 28 avril 1893, art. 19). 9° La société donne lieu a la taxe de 4 p. 100 sur le revenu, le prêt n'y donne lieu que s'il est fait à une société existai) le; la taxe se calcule, en outre, tout autrement en matière de prêt qu'en matière de commandite. 696. La distinction entre le prêt de consommation et le dépôt irrégulier est assez délicate: nous l'étudierons à propos du dépôt. 697. D'après la jurisprudence, l'escompte n'est pas un prêt, mais la vente d'une créance à terme ('). La plupart des au- teurs, au contraire, y voient un prêt sur gage. (') Cass., 16 août 1877, S., 78. 1. 331. - Cass. crim., 9 nov. 18S8, S., 89. 1. 393 impl.). — Pardessus, Dr. comm., I, n. 474; Troplong, n.369 s. — Contra Pont, I, n. 183; Boistel, n. 695; Lyon-Caen, Note, S., 89. 1. 393; Lyon-Cacn et Renault, Précis de dr. comm., I, n. 1391 et Tr. de dr. comm., IV, n. 702; Véran, Rev. de dr. comm., LVII1, 1896, p. 194. i 4RACTÈRE8 3Ô5 698. Les avances sur titres constituer) I de véritables prêts ('). 699. En parlant des intérêts, nous distinguerons du prêt Quelques autres conventions. SECTION II CARACTÈRES DU PRÊT DE CONSOMMATION. DK LA PROMESSE DU PRÊT 700. Le prêt de consommation est un contrat réel (2). La définition de l'art. 1892 le montre (s). Si donc la livraison des objets prêtés n'est pas faite, le contrat ne se forme pas (*). La livraison faite à l'emprunteur lui transfère la propriété. On aurait pu exprimer celte idée dans la définition (art. 1892) en substituant le mot donne au mot livre. Le législateur a préféré dire la chose tout au long dans l'art. 1893, peut-être pour avoir l'occasion de déduire de cette prémisse une con- séquence relative aux risques qui aurait pu facilement, à notre avis, être laissée à l'état de sous-entendu. « Par l'effet de ce » prêt, dit l'art. 1893, l'emprunteur devient le propriétaire de » la chose prêtée ; et c'est pour lui qu'elle périt de quelque » manière que cette perle arrive ». 70t. Le formalisme qui dominait dans le droit romain avait fait conclure du caractère réel du prêt à la nullité de la promesse de prêt ou du prêt non suivi de réalisation [pactum de muluando) (5). . Aujourd'hui, comme toutes les conventions sont obligatoi- res, cette convention est valable, et le stipulant peut exiger la réalisation du prêt (6). C'est également Ja solution admise à l'étranger (7). (') Cass. civ., 8 mars 1887, S., 90. 1. 257. — Cass. eiv., 29 oct. 1894, S., 9G. 1. 193.— Lyon-Caen et Renault, Traité, IV. n. 683: Lyon-Caen, Note, S., 90. 1. 257 ; Wahl, Tr. des titres au porteur, II, n. 1144 et Noie, S.. 96. 1. 193. (*) Duranton, XVII, 0.614; Troplong, n. 184; Pont, I. n.l36s.; Laurent, XXVI, n. 486; Guillouard, n. 67 et 68 ; Hue, XI, n. 167. — Contra Duvergier, n. 146. (3) V. supra, n. 687. — V. aussi n. 587 s. (*) Gass. req., 29 nov. 1887, D., 89. 1. 159. (s) L. 68, D., de verb. oblig., 45. 1. (*) Guillouard, n. 68; Hue, XI, n. 168. ■~) Allemagne, Droit commun, Eck, Ilollzendofî's Encuklopaedie, v° Mulunm; Suffiïan,Z> as pactum de muluo dando, Munich, 1866. — C.civ. allemand, art. «"> 1< ». — Prusse, God. gén., L. 11, §§ 654-660. 396 DU PRÊT DE CONSOMMATION Cette observation conduit à dire que l'attribution au prêt du caractère de contrat réel ne s'explique que par un souve- nir du formalisme romain ; elle est juridiquement injustifiable et, en fait, ne produit presque aucune conséquence ('). D'une part, le lien que la loi attache entre la formation du contrat et la livraison de la chose ne se comprend pas ; car, s'il est vrai que l'emprunteur ne peut tirer une utilité vérita- ble de la chose avant de l'avoir entre les mains, on peut en dire autant de l'acquéreur, du preneur, etc. Et cependant la vente et le bail sont des contrats consensuels. D'autre part, du moment que celui qui promet de faire un prêt est juridiquement tenu de le réaliser, sa situation n'est pas différente de la situation du vendeur, du bailleur, etc. avant la livraison de la chose vendue ou louée et la forma- tion de la convention est subordonnée h la volonté des parties. Aussi une grande partie de la doctrine allemande admet- elle que le prèl est devenu un contrat consensuel (2). 702. Il devrait résulter également de là que, comme dans tout autre contrat, l'objet promis est, s'il est déterminé, aux risques de L'emprunteur dès le jour où la promesse est faite. Les auteurs, se basant sur le caractère réel du prêt, donnent la solution contraire (3) que nous avons déjà appréciée à pro- pos du prêt à usage ('), mais qui, ici, est exacte quoiqu'elle soit inexplicable, car, d'après l'art. 1803, c'est « par l'effet du prêt » que les risques sont k la charge de l'emprunteur. 703. On admet (pie la personne qui ne réalise pas le prêt qu'elle a promis de faire (notamment qui ne réalise pas un crédit ouvert) peut être condamnée non seulement aux intérêts légaux, mais à la réparation de tout le préjudice causé A son cocontractant v5). Celte solution, cependant, soulève une objec- tion ; le promettant est débiteur d'une somme d'argent, et les (') V. supra, n. 5%. — V. cep. infra, n. 7')2. • ArndU, Pandecklen, S 232, note i ; Fœrçter, Théorie und l'ra.ris des preus- siseften Privatrechls, 1, S 72, note ifi ; Eck, loc. cil. — Contra Windscheid, l'an- de/den, II, §§ 370-371, note 6 ; Ungen, .lalirb. f. Uogmati/;, VIII, p. 11. Duranton, XVII, n. 556 ; Troplong;, n. 184 : Pont, n. 136 s. ; Laurent, XXVI, n. ÎS7 ; Guillouard, n. 68 et 69 ; Hue, XI, n. 168. (*) V. supra, n. 613. (») Cass. req., 8fév. 1875, S.. 75. 1.343. PROMESSE DE PRÊT 3(.»7 dettes de sommes d'argeni ne donnent jamais lieu, à titre de dommages-intérêts, qu'au payement des intérêts légaux C. civ., 1 153). De même le prêteur qui néglige de réaliser le prêt ne peut être tenu des intérêts moratoires que dans les conditions fixées i>;u- l'art. 1153 C. civ. ' , c'est-à-dire à la suite d'une demande en justice. La promesse de prêt étant valable, le prêteur est obligé de verser les fonds, sauf cependant dans les cas que nous indi- querons (*). 704. D'après plusieurs auteurs, le prêt de consommation < »>se d'être un contrat réel, et la promesse de prêt se confond avec le prêt lorsqu'elle -s'applique à une chose déterminée. Ainsi j'ai promis de vous prêter la barrique de vin qui est dans ma cave, h la charge par vous de m'en restituer une semblable dans un an. Cette promesse, dit-on, équivaut à ceci : je m'o- blige à vous transférer a litre de prêt la propriété de ma bar- rique de vin; or, aux termes de l'art. 1138, la promesse de transférer la propriété opère de plein droit translation de la propriété; donc l'emprunteur devient immédiatement pro- priétaire, et par suite les risques sont pour son compte ; le prêt deviendrait un contrat consensuel dans cette hypothèse particulière. Nous croyons que le prêt est toujours un contrat réel : par conséquent, dans l'hypothèse proposée, l'emprunteur ne de- viendra propriétaire et les risques ne seront pour son compte qu'à partir de la tradition. A l'art. 1138 nous opposons l'art. 1893, qui déclare très positivement que l'emprunteur ne devient propriétaire que par l'effet du prêt. C'est là une disposition spéciale, qui déroge à la règle générale de l'art. 1138. La dérogation d'ailleurs est bien facile à justifier, et à vrai dire il était presque inutile de la formuler. Car, en déclarant que la propriété est transférée par le seul effet du consentement, indé- pendamment de toute tradition art. 1138), la loi ne fait qu'in- terpréter la volonté des parties; or ont-elles pu vouloir, dans l'espèce proposée, que l'emprunteur devint immédiatement (») Oass. civ., 11 juil. 1895 motifs , S.. 95. 1. 329. - V. infra, n. 739 s. 398 DU PRÊT DE CONSOMMATION propriétaire? Admettons pour un moment d'ailleurs que la propriété soit transférée à l'emprunteur, ou plutôt au futur emprunteur, avant la tradition. En résulterait il, comme on le prétend (c'est là l'intérêt pratique de la question), que les ris- ques seront désormais pour son compte, par application de la règle Res périt domino? Nullement. Celte règle, nous l'avons vu, n'est nulle part écrite dans la loi. Mettre les risques a la charge de l'emprunteur, c'est dire en d'autres ternies que la perte de la chose ne le dispensera pas de l'obligation de restituer; or l'obligation de restituer ne peut prendre nais- sance, dans l'esprit de la loi, pour l'emprunteur que lorsqu'il a re<;u : l'art. 1893 le dit; donc c'est seulement à dater de cette époque que les risques pourront être à sa charge. 705. Comme exemple de prêts à terme, on peut citer les prêts différés du Crédit foncier. Le Crédit foncier retient, lors de la réalisation des prêts, les sommes qui peuvent être dues aux créanciers hypothécaires qui refusent le payement de leur créance. D'une part, ces sommes sont comprises immédiate- ment dans le total des sommes à rembourser par l'emprun- teur, et portent immédiatement intérêt. D'autre part, le Crédit foncier détient ces sommes pour le compte de l'emprunteur et lui en paye les intérêts ('). Cette compensation d'intérêts n'est qu'un artifice de comptabilité. En réalité le montant du prêt est fixé immédiatement, mais une partie de ce montant n'est pas immédiatement laissée à l'emprunteur (2). 706. La tradition, nécessaire pour que le prêt existe, peut résulter du seul consentement des parties, si l'emprunteur se trouve déjà en possession : par exemple si je déclare vous prêter de l'argent que je vous ai confié en dépôt (3). C'était déjà la solution du droit romain (i). •Josseau, Tr. du crédit foncier, 3» éd., I, n. 193. ■) Il suit de là qu'en droit fiscal : 1° le droit d'obligation est perçu sur le mon- tant total du prêt sans déduction de la somme réservée par le crédit foncier, Dict. Enreg., \° Crédit foncier, n. 18; Wahl, Sole, S., 92. 2. 31; 2° que la somme réservée par le crédit foncier, appartenant à l'emprunteur, doit être comprise dans la déclaration de sa succession. Sol. de la régie, 29 janv. 1889, S., 92. 2. 31. — Walil, loc. cit. 5 Eck, loc. cit. (*) L. 34,/»\, D., Mand., 17, 1. PROMESSE L>K PRÊT 399 707. La tradition peut s'effectuer par le droit accordé à l'emprunteur, et dont il use, de toucher une créance du prê- teur ' . Kllr peul aussi s'effectuer par la remise d'une chose dont l'emprunteur esl autorisé à opérer la vente et à s'approprier le prix 708. L'emprunteur devient propriétaire de la chose prêtée même si (.'Ile est déposée entre les mains d'un tiers ' un notaire, par exemple) ('), même avec l'obligation de l'affecter ;i un objet déterminé (' . Dans ce cas, le notaire n'est (pie le mandataire de l'emprunteur. Nous étudions un peu plus loin les conséquences de l'inexécution de l'obligation imposée à l'emprunteur de consacrer les fonds à une destination déter- minée (6). De même. L'emprunteur devient immédiatement proprié- taire, quoique le dépôt ait lieu entre les mains d'un tiers, jusqu'à ce que l'emprunteur ait fourni des sûretés (7). 709. Il peut arriver que le tiers le notaire entre les mains duquel les fonds sont déposés soit le mandataire du prêteur; par exemple, il a la mission de remettre les fonds à l'emprun- teur après que ce dernier aura accompli une formalité déter- minée, comme l'emploi auquel sont destinés les fonds en cas de prêt à une femme dotale (8). Dans ce cas, les risques sont pour le compte du prêteur jusqu'à la livraison effective faite à l'emprunteur (9). ' Eck, loc. ci/. - Eck, loc. cit. Guillouard, n. 71. * Cass., 7 mars 1842, S., 42. 1. 207. — Cass., 21 août 1862, S., 62. 1. 793, D., 62. 1. 438. —Cass.. 2 mars 1868, S., 68. 1.30Ï,D., 68/1. 154. —Cass. req., 15 mars 1886, S., 86. 1. 296, D., 87. 1. 28. — Paris, 22 juin 1866, S., 67. 2. 79. — Amiens, 28 janv. 1892, S., 94. 2. 177, D., 93. 2. 158. — Trib. civ. Yervins, 2 août 1895, Rec. Amiens, %. 126. — Aubry et Rau, IV, p. 599, § 394, note 3; Laurent, XXVI, n. 488; Guillouard, n. 71; Hue, XI, n. 167. {* Cass., 31 août 1863, précité.— Amiens, 28 janv. 1892, précité. — Hue, loc. cil. 6 V. le n. suiv. ' Cass., 2 mars 1868, précité. i"i i iuillouard. n. 71. Amiens, 21 mai 1879, S., 80. 2. 134. — Guillouard, n. 71. — V. cep. Trib. civ. Vervins, 2 août 1895, précité pour le cas où le notaire doit garder les fonds jus- qu'à l'accomplissement des formalités hypothécaires). 400 DU PRÊT DE CONSOMMATION Le tiers est le mandataire des deux parties s'il est chargé de veiller à l'accomplissement d'une formalité prescrite dans l'intérêt des deux parties ('), par exemple si un notaire doit remettre les fonds à une personne au remboursement de laquelle ils sont destinés et à laquelle le prêteur veut être subrogé^). Dans ce cas, les risques sont par moitié pour le compte des deux parties (3). 710. Si la destination imposée à l'emprunteur n'est pas observée, le prêteur peut demander la résolution du con- trat (*). Cette résolution ne rend pas le prêteur propriétaire de la chose prêtée, laquelle, étant tangible, est devenue la pro- priété définitive de l'emprunteur. Donc, en admettant que la chose prêtée existe en nature, le prêteur n'a pas le droit de la revendiquer; il n'a pas davantage de privilège sur elle; il est réduit sur cette somme à la condition des autres créanciers de l'emprunteur s . Toutefois il peut se faire que le dépôt ait été fait par le prêteur seul et pour son propre compte. Dans ce cas, il lui appartient, conformément au droit commun, de retirer la somme déposée, et la propriété n'en sera transférée à l'em- prunteur que si ce dernier a, du consentement du prêteur, relire la somme déposée D'autre part, quand le tiers a eu connaissance de l'emploi projeté, on doit supposer qu'il lui a été interdit de se dessai- sir des fonds, sauf pour cet emploi ; le prêteur, quoique propriétaire, ne peut donc exiger le remboursement de la r i iuillouard, a. 71. I iuillouard, loc. cil. ('} Guillouard, loc. cit. [*) Amiens, 28 janv. 1892, S.. '.'4. 2. 177, D., 93. 2. 158. vmiens, 28 janv. 1892, S., 94. 2. 177, \).. 93. 2. 158 fonds reslés entre les mains d'un notaire pour être emplo (6) Amiens, 'Jl mai 1879, S., 80. 2. 134. — (Iuillouard, n. 71. — On a dit qu'alors le tiers est mandataire du prêteur. Sole, S., 94. 2. 177. — L'idée du mandat nous pa- rait étrangère à la question, sauf dans l'hypothèse où le tiers est lui-même chargé d'accomplir les formalités auxquelles est subordonné 1 accomplissement du pré!, et du reste le mandat serait conféré dans l'intérêt du mandataire aussi bien que du mandant et ne pourrait être révoqué que de leur consentement mutuel. — V. notre Tr. des conlr. aléa t., du mandat, etc., n. 406. P0RM1 II l'HKI \i. illl somme sans justifier en même temps qu'elle sera affectée à cet emploi (*). 711. Le prêt de consommation esl «mi outré, comme nous le verrons, un contrat unilatéral Enfin, et ;iinsi que nous le montrerons également, c'est un contrat gratuit, mais seulement par sa nature, et non pas, comme le prêl à usage, par son essence SECTION III FORME ET PREUVE DL CONTRAT 712. La loi n'a pas réglé la forme et la preuve du prêt de consommation ; on doit donc se référer au droit commun. Le prêt de consommation est par suite soumis, s'il est cons- taté par acte sous-seing privé, à la formalité du bon pour ou approuvé prescrite par l'art. I32(i C. civ. pour les contrats unilatéraux ' . 713. En revanche, le prêl de consommation, étant un con- trat unilatéral, n'est pas soumis à la formalité des doubles Il en est autrement cependant s'il est joint à une autre convention forçant le prêteur à restituer des objets confiés, par exemple si l'emprunteur constitue un gage en garantie du remboursement (6). En vain dirait-on que le prêt n'en est pas moins unilatéral: la convention contient deux contrats unilatéraux; dans chacun d'eux le créancier est la personne (|iii remplit dans l'autre le rôle de débiteur, il y a donc des 1 Amiens. 28janv. 1892, précité. — Cet arrèl constate qu'il y a en mandat con- féré dans l'intéi et cummun du prêteur et de l'emprpnleur, et en conclut que ce dernier ne peut, à lui seul, révoquer le mandat. La constatation étaitexacte en t'ait, parce que le tiers était lui-même chargé d'employer la somme suivant les stipula- tions du contrat de prêt. Mais en dehors du mandat, les développements donnés an texte montrent que cette solution doit être également admise. 2 V. infra, n. 736. - ' V. infra, n. 80i s. (* Guillouard. n. 72. 5 Guillouard, n. 72. G) Cass. civ.. 8 mars 1887, S.. 90. L. 257. — Lyon- Caen, Noie, S..'90. i. 2">7. — Guillouard, n. 72 '-et auteur adopte l'opinion contraire dans son Tr. du nuiit ment, n. 24 . — V. infra, n. 737, Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 20 409 DU PRÊT DE CONSOMMATION obligations réciproques et le but auquel a obéi l'art. 132o s'applique. Mais ce n'est pas une raison pour dire qu'en ce cas le prêt est un contrat synallagmatique; comme on admet cependant sur ce dernier point l'opinion contraire, on en con- clut que le prêt n'est plus alors soumis a la formalité du bon pour ('). Ceci nous parait inexact; on a tort de penser que l'application de l'art. 1325 C. eiv. exclut l'art. 1326 C. civ. ; la loi ne donne pas cette solution, qui serait difficile à justi- fier. Les dangers auxquels l'ait. 1320 C. civ. a voulu remé- dier sont les mêmes qu'il y ait un gage ou qu'il n'y en ait point. Du reste, les auteurs que nous combattons admettent que si les actes de prêt et de nantissement sont séparés, la for- malité du bon pour redevient applicable au prêt (*), et qu'au- cun des deux actes n'est soumis à la formalité des doubles (s). 714. Si l'acte doit être, suivant la convention des parties, notarié, on décide généralement que l'emprunteur a le droit de choisir le notaire qui rédigera l'acte, parce qu'il paye les frais de cet acte (*). SECTION IV CAPACITÉ DES PARTIES § I. Capacité du prêteur. 715. Le prêteur doit être capable d'aliéner (5). ainsi que le voulait déjà Pothier ,;); car le prêt de consommation est un acte de disposition, un acte d'aliénation, l'emprunteur deve- nant propriétaire (art. 1893), et non un simple acte d'admi- nistration comme le prêt a usage (7). Sont donc incapables de faire un prêt de consommation ( ) Gass. civ., 8 mars 1887, pi e'-cilé. - I,yon-Caen, loc. cil. — Contra Guillouard, 7Y. du nantissement, n. 24. |* Lyon-Gaen, loc. cit. '■ Lyon-Gaen, loc. cil. « Gass.,3juill. 1844, S., 14. L. 667. — Cass., 30 avriI1873, D., 73. 1. 169. (s) Guillouard, n. 74 et 77: Hue, XI, n. 170, « N.4. (7) Pothier, n. i; Guillouard, n. 77. i vpacii i m ntK 1 1:1 ii 403 les mineurs, émancipés ou non ('), les interdits (*) et les per- sonnes pourvues u son représentant pourra revendiquer la chose prêtée, si elle existe encore ni nature, et, dans le cas contraire, exercer une action personnelle en restitution contre l'emprunteur, bien (jue le terme fixé pour la restitution ne soit pas encore expiré. 717. (Jue si l'emprunteur a consommé les choses prêtées, Pothicr soutenait que le prêt devenait valable, absolument comme s'il avait été consenti par un non propriétaire , et cette opinion a été reproduite par certains auteurs moder- nes . l'Ile n'est pas exacte ' , car elle est contraire aux principes admis pour les actes passés par un incapable; on ne peut considérer la consommation faite sans la participa- tion de l'incapable comme une ratification émanant de ce dernier. L'art. 1"2.'Î8. qu'on a invoqué en sens contraire, est spécial au payement. '-"- ( îuillouard, n. 77. 1 < "mil louait], n. 77. — Contra (pour la souscription d'obligations libérées Vas- sal, Des emprunts des départements, des communes, 1893, p. 84. 4 Guillouard, n. 77 bis; Hue, XI, n 170. ' N. 7 et 81. 6 Duranton, XVII, n. .V.7. : TroploDg, n. 203; Duvergier, n. 155; l'ont. I. n. 1G7: Laurent, XX\ a. i 8; Guillouard, n. 77 bis; Hue, XI, n. 1 7' ». i LPAI i 1 1 DE l'ëMPRUN ri i R 105 2 11. Capacité de l'emprunteur. 718. L'emprunl est un acte particulièremenl grave, car l'emprunteur s'oblige à restituer des choses semblables à celles qu'il a reçues, et grève ainsi son patrimoine de charges (jui peuvent être fort lourdes. L'emprunteur doit donc avoir la capacité de s'obliger ('). D'où il suit que le mineur, éman- cipé ou non, et l'interdit ne peuvent pas emprunter, ainsi que le décide d'ailleurs l'art. 483. En cas de nécessité absolue ou d'avantage évident, un emprunt peut être fait pour leur compte, mais moyennant L'accomplissement des formalités prescrites par les art. 457 et s. On a décidé que le père administrateur légal ne peut em- prunter sans l'autorisation du tribunal, donnée en chambre du conseil (*). La personne pourvue d'un conseil judiciaire ne peut pas emprunter sans l'assistance de son conseil (art. 513). La femme mariée ne peut pas emprunter sans l'autorisation de son mari ou de la justice, sauf exception peut-être pour la femme séparée de biens lorsque l'emprunt est relatif à l'ad- ministration de ses biens. Les envoyés en possession provisoire des biens d'un absent, n'ayant que le droit d'administrer, ne peuvent faire un em- prunt pour le compte de l'absent (3). L'administrateur provisoire nommé au cours d'une procé- dure en interdiction peut être autorisé par la justice à em- prunter (*). Nous avons déjà examiné si le gérant d'une société ou un associé peuvent emprunter (s). Les conseils des Universités délibèrent sur les emprunts à contracter par les Universités (décr. 21 juil. 1897, art. 9-3°), (') Guillouard, n. 78; Hue, XI, n. 170. - Trib. Seine, 18 mars, Ie"- avril, 5 mai, 24 août 1853, 27 janv., 28 janv. 1854, cités par Bertin, Chambre du conseil, 3e éd., I, n. 616. :< Bertin, Ch. du conseil, 3e éd., I. n. 403. • Cass., 6 fév. 1856, S., 56. 1. 113, D., 56. 1. 71. — Bertin, Ch. du conseil, I, n. W3. V. supra, n. 303 et 332. 406 DU PRÊT DE CONSOMMATION mais leurs délibérations ne sont exécutoires qu'après appro- bation du ministre [Ibid., ait. 10 . 719. Pour éviter que les matelots ne dépensent en débau- ches des sommes trop fortes pendant leurs voyages, Tord, du Ie' mars 1745 défend aux officiers de leur prêter de l'ar- gent en cours de voyage. 720. En droit romain, le sénatus consulte macédonien défendait aux lils de famille, soumis à la puissance paternelle, de contracter des emprunts d'argent ('). Le sénatus-consulte macédonien était reçu dans les pays de droit écrit (*). 11 n'étaitpasreçudansles paysde coutume (3). Le sénatus-consulte macédonien est encore admis dans le droit commun allemand (*). Mais il a disparu du droit fran- çais. 721. L'emprunt fait par un incapable est nul ; mais lui seul peut se prévaloir de la nullité, qui doit être demandée à la justice. La nullité une fois prononcée, l'incapable ne sera tenu a l'égard du prêteur que dans la mesure de son enrichissement, à moins qu'il n'ait agi par dol. Tant que la nullité n'est pas prononcée, le prêteur est, conformément au droit commun, à la merci de l'emprunteur incapable. Nous ne voyons pas comment on a pu donner au prêteur une action en revendication des choses non consom- mées ('), ou, en cas de consommation, une action en restitu- tion du protit (6). Si l'emprunt est régulièrement ratifié par l'incapable ou en son nom, le prêt devient valable (7). (») L. 1. pr. 1»., De Set. Maced., 1 i. 6. Argou. "Je édit., 1702, II, liv. III, cl). XXXI, p. 31G. — Notamment en Lan- guedoc, Argou, loc. cit. — Dans les pays de droit écrit du ressort du Parlement de Paris, il était reçu jusqu'au mariage des enfants. — Bretonnier sur Argou, loc. cit., p. 318, et sur Heorys, II. liv. IV, quest. 13. (3) Argou, op. cil., p. 318. (*) Eck, loc. cil. ; Mandry. Das gem. FamitienguterreclU, I, p. 431 s. — En Prusse, les personnes soumises à l'administration d'autrui ne peuvent aucunement s'obliger. Le macédonien n'est pas appliqué à Hambourg : Baumeister, Hambur- ijisches Privalrecht, IL p. 51. Le nou\eau C. civ. ne mentionne plus la prohibition. (*) Guillouard, n. 78. (•) Guillouard, n. 78. r Guillouard, ». 78. OBJET BT MODALITÉS '»'»< 722. Une déclaration royale du 21 janvier 1090 portait n Bar, Théorie und Praxis des inlernationalen Pricalrechls, 2e éd., I, p. 431, n. 153. (*) V. supra, n. 601. — V. aussi n. G19 s. (■ V. supra, n. 601. ÏOS DU PRÊT DE CONSOMMATION » quoique de même espèce, diffèrent dans l'individu, comme » les animaux : alors c'est un prêt à usage ». C'est une erreur : un négociant emprunte à un de ses confrères des marchan- dises, à la charge de lui rendre des marchandises de même nature. C'est bien un prêt de consommation, en dépit de notre article, qui a été maladroitement emprunté au droit romain. D'autre part, il y a lieu d'insister sur le prêt de la chose d'autrui. 726. « Par l'effet de ce prêt, dit l'art. 1893, « l'emprun- teur devient le propriétaire de la chose prêtée ». Or, pour que l'emprunteur devienne propriétaire par l'effet du prêt, il faut que le prêteur lui transfère la propriété; et, pour que le prê- teur puisse transférer la propriété, il faut qu'il soit lui-même propriétaire de la chose prêtée. Le prêt de la chose d'autrui est donc nul, parce que le prêteur ne peut transférer la propriété de ce qui ne lui ap- partient pas '). C'étaient déjà la solution et le raisonnement de Polluer {-) et du droit romain (3). Par suite, le propriétaire de la chose pourra la revendiquer contre l'emprunteur; et ceci va sans dire (*). 11 y a exception, comme nous le montrerons, si l'emprunteur est de bonne foi. Il est également certain que l'emprunteur peut se préva- loir de la nullité vis-à-vis du prêteur (5); on peut tirer un argument d'analogie de l'art. 1599, relatif à la vente de la chose d'autrui. D'autre part, l'effet ordinaire de la nullité d'un contrat est que les parties peuvent se prévaloir de la nullité. 727- Le prêteur est tenu à des dommages-intérêts envers l'emprunteur s'il a su que la chose prêtée appartenait à au- trui (6) ; s'il l'a ignoré, il ne doit pas de dommages intérêts (7). On peut invoquer à l'appui de ces deux solutions l'art. 1891 (8) ; Pothier les donnait également (9). l) Guillouard, n. Tô: Hue, XI. n. 1 « >* * . « N. i. 1 L. 2, § 4, D., De reb.cred., 12. 1. • liuillouard, n.. 75. s Laurent, XXVI, n. 493: Guillouard, n. 75. •-') Guillouard, n. 100. s) V. infra, n. 744. • V 52. OBJET II MODALITÉS 109 728. Le prêleur de bonne foi n'esl tenu à aucuns domma ges-intérêts, même si le prêl ;i été consenti moyennant des intérêts ('); celte solution se justifie par des arguments que nous développerons en parlant des vices de l;i chose prêtée (■). 729. Le prêteur lui-même, à notre avis, peut invoquer la nullité et exercer la répétition des choses prêtées (3). Ici encore nous nous basons sur ce qu'un contrat nul ne produit effet vis-à-vis d'aucune des parties. On objecte que, suivant un»' opinion très répandue, le vendeur de la chose d'autrui ne peut invoquer la nullité de la vente. En admettant que cela soit exact (ce qui est douteux), nous ne pensons pas que la même solution soit applicable au prêt : car le prêt de con- sommation doit par essence transférer la propriété delà chose prêtée, comme le montrent les termes formels de l'art. 1893. 730. Pothier suppose que l'emprunteur d'une chose appar- tenant à autrui l'a consommée de bonne foi, c'est-à-dire dans l'ignorance du droit de celui à qui elle appartient, et il décide que « cette consomption supplée à ce qui manquait à la vali- dité du contrat et oblige l'emprunteur envers le prêteur à la restitution d'une pareille somme ou quantité que celle qu'il a reçue, de la même manière que si le contrat eût eu toute sa perfection et que la-propriété des choses qu'il a reçues lui eût été transférée ». Un peu plus loin, le même jurisconsulte ajoute : « La raison de ceci est sensible : si la translation de la propriété des choses prêtées est nécessaire dans le contrat de prêt de consomption, c'est afin que l'emprunteur puisse se servir des choses prêtées, ce qu'il ne peut faire qu'en les consommant, et ce qu'il n'a pas le droit'de faire s'il n'en est pas le propriétaire; mais lorsque dans le fait, quoiqu'il n'en eût pas le droit, il s'est servi et a consommé les choses qui lui ont été prêtées, il est dès lors indifférent que la propriété lui en soit transférée ou non : le prêl, par la consomption de bonne foi qui a suivi, lui a causé la même utilité que s'il lui avait transféré effectivement la propriété de ces choses, et par 1 Uuillouard, n. 10!. — Contra Pont, I, n. 173; Aubryet Hau, IV, p. 600, §395, note 3: Laurent, XXVI, n. 501 ; Hue, XI, n. 180. — Cpr. infra, n. 740. (') V. infra, u. 746. | Contra Laurent, XXVI, n. i93 ; Guillouard, n. 75; Hue, XI, n. 169. 410 DU PI1ÈT Dt CONSOMMATION conséquent il doit produire de sa part la même obligation que si la propriété lui eût été transférée » ('). Nous croyons que celte solution doit encore être admise aujourd'hui (*). Il faut même, a notre avis, l'étendre au cas où l'emprunteur, n'ayant pas consommé la chose, est en situa- tion d'invoquer et invoque effectivement la maxime En fait de meubles la possession vaut tilre. Dans cette hypothèse, en effet, comme dans la précédente, l'emprunteur est à l'abri de toute action de la part de celui à qui la chose appartenait, et le prêt lui a procuré le même bénéfice que si le préteur eût été propriétaire; il est donc juste qu'il soit tenu de l'obliga- tion résultant du prêt (s). Ainsi, toutes les fois que l'emprunteur, invoquant expres- sément la maxime En fait de meubles la possession vaut titre, ou étant réputé l'invoquer tacitement parce qu'il a consommé de bonne foi la chose, pourra être considéré comme étant devenu propriétaire, sinon en vertu du prêt du moins à sou occasion, l'action résultant du prêt prendra naissance au profit du prêteur. 731. Dans tous les autres cas, cette action ne prendra pas naissance. Ainsi l'emprunteur a reçu la chose de mauvaise foi; il est exposé à l'action en revendication du propriétaire s'il détient encore la chose, à une action en dommages- intérêts s'il l'a consommée. Tenu envers le propriétaire, il ne sauiait l'être envers le prêteur, autrement il serait obligé de payer deux fois ;) ; le préteur n'aura donc pas l'action résultant du prêt. C'est encore la solution de Pothier (5). Elle n'est inexacte que si, comme le disait Pothier, le prêteur s'oblige à répondre à l'action du propriétaire. 11 en sera de même, si la chose prêtée est une chose per- due ou volée. L'emprunteur, même de bonne foi, demeure en pareil cas exposé à l'action en revendication du proprié- taire, auquel il ne peut pas opposer la maxime En fait de '..Vos. - Guiilooard, n. 7i); Nue, XI. a. 169. V. cep. Hue, toc. cil. *l Guillouanl. n. 76. 5 l.oc. cil. nii.n i il HODALI l ES \ I I meubles la possession vaut titre art. 'i'27'.i al. 1 . Tenu envers le propriétaire, il ne peut l'être envers le prôteur. lit nous maintiendrions cette solution même dans le cas où l'emprun- teur aurait consommé de bonne foi la chose. Nous croyons en effel qu'il demeurerait alors lenu envers le propriétaire en vertu du principe que Nul ne peut s'enrichir aux dépens d' autrui, et nous pensons même que l'action de celui-ci ne se prescrirait que par trente ans à dater du jour où elle a pris naissance,' c'est -à dire à dater du prêt. Non obstat art. 1238 in fine. Ainsi tenu envers le propriétaire, l'emprunteur ne peut l'être envers le prêteur. 732. Comme tout autre contrat à titre onéreux, le prêt est nul s'il a été fait sous une condition impossible ou illicite '). Ainsi est nul le prêt fait à un fonctionnaire pour lui servir de cautionnement et à la condition que le prêteur ait le pri- vilège de second ordre, si, le fonctionnaire ayant déjà versé son cautionnement, l'acquisition de ce privilège est impos- sible (-). 733. Le prêt fait en vue de l'exploitation d'une maison de tolérance est nul ('). On objecte que la loi ne considère pas le motif (jui guide les contractants; il ne s'agit pas ici de motif, mais d'objet : i! y aurait simplement motif illicite n'entrainant pas la nullité du contrat si l'emprunteur, sans en faire part au prêteur, projetait de donner aux sommes prêtées cette destination immorale; mais dès lorsque le prê- teur fournit ses fonds en vue de cette destination, l'objet du contrat est, par l'intermédiaire du prêt, d'assurer l'exploita- tion d'une maison de tolérance, et ceb objet est illicite. On peut également dire que le prêt est fait sous la condition d'un emploi interdit par la loi et par conséquent sous une condition illicite. Au surplus, nous pouvons noter à titre d'analogie que la cour de cassation reconnaît que rengage- ment d'un domestique en vue d'un service à faire dans une l'i Guillouard, n. 7G. H Pau, 29 juin 1892, S., 93. 2. 123. (3) Gass. req., t" avril 1895, S., 90. 1. 289, D., 95. 1. 263. — Trib. civ. I5ru.\H- les, 5 déc. 1894, Pasicr., 95. 3. 99. — Contra Paris, 13 lev. 1377, S., 77. 2. 23 ï. — Appert, Sole. S., 96. 1. 289. 412 Dl PRÊT DE CONSOMMATION maison de tolérance est nul et que le prêt fait pour alimenter le jeu est également nul ('). 7 34. On a conclu de là que le prêteur ne peut réclamer le remboursement des sommes prêtées (-). Cette solution n'est exacte que si on admet la persistance, dans notre droit, de la maxime : in pari causa turpitudinis meiior est causa possidentis, 735. Le prêt fait à un non pharmacien pour l'acquisition d'un fonds de pharmacie, est valable, car ce dernier peut se proposer do n'utiliser la somme empruntée qu'à l'époque où il aura les diplômes nécessaires, ou de faire gérer par un pharmacien le fonds qu'il acquerra (3). SECTION VI I LRACTÊRE UNILATÉRAL DU PRÊT ET OBLIGATIONS Dr PRÊTEUR ï 1. Caractère unilatéral du prêt. 736. Le code emploie une rubrique (des obligations du prê- teur) qui pourrait faire croire que le prêt de consommation est un contrat synallagmatique. (Je serait, d'après l'opinion géné- rale, une erreur; le prêt oie consommation est un contrat uni- latéral ('), où l'emprunteur seul contracte des obligations; comme nous l'avons dit à propos du prêt à usage (5), l'obliga- tion imposée au prêteur de ne pas redemander la chose avant le terme tixé est l'absence d'un droit plutôt qu'une obliga- tion; l'obligation de répondre des vices est accidentelle (6). Aussi Pothier lui-même, qui cependant traitait le prêt à usage comme un contrat .synallagmatique imparfait, quali- (*) V. notre Tr. du eonlr. de louage, l" éd.. II. n. L241, et notre Tr. des contr. aléatoires, du mandat, etc., n. 125 s. - Gass. req., 1" avril 1895, précité, 1 l'aris, 4 Tév. 1891. Ann. dr. comm., V. 1891, Jurispr., p. 101. 1 Font, I, n. 144 et 180; Laurent, XXVI, n. 485; Guillouard, n. 72, 98 bis et 102; Hue, XI, n. 107. — Contra Duvergier, n. 191 s.; Aubry et Ran, IV, p. 598, si 394, note 1. — D'après ces auteurs, ce serait un contrat synallagmatique impar- fait. — D'après Troplong. n. 255 Y. cep. n. 198 et Larombière (art. 1 102 1 100, n. 2), c'est un contrat synallagmatique parfait. 5) V. supra, n. 605. («) Guillouard, n. 102. — Conlra Troplong, n. 255. CARAI IhlU. I NILATÉRAL i \'i tiail de contrat unilatéral le prêl de consommation ('.). Ces! également ce qui résulte des travaux préparatoires. Il esl doue certain que le code a voulu attribuer au prêt de consommation le caractère d'un contrat unilatéral; mais, quoique cette conception soil approuvée par les auteurs, elle nous parait irrationnelle. La raison pour laquelle la vente el le louage sont des contrats syna Magmatiques est précisément dans cette obligation de garantie que contractent Je vendeur el le bailleur; il n'est pas facile de comprendre pourquoi le prêt, où se rencontre la même obligation, est néanmoins un contrat unilatéral. 737. Le prêt devient-il synallagmatique si le prêteur reçoit un nantissement qu'il est tenu de restituer après le rembour- sement, c'est-à-dire qu'il s'agit d'un prêt sur gage ou d'une avance sur litres? La question est importante au point de vue des formes de l'acte (*). On admet que le prêt devient alors synallagmatique, cha- cune des parties étant obligée (3). C'est, à notre avis, une erreur (*); la convention dans laquelle est contenue le put l'ait, à la vérité, naître des obligations réciproques, et ne peut être ainsi qualifiée de synallagmatique ; mais cela tient à ce qu'elle contient deux contrats distincts, tous deux produisant leurs effets naturels, et qui sont le prêt et le gage. Il résulte du même principe qu'une avance remboursable •.institue un prêt alors même que des avantages particuliers sont consentis à l'emprunteur comme compensation de ceux 'accordés par ce dernier au prêteur, suivant une convention contenue dans le même acte ou dans un acte différent; on ne peut voir dans les deux contrats un contrat unique et synallag- matique (5). ha jjrél à usage, n. 20. !J V. supra, a. 713. ;3) Cass. civ.. 8 mars 1887, S., 90. 1. 257. — Lyon-Caen, Note, S.. 90. 1. 25"; îuiUouard, TV. du nantissement, u. ;;4. — Mai? cet auteur admet le coni: pour les avances sur titre faites par la Banque de France (bypolhèse qui a donné lieu à l'arrêt de 1887), par le motif que les statuts de la banque ne lui per- mettent de prêter que moyennant ce nantissement de litre: l'argument est il lisant. Unsi décidé pour le cas où le remboursement des sommes empruntées ili M" PRÊT \)E CONSOMMATION 738. Le prêt à intérêt est unilatéral comme le prêt de con- sommation ordinaire ', car, outre que le code le présente comme une variété de ce dernier, il n'en diffère réellement que par une obligation de plus mise à la charge de l'emprun- teur; la situation passive du prêteur ne se modifie pas. § II. Obligations du prêteur. I. Obligation de verser les fonds. 739. I>e même que la personne qui a promis de faire un prêt doit verser les fonds promis (*). de même celui qui est devenu prêteur en versant une partie des fonds est obligé de verser le surplus. Toutefois le promettant peut se dispenser de faire le verse- ment si le prêt est nul (s). 740. l)e même, conformément à l'art. 1188 C. civ., le prê- teur n'a pas à verser les fonds si l'emprunteur tombe en faillite ou en déconfiture, ou diminue par son fait les sûretés promises. On décide, par application de l'art. 1 188, que les obligataires sont dispenses de faire les versements sur les titres si la société qui a émis ces titres tombe en déconfiture, cette der- nière n'offrant plus les garanties de remboursement qu'on pouvait exiger d'elle ('). 741. A défaut du versement des fonds, l'art. It53 G. civ. s'applique : l'emprunteur peut donc réclamer les intérêts de la somme promise à partir de la demande en justice, outre avoir lieu par 50 annuités de i p. l't". comprenant le capital et les intérêts, et où la ville emprunteuse a concédé au prêteur le monopole des concessions d'eaux. — <:a-s. civ., 15 nov. 1893, y., 95. 1. 193. — V. dans le même sens Wahl, Sole. S., 95. i. 193. Cass. Rome. 13 juill. 1892, I».. 94. 2. 291. — Laurent, XXVI, n. 512; Guil- louard, n. 121. - V. supra, n. 71 '1 s. 1 Par exemple si la société emprunteuse est nulle faute de publicité. — Trio. coin. Marseille, 3déc. 1890, Journ. de Marseille, 91. 1. 54. — Thaller, Ann. clr. com,,,., V, 1891, Doclr., p. 189. ' Trib. civ. Seine. 26 juill. 1889, Gaz. l'ai.. 89. 2.278. — Trib.cîv. Seine, 6 déc. 1889, Ann. dr. comm., IV. 1890, Jurispr., p. 62. — Louis-Lucas, Ann. dr. comm., IV. 1890, p. 62. OBLIGATIONS l»l PRÊTEUB — VERSEMENT I>i:s FONDS ï I •"> celle somme elle-même. Ces intérêts, conformément à l'art. 1153 (1. civ., sonl de G p. 100 en matière commerciale et de ."> p. 100 en matière civile. La cour de cassation décide même que les intérêts peuvent être plus étendus si le préjudice est plus considérable (' ). Mais cette opinion nous parait contraire à l'art. 1153. L'emprunteur peut-il demander également la résolution du contrat? Ceci dépend du point de savoir si l'art. 1184 C. civ., qui admet un contractant à réclamer la résolution du contrat faute d'exécution des obligations de son contractant, s'appli- que aux contrais unilatéraux. En lout cas, ce droit de réso- lution peut-être stipulé. 742. Lue société peut également stipuler que l'obligation sur laquelle les versements n'auront pas été faits aux épo- ques fixées pourra être vendue par elle en bourse aux risques et périls de l'obligataire (9). Ici encore.il a été décidé que si le souscripteur d'une obli- gation émise par une société est en retard pour effectuer les versements, et que la société se soit réservé le droit d'exécu- ter en bourse l'obligation en cas de retard, l'indemnité comprend non seulement les intérêts moratoires, mais la réparation du préjudice causé à la société par une vente en bourse à des conditions défectueuses ('). 743. La société peut également stipuler que l'obligataire ne pourra obtenir le paiement du lot afférent, à la suite d'un tirage au sort, au numéro de son obligation ('). On objecte- rait a tort que la société change ainsi de sa propre autorité 1 i Ipr. Cass., 13 nov. 1889, S., OU. 1. 24. i Cass. civ., 11 juil. 1895, S., 95. 1. 329 (si celte clause ne figure pas dans les prospectus d'émission, mais seulement sur des titres provisoires, l'acceptation de la clause par le souscripteur peut résulter en l'ait du versement opéré contre remise de ce litre provisoire et de ce que le souscripteur, financier expérimenté, n'a pu ignorer son existence). — Gpr. Cass., 8 déc. 1991, S., 92. 1. 61. |3 Cass. civ., 11 juil. 1895, S , 95. 1. 329. I' Cass. civ., 9 déc. 1895, S., 96. 1. 177. — Paris, 9 janv. 1890, S., 91. 2. 91 même affaire;. —Orléans, 14 juin 1893, S., 93. 2. 270. — Trib. civ. Seine, (3 janv. 1887, Gaz. Pal., 87. 1. 77. — Tissier, Note, S., 96. 1. 177. — Décidé que pour les obligations du Crédit foncier la clause est valable bien qu'elle n'ait pa~ été soumise à l'autorisation du ministre des finances. — Cass. civ., 9 déc. 1895, pré- cité. — Tissier, loc. cil. i 1 13 DU PRÊT DE CONSOMMATION les attributions des lots et déroge à la loi sur les loteries; elle ne fait au contraire que fixer les conditions auxquelles est subordonné le droit de l'obligataire. Dans ce cas, le lot appartient à la société, qui n'est pas tenue de l'attribuer par la voie du sort à un autre obliga- taire ('). Mais en L'absence d'une clause de ce genre, le lot ne peut être refusé à l'obligataire (-' . Un ne peut lui objecter (pie, faute d'exécuter ses obligations, il a encouru la résolution de son droit, car il n'y a pas de résolution sans jugement. II. Responsabilité dit prêteur. 744. « Dans le prêt de consommation, le prêteur est tenu » i . IL 99. RËMB0URSEMEN1 — MONTA NI 1. 1 NATURE ÎI7 745. Comme en matière de prêl ;'i usage, le prêteur n'est pas responsable «les vices apparents ('). 746. Même dans le prêt a intérêt, le prêteur de bonne foi n'est pas responsable des vices de la chose (*) ; car la loi ne dis- tingue pas et donne au contraire une solution générale; c'est également en termes généraux que s'exprime Pothïer. La solution contraire est, dit-on, de droit commun en matière de contrat onéreux; cela est vrai, mais l'art. 1898 y a dérogé, et, d'ailleurs, si le prêt à intérêt est un contrat onéreux, il n'eu est pas différemment du prêt de consommation ordinaire, puisque le prêteur, loin de rendre un service gratuit, stipule la restitution de valeurs équivalentes à celles qu'il fournit. Nous convenons d'ailleurs que, pour le prêt à intérêt, la loi s'est montrée peu rationnelle et a été victime de la similitude des dénominations, car il y a autant de différence entre le prêt à intérêt et le prêt de consommation ordinaire, qu'entre le louage et le prêt à usage. III. Obligation de ne pas redemander l'objet prêté. 747. « Le "prêteur ne peut pas redemander les choses prê- » tées, avant le terme convenu » (art. 1899). Ce texte est le pendant de l'art. 1883. Nous reviendrons sur le remboursement (:i). SECTION Vil OBLIGATIONS DE i/EMPRUNTÉUR S I. Obligation de rembourser les choses prêtées. I. Montant et nature des valeurs à rembourser. 748. << L'emprunteur est tenu de rendre les choses prêtées, » en même qxiantité et qualité, et au terme convenu» (art. 19(12 . L'art. 1892 s'exprime d'une manière plus heureuse en par- (*) Guillouard. a. 100. (*) Guillouard, n. lui. — Contra Pont. I, n. 173 ; Aubry et Rau, IV, p. 600, g 395, note 3; Laurent, XXVI, n. 501 ; Hue. XI. n. 180. — Cpr. supra, n. 728. ' V. infra, n. 748 s. Société, prêt, dépôt. — 2« éd. 27 118 l'I' PRÊT DE CONSOMMATION la nt de Ja restitution d' « autant de choses » de même espèce et qualité, car ce ne sont pas, comme le feraient croire les termes de l'art. 1892, les choses prêtées elles-mêmes qui doivent èlre restituées. Au surplus, ces articles doivent se compléter l'un par l'au- tre : les choses restituées doivent être de même espèce (art. 1892), de même quantité ait. 1902) et de même qualité (art. 1892 et 1902) que les choses prêtées. 749. Si le prêt est fait à la charge par l'emprunteur de rendre moins qu'il n'a reçu, il y a donation de la différence. Ainsi, quand je prête 1,500 fr. à un ami, à la charge qu'il m'en rendra 1,000, je lui fais donation de 500 fr. — Si l'em- prunteur s'oblige à rendre plus qu'il n'a reçu, l'excédent représente un protit pour h; prêteur, une rémunération du service tendu, un intérêt : ce qui n'empêche pas, comme nous le verrons, qu'il y ait prêt, car le prêl de consommation n'est gratuit que de sa nature, non de son essence. 750. Les objets rendus doivent être, dit la loi, de même espèce el qualité que les ohjels prêtés. Ainsi, quand j'ai prêté 10 hectolitres de blé de Nérac de première qualité, on devra me rendre 10 hectolitres de blé de même provenance et de même qualité. Mais d'ailleurs la valeur du blé qu'on me restituer,! pourra être plus ou moins considérable que celle du blé que j'ai prêté, suivant que la denrée se trouvera avoir augmenté ou diminué de prix à l'époque de la restitution; de sorte que si en quantité, espèce et qualité, je reçois autant que j'ai donné, en valeur je pourrai recevoir plus ou moins suivant les cas. C'est ce qui résulte formellement, comme nous le verrons, de l'art. 1897. Si la loi ne tient aucun compte de la valeur, c'est que les parties ont l'intention de rempla- cer les choses prêtées par des choses identiques et non pas par des choses de valeur égale (*). 751. Les art. 189o, 1896 et 1897 s'expriment en ces termes : Art. 1895. L'obligation gui résulte d'un prêt en argent ri est toujours que de la somme numérique énoncée ait contrat . — S'il y a eu augmentation ou diminution d'espèces avant (') I tuillouard, n. 92. REMBOURSEMENT MONTANT ET NATURE 419 l'époque du paiement, le débiteur doit rendre In somme numé- rique prêtée, et ne doit rendre que cette somme flans les espè- ces ayant cours au moment du paiement. Art. 1896. La règle portée en l'article précédent n'a pas lieu, si le prêt a été fait en lingots. ÀHT. 1897. Si ce sont des lingots OU des deniers qui ont été prêtés, quelle que soit l'augmentation ou la diminution de hoir prie, le débiteur doit toujours rendre la même quantité et quotité, et ne doit rendre //ne cela. C'est le contraire qui a lieu, si le prêt a pour objet une somme d'argent : en pareil cas, le prêteur pourra recevoir en quantité et qualité moins qu'il n'a donné, si la valeur nominale de la monnaie a été augmentée, s'il y a eu augmen- tation d'espèces, comme le dit l'art. 1895, et plus si elle a élé diminuée, s'il y a eu diminution d'espèces; mais il rece- vra toujours la même valeur, au moins en se plaçant au point de vue légal. La loi considère donc la monnaie, non pas comme une marchandise, mais comme le signe de la valeur inscrite sur les pièces de monnaie (1). C'étaient déjà le motif et la solution que donnaient Dumoulin (2) . Pothier (3) et la jurisprudence de l'ancien droit (4) ; le système contraire avait été longtemps en vigueur, mais méritait d'être rejeté : les parties voient dans la monnaie la valeur qu'elle repré- sente. 752. Est-il permis de stipuler que la restitution portera sur une somme représentant la valeur intrinsèque de la va- leur prêtée? La question a été agitée à propos du cas où, dans l'inter- valle entre le prêt et l'époque fixée pour la restitution, le titre de la monnaie diminuerait, de sorte que la même quantité de pièces de même espèce représenterait une valeur moindre. Est-il permis de stipuler que si cette éventualité se réalise, l'emprunteur devra rendre une valeur intrinsèque égale à la valeur prêtée ? i.nlmelde Santerrc, VIII, n. 100 bis; Guillouard. n. 81. - I>es contrats, usures el renies, n. 293. 1 X. 36. ' Arrêt d'aoù' 1647. cilé par Chorier, La jurispr. de Guy Pape, p. 258. ï'20 DU PRÊT DK CONSOMMATION La négative, soutenue par Dumoulin (') et Pothier {'-), est admise par certains auteurs modernes (9); elle nous parait inexacte (*) : en réalité, une clause de ce genre revient sim- plement à stipuler que la restitution portera, dans le cas de changement de titre, sur une valeur supérieure à la valeur prêtée, et cela n'a évidemment rien d'illicite. On s'est prévalu en sens contraire des termes impératifs de la loi; les mots « le débiteur ne doit rendre que cette somme... » excluent, dit-on, la clause contraire. Il est clair que pour considérer ces mots comme impératifs, il faut mé- connaître leur sens naturel. Ou objecte encore que, comme le disait déjà Dumoulin, lorsque les malheurs de l'Etat l'obligent à diminuer le titre des monnaies, les citoyens ne peuvent augmenter cette crise en discutant la valeur de la modification introduite. Nous ne saisissons pas la portée de cet argument, car il nous est im- possible de voir comment le prêteur, en exigeant ce qu'il a stipulé et en considérant ainsi les monnaies restituées au point de vue de leur poids et non pas au point de vue des sommes dont elles sont le signe, discute la valeur de la monnaie nou- velle. Enfin, l'art. 1897 dispose que si le prêt est fait en lingots, la restitution porte sur une valeur intrinsèque égale à la va- leur prêtée; or si les parties décident que, malgré la diminu- tion de titre, le remboursement portera sur une valeur égale à la valeur prêtée, elles ne font autre chose que considérer le prêt comme portant sur les métaux qui servent à la composi- tion des pièces d'argent prêtées, c'est-à-dire sur des lingots. 753. Nous ne ferons à notre théorie qu'une restriction : comme la restitution doit légalement porter sur la somme numérique prêtée et que, par suite, la restitution, en cas de diminution de titre d'une valeur intrinsèque supérieure à la (») Loc. cit. (») N. 37. (*] Troplong, n. 2i0; Duvergier. D. 177: Aubry et Rau, IV, p. 159, §318, noie 11 ; Guillouanl, n. 82. (*) Duranton. XVII. n. 577: Pont, I. n. 212; Culmet de Santerre, VIII, n. 100 bis. V. REMBOURSEMENT — MONTAN1 ET NATURE 421 râleur prêtée, doit être considérée comme la restitution d'une somme supérieure ft la somme prêtée, nous déciderons <|ifen matière civile, où l'intérêt maximum est de 5 p. 100, celte augmentation de somme, jointe aux intérêts, ne doit j > ; » s dé- passer .") p. 100. 754. Il nous parait plus certain encore que la clause sui- vant laquelle, si le litre de la monnaie est augmenté, l'emprun- teur ne devra restituer que la valeur intrinsèque des sommes prêtées, est valable. Ici, la seconde des deux objections qu'on nous a opposées ne peut plus être formulée, et quant à la pre- mière de ces objections, elle est, nous l'avons dit, k peine soutenante. 7 55. Il va sans dire qu'en cas de prêt d'argent le prêteur ne peut exiger des espèces de même nature que les espèces prêtées ('). 756. Mais il peut être stipulé que la restitution aura lieu en espèces d'une nature déterminée, par exemple en pièces d'or (*). 757. Si le remboursement a été convenu devoir être fait en certaines espèces de monnaies, cette convention doit être observée même si, dans le pays où le remboursement doit avoir lieu, ces espèces ne se fabriquent pas (3). 758. La loi qui détermine la valeur de la monnaie suivant laquelle le remboursement doit être effectué est la loi du lieu où la restitution doit être faite (*), car c'est dans ce lieu que le débiteur est obligé de se procurer les fonds nécessaires et qu'on doit supposer qu'il a entendu en calculer la valeur. Dans une autre opinion, il faudrait se référer à la loi du lieu où le contrat a été passé (s). 1 Golmet de Sanlerre, VIII, n. 100 bis. («i Troplong, n.243; Uuvergier, n. 179; Aubry et Rau, IV, p. 158, § 318, note 8; Larombière, art. 1246, n. 8; Guillouard, n. 82. 1 La jurisprudence du parlement de Grenoble était contraire ; celui qui s'était obligé à payer en florins d'or pouvait, en France, payer en écus d'or (Chorier, op. cit.. liv. IV, sect. 7, art. 17, p. 258, quest. 498; et on rapportait la valeur des florins à celle des écus. Chorier, op. cit., p. 258, quest. 279. 4 Fiore, Dr. in t. privé, trad. Pradier-Fodéré, n. 298 et 299; Guillouard, n. 85. — Contra Alb. Holin, l'rinc. de dr. int. privé, III, n. 1346 et 1347. l3i Pardessus, Cours de dr. comm., V, n. 1492; Massé, Dr. comm.. II, n. 124; Von Bar, Théorie und Praxis der intem. Privalrechts, 2» éd., II, p. 109, n. 284. 122 DU PRÊT DE CONSOMMATION 759. Le remboursement peut, si le lieu du remboursement diffère du lieu du prêt, se faire en monnaie ayant cours au premier de ces lieux ('). 760. Il est certain qu'en cas de faillite ou de liquidation judiciaire d'une société (') les obligataires ou prêteurs ne peu- vent exiger le paiement de la somme à laquelle ils auraient eu droit à l'époque fixée pour l'amortissement du titre, car dans cette somme figurait la prime de remboursement, laquelle est compensée en partie au moyen d'une retenue faite, jusqu'à l'époque de l'amortissement, sur les intérêtsannuels(3). Dans une certaine opinion, la société doit payer, outre les sommes versées lors de l'émission et les intérêts courus, la ditiérence entre l'intérêt légal des sommes versées depuis le jour de rémission et l'intérêt réellement payé jusqu'à ce jour aux obligataires ('). Cette solution repose sur l'idée inexacte que la société aurait emprunté au taux légal si elle n'avait pas réalisé son emprunt sous la forme d'obligation à prime Elle n'est donc fondée que si, en fait, cette observation peut être considérée comme conforme à la vérité (B). 761. Le remboursement doit porter en tout cas sur le capital versé par les obligataires et sur les intérêts courus jusqu'au jour de la faillite et de la liquidation judiciaire 762. En dehors de ce premier remboursement, la question de savoir quelle est la somme à rembourser en cas de liqui- dation pour les chances de primes dépend des circonstances. Les tribunaux doivent tenir compte du temps écoulé depuis 1 Von Bar, op. cit., Il, p. 1U9, n. 284 ; Alb. Rotin, Princ. du dr. int. privé. III, n. 1045. • fies événements donnent lieu au remboursement. — V. infra, n. 785. (») Gass. civ., 10 août 1863, S., 63. 1. 428, D., 63. 1. 349. — Cass. civ., 29 juin 1881, S., 83. 1. 218, D., 82. 1. 106. — Cass. civ., 18 avril 1883, S., 83. 1. 441, D., 8i. 1. 25. — Cass., 2 fév. 1887, S., 88. 1. 57, D., 87. 1. 97. — Cass., 10 mai 1887, S., 88. 1.57, D., 87. 1. 334. — Paris, 23 mai 1862, S., 62. 2.327. — Douai, 24 janv. 1873, S., 73, 2. 244, D., 74. 2. 203. — Paris, 28 janv. 1879, S., 79. 2. 52, D„ 80. 2. 25. — Tiïb. corn. Seine, 22 déc. 1885, Droit, 20 janv. 1886. — Labbé. Noie, S., s3. 1. 441: Lacour, Ann. dr. comm., III, 1889, .lurispr.. p. 66. — Contra Lyon, s août 1873, S.. 74. 2. 105, D., 74. 2. 201. («) Paris, 23 mai 1862, précité. 5 Lacour, op. cit., p. 67. (•) Trib. corn. Seine. 22 déc. 1805. précité. — Ladour, Ann. dr. com ., III. Jurispr., p. 66. Kl HBOI RSEJ1EM l ÊPOQI I. 123 rémission des titi-es, (lu temps ;'t courir jusqu'à l'expiration V. infra, n. 1094. &EMBOI B8EMEMT fcPOQJ l 42«*> fixé (1 . car la loi s'exprime «l'une manine j»l us l.ir^o il;ms Part. 1901 que dans l'art. 1900. Le juge examinera si le débiteur es! dans une situation à pouvoir B'acquitter (')'. Il aura le môme devoir devant la clause de remboursement « aussi Lot que possible, dès que le débiteur aura gagné quel- que argent » ('), ou « quand la situation financière du débi- teur le lui permettra » ('). 767. Les mots « lorsque sa position le lui permettra » équi- valent aux mots « lorsqu'il le pourra »> : le créancier, pour obtenir le remboursement, doit démontrer que le débiteur est en état de payer Il en est de même de la clause que le débiteur rembour- sera « au cas de retour à meilleure fortune ». On peut même admettre, selon les circonstances, que le créancier ne pourra rien réclamer au débiteur tant que ce dernier n'aura pas pas payé les autres créanciers (6). 768. Les mots « quand il le voudra » donnent au débiteur plus de liberté que ceux « quand il le pourra » <"). Mais ils ne dispensent pas le débiteur de payer (")'. Toutefois il se peut que les parties aient entendu conférer a l'emprunteur le droit de restituer quand cela lui convien- drait : on a dit qu'il y a alors constitution de rente perpé- tuelle (•). Cela n'est exact que si le prêt est à intérêts; dans le cas contraire, les parties ont entendu stipuler un terme indéfini (I0). En principe, on préfère la première .interprétation parce 1 Laurent. XXVI, n. 5U4: Guillouard, n. 106. — Contra Hue, XI. u. 172. Bordeaux, 22 juin 1833, S.. .33. 2. 547. — Bordeaux, 7 avril 1838, S., 40. 2. 02. — Troplong. n. 261 ; Aubry et Hau, IV, p. 87, § 303, note 3; Laurent. XXVI, n. 503 s.; Guillouard, n. 106; Wahl, Note, S., 96. 4. 17. Trib. paix Lille, 22 août 1894, Loi. 3 oct. 1895. ' Rennes, 24 jauv. 1889. Gaz. l'ai.. 89. J . 234. • r'i Bordeaux, 6janv. 1869, S., 69. 2. 180. —Guillouard, n. 107; Wahl, loc. cit.; Hue, loc. cit. » Houen, 31 déc. 1891, Rec. du Havre, 92. 2. 174. Wahl, loc. cit.; Hue, loc. cit. " Wahl, loc. cit.; 1 lue, loc. rit. Guillouard, n. 107 et 177. Wahl, loc. cit. 426 DU PRÊT DE CONSOMMATION que la rente perpétuelle est moins usitée que le prêt ('). Il nous semble qu'elle doit être elfectivement préférée, mais seulement si les parties ont déclaré faire un prêt et non pas si elles ont parlé de rente perpétuelle. La première interprétation doit en tout cas être préférée si aucun intérêt n'est stipulé (-'), car alors, en donnant un droit absolu au débiteur, on annulerait le contrat (3). D'autres pensent que le remboursement doit avoir lieu au décès du débiteur i* . le créancier ayant voulu accorder au débiteur une faveur personnelle. Cette interprétation peut sans doute être imposée par les circonstances (5) et résulter notamment des relations personnelles existant entre les parties ; mais, en principe, elle ne nous parait pas exacte (6), car si les engagements se transmettent aux héritiers du débiteur, les héritiers peuvent également invoquer les restrictions apportées à ces engagements, chacun étant censé avoir stipulé pour ses ayants-cause à titre universel (C. civ., art. 1122). 769. La stipulation que le prêteur s'en rapporte à la loyauté ou à la bonne foi de l'emprunteur peut donner, en fait, à ce dernier le droit de fixer librement, sans l'intervention de jus- tice, l'époque du remboursement (7j. Il en est de même de la clause que le remboursement aura lieu à la disposition de l'emprunteur. Mais, en principe, cette interprétation doit, dans l'une et 1 Guillouard, n. 177. - Wahl, lie. cit. (») Infra, n. 769. («) Paris, 14 mai 1*57. S., 58. 2. 425. — Garni. 23 mai 1883, Panier., 83. 2. 361, Journ. dr. //(/.. XI, 1SH4. p. 424. — Demolombe, XXV, n. 319;Aubry et Ran. IV. p. 86, § 303, note 2; Pont. I. n. 181. — V. aussi en ce sens (.;. civ. autrichien, § 904. (s) Wahl, loc. cit. 6 Wahl, loc. cil. ; Hue, loc. cil. {') Bordeaux, 31 mai 1848, S., 48. 2. 60i, D., 48. 2. 180. — Guillouard, n. 107 '■ Cpr. Hue. / qui poilc sur un objet déterminé, que pour le prêt de con- sommation, i RSf KBNT — ÉPOQI I 433 781. Toutefois les considérations sur lesquelles nous avons fondé ootre principe sont des considérations tirées du but que se sont proposé les parties, c'est-à-dire des considérations de fait. Donc, les juges du fond, qui apprécient souverainement le fait, sont libres de décider, sans avoir à redouter la censure de la cour de cassation, que le terme n'a été stipulé qu'en faveur du créancier, et que le remboursement par anticipation est possible ('). Quelle (pie soit leur décision, la cour de cas- sation ne peut la contrôler (2). 782. Dans tous les cas, on admet généralement qu'en ma- tière commerciale le terme est stipulé en faveur des deux par- ties (s). Par suite, une société commerciale ne peut rembourser par anticipation les obligations qu'elle a émises (*). 783. Lorsqu'une société ne se conforme pas à son tableau d'amortissement, on admet que les obligataires peuvent demander leur remboursement dans les mêmes termes que si la société était en liquidation (5). 784. Alors même que les prêteurs ont su la destination des fonds empruntés, ils ne peuvent être forcés d'accepter le rem- boursement anticipé par le motif que cette destination aurait cessé (8) 785. Mais la société en liquidation peut rembourser immé- diatement tous ses obligataires sans se conformer au tableau été soutenue par la raison que l'Etat est couvert par une loi qui a ordonné le paie- ment anticipé, et par suite n'a pas fait un acte contraire au droit précité. — Bré- înond, loc. cit., p. 27. — V. cep. cons. d'Etat, 7 déc. 1894, précité. — Arrivière, loc. cit. (') Cass., 29 juill. 1879, S., 80. 1. 109, D., 80. 1. 39. (2) Cass. req., 21 avril 18%, S., 97. 1. 481, D., 96. 1. 484 {confirmant Paris, 18nov. 1895, précité). {*) Nancy, 10 juill. 1882, S., 83. 2. 237. (') Nancy, 10 juill. 1882, précité. (5) Trib. civ. Seine, 26 janv. 1893, Gaz. Pal., 93. 1. 168. (') Décidé cependant que les obligataires d'une société peuvent être obligés d'ac- cepter le remboursement anticipé, s'ils ont su que l'emprunt était destiné à l'Etat et si une loi a forcé la société à recevoir elle-même de l'Etat son remboursement anticipé. — Trib. corn. Seine, 11 nov. 1895, Gaz. Pal., 96. 1. 296. — Ce jugement s'appuie sur qu'en fait (et cela était d'ailleurs inexact) le prêt était, en réalité, fait par les obligataires à l'Etat, qui voulait éviter un emprunt direct. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 28 ■434 DU PRÊT \)E CONSOMMATION d'amortissement ('), car si la société en liquidation subsiste comme personne morale, elle ne peut être tenue que des engagements de la société compatibles avec la cessation des opérations sociales. La liquidation, loin de permettre leur continuation, implique la réalisation immédiate de l'actif. D'un autre côté, l'observation de la loi du contrat exigerait qu'il fût distrait de l'actif un capital suffisant pour le service annuel de l'amortissement; or, le placement d'un capital est étranger à la mission des liquidateurs. 786. Cette solution est exacte alors même que la liquida- tion, loin de résulter d'une cause fortuite, comme l'insolvabi- lité de la société, provient d'un acte purement volontaire de cette dernière, comme la vente à l'Etat du réseau de chemin de fer qu'elle exploitait (*), ou une décision de l'assemblée générale fondée sur l'absence de bénéfices (3). Il reste d'ailleurs au créancier la ressource d'obtenir des dommages-intérêts. 787. D'autre part, il va sans dire que la convention por- tant que le débiteur pourra rembourser les sommes prêtées avant l'échéance est licite (*). Ainsi, lorsque les titres ou les prospectus d'émission por- tent que le remboursement des obligations aura lieu en un nombre déterminé d'années au plus tard, l'emprunteur se réserve implicitement d'opérer le remboursement avant cette époque (8). 788. Enfin, le Crédit foncier de France a le droit de rem- bourser avant terme les obligations qu'il émet, dans les limites du décret du 28 février 1852, qui, en permettant aux l'i Cass. civ., 2 fév. I^s7. S.. 88. 1. 57. IL, 87. 1. 97. — Cass. civ., 10 mai 1887, 3 3R. 1. 57, D., 87. 1. 334. — Trib. civ. Seine, 28 nov. 1888, Ann.dr. comm., 89. iô. _ Tri!), civ. Lille, 6 déc. 188S, Caz. l'ai.. 89. 1. Suppl., 15. — Lacour, Xotes, An,,, dr. corn., I, 1887, Jurispr., 157. n. 2, et 1889, Jurispr., p. 65. — Contra Labbé, Soie. S.. 83. !. 141. !) Cass. civ., 2 fév. et 10 mai 1887, précités se fondent sur ce que, dans l'espèce, les obligataires pouvaient s'attendre au radiât prévu dans les statuts). — Lacour, p. 159 et p. 65. (») Trib. civ. Lille. 6 déc. 1888, précité. (*) Fière.jouan du Saint, op. cit., n. 217. (*) Trib. corn. Seine, 9 jaav. 1893, Gaz. Pal., 93. 1. 154. — Trib. civ. Seine, 15 fév. L893, Ann. dr. comm.. 94. 1. 23. — Chavegrin, Note, S., 97. 1. 481. aBMBOUBSEMENT — LIEU 435 emprunteurs du Crédit foncier de se libérer par anticipation et en obligeant le Crédit foncier à ne jamais avoir en circula- tion des obligations pour une valeur supérieure à celles des prêts hypothécaires qu'il a consentis, lui confère implicite- ment If droit d'éteindre les obligations jusqu'à concurrence des emprunts qui lui sont remboursés ('). III. Lieu du remboursement. 789. Si le prêt est fait sans intérêts, le remboursement doit être l'ait au lieu où le prêt a été contracté (2), Cette solu- tion était déjà donnée par Pothier, et c'est une raison pour l'accepter encore aujourd'hui. Elle résulte, au surplus, de l'art. 1903, qui, au cas où l'emprunteur ne fait pas volontai- rement la restitution, lui impose de la faire « au prix... ; comme la restitution imposée n'a pas d'autre but que de mettre le prêteur dans la même situation que s'il avait obtenu la restitution volontaire, c'est également, en cas de restitution volontaire, le lieu du contrat ) Trib. civ. Annecy, 21 juin 1888, Pand. franc., 89. 2. 50. — Guillouard, n.87. 412 DU PRET DE CONSOMMATION sans transférer la propriété de la chose et ainsi, l'usage et la propriété se confondant, on n'a donné que la propriété et on ne peut exiger que l'équivalent de cette propriété ('). Ce raisonnement porte à faux : la partie qui, actuellement, se dépouille et qui ne reçoit l'équivalent de sa propriété que plus tard, perd jusqu'au remboursement l'usage de sa chose et réclame légitimement l'équivalent de cette privation de jouissance. D'autre part, cette jouissance est une source de bénéfices pour l'emprunteur; il est donc juste que l'emprun- teur en paie l'équivalent. Enfin, au moment de la restitution, l'emprunteur peut être insolvable et c'est un risque autori- sant le prêteur à stipuler plus qu'il n'a prêté [2). 803. La loi de Moïse défendait le prêt à intérêts entre Hébreux, mais permettait aux Hébreux de prêter à intérêt aux étrangers (3). 804. Eu Grèce, le prêt à intérêt était permis et usité (4). 805. A Rome, le mutuum était essentiellement gratuit, mais cela ne signifiait pas que les intérêts fussent inter- dits (5), seulement il fallait un contrat indépendant, une sti- pulation pour les faire courir (6). I d pacte même suftisait dans le nauticum fœnus (prêt à la grosse et dans les prêts faits par les cités (T . L'intérêt courait même de plein droit quand il s'agissait de prêts d'argent faits par les banquiers (8j. 806. L'effet du christianisme sur la prohibition de l'inté- (») Polhier, n. 53. |s) Guillouard, n. 109. ') L'ancien testament parait, en effet, défendre l'intérêt (Lib. Psalm., 14), mais seulement quand le prêt est fait à un frère Levitic, XXV, 35; Deutor., XXI11, 19; Ezech., XVIII . — Voh Lilienlhal, Holtzendorff s Rechtelexikon, V Wucher, III. p. 1346. — D'autres disent que les textes précités interdisent seulementl'usure. — Cpr. Albert Wahl, Tr. tfiéor. et pral. des litres au porteur, I, n. 16. — Sui- vant une troisième opinion, le prêt à intérêt était interdit sans restriction. — Laiitli, lier. lus', du droit, XV, 1869, p. 96. (•) Diodore de Sicile, liv. I, ch. 79. — V. Bœckb, Staatshaitshall (1er Atliener, \. ï 22; Wahl, op. cit., I, n. 18. — V. infra, n. 813. »] V. infra, n. 814. (6) Accarias, Précis de dr. romain, II, n. 589; Girard. Minitel de d>\ romain, 2« éd., p 502. " L. 7, D., de naut. fœn., 22. 2. — L. 30, D., de usur., 22. 1. isi Xov. 136 de Justinien. IN 1MU.IS — B1ST0RIQ1 i A 13 rôl n«' fui pas immédiat. Sans doute on trouvait le prêt à intérêt peu moral, soit à raison de certaines expressions de l'Evangile selon Saint Luc ('), et de la prohibition contenue dans l'Ancien Testament, soit à cause de l'obligation de cha- rité imposée aux chrétiens et du caractère naturellement improductif de l'argent; mais les clers eux-mêmes ne se con- sidéraient comme liés par aucune prohibition (2). Les conciles commencèrent par interdire aux clers le prêt à intérêt sous peine de révocation (3). Car une décision anté- rieure, qui le prohibait d'une manière générale (*), est d'une authenticité contestée. 807. C'est dans les pays où dominait l'Eglise grecque que se rencontre la première prohibition législative de l'intérêt, mais elle fut rapidement supprimée (5). La prohibition absolue fut en même temps, au viue siècle, édictée par certains synodes (6) et par le pouvoir royal en France [']. Mais dès le xiv" siècle, la prohibition disparut pour faire place à la limitation du taux de l'intérêt (8). Peu après, la prohibition religieuse devint générale dans la chrétienté ('). 808. Ce qui permit de maintenir pendant longtemps l'ob- servation de ces prescriptions religieuses, c'est que les Juifs, qui n'avaient pas à les observer, continuèrent à procurer, sous (') Mutuum dare nihil inde sperantes, 6. 35. (2) Von Lilientlial, lue. cit. (s) 325. Premier concile œcuménique de Nice. (*) 306. Concile d'Elvira [Espagne). (5) Introduite par l'empereur Basile (867-880), elle fut abrogée par son successeur Léon le Philosophe. (*) 789. Synode d'Aachen et quelques synodes anglais au même siècle. — V. aussi Lauth, Reu. hist. du dr., XV, 1869, p. 96. C) 789. Capitulaire de Charlemagne Pertz, Leges, I, 55 . — 1254. Edit. de Saint- Louis. (8) V. in fret, 815. (9) 1139. Le deuxième concile de Latran défend l'usure, c'est-à-dire tout intérêt de l'argent prêté, sous quelque forme que cet intérêt soit stipulé, et y attache l'in- famie. Le pape Alexandre III punit d'excommunication les usurarii manifesii (C. 3 et 7, X, De usur., 5, 19). — V. aussi pape Grégoire X, C. 1 et 2, VI, De usur., 5, 5 ; C.lément\'(Clement,w?i., Deusur., 5, 5). — L'encyclique Vixpei'venitde BenoitXIV l«r nov. 17i5) part encore du même point de vue. — C'est seulement le 3 juill. 1822 que le Saint-Office a permis le prêt à intérêt dans les limites fixées par les lois civiles. Cette décision a même été combattue par divers canonistes. 444 DL l'KÈT DE CONSOMMATION la forme de prêt à intérêt, des fonds à ceux qui en avaient besoin. L'Eglise défendait à la vérité aux chrétiens d'entrete- nir avec les juifs des rapports commerciaux, mais cette prohi- bition resta sans eifet. Les monastères eux-mêmes, au moyeu-âge, ne se firent pas faute d'emprunter à intérêt ('). On se contenta de limiter, comme nous le montrerons plus loin, le taux de l'intérêt (*). 809. Notre législation intermédiaire déclara le prêt à inté- rêt licite (décret des 3-12 octobre 1789). Il en est de même du code civil, comme l'indique l'art. 1905, dans les termes suivants : « Il est permis de stipuler des inté- » rets pour le simple prêt soit d'argent, soit de denrées ou » autres choses mobilières ». II. Nature de l'intérêt. 810. Les arrérages du prêt peuvent consister en denrées, et cela même si le capital prêté consiste en argent; car du moment que le prêt peut indifféremment porter sur de l'argent ou sur des choses fongibles, les fruits du prêt peuvent être également des choses fongibles; la seule question qui s'élève alors est de savoir si les lois limitatives du taux de l'intérêt sont applicables .Mais en principe, et si une slipulation formelle n'a pas été faite en sens contraire, les intérêts seront payés en argent, alors même que le capital consisterait en denrées; car tel est l'usage, et c'est également ce que supposent les textes. III. Taux de l'intérêt. \. Historique. 811. Le taux de l'intérêt est le rapport existant entre l'in- térêt annuel et le capital. Ainsi, quand, prêtant un capital de 1 Documents cités par d'Arbois de Jubainville. Documents relatifs aux taux de l'intérêt au moyen-âge, Rev. hist. du dr., IV, 1838, p. 419 s. En 1208 notamment prêt à 3 deniers par livre et par semaine, c'est-à-dire à 65, 62 p. 100 par an. |2) V. infva, n. 851. (3) V. infra, n. 829 s. INTÉRÊTS —TAUX ï i.'i 100 pour Imis ans, on s t i £>u !<■ un intérêt de ."> par an, l'inlé- rèl est bu capital comme ."> est à 100 ; il esl de lMi, autrement dit cing pour cent : ce que l'on exprime d'une manière abré- gée à l'aide du symbole suivant : ."> 0 0. Le taux de l'intérêt esl légal ou conventionnel: légal, lors- qu'il est fixé par la loi (art. 1153); conventionnel, lorsqu'il l'est par la convention des parties. 812. Les raisons qui justifient le prêt à intérêt interdisent également la limitation du taux de l'intérêt ('), quoique cer- tains auteurs, qui admettent notre solution sur le premier point, soient en désaccord avec nous sur le second point : la légitimité du prêt à intérêt repose sur l'idée que l'argent est une marchandise qui peut être louée ou vendue comme toutes les autres ; or le prix des marchandises est déterminé par la loi de l'offre et de la demande, sans que l'Etat se reconnaisse le droit d'y intervenir. On objecte que l'emprunteur doit être protégé par le prê- teur à la merci duquel il se trouve. C'est une erreur ; l'em- prunteur ne serait à la merci du prêteur que s'il était forcé de recourir à une personne déterminée et si la loi de la con- currence ne lui permettait pas d'établir une sorte d'enchère entre les capitalistes et de s'adresser à celui d'entre eux qui lui fera les conditions les plus avantageuses. Cette réponse, déjà décisive par elle-même, l'est encore davantage si l'on réfléchit que l'espèce de prêt à intérêt qui joue aujourd'hui le plus grand rôle dans la pratique est celui qui est constitué au moyen d'obligations émises par l'Etat, les sociétés et autres personnes morales. Or, ce n'est pas ici le prêteur, c'est-à-dire le souscripteur, mais bien l'emprunteur qui fait la loi. C'est la société qui, s'adressant au public, dicte les clauses de l'emprunt ; c'est elle qui, par des conditions insidieuses, peut chercher à tromper les souscripteurs; c'est elle enfin dont il faut se défier, au lieu de songer à la proléger. Ce qui condamne enfin l'opinion contraire, c'est que cer- tains de ses partisans admettent, en matière commerciale, la (' Wolowski, Rev. ait.. XXXI, 18G7, p. 235 s.; Hue, XI. n. 184s. - Conlra Guillouard, n. 111. Ai6 DL" l'RKT DE CONSOMMATION liberté du taux de l'intérêt '-). On prétend qu'ici la loi de l'offre et de la demande empêchera l'intérêt de monter à un taux exagéré; pas plus certainement que dans le cas précé- dent. Au surplus, il faut songer que le caractère commercial du prêt se détermine par la destination des fonds empruntés. I >r. quelle que soit cette destination, c'est toujours aux mêmes prêteurs que s'adressera l'empruiiteur et, à supposer qu'en matière civile l'emprunteur mérite d'être protégé, il le mérite également en matière commerciale. 813. En 'irèce, au moins à Athènes, il n'existait aucune limitation du taux de l'intérêt : 814. A Home, la première limitation du taux de l'intérêt parait avoir été introduite par la loi des Douze Tables. Le maximum du taux de l'intérêt fut le fcenus unciarium, c'est-à- dire un douzième cela revient peut-être à un dixième, l'année étant de dix mois , ou peut-être douze pour cent (3). D'autres lois modifièrent les bases de la liquidation (*), 815. Dans l'ancien droit, le prêt à intérêt ne fut complète- ment interdit que pendant une courte période ('). Mais jus- qu'à la fin de l'ancien régime, le taux en fut limité (6). ' iluillouard, n. L12. (*) Boeckh, Slralshaushalt der Athener, I. g 22. 1 V. Girard, Manuel de dr. romain, 2« cdit., p. 504, (*) 997. R. f. Lex Duilia et Maenia 'le unciario fœnoré, confirmant la loi des Douze Tables. — 407. Rogalio tribunicia, diminuant de moitié le maximum. — 112, Lex Genucia, défendant tout intérêt. Cette loi ne fut jamais observée. — 561. I.ei Sempronia, étendant les textes précités aux personnes qui ne sont pas citoyens romains. — 70i. Senatusconsulte, intérêt de 12 p. 100 fixé comme maximum dans toutes les provinces. — Justinien le fait descandreàG p. 100; cependant, dans cer- tains cas, il admet 12 p. 100 |L. 26, §§ 1, 2, C, de usur., 4. 32. Nov. 32 à 34). — Les prêts par les personnes de condition et les illustres ne pouvaient pas dépasser 4 p. 100; les prêts des banquiers ou commerçants pouvaient atteindre 8 p. 100. — Le taux de 12 p. 100 était à Byzance le taux habituel. — Cpr. R. Dareste, Les pa- pyrus gréco-égyptiens au musée de Berlin. Nouv. lier, hist., 1894, p. 691. — Le taux du nauticum fœnus fut libre jusqu'à Justinien, qui défendit de dépasser 12 p. 100. (s) V. supra, n. 807. [*) 1206-1218. Ord. de Philippe-Auguste fixant à deux deniers par livre et par semaine le maximum des intérêts que pouvaient stipuler les juifs. D'Arbois de Jubainville, op. cit., p. 419. — 1311. Edit de Philippe le Bel autorisant l'usure tiiontale [4 sous par livre'. Rec. gén. des anciennes lois françaises, III, p. 12. — 1349. Ordonnance de Philippe de Valois. — 1510. Ordonnance de Louis XII, lntI RETS — i.u \ ii7 Dans certaines provinces d'ailleurs, le taux de l'intérêt était pesté libre ('). Malgré la limitation de l'intérêt, certains parlements per- mettaient aux banquiers d'exercer leur profession dans leur ressort, en se fondant sur ce que les prêts faits par les ban- quiers constituent des espèces de sociétés où l'argent de l'emprunteur et l'industrie du prêteur concourent; c'était le système admis par le parlement du Dauphiné (*). Partout ailleurs, la profession de banquier exigeait une autorisation. La sanction de la limitation était très rigoureuse (3). 816. Plusieurs institutions, licites ou non, se développè- rent pour suppléer au prêt à intérêt. Ce fut d'abord la rente perpétuelle, à laquelle, comme nous le verrons, le législateur finit par s'attaquer (*). Ce fut ensuite la société en commandite. La lettre de change fut soumise à certaines restrictions réduisant le maximum du taux à 5 p. 100. — 1567. Ordonnance de Charles IX. Les intérêts ne peuvent dépasser le. denier 12. — 1579. Ordonnance de Blois 'art. 202), Prohibition du prêt, Rec. gén. des anciennes lois franc., XIV, p. 428. — 1581 et 1582. Ordonnance de Henri III. — 1605. Ordonnance de Henri IV. — 1629. Or- donnance de Louis XIII, denier 16. — Sept. 1079. Edit de Louis XIV, denier 18. — Une ordonnance de Charles IX (janv. 1560, art. 60) décida que les jugements portant condamnation pour prêt porteraient intérêt au denier 12 entre marchands et au denier 15 entre toutes autres personnes. V. Bruneau, Nôicv. traité des criées, 3e édit., Paris, 1704, Avant-propos, p. XXVI. — Il faut encore signaler une ordonnance de Charles le Bel (mai 1327, art. 9), obligeant les étrangers qui font le commerce de prêts à l'exercer dans les foires de Champagne, de Brie et de Nîmes. Rec. gén. des anciennes lois franc., III, p. 326. — Dans le Dauphiné, l'usage était primitivement qu'on pouvait stipuler des intérêls au denier 50; plus tard, le maximum fut du denier 16. Arrêts des 26 nov. 1587, juill. 1618, 21 fév. 1642. Chorier, La jurispr. de Guy-Pape, 2« édit. 1769, p. 273. (») D'après Argou (liv. lit, chap. XXXI, II, p. 312), le taux de l'intérêtétait libre en Dauphiné, Provence, Béarn, Franche-Comté et Alsace. Des ordonnances de 1 L42, 1580 et 1581 permettaient aux marchands de Lyon de stipuler ou payer des intérêts. Despeisses, Des contrais, tit. du prêt, sect. III. La conservation de Lyon étendit ce principe aux particuliers, mais le Présidial de Lyon était d'avis con- traire. Despeisses, d'après Bretonnier sur Henrys. (*) Chorier, La jurispr. de Guy-Pape, 2' édit., 1769, liv. IV, sect. VIII, art. 11, p. 272, quest. 287. (3) 1576. Edit de Henri III, ordonnant la confiscation des sommes prêtées à inté- rêts usuraires. L'enregistrement de cet édit fut refusé par certains Parlements. — 1594. Edit de Henri IV, renouvelant le précédent. — 1629. Ordonnance de Louis XIII (art. 151), contenant la même disposition. ' V. infra, n. 818. 418 DU PRÊT DE CONSOMMATION destinées à empêcher qu'elle ne déguisât un prêt à intérêt ; telle était la nécessité d'une remise de place en place ('). In procédé usuel était de stipuler des intérêts moratoires très élevés pour le cas où le capital ne serait pas payé à un terme très rapproché (-). 817. On interdisait le moliatra, c'est-à-dire l'achat de mar- chandises pour un prix déterminé, remboursable dans un an, et qu'on revend immédiatement au vendeur pour un prix inférieur payé comptant (8). Il en était de même de la perte de finance, « qui se fait pat- revente de la même marchandise à personnes supposées » On interdisait également le contrarias triant ou trois con- trats, qui contenait, ainsi que le dit Pothier (:i) : 1° une société dans laquelle celui qui veut disposer de ses fonds apporte dans l'exploitation commerciale de celui qui a besoin d'argent une somme déterminée; 2" un contrat d'assurance par lequel ce dernier assure son capital au premier, en s'obligeant à le rendre après l'expiration de la société et moyennant l'aban- don par le premier d'une quote-part de ses profits sociaux; 3° la vente, par le premier au second, de son apport et du sur- plus de ses profits moyennant une somme égale à la somme apportée, pi us des intérêts annuels. On annulait encore, lorsqu'il déguisait un prêt à intérêt interdit, le contrat jiiynoratif, c'est-à-dire le contrat portant vente d'immeuble à vil prix avec faculté de rachat, suivi d'un bail à ferme du même immeuble par l'acquéreur au vendeur, qui reste ainsi en possession de la chose vendue, en touche le prix et paie un loyer supérieur aux revenus de ce prix (6). 818. Pour compléter ies dispositions relatives à l'usure, d'autres textes limitèrent le taux de la rente perpétuelle (7). (') V. Lyon-Caen, De l'unification des lois relatives aux lettres de change, Jour». dr. int., XI, 1884, p. 351. (2) V. D'Arbois de Jubainville, op. cit., Rev. hist. du dr. fr., 1859, p. 521 (1219 . intérêts moratoires de l« ► < * 0. (s) V. IJruneau, ZV. des criées, 3« édit.. l|c part., chap. III, p. 18 ; Ferrière, Die/, de tir. et depratiq., v° Mohalra. (*) Ferrière, loc. cit. I5) Tr. du contrat de soc, n. 22. i°i Dumoulin, De tisur., 5(J, n. 392; Loisel, Inslil. coût., liv. IV, lit. I, règle 11. C) V. infra, a. 949. INTÉRÊTS — TAUX 449 819. La législation intermédiaire, après avoir maintenu la limitation du taux de l'intérêt ('), finit par la supprimer (2). L'art. 1 de la loi du 5 thermidor an IV, qui fut le dernier texte promulgué sur ce point, élait ainsi conçu : « A dater » de la publication de la présente loi, chaque citoyen sera » libre de contracter comme bon lui semblera : les obligations » qu'il aura souscrites seront exécutées dans les termes et » valeurs stipulés ». La jurisprudence concluait de cette dis- position que la liberté des parties, au sujet du taux de l'intérêt, était maintenue. 820. Il parait que la liberté proclamée par le droit inter- médiaire produisit des abus sérieux, dus évidemment au peu de sécurité qui, dans cette période troublée, accompagnait les transactions, et les travaux préparatoires du code civil con- tiennent la trace des préoccupations que cet état de choses entretenait dans l'esprit des rédacteurs du code civil (8). On discuta s'il fallait maintenir cette liberté. Néanmoins le code civil consacra la liberté des parties. Ce ne fut pas toutefois sans de vives résistances. L'art. 1907 al. I porte les traces de la lutte qui s'engagea à ce sujet : « L'inté- » vêt est légal ou conventionnel. L'intérêt légal est fixé par la » loi. L'intérêt conventionnel peut excéder celui de la loi, » toutes les fois que la loi ne le prohibe pas ». Le code civil ne contient pas de dispositions qui prohibent dans des cas particuliers la stipulation d'intérêts dépassant le taux légal. Les mots qui terminent le texte précité faisaient donc proba- blement allusion à des lois futures, que les adversaires de la liberté du taux de l'intérêt entrevoyaient comme devant appa- raître dans un avenir prochain et qui effectivement ne se sont pas fait beaucoup attendre. Le motif donné de ce renvoi est que la question doit être résolue diversement selon les cir- (') Béer. 3-12 oct. 1789, maintenant la limitation du taux de l'intérêt « sans rien innover aux usages du commerce ». On concluait de là qu'il n'y avait pas de limi- tation en matière commerciale. H Décr. 11 19 avril 1793, supprimant cette limitation, parce que « l'argent est nne marchandise », mais défendant lecommerce de l'or cl de l'argentpour lui subs - lituer le commerce des assignais. — Décr. 6 flor. an III rétablissant le commerce de l'argent. — Décr. 2 prairial an III le supprimant à nouveau. (") Discussion au conseil d'Etat, Fenet, XIV, p. 429 s. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 29 4">0 DU PHÊT DE CONSOMMATION constances et ne peut être, par conséquent, tranchée dans le code civil, destiné à être une loi immuable ('). Quoi qu'il en soit, il résultait de l'art. 1907 que le taux de l'intérêt était libre *). Tout ce qu'exigeait le code, c'est, comme nous le verrons, que le taux fût (ixé par écrit. Le taux de l'intérêt étant libre, on pouvait également sti- puler les intérêts des intérêts sans limitation ('). 821. La loi annoncée par l'art. 1907 a été rendue le 3 sep- tembre 1807; elle a pour titre : Loi sur le tai/x de l'intérêt de l'argent. L'art. 1 limite le taux de l'intérêt conventionnel : « L'inté- rêt conventionnel ne pourra excéder, en matière civile, cinq pour cent; If tout sans retenue ». Ces derniers mots font allu- sion à une pratique de notre ancien droit, que le législateur rappelle pour l'abolir ('•), et que nous retrouverons à propos des rentes : le débiteur d'une renie était autorisé à retenir sur les arrérages l'impôt établi sur le revenu par les lois. L'art. 2 fixe le taux de l'intérêt légal : « L'intérêt légal » sera, en matière civile, de cinq pour cent, et en matière » de commerce, de six pour cent, aussi sans retenue ». Le taux de l'intérêt est plus élevé en matière commerciale, parce que celui qui emprunte de l'argent pour le commerce fait courir au prêteur un plus grand risque et que d'autre part il retire du prêt un plus grand profit. Preunia mercatoris pluris valet quam pecunia mm mercatoris, dit Stracclia. A ce double titre, il est juste que l'emprunteur paye un intérêt plus élevé. Le taux de l'intérêt légal est réduit par une loi en prépara- tion : il ne sera plus que de cinq pour cent en matière com- merciale et de quatre pour- cent en matière civile. 822. Un verra que la doctrine et surtout la jurisprudence ont interprété de telle manière la loi de 1807, qu'elles ont (') Discours du tribun Albisson au corps législatif, Fenet, XIV, p. 173. — Dis- cours du tribun Boutte ville, Fend, XIV, p. 4615 — Ce dernier orateur proposait même de laisser au gouvernement le soin de fixer et de modifier le taux maximum de l'intérêt. (J) Cass., 3 mai 1809, S. chr. - Cass.,20 l"év. 1810, S. chr. — Cass., II avril 1810, S. chr. — Guillouard, n. 11*. (') Cass., 20fév. 1810, S. chr. — Cass.. 5oct. 1813, S. chr. — Guillouard, n. 118. *) Guillouard, n. 146. in rÉBÊTS i \i \ Loi fréquemment admis la validité d opérations conclues moyen- nant un inlérêl supérieur au taux maximum. Ce son I ces solutions de la jurisprudence qu'on a surtout invoquées pour demander une modification plus complète de la loi de 1807 ' . Des propositions nombreuses ont été faites, en eôet, pour rendre libre le taux de l'intérêt ! . Celle qui fut faite en 1881, à la Chambre, par M Truelle, et que la commission nommée iiour l'examiner avait favorablement accueillie (*), est deve nue après l'adoption d'un amendement ' , la loi du I2jau vier 188ii. Nous indiquerons d'autres lois (jui, clans des cas spéciaux, suppriment la limitation du taux de l'intérêt ou élèvent le maximum de ce taux. 823. Dans la plupart îles pays étrangers, le taux de l'inlé- rêl est libre Chambre des députés 'discours de M. Truelle, ./. 0//'.. mars 1882, Déh. pari . i Ih ambre, p. 287). Proposition Lherbette, rejelée par la Chambre. — 1862. Proposition Michel Chevalier, rejetée par le Sénat. — 1871. Proposition Limpérani, non dis- cutée. — 1876. Proposition Truelle, non discutée. — 1879. Proposition Truelle; rapport de la commission proposant l'abrogation en matière commerciale [J. 0//'.. juil. 1S7'.», p. 6999}. La proposition n'a pas été discutée en ce qui concerne le droit civil. (' Rapport Andrieux, ./. 0//'., mars 1882, /' >c. pari., p. 480. ' I >e M. Laroze. Allemagne. La prohibition du prêta intérêt, introduite par le droit canon, n'y eut pas grand résultat. Von Lilienlhal, lue. cit. — Luther défendit le prêt à iulé- rèt ; les vieillards, les veuves et les orphelins peuvent seuls emprunter à intérêts. Luther, Œuvres édit. Erlangen), XXIII, p. 406, sermon de 1540. Le principe ne f.il cependant pas modifié et l'introduction du droit romain contribua à maintenir I • droit de prêter à intérêt, mais elle conduisit aussi à faire admettre un maximum de 50/0 Windscheid, Pandekten, II, § 260 3° ; Arnlz, id., § 210-3»). — 1654. Déci- sion du Reiclislag limitant le taux de l'intérêt. — Bade [C. civ. français, la loi de 1*07 n'y a pas été introduite;. — Bavière (L. introductive du C. pén. de 1861, ii. 5, L.Ddéc. 1867 . — Brunswick L. 18 avril 1867).— Brème L. 27 déc. 1858 .— Cubourg L. 10 fev. 1860 . — Francfort (L. 2 fév. 1864). — Hambourg L. intro- duclive du C. co.. 22 déc. 1865, § 33.!. — Lubeck (L. 31 juin 1862). — Oldenbourg I.. H juin 1858 . — Saxe royaume L. 25 oct. 1864 . — Saxe-Meiningen (L. 7 juil. lv*>7 . — Saxe-Weimar 1858 . — Wurtemberg C. de police pén., 1839, art. 75. !.. 1er mai I8i'.> . — En Prusse, au contraire, le taux de l'intérêt est limité. Ord. 12 mai 1860, et 3 janv. 1867. — Le C. co. avait élevé le taux légal entre com- merçants à 60 0 art. 287 . — La loi d'Empire du 14 nov. 1867 décida que le taux de l'intérêt serait libre. Elle lut promulguée dans tous les pays, sauf en Bavière, 4')2 DU PRÊT DE CONSOMMATION B. Contrats auxquels s'applique la limitation du taux; calcul du maximum de l'intérêt. 824. La limitation du taux de l'intérêt s'applique à toutes les variétés du prêt d'argent; elle s'applique notamment, comme nous le verrons, à la constitution de rente perpé- tuelle. 825. Mais la limitation du taux de l'intérêt ne s'applique où elle fut remplacée par la loi analogue de 1807 précitée. Elle permettait à l'em- prunteur, si les intérêts dépassaient G 0/0, de dénoncer le contrat dans les six mois du jour où il avait été passé en remboursant le moulant du prêt six mois après la dénonciation. Le C. civ. (art. 247 reproduit cette dernière solution ; mais sa loi d'introduction (art. 37) abroge la loi de 1867. — Vne loi d'Empire du 24 mai 1880 punit peuplement ceux qui abusent des besoins ou de l'inexpérience des emprun- teurs pour se faire allouer un intérêt exagéré ou qui exercent d'une manière habi- tuelle l'usure. — Autriche. Patente du 26 avril 177)1 limitant le taux de l'intérêt. — Edit. de 1787 abrogeant celte limitation par le motif qu'elle nuisait aux affaires. — Patente 2 déc. l v 1 3 remettant la limitât nui en vigueur, sauf entre commerçants. — L. 1 i déc. 1866 la supprimant à nom eau tout en maintenant les peines de l'usure. V. aussi L. 14 juin 1868. — La L. 28 mai 1881 réprime, au point de vue pénal, les exploitations contre les emprunteurs bois d'état de se proléger, mais seulement en matière civile. — Hongrie. Libellé, mais une loi du 2 mai 1883 reproduit la loi autriebienne île 1881. — Angleterre. Le laux de l'intérêt est libre d'après une loi du 10 août 1834 17 el 18 Vicl.,cap. 90 . — V. Trib. civ. Seine, 12 mai 18S5, Jovrn. dr. int., XII, 1885, p. 305. — Brésil. L'intérêt est libre depuis 1832. — Canada. Les parties sor.t libres, sauf certaines corporations qui ne peuvent prêter soit à un taux supérieur au laux légal de 60 0, soit au delà d'un taux fixé par les lois spécia- les, et sauf au>M les banques qui ne peuvent prêter au delà de 7 0/0 (G. civ., art. 1785). — Danemark. L'intérêt est libre depuis 1855 (L. 6 avril). — Inde. Le taux est libre. Boscberon-Desporles, Aperçu hist. et anal. dr. hindou, fiev. hist. de dr. //-.. 1855, p. 336. — En Norwège, le taux de l'intérêt est libre depuis 1857; en Suède, depuis 1864. — En Belgique, la liberté a été consacrée par la loi du 5 mai 1865 (cependant peines pour celui qui « abuse des faiblesses ou des passions de l'emprunteur », C. pén.. arl. 494). — Hollande. Liberté depuis la loi du 29 déc. 1857. — Italie. L. 5 juin 1857 pour la Sardaigne et le Piémont, aujourd'hui en vi- gueur dans toute l'Italie. L. civ. de 1866, art. 1831. Déjà, en 1833, le taux de l'in- térêt avait été déclaré libre en Toscane. — Monaco. .Maximum 6 0/0 en matière civile comme en matière commerciale (C. co. 1745, d'après de Rolland, Journ. dr. int , XVIII, 1891, p. 1264). — Espagne. Liberté depuis 1848 ;L. 14 mai 1856;. — Portugal. Liberté G. co. ancien, art. 279, C. co. nouveau, art. I02j. — Etals- Unis. La solutiou varie suivant les Etats: dans la Caroline du Nord,le taux de l'intérêt est limité. V. décision de la cour de la Caroline du Nord, Journ. dr. int., IL 1875, p. 396. — Dans l'Etat de New-York, le taux maximum est de 6 0/0. V. cour circuit Orégon, 9 août 1886, Alb. law Journ., XXXIV, p. 274, Anal. Journ. dr. int.. XVI, 1*89, p. 501. — Russie. Le taux de l'intérêt est libre (décr. 6 mars 1879, G. civ., art. 2020 s.), mais s'il n'est pas déterminé dans l'acte de pi et, il est de 6 0/0. — Suisse. La liberté existe dans les cantons les plus importants (L. gène- INTÉRÊTS TAUX 433 pas aux Intérêts stipulés dans un contrai autre que le prêt(!). C'était déjà la solution de l'ancien droit (*) et notamment de Polhier ' . Kllc se justifie doue en premier liegu par la tradi- tion. Elle se justifie encore par le caractère limitatif dos tex- tes. Aussi bien la loi du 3 sept. 1807 que l'art. Isr de la loi du 19 déc. I8.")(), relatif au délit d'usure, prévoient exclusive- ment le prêt conventionnel, et, comme tous les textes qui restreignent la liberté des conventions, ceux-ci doivent être interprétés restrictivement. Il est vrai que la loi de 1807 parle aussi, en ternies généraux, d'intérêt conventionnel, mais ce terme a pour seul but de s'opposera Y intérêt légal. Ces considérations dispenseraient de réfuter l'objection tirée de ce que les motifs auxquels a obéi la loi commandent d'étendre sa décision à tous les contrats; une identité de mo- tifs ne suffit pas pour conduire à l'extension d'un texte qui déroge au droit commun. Du reste, l'identité de motifs, dans la plupart des cas, n'existe pas. La loi de 1807 est partie, comme d'autres dispositions, de l'idée que l'emprunteur est toujours à la discrétion du prêteur, et que ce dernier fait la loi dans le contrat. Or on ne dira pas que, si le donateur pro- met des intérêts supérieurs au taux légal, il obéit à une pres- sion que le donataire exerce sur lui. On ne dira pas davantage voise du 7 fév. 1857). — Turquie. Maximum 9 0/0 (auparavant 19 0/0). Règle- ment 22 mars 1887, .loum. dr. int., XIV, 1887, p. 514. — Dans la plupart des pays de l'Amérique du Sud, la liberté du taux de l'intérêt a été proclamée plus rapidement qu'en Europe. — Brésil (L. 24 oct. 1832). — Equateur (L. 7 oct. 1833). — Nouvelle-Grenade (1835). — Pérou 1852;. — Uruguay (L. 2 avril 1838). (') Cass., 8 mars 1865, S., 65. 1.171, D., 65. 1. 288 (motifs). — Csss. civ.,13 mars 1899, S., 99. 1. 216. — Hiom, 12 mars 1828, S., 32. 2. 16. — Besançon, 21 juill. 1890, S., 91. 2. 104. - Paris, 20 janv. 1892, S., 94. 2. 169, D.,93. 2.305. — Dijon, 12 déc. 1894, S., 95. 2. 19, D., 97. 2. 203. — Duvergie.r, Rev. dr. franc, et étr., IV, L847, p. 5; Demolombe, XXIV, n. 640; Liégeois, De l'Usure, n. 78, p. 173 s.; Anliry et liau, IV, p. 608, §396, notes 34 s. ; Ruben de Couder, Dict. du dr. corn., v° Intérêts, n. 164 bis; Lyon-Caen et Renault, IV, n. 988 bis; Caillemer, Et. sur les intérêts, p. 84 s.; Guillouard, Tr. du prêt, n. 156 (qui avait admis le contraire TV. delà vente, II, n. 562 ; Baugas, Du prêt à int., p. 158; Bailly, Rev. bourg. d<> l'enseig. sup., V, 95. 2. 162 s. ; Tissier, Note, S., 94. 2. 169. — Contra Bordeaux, 22 nov. 1893, D., 95. 2. 148. — Duvergier, n. 280; Laurent, XXIV, n.332; Colmet de ^anterre, VII, n. 97 bis, I; Boistel, Notes, D., 93. 2. 305, D., 97. 2. 203. -) Déclaration, 28 nov. 1713, citée par le nouveau Denizart, v° Escompte. ' Tr. du prêt de consomption, n. 88. — V. encore pour l'ancien droit, Trop- long, préf., p. cxxxvi. -loi DU PRÊT DE CONSOMMATION que l'acheteur est circonvenu par le vendeur, alors surtout que la loi redoute exclusivement le cas inverse, et accorde au vendeur une action en rescision pour cause de lésion qu'elle refuse à l'acheteur. Au surplus, le donateur, l'acheteur pour- raient promettre une somme supérieure à celie qu'ils s'enga- gent à payer; il y aurait donc contradiction à leur défendre de grossir cette dernière somme d'intérêts supérieurs au taux légal. 826. Ainsi celui qui constitue une dot peut s'obliger à payer, jusqu'à l'échéance des termes pris pour le versement du capital, un intérêt supérieur à o p. 100 ('). De même, dans une vente, le vendeur peut, en accordant ;\ l'acheteur un délai pour le paiement du prix, stipuler que ce dernier en servira jusque-là l'intérêt à un taux supérieur a. 5 p. 100 (').On objecte qu'il s'agit pour le vendeur de faire pro- duire, comme dans le prêta intérêt, un loyer à son argent. Cela est vrai, mais la limitation du taux de l'intérêt ne s'applique qu'au prêt. En vain dit-on qu'il y a, en pareil cas, un prêt effectué brevi manu. S'il y avait un prêt, il faudrait appliquer toutes les solutions relatives au prêt, notamment celle d'après laquelle l'intérêt ne peut résulter que d'une clause formelle. Il faudrait dire aussi que le vendeur tombe s. 100 au débiteur d'un legs ('). La cession de créance pour un prix inférieur à son mon- tant nominal ne peut être entachée d'usure '*). 827. La limitation du taux de l'intérêt ne s'applique même pas aux conventions autres que le prêt qui sont relatives a des opérations île crédit (s). Cette solution, cependant, est contestée par certains des auteurs qui, quant au principe, adoptent notre opinion. Ils se fondent sur l'identité de motifs, qui, ici. est réelle. Mais nous avons montré que l'identité de motifs ne suflit pas pour étendre la limitation du taux de l'in- térêt. La jurisprudence est en ce sens; car de ce qu'elle refuse à L'escompte le caractère de prêt, elle conclut que la limitation du taux de l'intérêt ne s'y applique pas [*). 828. La limitation du taux de l'intérêt, établie par la loi de 1807, ne s'applique pas à plus forte raison aux prêts de den- rées et aux choses mobilières, comme les valeurs de bourse (3 . Le titre même de la loi ne permet guère de doute à cet égard : « Loi sur le taux de l'intérêt de Yargent ». Aussi est-il inexact d'objecter que le code civil assimile entièrement le prêt de denrées au prêt d'argent. — Ainsi je puis vous prêter 100 hec- tolitres de froment à condition que vous m'en rendrez 125 au bout d'un an, ce qui représente un intérêt de 25 p. 100, ou à la condition que vous me paierez en sus des 100 hecto- litres une somme de 500 fr. 829. Mais les lois limitatives du taux de l'intérêt s'appli- quent à un prêt en argent dont les intérêts sont payables en jugement, celte prorogation s'analyserait en un paiement du prix suivi du prêt de pareille somme: la solution varierait donc suivant que l'acheteur obtient la proro- gation dans un intérêt civil ou commercial. [ll Guillouard, u. 156. •) Aix, 11 août 1871, D., 73. 2. 127. (3) Tissier, loc. cit. — Contra Lyon-Caen et Renault. IV, n. 695 et 702 ; Lyon- Caen, Notes, S., 87. 2. 201, et S., 89. 1. 393; Pont, I, n. 284 ; Boistel, n. 695. (*) Cass. crim., 9 nov. 1888, S., 89. 1. 393, D., 89. 1. 272. — V. hifra, a. 848 (5) Cass. req., 8 mars 1865, S., 65. 1. 171, D., 65. 1. 288. — Paris, 12 déc. 1863, S., 64. 2. 21, D.. 64 2. 62. — Aix, 26 jiril. 1871, S., 72. 2. 141, D., 73. 2. 86. — Troplong, n. 361 ; Pont, I, n. 288 ; Aubry et Rau, IV, p. 608, § 396, note 33: Guillouard, n. 155: Hue, XI, n. 183 et 193. — Contra Duvergier, n. 279. 45(3 DU PRÊT DE CONSOMMATION denrées ou autres choses fongibles, car les textes ne font au- cune distinction; la question n'est pratique qu'en matière de constitution de rente perpétuelle et nous la retrouverons en étudiant ce dernier contrat. 830. Il va sans dire que la loi de 1807 reprend son appli- catiqn si le prêt de denrées déguisait un prêt d'argent. Mais il ne suffirait pas (pie l'emprunteur eût l'intention de vendre les denrées pour se procurer les sommes qui lui sont nécessaires ('), car cette circonstance n'empêche pas que le prêt d'argent ne soit sérieux de la pari du prêteur. 831. Lorsque le prêt est mêlé de chances aléatoires, la limitation ne s'applique pas ['). C'est dire que la limitation du taux de l'intérêt ne s'appli- que pas dans L'hypothèse où la stipulation du capital et des intérêts est subordonnée à une condition (8). Dans cette hypo- thèse, l'intérêt comprend, outre le loyer de l'argent prêté, le prix du risque résultant de l'éventualité de l'événement qui entraînera la perte du capital. Cette solution est admise dans les législations étrangères (*). 832. Ainsi le droit romain supprimait la limitation du taux de l'intérêt dans le cas du nauticum fœnus, c'est-à-dire du prêt fait pour aider au transport de marchandises par mer, avec la clause que si les marchandises venaient à périr le capital lui-même ne serait pas sujet à remboursement (s). Cette solution est encore exacte. Elle est formellement con- sacrée par l'art. 311 C. coin. 833. Pour la même raison, la restriction du taux de l'intérêt ne s'applique pas à l'hypothèse où, le prêt étant fait en vue ') Conliu Aubry et Rau, IV, p. 608, § 396, note 33; Guillouard, n. 155. Cass., 6déc. 1886, S., 87. I. H9, D.,87. t. 312. — Cass.crim.,2 juin 1888, S., 89. 1. 393. - Cass. crim.,9 nov. 1888, S., 89. 1. 393, 1)., 89. 1. 272. — Cass. civ., 18 avril 1883, B., 83. I. 361, D., 84. 1.25. — Bordeaux, 22 nov. 1893, D.,95.2. 148. — Lyon-Caen, Rev. crit., X1I1. 1884, p. 331 et Noie, S., 89. 1. 393; Guillouard, n. 154 4i«; Hue, XI, n. 193. J) Mass. req., 6 déc. 1880, S., 87. 1. 119, D., 87. 1. 312. — Décidé cependant qu'un prêt fait à un taux exagéré sur une pension de retraite est usuraire quoique le prêteur doive n'avoir rien à réclamer si l'emprunteur meurt avant l'échéance. — Ai.x, 12 mai L893, Droit, 3 juin 1893. (*J Allemitrjne, Eek, loc. cit. 5 V. supra, a. 814. IN ll.ltKIS I AI \ YM d'une entreprise, il esl stipulé que les intérêts seront propor- tionnés aux bénéfices de l'entreprise ('). 834. La même solution doit être admise dans le cas où le prêteur sur effets de commerce déclare qu'en cas do non paye- ment des effets il n'aura aucun recours contre l'emprunteur ou renonce à ce recours pour le cas où les arrérages de pen- sions sur lesquels il a prêté ne prendraient pas naissance (*). Il en est de même si le remboursement ne doit s'effectuer que clans la mesure de la solvabilité d'une personne dési- gnée ('). 835. De même encore, la limitation ne s'applique pas au cas où il est stipulé que si l'actif de la société emprunteuse ne permet de rembourser qu'une partie de l'emprunt, le surplus ne sera pas sujet à remboursement (v). 836. Mais le fait que la somme prêtée est soumise à des risques particuliers ne légitime pas la stipulation d'un intérêt supérieur à S p. 100 (5), dès lors qu'en toute hypothèse et quelles que soient les éventualités de l'avenir, le prêteur aura droit au remboursement des sommes prêtées; il n'y a pas, en pareil cas, un contrat aléatoire ni conditionnel. On ne peut notamment considérer les obligations émises par une société comme mêlées de chances aléatoires (6), car si le prêteur risque de subir l'insolvabilité de la société, il n'est pas, à ce point de vue, dans une autre situation que tout autre prêteur. 1 Contra Cas*, roq., 5 déc. 1887, S., 90 1, Ï67, D., 88. i. 430 (motifs:. — Guil- louani, Tr. du contr. de soc, n. 18: Lyon-Caen et Renault, II, n. 63. - Lyon-Caen, Suie, S., 89. 1. 393. — Contra Paris, 4 juill. 1888, sous Cass. crim., 9 nov. 1888, S., 89. 1. 393, D., 89. 1. 272. (S Cass. req., 6 déc. 1886, S., 87. 1. 418, D., 87. 1. 312. 4 Cass., 6 déc. 1886, S., 87. 1. 418, D.. 87. 1. 312. — Guillouard, n. 154 bis. *) Cass. crim., 2 juin 1888, S., 89. 1. 393 (prêt sur pensions; ce prêt n'est pas aléatoire quoique les litres de pension soient successives ou insaisissables. Sic Lyon-Caen. loc. cit. infra . — Lyon-Caen, Xote, S., 89. 1. 393. — Contra Bor- deaux, 22 nov. 1893, D., 95. 2. 148 impl.). — Cet arrêt décide que le caractère aléatoire d'un prêt sur pensions ne légitime pas des intérêts usuraires si l'aléa a pour correctif la précaution pour le prêteur de se faire souscrire un titre se renou- velant tous les trois mois. — Trio. civ. Seine, 9 mai 1895, Droit, 25 mai 1895 'prêt an concessionnaire d'une mine d'or pour commencer les travaux). 6 Lyon-Caen, Rev. crit., XIII, 1884, p. 331 et Xote, S., 83. 1. 361; Lacour, .I/o*, dr. comm., III, 1889. Jurispr., p. 68. 438 DU PRÊT DK CONSOMMATION 11 en est ainsi même si les obligations sont remboursables avec une prime à une époque indéterminée ('). Sans doute, les obligataires, par cela même que le sort déterminera l'épo- que du remboursement, courent une chance; le contrat néan- moins n'est pas aléatoire au sens juridique du mot, puisqu'une promesse ferme leur est faite de leur procurer le rembourse- ment de leur titre. 837. Le prêt fait à un militaire qui délègue sa prime de rengagement n'est pas aléatoire, bien que, dans certains cas (*), cette prime doive disparaître, si la délégation n'a lieu qu'à titre de garantie et non pas à litre de paiement, et si, par conséquent, le remboursement doit avoir lieu en toute hypo- thèse (n). Il en esl <-. cil. — Contra Gass. civ., 18 avril 1883. S., 83. 1. 361, U., si. 1. 25. — Douai. 24 janv. HT:;. S., 7.\. i. 244. — Lyon, 8 août 1-7::. S., 7». 2. 106, 11. 74. 2 201. — Rennes, li mai 1884, sous Cass., 2 fév. 1887, S.. 88. 1. 57. H . 87. 1. '.'7. - Hue, XL n. 1'.'::. ■ Mise en réforme, perte de grade, promotion au grade d'officier. Cass. crim., 28 juiu 1893, D.,94. 1.254. 1 Trib. correct. Toulon. 9 fév. 1892, "> Cas^. crim., 9 nov. 1888 s., g ». j. ;;■...;. n., ,vi. j. 272 [rejetant le pourvoi contre Paris, 4 juill. 18S^, précité . « Boistel, Sole, D., 93. 2. 305; Hue, XI, n. 192. INTÉRÊTS TAUX '«•")'• intérêt supérieur à •"» j». 100 s'il trouve dans le contrat, outre l;i jouissance tic la somme prêtée, d'autres avantages encore. 840. (l'est ainsi quese justifiait, selon la jurisprudence, le droit de commission perçu au profit des banquiers, outre l'intérêt, pour leurs soins et démarches, si ces soins étaient réels (' . El aujourd'hui encore, que la loi de 1886 a rendu licite ce droit de commission, considéré connue un supplément d'intérêt, on ne peut faire aucune objection à la stipulation d'une commission qui, dans un prêt civil, porterait la rému- nération du prêteur à plus de 5 p. 100 (*) ; le prêteur qui prête des capitaux étrangers, qui est obligé de rechercher ces capi- taux et d'en servir lui-même l'intérêt, perçoit légitimement pour ce l'ait une rémunération; c'est la solution qu'on appli- quait au banquier; on pouvait ajouter en faveur du banquier un argument spécial : comme il fait commerce de prêter les capitaux étrangers, ce commerce nécessite une installation et des employés, l'obligation d'un approvisionnement anticipé, (')Cass., 17 mars 1862, S., 62. 1. 130.— Cass., 29 janv. 1867, S.. G7. 1. 245. — Cass., 28 avril 1869, S., 6'.». 1. 30(5. — Cass., lk juin 1870, S., 70. 1. 399. — Cass., 13 fév. 1872, S.. 72. 1. 17. — Cass. civ., 15 iiov. 1875, S.. 76. 1. 69, D., 76. 1. 171. — Cass. civ., 4 janv. 1876, S., 76. 1. 65,D., 76. 1. 337. — Cass.crim., 16 août 1877, S., 78. 1. 331. — Cass., 14 janv. 1878, S., 78. 1. 395. — Cass. req., 11 fév. 1878, S., 78. 1. 393, D., 78. 1. 119. — Cass. req., 24 mai 1880, S., 81. J. 101. — Cass. req., 13 fév. 1883, S., 8-4. 1. 153. — Cass. req., 5 nov. 1884, S., 97. 1. 281 (en note , D., 85. 1. G7. —Cass. req., 11 déc. 1888, 8., 89. 1. 197. — Nancy, 8 jnil. 1858, S.. 58. 2. 698. — Rennes, 13 mars 1876, S., 79. 2. 257, D., 79. 2.93. -Orléans, 17 fév. 1881, S., 82. 2. 245, D., 82. 2. 172. — Grenoble, 18 mars 1887, Rec. Grenoble, 87. 121 (avant L. 1886). — Agen, 20 mai 1887, liée d'Agent SI. 135 (depuis L. 86). — Saalnier de la Pinclais, Concl. sons Rennes, 21 mai 1879, S., 80. 2. 73; Troplong. ii. 382; Bédarride, Tr. du dol et de la fraude. 4e éd., n. 1131 ;Dietz, Du compte- courant, p. 228; L)a, Du compte-courant, a. 142; Lyou-Caen et Renault, IV, n. 695 et 846; Bois tel, Précis de dr. coin., a. 647. — Contra Agen, 19 juil. 1854, S., 54. 2.593, D., 55. 2. 164. — Duvergier, n. 269 et De la loi sur le taux de l'intérêt appliquée a l'escompte el aux commissions de Banque, Heu. de dr. franc, et élr.. IV, 1847, p. 453;Thézard, lieu, crit., III, 1873-74, p. 259; Hue, XI, n. 192. — A plus forte raison le banquier peut-il stipuler une commission pour avoir servi d'intermédiaire entre la maison de banque, constituée en société en commandite. qu'il dirige, et l'emprunteur. Trib. sup. .Monaco, 22 mai 1891, Journ. dr.inl., XVIII, 1891, p. 1263. {-) Cass. req., 19 fév. 1895, D., 95. 1. 224. — Cass. civ., 8 mars 1897, S , 97. 1. 281. — Agen, 20 mai 1887, précité. — Caen, 1er fév. 1888, Rec. Caen. 88. 164. — tiennes, 18 nov. 1889, Rec. Nantes, 91. 1. 117. — Chambéry,6 juin 1890, Rec. Cftam- béry, 90. 209. — Rouen, 24 mars 1893, Rec. Rouen, 93. 1.122. — Bordeaux, 22 nov. 1893, D., 95. 2. 148. — Cuillouard, n. 158. 400 m prêt lu: consommation dont les frais doivent être payés parceux qui entrent en rela- tion avec le banquier. On objecte (pie la loi considère exclusivement la situation du prêteur et ne veut pas qu'il paye plus de 5 p. 100 d'inté- rêt ; cela «-si très exact, mais le salaire de l'intermédiaire qui a rendu service à l'emprunteur n'est pas un supplément d'in- térêt. Evidemment, rien ne s'opposerait à ce que L'emprun- teur, mis directement en relations avec le prêteur par un intermédiaire, promit à ce dernier, soit une somme fixe, soit une commission proportionnelle, à titre de rémunération; comment cette commission deviendrait-elle plus illégale par cela seul que l'intermédiaire, couvrant la personne de celui qui a fourni les fonds, prêterait l'argent d'autrui? 841. La jurisprudence s'autorise à réduire la commission si elle n'est pas en rapport avec le service rendu ('). Cela a été critiqué ') ; si la convention relative au droit de commis- sion est licite, clic doit, dit-on, être exécutée; d'ailleurs le motif sur lequel se fonde la jurisprudence, à savoir que la commission est une rémunération du service rendu, interdit la réduction; car il appartient aux parties d'apprécier la va- leur du service — Mais, d'après la jurisprudence, les salaires du mandataire peuvent être réduits par les tribunaux; or, la jurisprudence sur le droit de commission se fonde également sur ce que le droit de commission est. suivant elle, une rému- nération du mandai. 842. Cette jurisprudence a, depuis la loi de 1886, le résul- tat inattendu de faire tourner au préjudice du banquier la solution admise en sa faveur. En effet, la jurisprudence admet, comme nous le montrerons >{*), que le prêt fait par un ban- quier est un prêt commercial qui échappe, comme tel, et con- formément à celte loi, à la limitation du taux de l'intérêt; mais le droit de commission, étant la rémunération du man- dat, continue à être réductible s'il est exagéré ('). Il résulte Cass., 29 janv. 1867, S.. 07. 1. 245. — Cass., 13 fév. 1872, S.. 72. 1. 17. — >--.. 11 déc. 1888, précité. — Cass.. 1'." fév. ls'.)5, précité. — Cass., 8 mars 1897, précité. — Hennés. 18 oov. 1889, précité. '- Lyon-Cacn, Noie, S., 87. 2. 201. I V. in fra, n. 880. » i ;ass., 19 fév. 1895 et 8 mars 1897, précités. iMi.iu rs m\ 161 de là que les banquiers, qui, nvanl lu l<»i de I SS(i, se trou- vaient. ;ni point de vue (!<• l'intérêt qu'ils pouvaient stipuler sous forme de droit de commission, dans une situation supé- rieure à celle des particuliers, sont aujourd'hui moins favori- sés qu'eux. Aussi serait-il, croyons-nous, plus exact de considérer que, depuis la loi de 188G, la commission du banquier n'est pas réductible; comme il a le droit de prêter srs propres /omis au taux le plus élève, il n'est pas exorbitant qu'il réclame, pour une avance portant sur les fonds d'aulrui, un intérêt qu'il a incontestablement le droit de réclamer pour le prêt de ses propres fonds. Au surplus, le banquier ne peut-il pas alléguer que si le caractère de mandataire lui a élé autre- fois, dans son intérêt, attribué par la jurisprudence, ce carac- tère, en réalité, ne lui appartient pas? Il prête en son nom, c'est à lui et non à celui de qui il tient les fonds que le rem- boursement doit être fait. D'après ce qui précède, il ne nous semble pas que la ques- tion de savoir si, en cas de compte-courant, la commission doit se percevoir seulement sur les versements émanés du banquier ou peut l'être aussi sur les soldes reportés à nou- veau lors des comptes périodiques, puisse encore se présen- ter'; la commission est toujours légitimé parce qu'elle est laissée à l'arbitraire des parties. La jurisprudence cependant examine la question: elle admet en général, comme autre- fois ' , l'affirmative (s), et la cour de cassation reconnaît le pouvoir souverain des usages, conslatés par le juge du fait 3 . La même solution est admise, mais toujours à tort, suivant nous, pour la question de savoir si la commission peut être perçue sur le débit du compte sans déduction du crédit 843. Dans tous les cas, le mandataire qui négocie un prêt (') Cass., 8 août 1871, S.. 71. 1. 150. — Cass., 13 Tév. 1883, précité. — Cass., 5 nov. 1884, précité. — Gaen, 5 juill. 1872, sous Cass., 2 déc. 1873, S., 74. 1. 57. — Contra liass.. 16 déc. 1831, S., 55. 1. 105. - <:a..-., 5 déc. 1854, S., 55. 1. ?JK — Boistel, u. 886. • Grenoble, 12 doc 1893, sous Cass. civ., 8 mars 1897, S., '.'7. 1. 281. — Lyon- Caen et Renault, IV, n. 8 iT. 1 Cass. civ., 8 mars 18'J7, précité. ! Hmss. civ., 8 mars 1*97, précité. -Î02 DU l'UKT DE CONSOMMATION cl met en rapport le prêteur et l'emprunteur peut se l'aire allouer une commission ('") dans les conditions qui viennent d'être indiquées. 844. Mais si le prêteur prête ses propres capitaux, il ne peut, eu matière civile, exiger un droit de commission qui, uni à l'intérêt, dépasserait 5 p. I00(*). Ce ne serait là qu'un moyen de stipuler un intérêt illégal, et d'ailleurs une commission suppose essentiellement qu'on remplit le rôle d'un commis- sionnaire, c'est-à-dire qu'on prèle les capitaux d'autrui. 845. Le fait que le prêteur, qui a stipulé une commission sous prétexte qu'il a prêté les capitaux d'autrui, prête en réa- lité ses propres capitaux, peut êtreprouvé par tous les moyens, car il constitue une fraude à la loi. Si le préteur n'indique pas à qui appartiennent les capi- taux qu'il a prêtés, il est censé avoir prêté les siens. Il ne peut même être admis à prouver, pour légitimer la commission stipulée, que les capitaux appartenaient à autrui, car l'emprunteur a dû croire que les capitaux prêtés appar- tenaient au prêteur. 846. La commission ne se justifie pas davantage si l'inter- médiaire s'est entendu avec le propriétaire des fonds dans le luit de prêter les capitaux dece dernier à un intérêt illégal (:i]. Dans ce cas, il y a un véritable acte d'usure auquel l'intermé- diaire s'est associé. 847. Le juge du fait constate souverainement si la commis- sion répond à des soins véritables ' et si elle n'est pas exa- gérée 848. Le droit de commission prévu pour l'escompte d'un (' Duvergier, Rev. dr. fr. et itr., IV, 1 s i 7 , p. 453; Hue, XI, n. 192. — V. supra, ... 840. ')Cass., 26 niai 1855, S., 55. I. 387, 1».. 55. 1. 264. — Cass., 21 avril 1886, D , 87. 1. 85. — Agen, 12 mai 1853, S., 53. 2. 213, D., 54. 2. 281. - Agen, 19 joli. 1854, S . 54. 2 593, D.. 55. 2. 161. — Hennés, 21 mai 1879, S.,80. 2. 73.— Agen, 20 mai 1887, précité. — Bordeaux, Ie' juil. 1892, Rec. Bordeaux, lJ2. 1. 106. — Tiil>. coin. Agen. 11 juin 1887, Rec. Agen, 87. 299. — Troplong, n. 383; Pont, I. n. 293; Aubry et Han, IV. p. 611, § 396, note ii : Guilluuard, n. 1C>7; Duver- gier, Rev. dr. fr. et élr., IV. I,vi7. p. 153. illouard, n. 158. '-• Cass. req., 11 déc. 1888, précité.— Cass. req.,19 fév. 1895, précité.— Cass. rei-, 8 mars 1897, S., r.'7. 1. 281. INTÉRÊTS l ai \ 463 effet de commerce se justifie exactement de la mémo manière que le droit de commission on cas de prôl On peut ajouter (jno celui qui fait escompter l'effet n'est pas le véritable bénéficiaire de l'escompte et qu'il n'y a par suite aucune assimilation à établir entre lui et la personne qui se fait consentir personnellement un prêt; il a lui-même retenu à celui qui lui a présenté l'effet l'intérêt que l'escompteur lui relient ;i son tour; celui qui présente l'effet supporte donc, en dernière analyse, cet intérêt. 849. De même encore, il n'y a rien à redire à une conven- tion où les membres d'une association en participation, pour éviter une liquidation onéreuse, cèdent à un coassocié leur part pour une somme inférieure à leur apport en lui faisant en outre la promesse d'un report sur d'autres titres jusqu'à la liquidation du mois suivant, pour pareille somme, de son découvert entre eux et obtiennent de leur coassocié la pro- messe d'une commission à 10 p. 100 (!). Celte commission peut être considérée comme compensant la différence entre les apports et les sommes remboursées. 850. On admet que le banquier, qui négocie des effets payables dans un lieu autre que celui où ils sont négociés, a droit au change, car c'est l'usage du commerce et, du reste, le banquier en paye une partie à son correspondant. Il a droit au change même s'il a stipulé une commission; la commission n'est pas censée comprendre le change (3). 851. L'obligation de payer, outre les intérêts légaux, les honoraires de l'avoué, ou les dépens en cas de poursuites judiciaires pour défaut de payement ne peut rendre le prêt usuraire (4). Il en est autrement de l'obligation de payer, outre les inté- ') Boislel, n. 696 et iVo/e,D.,93.2. 308.— Contra Trib. coin. Agen. 11 juin 1887, Roc. d'Agen, 87. 299. — Dnvergier, Rev. dr. fr. etétr.. IV, 1847, p. i s., 7 s. sauf si l'escompte est l'ait sur l'escompteur ou si celui qui fait escompter ne reste pas garant) ;Thézard, Rev. crit.. III, 1873-74, p. 259. (*) Paris, 20 janv. 1892,S.,94.2. 169, D., 93. 2. 305. — Boislel, Noie, D., 93. 2.307. ') lîouen, 24 mars 1803, Rpc. de Rouen, 93. 1. 122. — Il a droit au change même sur les valeurs fictives, à moins qu'elles n'aient été crées dans son propre intérêt. — Rouen, 24 mai» 1S'.»3, précité. ' C Kentucky, Anal, lourn. dr. inl., IV, 1*77, p. 263. 46 i L'L PRÊT DE CONSOMMATION rêls légaux, une certaine somme en représentation de perles subies par le prêteur en vendant des titres pour réaliser le prêt Kl) ou en échange du consentement donné par le prêteur à la prorogation du prêt (-). De môme, le prêt est usuraire si, outre des intérêts qui atteignent le maximum, l'emprunteur s'engage à parfaire la différence entre le cours que les obligations vendues par le prêteur auraient au jour du remboursement et leur cours au jour de la vente (s). 852. Si le remboursement doit avoir lieu ailleurs qu'à la résidence du prêteur, ce dernier peut stipuler, outre les inté- rêts légaux, 1rs frais que nécessitera ce remboursement. De même il peut stipuler une certaine somme à tilrc d'in- demnité pour le c.is où il sciait obligé d'aller toucher la créance ailleurs qu'au lieu fixé par le contrat ('). 853. La stipulation que les intérêts à ."> p. 100 seront pré- levés en dedans, c'est-à-dire qu'ils seront retenus d'avance au moment où l'emprunteur reçoit le capital prêté, est usuraire car la loi. eu fixant le maximum, a entendu que les intérêts seraient payés périodiquement au fureta mesure de la jouis- sance du ca pi ta I ; le calcul des intérêts en dedans élève donc les intérêts au-dessus du taux légal. 854. Un a considéré comme usuraire le prêt fait au taux légal a\ ec la clause que les intérêts en retard produiront de plein droitdes intérêts (' . Mais celle solution nous parait erronée. 1 Cass. req , 12 juin 1894, S., 9i. 1. 345, D., 94. I. i;:i. — Conlra Aix, 15 nov. 1892, Gaz. Pal., 93. I. 2« p.. 65. - Bordeaux, 17 janv. 1893, Gaz. l'ai., 93. 2. 2« p., 8. • ////./Ai\. K> nov. 1892, précité. '. Trib. civ. Le Vigan, 9 juin 1887, Loi, 7 août 1887. Ls Cass . 26 mai 1855, s..;).") i. 387,D.,55. I. 264. — Çass., 28 juin 1876, S., 76. 1. 449, B . 76. 1. 385. -Agen, 12 mai 1853, S., 53. 2.273, D., 54. 2.181. — Agen, 19 juill. 1854, S., 54. 2. 5f3, D., 55. 2. 164.— Limoges, 25 juill. 1865, S., 65.2.281, D.,6">.-2 207.- Toulouse, 23 janv. I868,S.,68 2.36.— Bordeaux, 17 janv. 1893, Gaz. Pal., 93. 2. 2« p., s. — Trib. civ. Bordeaux, 22 fév. 1892. Loi, 19 mars 1892. — Duvergier, n.299; Poot, ï,n. 292; Aubryet Rau, IV, p. 611, § 396, noie 46; Guil- louard, n. 159; Hue, XI. n. l£6. — Décidé que la clause est licite pour les intérêts de l'année courante, mais non pour ceux des années suivantes. — Bordeaux, l*r juill. 1892, Bec. Bordeaux, 92. I. i • Bordeaux, 17 janv. 1893, Gaz. Pal., 93. 2.2e p.. 8.— V. en ce sens pour le compte courant Bennes, 18 nov. 1889, Bec. Nanles, 91. 1. 117. INTÉRÊTS — l \i \ 405 De même dous pensons qu'on peul stipuler In capitalisation dans des délais plus courts que celui d'un an (C. civ., art. I l'ii, sans que le contrat soit usuraire. 855. La clause par laquelle les intérêts à 5 p. 100 sont stipulés non pas pour l'année véritable de 365 ou 366 jours, mais pour l'année commerciale de 360 jours, est usuraire ; ce calcul avait été établi à titre de droit commun, dans un but de simplification, par un décret du 18 frimaire an III. mais ce décret n'est plus en vigueur et aujourd'hui, non seulement le droit commun n'est plus en ce sens, mais une stipulation for- melle serait nulle (*). Sans doute le préjudice que ce mode de calcul cause à l'emprunteur est très faible, mais l'objec- tion qu'a fournie cette observation est sans valeur, car la loi ne veut en aucun cas que l'intérêt stipulé en matière civile dépasse 5 p. 100. 856. La fraude la plus pratiquée, parce qu'elle offre le plus de sécurité aux usuriers, à raison de la quasi-impossibilité d'en établir l'existence, consiste à faire souscrire à l'emprun- teur une reconnaissance excédant le chiffre de la somme qu'il reçoit. Ainsi l'usurier qui veut prêter 1,000 fr. pour un an moyennant un intérêt de 100 fr., soit 10 p. 100, ne versera que 950 fr. à l'emprunteur, auquel il fera souscrire une recon- naissance de 1,000 fr. avec intérêt à 5 p. 100. 11 va sans dire que cette convention est nulle. 857. De même l'usure existe, alors même que l'intérêt ne dépasse pas le maximum légal, si l'emprunteur promet de rembourser une somme supérieure à la somme prêtée d'un chiffre dépassant ce maximum ('). («) Cass., 20 juin 1848, S., 48. 1. 433, D., 48. 1. 106. — Gass.,14mai 1852. S., 52. 1. 855, D., 52. 1. 309. — Cass., 14 janv. 1876, S., 76. 1.65, D., 76. 1. 337. — Rouen, 19 juin 1847, S., 48. 2. 311, D., 48. 2. 111. — Paris, 20 avril 1848, S., 49. 2. 298. — Dijon, 5 juill. 1880, S., 82. 2. 203. — Caen, 1« fév. 1888, Rec. Caen, 88. 10 i. — Pont, l, n. 294; Aubry el Uau, IV, p. 611, § 396, note 47; Guillouard, n. 160; Hue. XI, n. 196. — Conlra Grenoble, 15 mars 1844, S., 46. 2. 458. — Grenoble, 1"' avril 1846, S., 46. 2. 460. — Rennes, 18 nov. 1889, Rec. Nantes, 91. 1. 117 (pour le compte courant). (*) Trib. com. Angoulème, 20 août 1893, Rec. Rordeaux, 94. 2. 61 et peu importe que le remboursement ait lieu au moyen d'une cession de créance, si le débiteur était solvable). Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 33 4C6 DU l'RÈT DE CONSOMMATION 858. Le contractus Irium, annulé, comme nous l'avons vu, dans l'ancien choit ('), est également nul aujourd'hui s'il déguise la stipulation d'un intérêt supérieur au maximum fixé par la loi (!). Il en est de même du mohatra dans les mêmes condi- tions (*). 859. De même encore pour le contrat pignoratif (*), éga- lement nul dans l'ancien droit. Mais il va sans dire qu'en lui-même ce contrat pignoratif, — vente avec droit de rachat, bail par l'acquéreur au vendeur, — ne déguise pas un prêt usuraire. si le prix du bail n'est pas supérieur aux revenus du prix de vente (•). C'est une question de fait (6). 860. La vileté du prix par rapport au prix du bail est l'in- dice certain du prêt usuraire. Mais le contrat pignoratif peut déguiser également un prêt usuraire alors même que le prix représente la valeur exacte de la chose, si l'acquéreur n'est, d'après une convention ver- bale, tenu d'en payer qu'une partie " . 861. L'anlicbrèse déguise un prêt usuraire si l'immeuble donné à anlichrése produit des fruits d'une valeur nette sen- siblement supérieure aux intérêts stipulés pour la somme prêtée ("). 1 V. supra, n. 817. (*) Cass., 27 fév. 1864, S.. 64. 1. 341. — Troplong, Tr. delà soc, I, n. 47, et II, n. 652; Duvergier, Tr. de la soc. a. 58; Aubry el Rau, IV, p. 612, §396; Guil- louard, n. 161 . ' Gulllouard, n. 161. — V. supra, n. si T. » Cass., 6 frim. an VIII, S. chr. — "iass.. 24 fruct. an VIII, S. clir. — Cass., . 1845, S., io. 1. 732. — <;ass.. 22 avril L846, S., 16. 1. 639. — Aubry et Rau, IV, p. 612, § 3%, note 55; Guillouard, n. 162 et Tr. de la vente, II, n. 648. — V. supra, n. 817. Arrêts et auteurs précités. — V. supra, n. si 7. 6 Arrêts et auteurs précités. (7) Paris, 22 messidor an XI, S. clir. — Limoges, 18 mars 1828, S. chr. — Mont- pellier, 25 août 1829, S. chr. — Pau, 17 mai 1830, S. chr. — Limoges, 10 mars , 28 mars 1837, S., 37. 1. 936. — Lyon, 27 août 1841, S., 12. 2. 33. — Caen, 20 janv. [846, S., 16. 2. 199. — Merlin. Rép., v° Conlr. pignor., et Quest.. eod. v°; Troplong. Tr. de la vente, II, n. 695; Aubry et Rau, IV, p. 612, § 396, note 54; Guillouard, n. 162. Montpellier, 21 nov. 1829, S. cbr. — Troplong, n. 389; Guillouard, n. 163; [lue, XI, n. 195. INTÉRÊTS — TAUS 107 862. L'échange peul déguiser un prêt usuraire s'il est fait moyennant unesoulte trop considérable et rjui représente en réalité une somme prêtée ('). 863. La société, comme nous l'avons montré, peut déguiser lin prêt usuraire (*). 864. La vente à réméré peut déguiser un prêt à inté- rêt '). Les intérêts ne peuvent alors être réclamés, puisque le taux de l'intérêt doit être fixé par écrit (*). 865. Dans les obligations émises par les sociétés, il est nécessaire que le taux de l'intérêt, augmenté de la valeur actuelle de la chance de prime, ne dépasse pas o p. 100 On a soutenu qu'il suffit que le taux de l'intérêt ne dépasse pas 5 p. 100 r5) ; cela ne nous parait pas exact. 866. (Test au juge du fait, d'après la cour de cassation, qu'il appartient de décider souverainement si une perception est usuraire (6 et si un contrat déguise un prêt à intérêt (7). C. Lois spéciales dérogeant à l;is davantage réduire un droit de commis- sion ('). De même, dans les colonies, où le taux de l'intérêt est libre, on ue peut annuler ou réduire un intérêt excessif (2). 874. Le prêt est commercial lorsque le capital emprunte est destiné à un emploi commercial (3), et quelle que soit la qualité des parties. On comprend, en pareil cas, un intérêt élevé, car la somme prêtée courra des risques particuliers, et cette considération est d'autant plus puissante que, dans le prêt a la grosse, a cause des risques, le taux de l'intérêt est libre. En outre, le service rendu à l'emprunteur est plus grand qu'en matière civile, le bénéfice des opérations civiles étant moins considérable, en général, que celui des opérations com- merciales. Il faut ajouter que ce système trouve un appui dans les mots matières commerciales qu'emploie la loi de 1807. Enfin l'art. 91 C. corn., sur le gage commercial, montre que la loi considère comme commercial tout acte fait pour les besoins du commerce. Réciproquement le prêt est civil quand il a une destination civile, quelle que soit la qualité des parties (*). 1 i V. supra, n. 841 s. Contra Alger, 16 juin 1890, Rrv. algér.. 90. 548. |J) Cass.,27nov. 1871, S., 71. 1. 204. — Cass. crim., 27 fév. 1864, S., 64. 1. 341, ]). Hép., SuppL, v° Prêt à int., p. 630, note 2. — Cass. crim., 14 mai 1886, S., 87. 1. 345. — Bourges, 27 janv. 1857, S., 58. 2. 695. —Besançon, 4 juill. 1857, S., 58. 2. 5515. — Paris, 2 fév. 1861, S., 61. 2. 256. — Lyon, 29 janv. 1858, S., 58 2. 695. — Limoges, 25 juil. 1865, S., 65. 2. 284. — Paris, 9 mai 1890, Journ. des assur., 91. 93. — Aix, 9 juil. 1891, Gaz. Pal., 91. 2. 450. — Paris, 28 déc. 1893, S., 95. 2. 75, D., 94. 2. 500 (le prêt destiné à l'acquisition et à l'exploitation d'un fonds de commerce est commercial). — Trib. civ. Amiens, 7 juin 1890, Rec. d'Amiens, 91.7, — Trib. civ. Seine, 6 juill. 1893, Gaz. Pal., 93. 2. 201. — Troplong, n. 362; Aubry el Hau, IV, p. 60(5, § 396, note 25; Lyon-Caen et Renault, IV, n. 694, et Manuel. n. 760; Pont, I, n. 277; Lyon-Caen, Noies, S., 87. 1. 345, S., 89. 1. 393, et S., 90. 2. 41; Laurent, XVI, n. 316; Bonfils, Rev. cri!., XVIII, 1889, p. 386; Ruben de Couder, Uict. dr. corn., v° Intérêts, n. 170; Guillouard, n. 150 s.; Mongin, Xole, Pand. franc., 95. 1. 337; Danjon, Le prêt civ. et le prêt commercial sous la loi du 12 janv. 1886, Ann. dr. com.,1, 1886-87, DocL, p. 201; Hue, XI, n. 191; Thaller, n. 1061 et 1062. ' Cass. crim., 14 mai 1886, précité (te prêt en vue du jeu est civil alors même qu'il est fait a un commerçant, qui souscrit des billets à ordre). — Poitiers, 15 mars 1893, Gaz. Pal., 93. 1. 344. — Paris, 10 mars 1896, D., 98. 2. 486. — Trib. civ. ëeine, 11 nov. 1892, Gaz. Pal., 93. 1. 58. — Trib. corr. Seine, 17 janv. 1896, 470 DU PRÊT DE CONSOMMATION 875. (l'est d'ailleurs de la destination apparente, indiquée au prêteur, et non pas de la destination réelle qu'il s'agit ' . Mais nous verrons que si la destination n'a pas été indiquée au préteur, on doit supposer que la destination du prêt est commerciale, quand l'emprunteur est commerçant (*). 876. Dans une autre opinion, la nature du prêt se déter- mine par la qualité de l'emprunteur, par la raison que le commerçant fera produire aux sommes empruntées un revenu plus considérable que le non commerçant (3). 877. D'autres autorités encore, partant d'un adage célèbre de Straccha « pluris valet pecunia mercatoris qnam pecunia non mercatoris », s'attachent à la qualité du prêteur (*). Le prêteur commerçant, disent-ils, se prive plus que le prêteur non commerçant, car il aurait fait produire à son argent un revenu plus considérable que le non commerçant. 878. En partant de l'opinion que nous avons défendue, et qui est communément admise, on décidera que le prêt fait, même à un commerçant, pour payer le prix d'acquisition d'un immeuble, est civil (5) ; car toutes les opérations relatives aux immeubles sont civiles et la jurisprudence applique cette solution même aux immeubles acquis par un commerçant dans l'intérêt de son commerce ('); il est vrai que le prêt, même fait en vue de l'acquisition d'un immeuble, ne porte pas lui-même sur un immeuble; c'est là une objection qu'on G u. Pal., 96. 1. 508. — Trib. coin. Nantes, 16 déc. 18%, Kee. Nantes, 97. 1. 107. — Trib. civ. Tournai, 22 fév. 1894, l'asicr., (J4. :!. 181. — Autorités précitées. — Par exemple le prêt destiné à l'achat d'une maison, même dans un but commer- cial, est civil. — V. infra, n. 878. — Mongin, toc. cil. — Quid si l'emprunteur souscrit des lettres de change? Un a soutenu que le prêt est commercial, la lettre de change étant un acte essentiellement commercial (C. coin., 6321. — Lyon-Caen, Note, S., 87. 1. 345. 1 Trib. civ. Seine, 11 nov. 1892, précité. .-*i V. infra, n. 887. ' Lyon. 20 nov. 1857, S., 58. 2. 699. — Cass. crim., 23 juin 1893, D., 94. 1. 254. — Troplong. n. 362: Aubry et Rau. IV, p. 605, § 396, note 25. 1 Cass., 27 fév. 1864. précité. — Pau, 21 fév. 1887, D., 87. 2. 249. (5) Cass. req., 12 juin 189i, S.. 94. 1. 345, D., 94. 1. 473 (même si l'immeuble est acheté pour protéger une industrie contre la concurrence). — Sole, S., 94. 1. 345: Mongin, loc. cil. (8) V. Cass., 18 avril 1882, S., 82. 1. 407. — Poitiers, 30 janv. 1888, S., 89. 2. 80, et beaucoup d'autres arrêts. INTÉRÊTS —TAUX 171 ;i faite à notre théorie, et on a encore fortifié cette objection en disant t j ne (cela est incontestable) le prêt fait par un ban- quier est considéré par la jurisprudence comme commercial, v;m> restriction, alors même par conséquent que les fonds prêtés sont destinés à l'acquisition d'un immeuble. Mais on ne peut tenir aucun compte de la théorie très spéciale des prêts faits par un banquier; cette théorie écartée, il reste que, comme nous l'avons montré, le caractère du prêt se déter- mine par la destination des fonds et non par la nature de l'objet prêté. Aussi le prêt est-il civil, même si l'emprunteur veut acqué- rir l'immeuble où se trouve déjà exercée son industrie dans le but de se protéger contre des concurrences ('). On objecte la théorie de l'accessoire, d'après laquelle un acte fait par un commerçant en vue de son commerce a le caractère commer- cial, même si, en lui-même, il est civil. Cette objection est mal fondée, car la jurisprudence refuse d'étendre aux acqui- sitions d'immeubles la théorie de l'accessoire (2). Le prêt fait pour l'achat d'une mine est également civil (3). 879. Au contraire, les prêts faits à un commerçant pour les besoins de son commerce ont un caractère commer- cial (*). Il en est de même du prêt fait à une personne pour l'acqui- sition d'un fonds de commerce (5) ; on objecte qu'à ce mo- ment, l'emprunteur n'est pas encore commerçant; mais le prêt n'en a pas moins une destination commerciale. "De même encore du prêt dont le montant doit être versé dans une société commerciale (6). 880. D'après la jurisprudence, le prêt fait par un banquier '] Cass. req., 12 juin 1894, précité. — Sole, S., 94. 1. 345. (*) Arrêts précités. (») Aix, 11 mai 1892, Hec. Marseille, 92. 1. 200. — Contra Trib. corn. Marseille. 5 août 1891, liée. Marseille, 91. 1. 269. • Gass. criin., 14 niai 1886, S., 87. 1. 345. — Cass. req., 8 nov. 1892, S., 93. 1. 32, D., 93. 1. 78 (prêt à une Compagnie des chemins de fer pour les besoins de l'entreprise). — Bourges, 27 janv. 1857, S., 58. 2. 695. — Trib. civ. Amiens, 7 juin 1890. Rec. Amiens, 91. 7. — Trib. corn. Seine, 10 mars 189*, Gaz. l'ai.. 92. 1. 513. — Trib. corn. Seine, 15 nov. 1897, Gaz. Pal., 98. 1. 272. — Thaller, a. 1061. 5) Contra Paris, 4 fév. 1891, Ann. dr. corn., V, 1891, Jurispr., p. 101. onlra Trib. civ. Lyon, 20 mai 1893, Gaz. des Trib., 28 sept. 1893. 472 DU PRÊT DE CONSOMMATION et rentrant dans ses opérations habituelles est loujours com- mercial ('). Cette opinion compte beaucoup d'adversaires {-). Elle se | Casa., 11 mars 1856, S., 56. 1. 729, D., 56. 1.407. — Cass. criin.,27 fév. 1864, S., 64. 1. 341, D. Rép., Suppl., v> Prêt à int., p. 630, note 2.— Cass. civ., 29 avril 1868, S., 68. 1. 281, D., 68. 1. 312. — Cass. civ., 28 avril 1869, S., 69. 1. 306, D., 69. 1.241. —Cass. civ., 10 janv. 1870 (deux arrêls), S., 70. 1. 157 et 159, D.,70.1. 60. — Cass. req., 16 janv. 1888, S., 88. 1. 457, D., 88. 1. 67. — Cass. civ. (et non req.), 25 juill. 1895, S., 99. 1. 326, D., 96. 1. 193. — Bourges, 14 fév. 1854, S., 54. 2. 531, 1)., 55. 2. 271. — Bordeaux, 27 avril 1869, S., 70. 2. 23, D., 70. 2. 218. — Douai, 24 janv. 187.!, S., 73. 2. 244, D., 71. 2. 203. — Orléans, 17 fév. 1881, S., 82. 2. 245, D.,82. 2. 172. — Pau, 21 fév. 1887, D., 87. 2. 249. — Grenoble, 18 mars 1887, lier. Grenoble, 87. 121. — Bennes, 18 nov. 1889, Rec. Santés, 91. 1. 217. — Bouen, 22 mars 1890, Loi, 18 mai 1890. — Paris, 18 mai 1893, Journ, des soc, 94. 1. 297 (avances sur pensions par une société constituée dans ce but). — Trib, coït. Lvreux, 26 déc. 1889, Droit, 7 janv. 1890. — Trib. civ. Condom, 23 nov. 1893, Gaz. Pal., 94. 1. 199 (ouverture de crédit).— Trib. civ. Montbé- liard, 11 mars 1898, Gaz. Pal., 98. 1. 535. — Troplong, n. 362; Aubry et Bau, îY, p. 605, s 396, noie 23; Boistel, u. 695; Moreau, Soie, S., 68. 1. 281; Yé- ran, lier. dr. corn., LVIII, 1894, p. 241 et 278 s.; Colmet de Sanlerre, VIII, n. 115 bis, V et VI; Cuillouard, n. 152; Danjon, op. cit., p. 202 (ou môme par un commerçant par spéculation!; Boistel, Note, 1).. 98. 2. 486. — On a refusé à l'ex- ploitant d'un comptoir pour prêt sur pensions la qualité de commerçant. — Paris, 4 juil. 1888, An,,, dr. corn., Il, 1888, p. 236. — Bouen, 31 janv. 1891, Ann. dr. mm.. V, 1891, Jurispr., p. 99. — Lyon-Caen, Note, S., 89. 1. 393. — C'c>t, selon nous, une erreur. — Paris. 18 mai 1893, précité. —Trib. civ. Condom, 23 nov. 1893, lier. dr. co„,., 94. 2. Il S. — pic, Ann. dr. coin., VI, 1892, DocL, p. 236. — iin avait prétendu que depuis la loi du 12 janv. [886, la jurisprudence a abandonné son système. Cass. crim.,2 juin et 9 nov. 1888, S:, 89. 1 393. — Lyon, 3 juin 1889, S., 90. 2. 41,1)., 91.2. 26. — Pari*, 7 déc. 1892, Gaz. Pal.,93. L.2« p., 32.— Bouen, 31 janv. 1891, Droit, 27 fév. 1891.— Trib. corr. Seine, 17 juin 1892, Gaz. Put. ,92. 2. 72. — V. Ann. dr. cotntn., Il, 188S, Jurispr.. p. 236 et Thaller,.-L. /OOles intérêts de ses avances » prouverait que les ban- quiers en général pouvaient, dès cette époque, prêter sans res- triction au taux de 6 p. 100, fixé pour les prêts commerciaux. Ces considérations sont loin d'être décisives. Les motifs qui justifient l'élévation de l'intérêt en matière commerciale, et que nous avons rappelés eu parlant du prêt destiné à une opération commerciale, ne se rencontrent pas ici : les risques sont moindres dans notre hypothèse que dans la précédente, le service rendu est également moindre. Sans doute le ban- quier pourrait trouver un profit plus élevé dans un prêt commercial, mais aussi il courrait plus de risques et, du reste, la même considération s'appliquerait à un particulier D'un autre côté, il est certain que le gage consenti pour la garantie d'un prêt fait par un banquier n'est pas nécessaire- ment commercial; cela résulte de l'art. 91, § 1 C. corn. Quant à la loi de 1857, elle a un caractère exceptionnel. 881. Quelques-uns des partisans de la solution adoptée par la jurisprudence y font exception pour le cas où la nature des garanties, la forme de l'acte ou toute autre circonstance indiqueraient la destination civile du prêt fait par le ban- quier ('). Cette restriction n'a aucune raison d'être. On va même jusqu'à dire que le prêt garanti par une hypo- thèque sera civil (2). 20. — Pont, I, n.277; Lyon-Caen, Notes, S., 89. 1. 393 et S. ,90. 2. 41; Bonfils. Rev. oit., XVIII, 1889, p. 380 s.: Hue, XI. n. 191 : Thaller, n. 1062. ') Aubry et Rau, IV, p. 606, § 396; Véran, op. cit., p. 282. 5 Véran, loc. cit. 474 DU PRET DE CONSOMMATION 882. En tout cas il est certain //., mars 1882, Déb. pari., charnb., p. 289 et 294. 4 Cass. crim . 20 janv. 1888 - 39. 1. 281. — Cass. crim., 2 juin 1888, S., 89. 1. 393. — Cass. crim., 9 nov. 1888, S . 89. 1. 393, !>.. 89. 1. 272. i5i Cass. crim., li mai 1886, S., 87. 1. 345. i6! V. supra, h. 689. (7) Contra Paris, 7 déc. 1891, Gaz. Pal., 92. 1. 152. — Un autre système a été mis eu avant pour justifier l'application des peines de l'usure et l'inapplicabilile de la loi de ltS80. On a dit que le pi et est consenti en réalité sur le gage détenu par le Monl-de-Piélé, < ] n c , par suite, l'acheteur dirige une maison de prêts sur gage, interdite par loi, et qu'une opération délictuelle ne peut avoir le caractère commercial. — Triti. correct. Seine, 11 jan \ . 1892, Gaz. l'ai., 'J>. 1. 152. — V. infra, n. 888. (») Paris, 7 juil. Î887, Droit, 21 juil. 1837. — Paris, 15 juil. 1887, Gaz. Trib., 18 août 1887. — Contra Trib. corr. Seine, 15 avril 1890, Droit, 17 avril 1890. — Trib. corr. Seine, 23 déc. 18(.C>, Pand. franc., 96. 2. 153 pour les motifs indiques à la note 7 ci-dessus . — V. infra, n. 888. IMHihls - TAUX i 75 885. Le [>n"'t fait pour l'exploitation d'un brevet d'inven- tion esl commercial. Il en est autrement du prêt fait simplement pour les essais de l'invention brevetée ('). 886. La question de savoir si les prêts faits à une société civile qui adopte la forme commerciale sont commerciaux est délicate. Mile se rattache à un problème plus général : lecarac- tère des opérations de celte société est-il le même que celui des opérations dune société commerciale? La loi du 1er août 1893 porte que les sociétés civiles à forme commerciale « quelque soit leur objet... seront commercia- les et soumises aux lois et usages du commerce ». Il semble bien que l'assimilation est absolue. Et celte doctrine estadop- tée par certains auteurs; ils en concluent que les prêts faits par la société civile à forme commerciale sonteommerciaux (*). D'autres auteurs pensent au contraire que l'assimilation existe exclusivement en ce qui concerne la faillite, les livres et la compétence, non pas en ce qui concerne le caractère des opérations !j. La question est trop générale pour que nous l'examinions ici (*). 887. En tout cas le prêt civil ne perd pas son caractère, par cela seul qu'il est destiné à une société commerciale et cela même si le prêteur et l'emprunteur font tous deux partie de cette société (5). Toutefois, si l'emprunteur est un commerçant, on présumera jusqu'à preuve contraire que le prêt est commercial, confor- mément à l'art. 638-2° C. corn. (•). (») Trib. civ. Lyon, 20 mai 1893, Gaz. des Trib., 28 sept. 1893. - Tballer, Ann. dr. comm., 94. 2. 137 ; Wahl, Noie, 96. 2. 57. Lyon-Caen et Renault, Manuel de dr. comm., 3e éd., n. 337. (*) V. Wahl, Note, S., 96. 2. 57. (5) Trib. civ. Lyon, 20 mai 1893, Gaz. Trib., 28 sept. 1893. («) Cass., 27 fév. 1864, S., 64. 1. 341, D., Rép., Suppl., v« Prêt à bit., p. 630, note 2. — Bourges, 27 janv. 1857, S., 58. 2. 695. — Besançon, 4 juill. 1857, S., 58. 2. 553. — Lyon, 7 déc. 1887, Mon.jud. Lyon, 17 janv. 1888. — Paris, 29 nov. 1892, Gaz. Pal., 93. I. 2* p., 21. — Trib. corn. Havre, 7 avril 1888, Iïec. Havre, 88. 133. — Trib. civ. Amiens, 7 juin 1890, Rec. d'Amiens, 91. 7. — Pont, 1, n. 277 ; Bon- fils, Rev. erit., XVIII, 1889, p. 386; Guillouard. n. 151. — Cpr. Trib. corn. Nantes. 21 mars 1891, Rec. Nantes, 91. 1. 160. — Contra Trib. civ. Seine, 11 nov. 1892, préc'té. Ï7G LU PRÊT DE CONSOMMATION 888. On ne voit aucune raison de limiter l'application de la loi de 1886 au cas d'un prêt commercial licite ('), et de refuser, par exemple, cette application au tenancier d'une maison de prêt sur gages (-). D. Sanction de I" limitation du taux de l'intérêt. 889. Toute stipulation d'intérêts excédant le taux légal constitue une convention usuraire, prohibée à ce litre par la loi de 1807. Celte prohibition reçoit une double sanction : l'une civile, l'autre pénale. La sanction civile est contenue dans l'art. 3 de la loi de 1807, qui s'exprime ainsi : « Lorsqu'il sera prouvé que le prêt » conventionnel a été fait à un taux excédant celui qui est » fixé par l'art. 1 ' . le prêteur scia condamné, par le tribunal » saisi de la contestation, à restituer cet excédant s'il l'a reçu, » ou à souffrir la réduction sur le capital de la créance, et » pourra même être renvoyé, s'il y a lieu, devant le tribunal » correctionnel, pour y être jugé conformément à l'article » suivant ». Ce texte avait donné naissance k quelques con- troverses, qui ont été résolues dans le sens de la sévérité par l'art. 1 de la loi du 19 décembre 1850, ainsi conçu : « Lors- » que, dans une instance civile ou commerciale, il sera » prouvé que le prêt conventionnel a été fait à un taux supé- rieur à celui fixé par la loi, les perceptions excessives seront • imputées de plein droit, aux époques où elles auront eu lieu, » sur les intérêts légaux alors échus, et subsidiairement sur » le capital de la créance. — Si la créance est éteinte en » capital et intérêts, le prêteur sera condamné à la restitution » des sommes indûment perçues, avec intérêts du jour où » elles lui auront été payées ». Ces dispositions ont été reproduites, pour l'Algérie, par l'art. 2 du décret du 29 janvier 1898. La loi de 1830, en proclamant l'imputation, ne dit pas que ce soit la seule sanction du prêt usuraire. Aussi faut-il, con- 1 Contra Toulouse. 24 l"év. 1894, précité. '- Cpr. Lyon-Caen et Renault. I, n. 103 bis. — .. 19. 1. 241. — Cass.. 16 nov. 1880, S., 81. 1. 313, D., 81. 1. 109. — Rennes, 13 mars 1876. S., 79. 2. 257, D , 79. 2. 93. — Guillouard, n. 167. s Cass., 27 mai 1840, S., 40. 1. 620. — Cass., 12 avril 1841, S., 41. 1. 637. — Cass., 8 mars 1847, S., 47. 1. 470, D.. 17. I. 98. — Bordeaux, 8 août 1830, D..Ô5. 2. 232. — Font. I. n. 317; Aubry et Rau, IV. p. 611, § 396, note 5: Guillouard. n. 1C7. _ V. cep. Bourges, 2 juin 1831, S., 32. 2. 120. •478 DU PRÊT DE CONSOMMATION autrement que si elle était faite au moment ou à la suite de- la restitution du capital prêté ('). Certains auteurs reproduisent cette doctrine, a l'appui de laquelle ils invoquent, en le détournant de sa signification, l'adage Nemo liberalis nisi liberatus (*). Ils ne font exception u nantissement, n. 529; Aubry et llau, IV, p. 613, § 396, note 57; Guillouard, n. 164. — V. cep. Pau, 17 mai 1830, S. chr. — Lyon, 27 août 1841, S., 12. 2. 32. '" V. Guillouard, loc. cit. C) Paris, 22 messidor an XI, — Poitiers, 17) prairial an XII. — Caen, 20 janv. 1846, précités. — Guillouard, n. 164. s V. cep. Guillouard, n. 164 il dit que l'acheteur apparent jouit » jusqu'au remboursement, du droit de rétention que lui assure lu forme de contrat pignora- tif donnée au }>rèl ■• . INTÉRÊTS — IAI \ iT'J 896. La réduction pont rire réclamée pendant trente ans {'). 897. Quant h la sanction pénale, elle consiste, d'après l'art, i île la loi du 3 sept. 1807, clans une amende i> art. 2); en cas de récidive, la peine est du maximum, lequel peut même être élevé au double (art. 3). Ces peines ne frappent que celui qui se livre « habituelle- ment à l'usure ». Nous avons examiné déjà dans quelles limites la loi de 1880 a maintenu le délit d'usure ('). 898. L'emprunteur peut par tous les moyens, même par témoins et par présomptions, démontrer que le prêt qui lui a été fait a été consenti moyennant des intérêts usuraires (s), car il s'agit d'une fraude à la loi (C. civ. 1333). Dans l'ancien droit, on allait même jusqu'à décider que le témoignage de l'emprunteur suffisait pour prouver l'usure ('). Il va sans dire que cette solution n'est plus exacte aujourd'hui. 899. S'il s'agit de combattre les énonciations faites par un officier public dans un acte aulhentique et constatant un fait accompli par cet officier public ou sous ses yeux, l'emploi de l'inscription de faux sera nécessaire, conformément au droit commun. Sans doute l'emprunteur pourra, sans recourir à l'inscrip- tion de faux, démontrer, malgré l'indication dans un acte authentique d'intérêts n'excédant pas le taux légal, que des intérêts supérieurs au taux légal ont été stipulés " . Mais si l'acte authentique constate que sous les yeux du notaire une somme déterminée lui a été versée, l'emprunteur I .renoble, 30 janv. 1894. D., 96. 2. 69. ; V. supra, n. 883. (* Cass., 18 therm. an XIII, S. clir. — Cass.. 28 juin 1821, S. cbr.— Cass., 18 fév. 1829, S. chr. — Cass., 29 janv. 1867, S., 67. 1. 245, D., 67. 1. 52. — Cass.. 13 fév. 1880, S., 80. 1. 485, D., 80. 1. 237. — Riom, 16 janv. 1827, S. chr. — Bor- deaux, 7 avril 1827, S. chr. — Caen. 26 juil. 1*27. S. chr. — Bourges, 2 juin 1831, S.. 31. 2. 248. — Caen, 20 janv. 1846, S., 46. 2. 499. — Troplong, n. 105 : Aubry et Rau, IV, p. 61:5., § 396, noie 59: Guillouard, n. 168. 4 Arrêt 2 sept. 1897, cité par Ghorier, op. cit.. II. p. 273. 5) Guillouard, n. 168. 480 DU PRÊT DE CONSOMMATION ne pourra soutenir sans inscription de faux que la soin me versée était inférieure à la somme indiquée dans l'acte '). E. Rétroactivité des lois relatives au taux maximum de l'intérêt. 900. La loidu 12 janvier 1880 ou toute autre loi modifiant le taux maximum de l'intérêt, rétroagit-elle? Il est incontestable que cetle loi n'a pas pu avoir pour résultat de valider les sti- pulations d'intérêts faites sous l'empire de la législation anté- rieure, qui seraient nulles sous l'empire de cette législation et valables par application de la loi nouvelle, ou réciproque- ment (arg. art. 2 . (l'est ce que décidait formellement la loi de 1807 Mais, à dater de la promulgation de la loi de 1880, ceux qui avaient commis le délit d'usure en matière commer- ciale ont cessé d'être punissables. En d'autres termes, ces lois rélroagissent en tant que lois pénales (*), mais non en tant que lois civiles (3). Cependant la ratification, postérieure à la loi de 1880, d'un prêt commercial usuraire antérieur à cette loi le rend vala- ble IV. Forint- cl preuve de la stipulation d'intérêts. 901. La loi ne prescrit aucune forir.ule sacramentelle pour la convention d'intérêts (s). Cass., 28 juin 1821, S. chr. — Guillouard, n. 168. Cass. ciïm., 14 mai 1886, S., 87. 1. 201, D., 86. 1. 428 (impl.) — Lebéc, Ann. dr. comm., 1888, Jurispr., p. 188; Lyon-Cien, Noies, S.. 87. 1. 345 et S., 87. 2. 201. |3) Cass., 20 fév. 1810, S. chr. — Cass.. Il avril 1810, S. chr. — Cass., 29 janv. 1812, S. chr. — Ciss., 21 juin 1825, S. chr. — Cass., 5 mars 183i, S., 34. 1. 507. — Cass., 15 nov. 1836, S., 35. 1. 939. - Cass. civ., 2 juin 1883, S., 89. 1. 393. — Besançon, 21 avril L886, S., 87. 2. 202, I)., 86. 2. 268. — Orléans, 12 juin 1886, S., 87. 2. 201. — Duranton, XVII, n. 602 : Aubry et Rau, I, § 30, note 49; Laurent, II, n. 194; Guillouard, n. 141: Iîau Iry-Lacantiner'.e et IIouques-Fourcade. Tr. des personnes, n. 137 et 154; de Vareiiles-Sommières, De la rétroactivité des /«/.s-, lier. intérêts à la somme prêtée, employer les formes rigou- reuses de l;i stipulation ('). l.a plupart des législations étrangères se contentent, comme la loi française, d'une convention quelconque (*;. 902. Mais une convention formelle est nécessaire polir que le prêl produise des intérêts et il faut que la volonté des par- ties soil exprimée en termes qui ne laissent aucun doute; ru d'autres termes, le juge ne peut faire découler des circons- tances la volonté tacite des parties (*). Cela résulte du mot Stipuler employé par l'art. 190"), d'après lequel on peut sti- puler des intérêts ' , et encore davantage de la nécessité d'un écrit imposée par l'art. 1907 (5) ; et cela est, du reste, parfai- tement d'accord avec la conception adoptée par le code sur la nature du prêt; comme le prêl est gratuit par sa nature, la fixation d'un intérêt déroge au droit commun et il est, dès lors, naturel qu'elle doit être expresse. Enfin il résulte des travaux préparatoires qu'on a intentionnellement exigé une stipulation expresse dans le but de diminuer l'usure en obli- geant le prêteur à proclamer l'intérêt stipulé (6). La loi de 1807 n'a pas modifié cette solution, car elle a eu pour seul but de fixer le maximum de l'intérêt. 903. La jurisprudence semble avoir souvent exagéré ce principe. La convention porte que le prêt est l'ait pour trois ans sans intérêt jusqu'à cette époque. X est-ce pas dire, im- plicitement peut-être, mais très formellement néanmoins, qu'après l'expiration des trois années, l'emprunteur devra 1 V. supra, n. 805. lllemagne. Dr. comm., Eck, loc. cil.. < '.. civ. 246. — Cependant, en Prusse. on exigeait un écrit. Code général, XI, S 824. — En Suisse, le code fédéral [art. 330; exige une clause expresse de l'acte. (*) Cass., 27 juill. 1853. P., 5i. 2. 88, D., 53. 1. '211. — Hernies, 19 avril 1811, S. chr. — Duvergier. n. 253 s.; Pont. I. n. 240 s.; Troplong, n. 409: Anbry et Hau, IV, p. 601, § 396, note 1: Guillouard, n. 122, 124 et 126; Hue, XI. n. 180. — Contra Laurent, XXVI, n. 514. («) V. supra, n. 8U9. 5 V. infra, n. 907. (6) Rapport de Boutteville au tribunat, Feuet, XIV, p. 162. >OCIKTK. PRÊT, OÉI'ÔT. — 2e éd. 31 482 bl PBÊT l)E CONSOMMATION des intérêts s'il ne restilue pas immédiatement (')? Il a été jugé cependant que la clause n'était pas suffisante pour faire courir les intérêts On a dit en ce dernier sens que les clauses douteuses s'in- terprètent en faveur du débiteur. Cela est vrai, mais la clause ici a un sens très clair et on ne peut rejeter la signification cpie nous lui donnons sans la supprimer complètement; or, c'est un principe certain que les clauses des actes doivent recevoir l'interprétation qui leur donne un effet(C. civ. 1157). 904. Nous trouvons dans ce même ordre d'idées des déci- sions plus exactes. In prêt est fait pour un certain temps avec stipulations d'intérêts jusqu'à l'époque fixée pour le rembour- sement ; l'emprunteur ne s'acquitte pas a l'expiration du terme convenu; continue-t-il à devoir les intérêts fixés par la con- vention? L'affirmative semble, à première vue, devoir rempor- ter (*) ; elle a été consacrée par quelques arrêts; mais il y en a un plus grand nombre en sens contraire ('). ('es derniers reconnaissent seulement au prêteur le droit de faire courir les intérêts moratoires en formant contre l'emprunteur une demande en justice. Le prêt à intérêt se transforme donc de plein droit, par l'expiration du terme fixé, en un prêt gratuit, au profit de l'emprunteur qui ne remplit pas son obligation. Cela est exact, car l'intérêt ne peut être du qu'en vertu d'une stipulation (*). Cette solution est appliquée par la jurispru- dence au cas d'amortissement d'une obligation (6). 905. I.e principe que le prêt ne porte pas intérêt de plein ■) Bourges, 1! juin 1825, S. cbr. — Bordeaux, 28 mai 1832, S., 32. 2. 62(5. — Toulouse; i9janv. !>i'(, S . ii. 2. 272. — Guillouard, n. 126: Hue. XI, n. 180. - Agen, 19 juin 1824, S. clir. — Bourice*. 28 juin 1*27, D. liép., v" Prêt à inlé- 26. _ Ageu, 1'.' mars 1833, S.. 33. 2. i>:>3. — Aubry et ttau, IV, p. 601, S •:%, noie 2. > Cass. req., 10 mai 1837, S., a:. 1. 1008. — ( lass. civ.. 2 mars 1898, D., 98. 1. 162. — Merlin. Que.sl.. v» Prescr. hyp.,% 1 : Aubry et Bau, IV, p. 601. g 3%, note 3; Laurent. XXVI. u. 516; Guillouard, n. 127 ; Chavegrin, Sole, S., 91. 1. ls. ' Bourges, 25 avril 1826, S. chr. — Bordeaux. 2 mai 1826, S. cbr. — Bordeaux, lep mars 1832, D. Rép., v° Prescr.civ., u. 1057-2°. — Trib. civ. Bruxelles, 10 janv. 1895, Pasicr., '.T.. 3. 21. S) V. supra, n.902. * V. infrn, n. 905. )\ IKIlK.ls FORME i;i l'IU.l V l. AH'.l droil rs( applicable au prêt commercial comme au prêt civil ; la jurisprudence esl en ce sens. Les textes ne distinguent pai('). Quelques législations étrangères font courir de plein droit les intérêts en matière commerciale (•). 906. Il est de jurisprudence que la règle souffre exception en ce qui concerne les comptes courants commerciaux : chaque partie doit de plein droit les intérêts des sommes qui figurent ,i son débit (a). Il ne faut pas chercher le fondement de cette exception ailleurs que dans les usages du commerce. Le but que poursuivent les commerçants, c'est le gain. On présume donc que les capitaux ne demeurent jamais improductifs dans les mains d'un négociant, et par suite il doit en servir l'intérêt à celui de qui il les tient, pendant tout le temps qu'il en a joui. Ce n'est là, d'ailleurs, en l'espèce, qu'une considération destinée à faire" comprendre la raison de la jurisprudence qui s est formée sur ce point, et non pas un argument de droit; car il faudrait dire que le prêt porte toujours intérêts en ma- tière commerciale, ce qui, nous l'avons montré, est inexact. Une autre justification a été tentée *) : le compte-courant, a-l-on dit, contient un mandat que les parties se donnent l'une à l'autre de se faire des avances. Or, aux termes de l'art. 2011, les intérêts des avances faites par le mandataire au mandant courent de plein droit. Cette explication n'est pas plus satisfaisante que la précédente : car, dans la réalité, chacune des deux parties promet conditionnellement un prêt à l'autre, et, dans cette promesse de prêt, il n'y a pas plus de raison de voir un mandat que dans le prêt ordinaire. ') Angers, 29 mai 18< »7, S. chr. — Poitiers, 15 mai 1824, S. chr. — Colmar, 12 juil. 1824, S. chr. — Bourges. 16 mai 1845, S., 47. 2. 57, D., 47. 2. 32. — Pont, 1, n. 250; Guillouard, n. 123. — Contra Paris, 18 mai 1825, S. chr. — Massé. Dr. corn., IV, n. 1091. Ji Suisse, C. féd., art. 330. \ Gass., 17 mars 1824, y. chr. — Cass., H janv. 1841, S., 41. 1. 636. — Gass., ■S mars 1853, S., 54. 1. 769, D., 54. 1. 336. — Cass., 24 mai 1854, S., 55. 1. 737, D., 54. 1. 179. — Bordeaux, 4 juil. 1832, S., 32. 1. 824. — Lyon, 20 nov. 1857, S., 58. 2. 699. — Pardessus, ('ours de dr. comtn., II, n. 475; N'ohlet, Du compte-cou- rant, n. 8 et 136 ; Pont. I, n. 251 : Auhry et Bau, IV, p. 601, § 3%, note 4 ; Guil- louard, n. 128; Hue, XI, u. 180. (') Pardessus, toc. cit.; Guillouard, loc. vif. 48 1 DU PRÊT DE CONSOMMATION 907. L'art. 1907 se termine par ces mots : « Le taux de » l'intérêt conventionnel doit rire fur par écrit ». On voulait ainsi « contenir la cupidité par le frein de la honte ». On est parti de l'idée que « ce n'est pas à la face des tribunaux que les prêteurs réclament le paiement des effrayantes usures qu'ils ne rougissent pas de se permettre » :'); on espérait que les usuriers seraient retenus par un sentiment de pudeur, et qu'ils reculeraient à la pensée d'étaler au grand jour leur coupable industrie en constatant par écrit le taux des inté- rêts qu'ils exigeaient de leurs clients. La disposition de l'art. 1907 in fine n'a nullement pour but d'ériger en contrat solennel la convention fixant le taux de l'intérêt, mais seulement d'en prohiber la preuve par témoins même au-dessous de 130 fr. (*). La preuve par l'aveu ou l'in- terrogatoire sur faits el articles (s) et le serment (4) demeu- rent d<»nc permis. Il en est de même de la preuve par témoins s'il y a commencement de preuve par écrit (5), ou si l'écril a été égaré. Le contrat n'est pas nul à défaut d'indication écrite des intérêts 908. (le qui doil être (ixé par écrit, ce n'est pas seulement la convention portant que des intérêts seront dus, c'est le taux même de l'intérêt, ou tout au moins les indications nécessaires pour que le taux puisse être calculé r . L'art. 1907 est formel sur ce point ; d'ailleurs la solution contraire ne répondrait pas i'l Rapport Iioulteville au tribunal et discours Albisson au Corps législatif. Locré, XV, p. 50 et 63. (*) Cass., 22 juin 1853, P., 54. 2. 88, D., 53. 1. 211. — Troplong, n. 409; Duver- gier, n. 255; Pont, I, n. 274; Laurent, XXVI, n. 528; Guillouard, n. 125; Appert, Soie, S., 96. 1. 353; Hue, XI, n. 198. — Contra Duranton, XVII, n. 598. (3) Auteurs précités. — Contra Duranton, loc. cit. ' Auteurs précités. — Contra Duranton, loc. cil. 5 Cass., 22 juin 1853, précité. — Contra Hue. XI, n. 198. I6) V. les auteurs précités. — Cn tout cas, on ne peut approuver Cass. req., 30 juil. 1895, S-, 96. i.353,D.,96. 1.86, qui, partant de l'idée (fausse d'ailleurs comme nous allons le montrer) que la si pulalion, comme intérêts, de denrées, non évaluées dans un contrat déguisant un prêt d'intérêt, est contraire à l'art. 1907. décide que si, en même temps, une somme d'argent est également stipulée comme intérêts, les inté- rêts doivent être réduits à la somme d'argent: dans la pensée des parties, le contrat est indivisible, comme on l'a fort bien dit. Appert, loc. cit. ('•) Cass. req., 30 juil. 1895, S., 96. 1. 353, D , 96. 1. 86. — Lardenois, Rapport sous Cass. req., 30 juil. 1895, précité. — Contra Appert, Xote, S., 96. 1. 353. in 1 1 Ri rS FORMI ET imu i \ i: '»< pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été » volontairement acquittées » (3). Cette explication est très peu satisfaisante : car, le prêt étant gratuit par sa nature, l'obli- gation naturelle de payer des intérêts n'a aucune raison d'être. I ne autre explication consiste à dire que l'emprunteur qui paye les intérêts non stipulés est censé avoir fait une libéra- lité, laquelle produira les effets ordinaires des donations au point de vue du rapport, de la réduction, de la révocabilité (; i. C'est aller beaucoup trop loin. Les libéralités ne se présu- ment pas, et celte présomption serait ici d'autant plus singu- lière que les relations entre prêteur et emprunteur ne sont ») V. supra, n. 898 s. (!) Aubry et Rau, IV, p. 602, g 396, noie 6 : Laurent, XXVI, n. 522: Guillouard, n. 133; Hue, XI, n. 181. 3) Duranton, XVII, n. 599. (*) Pont, I, n. 25i. INTÉRÊTS — FORME El PREUVE '» [». 100 en matière civile et de 0 p. 100 en matière commer- ciale (*). En toul cas, le juge du l'ail est souverain. \ . Lieu de paiement des intérêts. 915. Conformément au principe général de l'art. 1247, les intérêts sont quérables, c'est-à-dire payables au domicile du débiteur ('), à moins de clause contraire ('*). VI. Epoques de paiement des intérêts. 916. Les parties fixent librement l'époque où les intérêts doivent être payés. Ainsi elles peuvent convenir (pie les intérêts seront payés en bloc au moment du remboursement du capital (5). ') Contra Aubry et Rau, IV. p. 602, § 396, note 6; Guillouard, n. 134; Une, XI, il 181. *] Bourges, 11 juin 1825, S. chr. — Lyon, 26 .juin 1851, I> . ~>'i '>■ 445. — Duver- per, n. 250; Pont, I, n. 248: Guillouard, n. 12'.'. 1 ( iuillouard, n. 177 bis. *) Guillouird, n. 177 bis. 5 Guillouard, n. 130. imi in i- l'iu i \ i ni PAU mi !t i i89 Nous nous sommes dAjn cxpli(|tiéssur l<- poinl de savoirsi, tout en adoptant pour !<■ taux des intérêts l<* maximum fixé par la loi, «-I les peuvent librement fixer L'époque . 1. 117. — Guillouard, n. 138; 1 1 ne, lue. cil. Cass., 13janv. 1875, précité. — Guillouard, loc. cit.; Hue, loc. cil. 1*1 Gass., 8 mai 185"). 1).. :>ô. 1. 2U. — Laurent, XXVI, n. 519; Guillouard, n. 139; Hue, XI, n. 199. ■mi ni is i>i iiki: 191 \ III. Temps pendant lequel les intérêts ^>>t/ dus. 922. A défaut de convention sur l'époque à laquelle les in- térêts prennenl naissance, ils commencent à courir du jour <>ii l'emprunteur a la jouissance du capital dont les intérêts sont le loyer, c'est-à-dire du jour où les fonds ont été versés à l'emprunteur '). 923. Aux termes de Tait. 4 45 C coin., les dettes d'un failli cessent, à partir du jugement déclaratif de faillite, de produire intérêts, dette disposition est édictée dans un but de simpli- fication, et non dans une pensée dedéfaveur pour les créanciers, puisque le jugement déclaratif ferait courir, d'après le droit commun, les intérêts des créances, même pour lesquelles il n'aurait pas été stipulé d'intérêts et que, par suite, l'art. 445 C. corn, ne procure aux créanciers ni profit ni perte (-). L'art. 445 C. coin, n'arrête les intérêts qu'à l'égard de la masse; ils continuent à courir contre les co-obligés ou cau- tions du failli vs). Ils continuent même à courir contre le failli, qui est tenu de les acquitter pour se réhabiliter ('■). 924. En dehors de cette circonstance, l'intérêt stipulé courra jusqu'à l'échéance fixée pour le remboursement du capital. Mais l'intérêt stipulé ne continue pas à courir après l'échéance de la dette (5). 925. Il arrive souvent que le porteur d'un titre amorti ignore l'amortissement; que, de son coté, le débiteur ne s'en préoccupe pas; que, par suite, le porteur touche les intérêts pendant de longues années sans y avoir droit, car il est cer- tain, d'après ce que nous avons dit, que, le titre une fois amorti, les intérêts cessent, en principe, de courir (6). La question se pose alors de savoir si, au moment où le (') Hue, XI, n. 180. P) Labbé, Sole, S., 94. i. 113. (?] Labbé, loc. cil. (•) Cass. civ., 17 janv. 1893. S.. 94. 1. 113. — Paris, 1"' iléc. 1892, S.. 94. 2. 13s. — Labbé, loc. cit. (*) V. supra, n. 904. (•; Chavegrin. loc. cil. — V. supra, n. 9(4. i92 01 PRÊT DE CONSOMMATION remboursement s'effectuera, le débiteur aura le droit d'opé- rer, sur la somme à rembourser, la déduction des intérêts payés à lort. Cette question a été tranchée, comme nous le verrons, dans le sens de la négative par la loi du 1er août 1 893 , mais elle n'a cependant à peu près rien perdu de son intérêt, soit parce que celte loi n'interdit pas la clause con- traire, soit parce qu'elle n'a pas une application générale. 926. Pour des raisons diverses, beaucoup d'auteurs ont soutenu que la répétition des intérêts de la pari de la société n'est pas possible ' L'opinion contraire nous parait plus exacte (*). 11 est certain d'abord que telle est l'intention des contrac- tants; le débiteur, par l'amortissement graduel des titres, entend diminuer peu à peu ses charges en restreignant sa dette; il les augmenterait si, ne profitant plus du capital des obligations amorties, il continuait à en devoir les intérêts. Il est vrai <]in\ dans notre opinion, le débiteur, restant déten- teur du capital et cessant don devoir les intérêts, peut tirer un profil de cette situation; mais il arrive souvent que ce profit n'existe pas. le débiteur gardant improductifs dans ses caisses les capitaux amortis et dont le montant peut lui être réclamé d'un moment à l'autre. Il faut ajouter que, dans le cas le plus usuel, celui où les titres sont au porteur, le débiteur n'a aucun moyen de trou- ver ses créanciers, qu'il ne commet aucune négligence lors- que des coupons lui sont présentés, en ne procédant pas à une vérification difficile sur le point de savoir si les titres sont sortis. 1 Gaillard, Oblig. nu porteur, payement par erreur, Kev. prat . IX, 1860, p. i*»l s.; Daniel de Folleville, Tr de lu posses. des meuhles, n. 366; Detoison, Tr. des val. niob., n. 262; Chavegrin, Sole, S., 91. 1. J7, g 1; Monlagnon, Ann. Cass.. 29 juil. 1879, S., 80. 1. 109, D., 80. 1. 38. —Cass. civ., 13 mai 1889, S., 91. 1. 17. —Cass. civ.. 14 janv. 1890, S., 91. I. 17, 1).. 90. 1. 326. — Nànçy,28oct. -..91.2. 11, D., 91. 2. 365. 494 l>l l'itkï" DE CONSOMMATION sont nulles ('), on a prétendu qu'elles rentrent dans les stipu- lations par lesquelles une personne se décharge des consé- quences de sa faute et on a dit que, dans l'espèce, c'est de sa faute lourde ou de son dol que le débiteur se décharge; or. si la validité des stipulations qui exonèrent une personne de sa faute est discutée, on est d'accord pour admettre que s'il s'agit de faute lourde ou de dol, la stipulation est nulle. On ne fait exception que pour le premier des coupons échus depuis l'amortissement, si, en fait, le débiteur n'a commis qu'une faute légère; mais on n'admet pas que le paiement des coupons ultérieurs puisse aller, de la part du débiteur. sans une incurie équivalente à une faute lourde Ce n'est pas, à notre avis, raisonner exactement. D'une part, nous le répétons, s'il peut être stipulé que les intérêts cesse- ront de courir après l'échéance, aucune raison ne s'oppose à ce que cette solution soit appliquée dans les rapports entre l'être moral qui a émis un litre et l'obligataire. D'autre part, si même l'on transporte la question sur le terrain de la faute, nous ne voyons pas quelle faute un débiteur peut commettre en obligeant le créancier à vérifier soigneusement les listes de tirage. 929. Cette convention résulte de ce que les prospectus d'émission portent que les titres cesseront de produire intérêt à partir de leur amortissement -,. Ou l'a contesté cependant, on a attribué à cette clause la signification que le porteur renonce aux intérêts des titres dont il connaît l'amortissement (') ; une telle interprétation va contre le sens évident des termes; elle invoque à son appui cette considération que le souscripteur ne peut être réputé avoir d'avance consenti à sa ruine : mais il n'a consenti qu'à une chose, c.'est à vérifier soigneusement les listes de tirage. (Jette stipulation résulte également de ce qu'en louchant les intérêts, le porteur affirme que son litre n'est par amorti ou s'engage à en restituer les intérêts au cas d'amortissement. Cela a été formellement reconnu dans les travaux p répara toi- 1 Chavegrin, Ko'.e, S., '.'1. 1. 20, S 1. Nancy, 2s oct. is9o, S., 91. 2. 11. 1).. 91. 2. 365. Chavegrin, Soie, y., 91. 1. 20, § 1. IN l ÉBÊTS - l>l BEI \\y> res de la l<>i du I" aoûl t S9.*{ ' et cela n'esl |*.i> douteux (*), sauf dans l'opinion qui considère comme nulles toutes les conventions par lesquelles le porteur renonce .1 garder les intérêts du litre amorti 930. Toutefois, s'il est établi que le débiteur connaissait l'amortissement du litre, la continuation du service des inté- rêts peut être considérée comme une renonciation au droit d'invoquer l'amortissement (' . 931. Le porteur du titre a un recours contée son vendeur ou son agent de change , si l'amortissement était antérieur à son acquisition (*). 932. On réclamait vivement une modification de la législa- tion sur les points qui viennent d'être discutés (6). dette réforme a été partiellement réalisée par l'art. 70 qu'a ajouté la loi du 1er août 1893 à celle du 24 juillet 1867 : Dans les cas où les sociétés ont continué à payer les inté- rêts ou dividendes des actions, obligations ou tous autres •> titres remboursables pur suite d'un tirage au sort, files ne » peuvent répéter ces sommes lorsque le titre est présenté au mboursement ». Comme on l'a fait remarquer au sénat (7), cette disposition manque son but. En effet, par cela même que l'art. 70 n'in- terdit pas la stipulation contraire, il est permis aux sociétés de stipuler que le créancier renonce à la disposition de la loi 8). Or cette clause est. et surtout deviendra de style. i Falcimaigne, discours précité. 5 Cass. civ., 13 mai 1889, précité impl. . — Cass. civ., 14 janv. 1890, précité motifs). — Trib. coin. Seine, 14 avril Wxti. Droit, 30 avril 1886. Trib. coin. Nantes, 7 fév. 1885, sous Cass. civ.. 13 mai 1889, précité. — Cha- . in, Noie, S., 91. 1. 20, § 1. ') Trib. civ. Seine, 15 mai 1885. Gaz. Trib.. 2 juin 1885. • Paris, 2 janv. 1890, Droit, o" fév. 1890. — Paris, 19 juil. 1890, Droit, 28 août — Cbavegrin, Noie, S.. 91. 1. 17, g 1. ■ Vœu de la Chambre de commerce de Paris, Journ. îles soc, 1888, p. 256. — Projet de l'Union des banquiers des départements, 9 déc. 1887. — Résolution du • iougrès international des sociétés par actions, août 1889, compte-rendu slénogr. des délib. du congrès, p. 250 s. et 317. — Paul Leroy-Beaulieu, Echu, franc. . 7 si pt. 1887; Vavasseur, Econ. franc., 16 nov. 1889 et Bev. des soc, 1889, p. 471 : Deloison, Tr. des val. moi., p. 295: Bucbère, Loi. 21 juin 1890; Chavegrin, Xole, S., 91. 1. 21. ' ') Falcimaigne. discours précité. ■496 DU PBÊT DE CONSOMMATION D'un autre coté, la loi se restreint, comme le montre son objet, qui est de modifier la loi de 1867 sur les sociétés commerciales, aux sociétés commerciales ou à forme commer- ciale. 933. On parait considérer comme évident que, dans toutes les opinions, le droit, pour le débiteur, de répéter les inté- rêts perçus est subordonné à une publication, faite confor- mément aux usages du commerce, des titres amortis (';. En effet, dans le cas contraire, la société, qui était en mesure de faire part de ramollissement aux porteurs de titres, a com- mis une faute en s'abstcnant de le faire. IX. Sanctions de l'obligation de payer les intérêts. 934. La sanction de l'obligation de payer les intérêts est dans l<" droit qui appartient au créancier de faire courir les intérêts <1«- ces intérêts dans les conditions lixées par l'art, il 54 c. civ. 935. Le défaut de paiement des intérêts permet-il au créan- cier de réclamer la restitution du capital? ('cite réclamation constituerait une demande en résolution de la convention. La question revient donc à savoir si les contrats unilatéraux le prêt, même à intérêt, est dans l'esprit du code un contrat uni- latéral' ' peuvent être résolus pour inexécution des condi- tions, deux qui admettent l'affirmative permettent au créancier, non payé îles intérêts, de réclamer la restitution du capital ; Les autres sont d'avis contraire ('). S'il s'agit d'obligations et si le capital peut êlre répété, on peut demander aussi une fraction de la prime de rembour- sement, calculée de la manière indiquée plus haut (5). 1 Chavegrin, Sole, S., 91. 1. 18, § l. j V. supra, n (*) Trib. civ. Seine 26janv. 1893, Gaz. l'ai.. 93. 1. 168 (obligations émises par une société). — Bruxelles, 21 déc. 1853, Pasicr., ~>4. 2. 27'.". — Aubry et Rau. IV, p. 602, J 396, nole9; Guillouard, n. 140; Hue, XI, n. 200. («) Cass. Rome. 13 juil. 1892, D., 94. 2. 291.— Trib. civ. Bruxelles, 9marsi889, Jurispr. des tri/,, bel;/.. 89. 422. — Laurent, XXVI, n. 521. (s) Trib. civ. Seine. 26 janv. 1893, précité. — Une, XI, n. 200. — V. supra, n. 760 s. INTÉRÊTS DROH INTERNATIONA] 497 11 est, ''ii tool cas, certain que le droil du débiteur au rem boursement du capitaj peut être stipulé ('). \ . Des intérêts du prêt en droit international. 936. La question de savoir si le prêt porte intérêt et quel est le montant maximum des intérêts, abstraction faite du point de savoir si les tribunaux peuvent appliquer une loi admettant un maximum supérieur au maximum fixé par leur propre législation, est tranchée par la loi qui règle les ell'ets de l'obli- gation (s),car la stipulation des intérêts concerne une des con- séquences du contrat. Il s'agit donc de la loi du lieu où le contrat est passé (3) ; c'était déjà la solution en droit romain (4). (') Trib. civ. Toulouse, 28 fév. 1888, Gaz. Trib. Midi, 22 avril L888-. — Trib. civ. Toulouse, 9 mai 1891, Gnz. Trib. Midi, 7 juin 1891. (!) Weiss, Noie, l'ami franç.,96. 5. 1; Guillouard, n. 143; Burge, Comment. mi colonial ami foreign laws, cité par Fœlix, liev. élr. et franc, de législ., VI, 1839, p. 735;Albéric Rolin, Princ. du dr. int. prier. III, n. 1358 s.; Von Bar, Th. uixl Praxis /les internationalen Privnlrechts, 2e éd., Hanovre, 1889, II, p. 56, n. 264. — Cet auteur, dans l'application de son principe, part de l'idée que les inté- rêts peuvent être considérés soit comme une compensation des gains que le créan- cier aurait pu faire par un autre emploi donné à l'argent prêté, soit comme un fruit que produit le capital au lieu où il est employé ; la première idée, selon lui, conduit à appliquer la loi du domicile du créancier ou, si le créancier n'aurait pas employé L'argent dans ce lieu, la loi du lieu où il l'aurait employé; la seconde com- mande de se référer à la loi du domicile du débiteur ou plus exactement à celle du lieu où le débiteur a fait fructifier la somme prêtée, « car c'est par le travail et les ressources du débiteur que la somme prêtée produit des fruits ». Si le prêt est fait pour tant de temps, on doit accepter le premier point de vue ; s'il est îa'iipour une longue durée, on doit s'en tenir au second, parce que dans le premier cas le prêt est une exception à la règle que le prêteur jouit de son argent à son domicile et que dans le second cas le créancier songe avant tout à utiliser le travail et les ressources du débiteur. (s) Lyon, 3 août 1876. Jour», dr. int., IV, 1877, p. 356. - Alger, 7 déc. 1892, Journ. jurispr. algér., 1893, p. 85, Jonrn. dr. int.. XX, 1893, p. 541. — Trib. civ. Melun, 18 juin 1874, Journ. dr. int., II, 1875, p. 353. — Trib. civ. Seine, 12 mai 1885, Journ. dr. int., XII, 1885, p. 305. — Trib. civ. Seine, 21 mars 1894, Journ. dr. int.. XXI. 1894, p. 541. — Trib. civ. Seine, 14 nov. 1890, Journ. dr. int., XIX. 1S92, p. 987. — Trib. civ. Besançon, 23 janv. 1890, Journ. dr. int., XIX, 1892, p. 1031.— Trib. civ. Seine, 5 déc. 1895, Journ. dr. int., XXIV, 1897,p. 1 49; Pand. franc., 96. 5. 1. — Trib. consul. France à Constantinople, 5 mars 1893, Joum. dr. int.. XX, 1893, p. 615. — C. supr. Ohio, Journ. dr. int., III, 1876, p. 205. — C. Mipr. Nibraska, 20 mars 1883, Journ. dr. int., XI, 1884, p. 533. — Burge, lor. • •/. .• Weiss, lo". cit.; Guillouard, loc. cit. ; Hue, loc. cit. * I . 1 pr. 1)., De usur., 22. 1. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 3i 498 DU PRÊT DE CONSOMMATION On arrive à la même solution en disant que les lois restric- tives du taux de l'intérêt sont des lois de police ('); mais nous pensons qu'on donne ainsi une interprétation trop large de cette dernière expression. 937. Certains auteurs, tout en appliquant la loi du pays où le contrat est passé, décident que si l'argent est versé par le prêteur dans un autre pays, c'est la loi de ce pays qui fixe le taux de l'intérêt (*). On invoque en ce sens une loi romaine qui n'est pas probante ('), l'intention des parties qu'il est difficile cependant de rechercher et l'idée fausse que le taux de l'in- térêt est déterminé par la situation économique du pays où les fonds sont versés. Cela revient à dire que, d'une manière absolue, la loi du lieu de versement dos fonds détermine le taux de l'intérêt, puisque la loi du contrat n'est appliquée par cette opinion que dans le cas où les fonds y sont versés. C'était l'opinion de Dumoulin ('), et c'est encore celle de la jurisprudence (5). 938. La nationalité du prêteur n'est d'aucune importance. Mais si les deux parties appartiennent à la même nationalité, la question est réglée par leur loi nationale, puisqu'on admet en général que cette loi régit alors les effets du contrat (6). Le lieu où le remboursement doit s'effectuer n'importe pas davantage (7). (' Bead&ot, Cours de dr. civ., Inlrod., a. 153. Guillouard, n. 142; Cabou&t, Ann. dr. comm., IV, 1890, .lurispr., p. 132: Une. XI. n. 213. -1) L. 3, D.. De bon. auct. jud. possid., 42. 5 (celle loi dit seulement qu'un contrai est réputé s-e former là où le prix doit en être payé). i Comm. ad Cod., I, 1. 3. sj Cass., 21 déc. L8T4, s.. 75. I. 78. I).. 76. 1. 107. — Grenoble, 11 juill. 1872, Journ. dr. int.. I, 1874, p. L28 . D., 76. 2. 236. — Piore, Dr. int. privé, n. 262; i liiillouard, n. 142. [•) Ballot, Rev. dr. fr. el élr., VI, 1849, p. 806 ; Weiss, toc cil. — V. cep. Alger, 7 déc. 1892, précité (si deux Musulmans font constater leur accord par un juge de lini.v. l'obligation produit des intérêts, quoique la loi musulmane interdise le prêt à intérêt). — Contra lluc, XI, n. 21 i. 7i i :pr. Ncbraska, 20 mars 1883, précité. — Contra G. circuit Orégon, 9 août 1886, Journ. dr. int., XVI, 1889, p. 501. — P.Voêt, De statut, eorumq . concursu Amsterdam, 1661/, th. II, § 9, n. 12; Chrislinaeus, l'ractica quœstionum (Anvers, 1661), I, doc. 1883, u. 12 et 13; Everhardus, Consilia [Augusfse Vindelis, 1603), INTÉRÊTS - DROH INTERNATIONAL 499 Noua en dirons autanl de la loi dodomicile du débiteur ('). La loi du domicile du prêteur, qui a été également propo- •), n'a pas plus d'influence sur la question. 939. Il n'appartient pas aux parties de déciderquele taux maximum sera fixe par une autre loi, telle que celle de la résidence de l'emprunteur (:{). Aussi est-il (''vident que, la fraude faisant exception à toutes les règles, les personnes qui, pour pouvoir convenir d'un inté- rêt supérieur à celui du pays où elles s'accordent, vont dresser l'acte dans un paysétranger,sont,aupointdcvuedu maximum de l'intérêt, régies par les lois du premier de ces pays ' . 940. Certains appliquent la loi du lieu où le capital doit être employé (5). I »n a aussi appliqué le domicile du créancier, mais avec la faculté pour le créancier de se soumettre à une autre loi (6). 941. Beaucoup d'auteurs pensent que les tribunaux n'ont le droit, en aucune hypothèse, d'admettre la légitimité d'inté- rêts supérieurs au taux maximum fixé par leur propre loi (7). Ils se fondent sur l'ordre public. c 'ii-. 78, n. 2i s.; Burgundas, Ad consuet. Fland. (racial us [1670), IV, n. 10 i :pr. n. 29 ; Boullenois, Tr. de lu persotin. et de la réalité des lois Paris, 1766), II, p. 172 ; Fœlix, I.n. 109 ;Burge, Comment, on colonial andforeianlaws, LU. p. 77 i, § 304 e: ^tory. Comment, on internat, law, b" éd. (Berlin. 1857), §§ 298 s. («] Rouen, 12 juill. 1889, Journ. dr. inl., XVIII. 1890. p. 123. Gaz. Pal., 89. 2. 455. — Contra Tlioel, Einleilung in das deutsch. Privalrechl (Gœttingue, 1851 1, ï sr>. note 4 ; Brocher, II, n. 145; Fiore, n. 264. ' i Trib. sup. Monaco, 22 mai 1891, Journ. dr.int.,XVUl, 1891, p. 1263 (motifs). Contra C. supr. Ohio, janv. 1881, Journ. dr. inl.. XI, 1884, p. 334. — C. de circuit Nebraska, janv. 1881, Journ. dr. inl . X. 1883, p. 416, et autres décisions citées Journ. dr. int., loc.cil., p. 417 — Hue, XI, n. 215. 1 Bastia, 19 mars 1866, S., 66. 2. 255, D., 66. 2. 222. — Voit. Pand.,%6, liv. XXII, lit. 1; Fiore, n. 264; G-uillouard, n. 113 bis. s De Bar, op. cit., II, p. 61 s., n. 265 et 2(36. Cet auteur reproduit les distinc- tions que nous avons indiquées, supra, p. 497, note 2. — En général donc, il appli- que la loi du domicile du débiteur. Cependant, s'il s'agit d'un prêt hypothécaire, il applique la loi du lieu de situation de l'immeuble hypothéqué, à moins que l'hypo- Ihè |ue n'ait joué dans l'intention des parties qu'un rôle accessoire. — Le taux des intérêts d'un capital prêté pour soutenir une entreprise est réglé par la loi du lieu de celte entreprise. — Chausse, Ree. crit., XV, 1886, p. 693. 6) Bouhier, Coul. de Boiirnoqne. ch. XXI, n. 191 et 195. :) Trib. civ. ^eine, 13 fev. 1895. Journ. dr. ml.. XX1U, 1896, p. 1064. — Trib. sup. coin, allemand motifs ,Enlsch., I, n. 30, p. 61. — Trib. d'appel Celle, 16sept. 1832, Seuffert, Archiv, VIII, n. 1. — Duvergier, n. 313: Démangeât sur Fœlix, 500 DU PRÊT DE CONSOMMATION Nous sommes d'avis contraire. La limitation du taux de l'in- térêt n'est que d'ordre public interne; car on ne peut consi- dérer comme appartenant à l'ordre public au point de vue absolu une règle combattue par la majorité des économistes et inconnue dans la plupart des colonies françaises. Aussi les tribunaux français doivent ils consacrer en matière civile la stipulation faite à l'étranger d'intérêts supérieurs à 5 p. 100 (*). On croit, en faveur de l'opinion contraire, trouver un argu- ment dans les lois qui considèrent l'usure comme un délit ; cet argument se réduit à une pétition de principe, car il fau- drait démontrer que la législation entend traiter comme usu- raires les intérêts, supérieurs au maximum fixé par la loi française, qui sont stipulés dans un pays étranger. 942. Certains auteurs, qui ne regardent la fixation d'un maximum que comme une règle d'ordre public interne, déci- dent cependant que la prohibition du prêt à intérêt est d'ordre public international, et interdisent, en conséquence, aux tribu- naux d'un pays où le prêl à intérêt serait prohibé d'appliquer 1, p. 232, noie u : Laurent. Le dr. civ. intern., VIII, n. 201 s. ;Savigny, Tr. de dr. romain, VIII, § '■>"> Irad. Guenoux . p. 27:!; Stobbe, Handbuch des d. Privat- rechls 2» éd., 1882 . I. ; 31, noie * : Berlauid, Quest. prat. et doclr. sur le <'. civ., I, p. 49 s.; Audiuet, Dr, int. privé, a. WO; Weiss, Précis de dr. int. privé, p. 633 et Soie. Parut, franc., 96. 5. L (») Cass., 18 juin 1857. S.. 59. 1. 751, D., 59. I. 194. — Turin, 28 flor. an XIII, S. chr. — Bordeaux, 26 janv. 1831, S., Si. 2. 178. — Bourges, G mars 1860, S., 60. 2. 621. — Bordeaux, 22 août 18< 5, S., 66. 2. 217, D., 66. 2. 223. — Bastia, 19 mars 1866, S-, 66. 2. 255, n.. 66. 2. 222. — Cbambéry, 12fév. 1869, S., 70. 2. 9, D, 71. 2. 118.— Lyon.:; août 1876, Journ. dr. int., IV, 1877, p 356. — Trib. civ. Seine, 14 nov. 18*'.*, Droit, 22 nov. 1889. — Cbambéry, 6 juin 1890, Journ. dr. int., XVIII, 1891, p. 567, Rec. Chambéry, 90. 209. — Lyon, 18 nov. 1887, Mon. jud. Lyon, 23 août 1888. — Trib.civ. Seine, 12 mai 1885,. lourn. dr. int.,XU, 1885, p. 305. — Trib. coin. Havre, 7 fév. 1887, Rev. dr. int. dr. mûrit., 1886-87. p. 687. — Trib. civ. Seioe, 14 qov. 1890, Journ. dr. int., XIX, 1892, p. 987. — Trib. civ. Seine, 21 mars 1894, Journ. dr.int., XXI. 1894, p. 541.— Trib. civ. Seine, 5 11er. 1895, Journ. dr. int., XXIV, 1897, p. 149, Pand. franc., 96. 5. i. — Troplong* n. 359: Fœlix, 1. p. 251 : l'ont, I. n. 270;Aubry et Bau, IV, p. 607, § 396. note 27: Brocher, II, p. 248; Piore, n. 264; Despagoet, Précis de dr. int., p. 493; Surville et Artlmys. ibid., p. 247 ; Guillouard, n. 143; Chausse, Rev. cit.. XV, 1886, p. 693; Cabouat, Ann. dr. connu.. IV, 1890, Jurispr.,f. 130; Hue, XI, n. 216— En Autri- che, la loi du 17 janv. 1787 porte que les intérêts valablement stipulés d'après la loi du lieu où le contrat s'est formé peuvent être réclamés en Autriche. — V. Unger, Syst. des œster. allgem. Privatrechts, I, Vienne. 1853, p. 188. INTÉRÊTS — DROIT INTERNATIONAL 501 une loi étrangère contraire [*). Mais cette distinction nous parait manquer île logique. 943. Les intérêts moratoires qui peuvent être dus en cas de non paiemenl des arrérages sont, connue les intérêts con- \ entionnels, régis par la loi du contrat ('), car ils sont la suite du contrat ; la demande en justice n'est que l'occasion des intérêts moratoires et le titre de ces intérêts est dans la con- vention. 944. Aussi faut-il rejeter l'opinion qui applique la loi au lieu où l'action en justice est intentée, sous le prétexte que ces intérêts sont dus en vertu de la loi dans le ressort de laquelle l'action est intentée (•). 945. En tout cas, si l'acte fixe le taux des intérêts « jusqu'au remboursement », on décide que les intérêts moratoires seront dus au même taux, pourvu que les intérêts fixés par la con- vention ne dépassent pas la limite fixée par la loi du lieu où le contrat est passé, car alors les intérêts moratoires sont la suite des intérêts conventionnels (4). 946. La forme de la stipulation de l'intérêt est réglée par la loi du pays où cette stipulation est faite; ainsi l'intérêt peut être conclu verbalement même entre Français dans un pa\s où cela est légal (5). l] Guillouard, n. 143. : Cass., 10 juin 1857, S., 59. 1. 751, D., 58. 1. 194. — Bastia, 19 mars 1866, S., 66. 2. 255, D.. 66. 2. 222. — Aubry et Rau, IV, p. 607, § 396, note 28; Guillouard. n. 144; Hue, XI, n. 217 et 218. 3; Aix, 14 janv. 1825, S. chr. — Bordeaux, 22 août 1865, S., 66. 2. 217. D., 66. 2. 223. — Pont, I, n. 271. 4 l'ont, loc. cit.; Guillouard, n. 144. f'} Bourges, 6 mars 1860, S., 60. 2. 621. — Bordeaux, 22 août 1865, S., 66. 2. 217, D., 66. 2. 223. — Trib. civ. Melun, 18 juin 1874, Jouni. dr. int., II, 1875. p. 355 (Californie). — Albéric Rolin, III, n. 1351; Brocher, II, n. 256; Hue. XI, n. 214. Ô02 DE LA RENTE PERPÉTUELLE SECTION VIII DE LA RENTE PERPÉTUELLE OU CONSTITUÉE § I. Historique. 947. Nous avons déjà dit (') que le contrat de constitution de rente fut imaginé, dans notre ancien droit, pour éluder la prohibition du prêt à intérêt (-). Le prêteur transmettait à l'emprunteur la propriété d'un capital dont il s'interdisait le droit de jamais exiger le remboursement; en échange, l'em- prunteur s'obligeait à payer une rente perpétuelle. Cette opération, disait-on, ne constitue pas un prêt, mais bien une vente : la chose vendue, c'est la rente et le capital versé par le crédi-renlier en est le prix '). 948. On rencontre la trace du contrat de constitution de rente perpétuelle dans le droit romain (*). A Home, on n'appliquait pas aui constitutions de rentes perpétuelles les règles du prêt à intérêt. Ainsi Justinien s décida que la règle d'après laquelle le cours des intérêts cessait, dans le prêt, lorsqu'ils auraient atteint le principal, ne s'appliquerait pas aux rentes perpétuelles, où la presta- tion stipulée était plus un revenu périodique [annuus redihts) qu'un intérêt. 949. Polluer dit que les discussions sur la légitimité de la constitution de rente perpétuelle commencèrent au xiu" siè- cle, d'où il conclut qu'elle était rare avant cette époque (6). En tout cas, cette validité fut reconnue sans grande diffi- culté {"). (') V. supra, n. 816. — V. infra, n. 949. *) Potliier. Du contrai de constil. de renie, n. 5: Argou, liv. III. cb. XXVI, II, p. 266. (8) Potliier, loc. cil.; Argou, loc. cit. \*j Nov. 160. — V. Dumoulin. l>e usur., quesl. 37. (S)Nov. 160. «■ N. 3. t1! Pothier, loc. cit.; Argou, liv. III, eh. XXVI. Il, p. 256. — D'après Argou, loc. cit.. une opinion soutenue dans les débuts subordonnait la validité de la cons- titution de rente à la condition que le débi-rentier eût des immeubles et en afîec- B1ST0RIQI i o03 Le droil canon lui-même permettait l'intérêt dans la cons- titution de rente ('). Mais, comme la rente perpétuelle avait été pratiquée pour tourner les règles limitatives du taux de l'intérêt, des dispo- sitions législatives, dans le but d'éviter cet abus, fixèrent un maximum (jue les arrérages de la rente perpétuelle ne purent dépasser (*). Les auteurs admirent même que, de plein droit, la restriction du taux de l'intérêt s'appliquait aux arrérages de rentes (s). Les ordonnances qui temporairement, pour les besoins de l'Etat, levaient un impôt sur les revenus, permettaient aux débi- teurs des rentes constituées de retenir sur les arrérages des rentes l'impôt airérent à ces rentes, par la raison que les rentes procuraient aux créanciers un revenu imposable et diminuaient l'actif du débiteur ('). La loi du 3 sept. 1807 fait allusion à cette règle. 950. La constitution de rente est devenue rare dans notre droit actuel, où die n'a pas la même raison d'être que sous notre ancien droit, puisque le prêt à intérêt n'est plus pro- hibé. Seul à peu près, l'Etat emprunte aujourd'hui sous cette forme, qui lui olï're l'avantage de ne pas se mettre à la dis- crétion des prêteurs, et de rembourser le capital avancé quand il lui convient, tout en permettant à ceux-ci de rentrer facile- tàt les fruits au paiement, parce que dans ce cas seul il y avait moins prêt à inté- rêt que vente de fruits. (') C. 1 et 2, Exlr. comm. de empl. et vend., 3. 5. — 1424, Martin V. — 1 i*'">. Calixte III. ') Ane. Coût d"Orléans. 15*39. art. 37'.» maximum du denier 10;. — Mars 1567, édit de Charles IX (denier 12 au maximum. — Juillet 1601, édit de Henri IV (le maximum du taux des renies constituées est du denier 16, excepté entre mar- chands fréquentant les foires de Lyon et pour cause de marchandises!. — Mars 1634, ord. de Louis XIII (maximum du taux des renies porté au denier 18, toujours avec la même exception). — Dec. 1665, ord. de Louis XIV (maximum porté au denier 20, toujours avec la même exception). — 1720, édit réduisant le maximum du taux au denier 50; cet édit ne fut pas enregistré. — Juin 1724 (maximum fixé au denier 30). — Juin 1725 maximum fixé au denier 20). — On voit qui! est inexact d'affirmer, avec certains auteurs Guillouard, n. 174 , que les arrérages de rentes perpétuelles pouvaient être fixés librement. (s) Dumoulin, De usur., quest. 30; Argou, loc. cit., p. 267. — Polhier, auquel on a imputé la doctrine contraire (n. 5 et 43), dit, au contraire, formellement (n. I1 »> que les rentes ne peuvent être constituées qu*au denier 20 \5 p. 100, au plus. (*) Polhier, n. 125. 504 DE LA RENTE PERPÉTUELLE ment dans leurs fonds, quand ils le veulent, par le moyen d'une vente faite à la Bourse. § II. Diverses sortes de rentes constituées. Nature de la constitution de rente. 951. La rente constituée peut être perpétuelle ou viagère : « Cette rente peut être constituée de deux manières, en per- >• pétuel ou ru viager », dit l'art. 1910. Si elle était constituée pour une durée déterminée, pour vingt ans par exemple, on tomberait dans l'hypothèse du prêt à intérêt; car le capital serait exigible de la part du créancier à l'expiration du délai fixé. — Le législateur ne s'occupe ici, et nous ne nous occu- lterons avec lui, que de la rente constituée en perpétuel. « Les • > règles concernant les rentes viagères sont établies au titre » Des contrats aléatoires », dit l'art. 1914. Ou peut considérer comme des rentes constituées les renies foncières, qui consistent dans une prestation perpétuelle stipulée en vertu d'un bail à rente, c'est-à-dire comme prix de l'aliénation d'un immeuble ; dans l'ancien droit, où le fonds aliéné était hypothéqué de plein droit en garantie du paie- ment de la rente, la rente foncière n'avait aucun rapport avec la rente perpétuelle ordinaire, équipol lente au prêt; elle constituai! une charge réelle due par l'immeuble seul et n'était pas rachelable. Les rentes foncières sont aujourd'hui meubles (art. 529) et «achetables (art. 530). Elles n'ont qu'un caractère différent de la rente perpétuelle, c'est qu'elles ne sont pas soumises aux lois qui limitent le taux de l'intérêt, et encore ceci tient-il non pas à leur nature, mais à ce qu'elles constituent un prix de vente et que le prix de vente échappe aux lois limitatives du taux de l'intérêt. Au surplus, l'étude de la rente foncière rentre dans le commentaire du titre de la distinction des biens. 952. Le code civil considère la constitution de rente comme un prêt à intérêt ; c'est ce qui résulte, non seulement de la place qu'occupe l'art. 1909 (au chapitre Du prêt à intérêt), niais aussi de ses termes : « On peut stipuler un intérêt \ \ 1 1 RE .il [UDIQUK 505 » moyennant un capital que le préteur s'interdit d'exiger. — » Dans ce cas, le prêt prend le nom , y., 47. 1. 113. D., 46. 1. 357. — Troplong, n. 393; Aubry et Rau, IV, p. 615, § 3(J8, note 4; Laurent, XXVII, n. 7; Guillouard, n. 181. i'aii mi m des i> i ÊnÊrs .'>()'.» 964. Dans l'ancien droit, d'ailleurs, du parlait de celte idée, puisqu'on allait jusqu'à interdire la stipulation que l<-s arré- rages seraient payables en denrées, par la raison qu'il était impossible d'affirmer d'avance qu'un jour donné la valeur «les fruits ne dépasserait pas le taux légal de l'intérêt ('). Il est inutile de dire ijue celte solution n'est [dus exacte aujour- d'hui (s). 965. Pour savoir si le maximum légal de l'intérêt se trouve dépassé, les denrées doivent être estimées d'après les mercu- riales (:t). Mais elles doivent être estimées au jour du prêt et non au jour où les arrérages sont payables ; car c'est au moment du prêt qu'on doit rechercher si les parties ont voulu faire ou non un prêt usuraire. 96'3. Une ordonnance de novembre 1565 rendue sous le règne de Charles IX décida que les arrérages des rentes per- pétuelles payables en blé seraient converties en argent au denier douze (4). Ce texte n'est pas applicable aux rentes cons- tituées postérieurement au code civil : par cela même qu'il n'a pas été reproduit, il a été abrogé (s). Du reste, il résulte de ce qui précède (6) qu'il était déjà tombé en désuétude. 967. Si le débi-rentier meurt laissant plusieurs héritiers, chacun d'eux peut payer divisément sa part dans les arréra- ges (7), car les dettes d'argent sont divisibles; telle était la solution de Pothier (8). Il va sans dire qu'à raison de l'indivisibilité de l'hypothè- que, l'héritier détenteur d'un immeuble hypothéqué à la rente peut être tenu de payer la totalité des arrérages; c'est encore ce que -disait Pothier (9). (') Argon, loc. cit., p. 268. V2) Hue, XI, u. 202. 1 Guillouard, n. 181. (4) Isambert, Rec. gén. des anciennes lois /'unir., XIV, p. 183. (5) Troplong, n. ï,93; Guillouard, n. 182. — Contra Chardon. Du (loi et de /) ('). II. Remboursement du capital. 972. Quoique le débi-rentier ne soit pas tenu de déférer à la demande du créancier en remboursement du capital prêté, ce remboursement n'en doit pas moins être considéré comme rentrant dans ses obligations ; car, d'une part, c'est une néces- sité pour lui de rembourser le capital, s'il veut être déchargé pour l'avenir des intérêts, et, d'autre part, il y a des circons- tances où le créancier peut exiger ce remboursement (2). A. Prescription de. l'action en remboursement. 973. Toutefois l'obligation du remboursement peut s'étein- dre par la prescription, et c'est pour cette raison qu'au bout de 28 ans le crédi-rentier peut exiger un titre nouvel (C. civ. art. 2263). La prescription est de 30 ans. Elle court non pas du jour où les derniers arrérages ont été payés (3), mais du jour du titre (*). B. Rachat de lu rente. a). Caraetèrp essentiel du droit de rachat, ('lu use contraire. 974. Aux termes de l'art. 1911 al. 1 : « La renie constituée >j en perpétuel est essentiellement rachetable ». C'est plutôt remboursable qu'il aurait fallu dire, puisque notre législation considère la constitution de rente comme un prêt (8) ; le mot /achetable, emprunté à notre ancien droit, donne à entendre qu'elle est une vente. 1 V. pour le prêt, supra, a. 935. - Y. infra, n. 988 s. V. cep. Trib. civ. Beauvais, 23 îèv. 1893, Gaz. Trib., 25 avril 1893. ', Uaudry-Lacantinerie et Tissier, Tr. de la prescription, n. 382 et les autorités cite esl et 621. 1 i Uiillouard, n. 186. «312 DE LA RENTE PERPÉT1 ELLE La l'acuité, que la loi reconnaît au débi-rentier de rem- bourser le capital de la rente, est précisément une consé- quence du principe que la constitution de rente est un prêt: car le prêt implique l'idée d'un remboursement. Ainsi, le prêteur ne peut jamais demander le remboursement du capi- tal de la rente; il s'est interdit le droit de l'exiger : c'est la différence principale qui existe entre le prêt et la constitution de rente. L'emprunteur, au contraire, peut rembourser, et en principe, il le peut quand il le juge à propos. 975. Le droit de rachat était, dans l'ancien droit, consacré au profit du débi-rentier par la plupart des coutumes ('). Cependant, à l'origine, la rente n'était pas rachetable; c'est à la laveur d'une bulle de 11570, due à Pie V, que la solution contraire s'introduisit dans lescoutuumes *) et Loisel l'exprime ainsi : « Mentes constituées à deniers sont rachetables à tou- jours » ('). Elle n'était pas d'accord avec le caractère de vente attribué à la constitution de renie dans l'ancien droit ('). 976. La rente est rachetable quelle que soit la qualité du crédi-renlicr. Mans un avis interprétatif du 21 décembre 1808 ayant force de loi, le conseil d'Etat a décidé « que le rem- boursement des capitaux dus aux hospices, communes et fabriques cl autres établissements dont les propriétés sont administrées cl régies sous la surveillance du gouvernement, peut toujours avoir1 lieu quand les débiteurs se présentent pour se libérer ». 977. La règle que la rente est essentiellement rachetabic s'applique-t-elle aux rentes constituées à titre gratuit? Nous ne le pensons pas (5). On ne peut tenir compte de l'art. 1911, ' Paris, art. 11'.». — Orléans, ait. 268. — Bourbonnais, art. ils. — Nivernais, art. 9. — Troyes, art. 67. — V. Argou, toc. cil. -' Laurière sur Loisel, li\. IV, tit. 1, Des renies. iv. IV. tit. I, règle 7. • Laurent, XXVII, m. 10. — V. cep. Guillouard, n. 187. I5| Conlra Paris, 1'.» fév. 1884, !>.. 85. 2. il cet arrêt n'a pas d'autorité, car il ne semble pas croire que la question soit discutable . — Besançon, 23 déc. 1891, 1»., 92. 2. 303. — Paris. VA mai 18%, 1).. 97. 2. ïù — Grenoble, 3 mars 1896, U., '.'7. 2. 2Ô7. — Rouen, 27 mars 1897, Rec. Rouen, 98. 1. 119. — Trib. civ. Toulouse, 2.S fév. lsir>. Droit, 17 mais 1895, Loi, 19 mars 1895. — Trib. civ. Lombez, 25 nov. 1S97, Gaz. Trib., 98, 2« p., 1. 190. — Guillouard, n. 205; de Loynes, Note, D.. 97. 2. 257. hachai 513 qui, comme huis 1rs articles voisins, esl spécial aux rentes constituées moj ennanl un capital, et cet article fournil même à notre opinion un très sérieux argument a contrario. D'autre part, une obligation perpétuelle n'a rien d'illégal ; les droits réels perpétuels sont seuls réprouvés par la législation. Enfin la faillite de rachat est empruntée à l'ancien droit, où elle ne s'appliquait pas aux rentes constituées à titre gratuit ('). 978. La faculté de rachat est imprescriptible [-), d'abord parce que les termes de l'art. 1911 le démontrent, ensuite parce qu'il s'agit là d'un acte de pure l'acuité ;C. civ., 2232). 979. Dans l'ancien droit, toute clause qui mettait un obsta- cle quelconque au droit de rachat pendant un certain temps était déclarée nulle comme contredisant le caractère essen- tiellement rache table de la vente 8). On annulait également les clauses qui subordonnaient le rachat à un avertissement donné un certain temps à l'avance • . Le code a dérogé à cette règle, et c'est avec raison (5). On conçoit en effet que celui qui s'interdit à tout jamais le droit de réclamer le capital qu'il aliène puisse légitimement ne pas vouloir être remboursé du jour au lendemain : dans sa pen- sée, le prêt est sans doute un prêt à long terme. Aussi l'art. 1911 al. 2 dispose-t-il : « Les parties peuvent seulement con- » venir que le rachat ne sera pas fait avant un délai qui ne » pourra excéder dix ans, ou sans avoir averti le créancier ■ ■ au terme d'avance qu'elles auront déterminé ». — Si la con- vention interdit le remboursement pendant un délai plus long (jue dix années, nous verrons qu'elle ne sera pas nulle pour cela, mais qu'il y aura lieu de la réduire à la limite légale. Le texte que nous venons d'analyser établit entre la cons- titution de rente et le prêt à intérêt une différence difficile à justifier (•). La loi laisse les parties libres de fixer comme (») Pothier, n. 166. Troplong, n. 435; Guillouard, n. 188. 1 Putbier, n. 52 : Argou, op. cit., p. 269. (*) Pothier, loc. cit. (qui critique un arrêt de Grenoble validant une clause qui obligeait le débi-rentier à donner avis du rachat six mois à l'avance). (5) Guillouard, n. 190. («) Laurent, XXVII, n. il lis; Guillouard, n. 190. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 33 514 DE LA RENTE PERPÉTUELLE elles l'entendent l'époque du remboursement du prêt à inté- rêt, pourvu tout au moins qu'elles n'excèdent pas la limite de 99 ans (car alors on peut le considérer comme une rente perpétuelle) : ainsi un prêt peut être fait pour vingt ans, pour trente ans..., auquel cas l'emprunteur n'a pas le droit de for- cer le prêteur à recevoir le remboursement avant l'expiration du terme convenu ; tandis que la clause qui déclarerait une rente constituée non remboursable pendant le même délai, ne produirait son effet que pour dix ans. ïl eût été plus logi- que, à notre avis, d'assigner à la durée du prêt à intérêt un maximum égal à celui pendant lequel la rente peut être sti- pulée non remboursable. 980. La clause qui interdit le rachat pendant un délai de plus de dix ans n'est pas nulle, mais seulement réductible à dix ans ('). On doit penser que les parties ont tenu avant tout à empêcher le rachat et qu'elles aiment mieux l'empêcher pen- dant un temps limité que de ne pas l'empêcher du tout ; on peut, en outre, invoquer par analogie l'art. 1660, d'après lequel, si une vente est faite avec la faculté de rachat pendant un temps excédant le délai légal de cinq ans, le rachat peut être effectué pendant cinq ans. b\ Conditions dit rachat. 981. Si la rente est constituée en argent, comme le taux- légal de l'intérêt est, à défaut de convention, de 5 p. 100, le rachat doit être fait au moyen d'une somme égale a vingt fois les arrérages, c'est-à-dire au denier 20 (*). Les parties peuvent stipuler un chiffre plus élevé pour le rachat (') ; tout ce qui en résultera, c'est que le capital sera plus de vingt fois égal aux arrérages, en d'autres termes que 1rs arrérages seront de moins de 5 p. 100 du capital et cela n'est pas interdit. Mais les parties ne peuvent stipuler un chiffre moins élevé pour le rachat, car il en résulterait que les intérêts seraient M Duranton, XVII, n. 611 ; Troplon^r, n. 140; Pont.I, n. 342; Laurent, XXVII, n. 11 bis ; Guillouard, n. 190 bis. tiuillouard, n. 191 ; Hue, XI, n. 2<»r>. 3 Guillouard, loc. cil. HACHAI 515 de plus de •"> p. 100 cl excéderaient ainsi le maximum légal du taux de l'intérêt (' . Oue si la rente est constituée à titre gratuit, le taux de •"> p. 100 nYsl plus applicable de plein droit, puisqu'il ne s'agit plus d'un prêt, niais bien d'une donation (8). (l'est aux tribunaux qu'il appartient de fixer le taux du rachat (f). Cette solution est d'autant plus certaine que, les placements mobiliers rap- portant aujourd'hui beaucoup moins de 5 p. 100, le rachat opéré sur le taux de .") p. 100 nuit au crédi-rentier et que, par suite, la solution exacte en matière de constitution de rente k titre onéreux est trop injuste pour pouvoir être étendue. On objecte en sens contraire l'art. 2, tit. III, de la loi du 18juil. 1790 ; mais ce texte ne concerne que le rachat des charges foncières. Les tribunaux peuvent décider que le rachat s'opérera par l'achat d'une rente sur l'Etat représentant des intérêts équiva- lents (*). En revanche, le disposant peut fixer le prix du rachat avec la plus grande liberté, sans qu'on puisse, au cas où il résul- terait du chitfre fixé que le chiffre de la rente est de plus de •') p. 100 du capital, opposer les lois restrictives du taux de l'intérêt (5). La raison est encore ici qu'il ne s'agit pas d'un prêt à intérêt. 982. Si la rente est constituée en denrées, la loi des 18-29 déc. 1790 (tit. III, art. 2), porte que le rachat aura lieu au de- nier 25, plus le dixième. Cette loi est encore en vigueur, puis- qu'elle tranche une question que le code n'a pas prévue (6). i1) Guillouard, loc. cit.: Hue, loe.cit. 1 Paris, 19 déc. 1884, D., 85. 2. 41. — Paris, 13 mai 1896, D., 97. 2. 257. — Trib. civ. Lombez, 25 nov. 1897, Gaz. Trib., 98, 2e p., 1. 190 — Hue, XI, n. 205 ; de Loynes, Noie, D., 97. 2. 257.— Conhn Besançon, 23 déc. 1891, D., 92. 2. 203. — Grenoble, 3 mars 1896, D., 97. 2. 257. — Rouen, 27 mars 1897, Rec. Rouen, 98. 1. 119. t:il Poitiers, 16 juin 1890, Gaz. l'ai., 90. 2. 47. — Guillouard, n. 192, — et les auto- rités précitées. ' Paris, 19 Tév. 1884, D., 85. 2. il. — Trib. civ. Toulouse, 28 fév. 1895, précité. — Guillouard, n. 192. Paris, 19 fév. 1884, précité.— Besançon, 23 déc. 1891, précité. — Guillouard, n. 192; de Loynes, loc. cil. 6 Caen, 16 nov. 1829, S.. 48. 2. 399 en note). —Trib. civ. Caen, 20 mars 1848, S., 18. 2. 399. — Pont.I, n. 343; Guillouard. n. 191 ; Hue, XI, n. 205. 516 DE LA RENTE PERPÉTUELLE 983. I n avis du Conseil d'Etat ayant force de loi interpré- tative, en date du 21 déc. 1808, décide que si la rente a été constituée au profit d'une commune, d'un hospice, ou d'une fabrique, les débiteurs <• doivent avertir un mois à l'avance pour que ceux-ci (les établissements précités) avisent, pendant ce temps, au moyen de placement et requièrent les autorisa- tions nécessaires de l'autorité supérieure ». Cette disposition ne doit pas être étendue aux autres hypo- thèses. Mais le débi-rentier doit offrir le capital en entier; la loi n'exige pas des Offres réelles, mais il est nécessaire que le détenteur indique au débiteur sa volonté de rembourser le capital en entier. Il doit, en même temps, offrir les intérêts échus; un créan- cier ne peut, en effet, être obligé de recevoir le capital avant d'avoir reçu les intérêts. 984. Si le débiteur est mort laissant plusieurs héritiers, chacun a le droit deforcer le créancier à recevoir le rembour- sement, dé sa part ' (arg. art. 1220). La solution contraire, il est vrai, était généralement admise dans notre ancien droit, notamment par Dumoulin (*) et Pothier (s) ; mais il ne faut pas oublier que la constitution de rente était alors considérée comme une vente cl le remboursement comme un rachat. Il était donc tout simple d'appliquer la règle que notre droit actuel a consacrée en matière de vente à réméré (art. 1671» . Aujourd'hui la constitution de rente est un prêt et il faut, par conséquent, lui appliquer les règles du prêt et non celles de la vente. On se fondait également, dans l'ancien droit, sur ce que le remboursement est seulement in facultate solulionis, et que la chose due est la rente, laquelle a été créée sous la faculté de rachat de la somme totale. On ajoutait que la résolution (') Duranlon, XVII, n. 613; Duvergier, n. 336; Pont, I, n. 345; Aubry et Rau, IV, p. 615, § 398, note 6 ; Laurent. XXVII. n. 13 : Arntz, IV, n. 1390; Guillouard, n. 194 : Ihn\ XI. n. 205 et 210. — Contra Merlin, Rép.. v° Renies constituées, g 9, n. 3; Troplong. n. 46:5; Larombière, Th. et prat. des oblig.. art. 1121, n. 37. i-i Tract, de divid. et individ., 3e part., n. 23. > N. 190. HACHAT 517 des contrats ne peut être partielle. Ce raisonnement portail •i faux : il ue s'agil pas ici de résolution, mais de cessation du contrai par son exécution; d'autre part, les detles facul- tatives, comme toutes les autres, se divisent entre les débi- tein s c). Capacité en matière de rachat. 985. De la part du crédi-renlier, le rachat est forcé ; aucune capacité n'est donc exigée de lui que celle de recevoir le paiement de dettes échues. Lorsque, par exemple, le crédi-renlier est un mineur, et que le taux du rachat est fixé dans l'acte constitutif de la rente, le tuteur peut recevoir le prix du rachat sans l'autori- sation du conseil de famille " . Mais si la rente est payable en fruits, le tuteur ne peut con- sentir au rachat sans avoir obtenu du conseil de famille l'au- torisation d'y consentir au taux proposé par le débi-rentier (2). Le mineur émancipé peut recevoir seul le remboursement de rentes constituées (3), parce qu'il peut recevoir seul le paiement de dettes échues. 986. De la part du débi-rentier, le rachat est un paiement anticipé de la créance; c'est, si la rente a été constituée à titre onéreux, un acte d'administration que le tuteur ou le mineur émancipé peuvent accomplir. (1 . Effets du rachat . 987. Une fois la rente rachetée, tout rapport cesse entre les parties. Le crédi-rentier n'a de recours contre le débi- rentier que s'il est évincé de l'objet donné en payement ou si cet objet est vicieux. Il n'a pas de recours si le rachat a eu lieu au moyen d'un titre de rente et si, par suite de conversion, le produit annuel de ce titre a diminué ' . 1 Toulouse, 13 mai 1829, S. cbr., D. Rép., v° Minorité, a. i50. — Berlin, Chambre du conseil, 3' édit., I, n. 529. ! Toullier, II, n. 1204: Berlin, loc. cit. (*) Toullier, II. n. 297; Berlin, op. cit.. I, n. 594. 4 Paris. 27 oct. 1892, Gaz. Pal.. 93. 1. 2e p.. 1 'conversion du 4 1/2 en 3 1 2 p. ICO1. 518 DE LA RENTE PERPÉTUELLE C. Obligation de rembourser /l'> L'art. 1912 doit être entendu en ee sens que si le débiteur est en retard de payer deux années d'arrérages, ou si, en d'autres termes, à un moment quelconque il doit deux années entières d'arrérages échus, qu'il ne paie pas, il peut ôtreforcé au remboursement ('). C'est donc à tort qu'il avait été décidé que le débiteur de- vait être en retard de deux ans à partir de la première annuité non payée (8). Celte interprétation revient à exiger trois ans de non payement. 989 bis. Il n'est pas nécessaire, pour que l'art. 1912-1" soit applicable, que les deux années d'arrérages dues soient consécutives (3), car la loi ne distingue pas. La question est. du reste, peu pratique (*). 990. L'art. 1012 repose sur la volonté présumée des par- ties et n'est pas d'ordre public. Les parties peuvent donc aggraver contre le débiteur les conditions auxquelles est subordonné l'art. 1912, en décidant, par exemple, que le défaut de payement d'une seule annuité entraînera la résolution (3). Elles peuvent également subordonner la résolution au dé- faut de paiement de plus de deux annuités (fi). 991. Faut-il voir dans cette disposition une application particulière du principe consacré par l'art. 1184 (pacte com- missoire tacite)? Nous ne le croyons pas; car la constitution de rente est un contrat unilatéral, et l'art. 1184 n'est pas, dans une opinion très répandue, applicable aux contrats unilatéraux. Nous y voyons plutôt une déchéance du bénéfice du terme illimité accordé à l'acheteur pour rembourser le capital de la rente (arg. art. 1188 cbn. 1912 al. 1 et 2) (7). Au '] Cass., 12 nov. 1822, S. cbr.,D. Rép., v° Renlesconslituées, n. 181. — Duran- ton, XVII, n. 617 ; Troploug, n. 483; Pont, I, n. 350; Aubry et t\au, IV, p. 615, §398, note 7; Laurent, XXVII, n. 18; Arntz. IV, n. 1383; Guillouard, n. 196 ; IIuc, XI, n. 207. (*) Caen, 26 juil. 1820, sous Cass., 12 nov. 1822, précité. (3) Duvergier, n. 618; Pont, I, n. 351; Guillouard, n. 197. — Contra Duranton. XVII, n. 618; Aubry et Rau,IV, p. 615, § 398 ; Guillouard, n. 197 ; Hue, XI, n.2<)7. {*) Troplong, n. 48i; Guillouard, n. 197. (5) Laurent, XXVII, n. 19; Guillouard, n. 198; Hue, XI, n. 207. CJ Auteurs précités. [7) Laurent, XXVII, n. 14 s.; Arntz, IV. n. 1385. «")20 DE LA RENTE PERPÉTUELLE surplus, il ne peut s'agir d'une résolution, puisque le contrat garde nécessairement ses effets pour le passé. Les auteurs cjui considèrent l'art. 1 184 comme applicable aux contrats unilatéraux, en concluent que l'art. 1912-1° est une application de l'ait. 1 1 Si ('). 992. De notre système, nous tirerons la conséquence sui- vante : Il n'est pas nécessaire que le crédirentier mette le débi- rentîer en demeure, par une sommation ou un autre acte équivalent, pour lui faire encourir la déchéance qui nous occupe; du reste, l'art. I9tâ n'exige qu'une condition pour «pie le remboursement puisse être exigé, c'est le défaut de payement des arrérages pendant deux ans. D'autre part le débiteur ne peut se plaindre, car il trouve une grande faveur • lins ce fait que le défaut de paiement d'une seule annuité ne suffit pas à lui imposer le remboursement. La déchéance est encourue de plein droit par la seule force de la loi. vi et potes- tatt legis ' ; le crédi-rentier peut donc de piano poursuivre le remboursument du capital contre le débiteur en retard de deux années d'arrérages. Et toutefois, si la rente est quèrable, c'est-à-dire payable au domicile du débiteur, où le crédi-rentier doit venir la récla- mer,il est tenu de justifier régulièrement qu'il s'\ est présenté pour toucher les arrérages (') ; c'est une règle de bon sens, contre Laquelle le texte de l'art. 1912 ne peut prévaloir. On décide que la mise en demeure, au cas où la rente est quérahle, De peut être faite que par huilier • . Cela nous <'| Troplong. n. 471; Duvergier. n. 339, note 1; Pont, I, n. 348; Guillouard. ii. 19&; Hue, XI, n. 206. - Caas., x a. \ ri I 1818, S. clir. — Cass., lu nov. 1818, S. cbr. — Cass., 25 nov. L839, S . 10. I. 25». — <:a^.. '.> août 1841, S.. 41. 1. 796. — Duranton, XVII, ii. 619; Troplong, n. 174 s.; Auhry et Iiau, IV, p. 616, g 398, note 8; Laurent, XXVII, n. 2.. 81. 2. i:>x. _ Duvergier, n. 342; Pont, I, n. 352; Aubry et Rau, IV. p. 6H', § 398, note 10; Guilllouard, n. 200; Hue, loc. cit. — Contra Laurent, XXVII, n. 20s. 1 Guillouard, n. 201. Hi MBOl RSI Mi M DE LA REfl i i 521 paraît douteux ' : l'art. 191*2 resie applicable dans la mesure où le caractère «l<* la rente le permet et l'art. 1912 n'exige [>;is l'intervention .. 81. 2. 158. — Troplong, n. 186; Duvcrgier, n. 364; l'ont, n. 355; .loubert. Concl. sous Cass., 12 juill. 181:;. S. chr.: Laurent, XXVII, n. 151 : Arntz, IV, n. 13**; Guillouard, n. 205; Hue, XI, n. 20*. — Contra Cass., 12 juill. 1813, S. cbr. — Aubry et Hau, IV, p. 616, §398, note '.'; Colmet de Saulerre, VIII. n. 123 bis, XV. J Y. supra, n. 'J77. I1! Cass.. 5 mars 1817, S. chr. — Cass.. 28 juill. 1824, S. chr. — Cass., 4 janv. 1865, S.. 65. 1. 136, I)., 65. 1. 234. — Paris, 11 mars 1816, S. chr. — Duranton, XVII, n. 622; Troplong, n. 488; Duvergier, n. 365; Pont, I, n. 356; Laurent, XXVII, n. 32; Guillouard, n. 208; Hue, XI, n. 279. (*) Duranton, IV, n. 147 s. et XVII, n. 622; Troplong, n. 487; Duvergier, n. 366; Guillouard, n. 207. (5) Aubry et Rau. IV, p. 616, § 308; Guillouard, n. 207. («) Cass., 4 déc. 1832, S., 33. 1. 398. — Cass., 5 nov. 1860, S , 61. 1. 858, D.,61. 1. 301. — Guillouard, n. 210; Hue, XI, n. 211. — V. cep. Paris, 11 fév. 1825, S. chr. ' 'ontra I lue, loc. cil. REMB01 RSEMI M DE LA ni \ 1 1: ."rj:{ restituer le capital, en fournissant un complément de garan- ties .m des garanties équivalentes (arg. art. 2131) ('). Si les sûretés n'ont pas été fournies, malgré le cas fortuit le débiteur ne peut en offrir d'autres ('). Ici encore il s'agit d'une déchéance de terme et non pas d'une résolution (s). 998. Comme dans le cas de l'art. 1912-1°, le juge peut accorder un délai pour fournir les sûretés (*). 999. Pas plus que l'art. 1912-1°, l'art. 1912-2° n'est appli- cable aux rentes constituées à titre gratuit (5j ; les raisons de décider sont les mêmes. 1000. Troisième cas. Le débi-rentier tombe en faillite ou ni déconfiture. — Nous croyons que le capital de la rente ne de- viendrait pas alors exigible contre la caution; nous retrouve- rons cette question dans notre traité du Cautionnement (6). Gomme dans les deux cas précédents, il s'agit d'une déchéance du terme et non pas d'une résolution (7j. Le juge peut accorder un délai (8). 1001. A la faillite du débiteur, il ne faut pas assimiler son décès avec acceptation de sa succession sous bénéfice d'in- ventaire (9). 1002. L'art. 1913-3°, comme l'art. 1912-1° et 2°, n'est pas applicable aux rentes constituées à titre gratuit (l0). L'art. 1912-3° n'est pas applicable aux rentes constituées comme prix de la vente d'un immeuble (n). (') Troplong, n. 492 ; Aubry et Hau, IV. p. 617, § 398, note 12; Pont. [, n. 358; Laurent, XXVII, n. 37; Guillouard, n. 211 ; Hue, loc. cit. («) Guillouard, n. 211. |3) Laurent, XXVII, n. 14 s.; Arntz, IV, n. 1391. — Contra Guillouard, n. 195 et 210; Hue, XI, n. 211. — V. supra, n. 991. (*) Duranton, XVII, n. 626; Duvergier, n. 339; Guillouard, n. 212. — Contra Laurent, XXVII, n. 34. (r,j Troplong, n. 494 s. ; Guillouard, n. 213. (•) lreet2eédit., n. 1014. (7) Laurent, XXVII, n. 14 s.— Contra Guillouard, n. 195 et 214; Hue, XI, n.211. (8) Contra Hue, loc. cit. 9, Cass., 27 mai 1829, S. chr. — Guillouard. n. 215. (,0) Guillouard, n. 215. (") Nîmes, 25 mai 1852, S., 52. 2. 540, D., 55. 2. 262. — Caen, 5 août 1874, S., 75. 2. 327, D., 76. 2. 123. — Guillouard, n. 215. 521 DE LA RENTE PERPÉTUELLE 1003. Les effet du rachat opéré sont les mêmes que ceux du rachat volontaire (') § V. Obligations du prêteur ou crédi-rentier. 1004. Les obligations du crédi-rentier sont celles du prê- teur à intérêts ; il répond, dans les mêmes conditions que ce dernier, des vices des choses prêtées (2). Nous avons, d'autre part, examiné ses obligations relativement au remboursement de la rente (3). § VI. Effet rétroactif des, lois en matière de constitution de rente. 1005. Conformément au droit commun, les rentes sont régies, pendant toute leur durée, par la loi en vigueur à l'épo- que où elles ont été constituées. Ainsi la loi qui modifie le maximum des arrérages n'est pas applicable aux rentes déjà constituées (*). C'était la solu- tion de l'ancien droit (■). 1006. De même on admet que l'ordonnance de 1565, qui convertit en argent les arrérages stipulés payables en denrées, reste applicable aux rentes constituées avant le code civil (6). Mais nous avons montré que cette ordonnance n'était plus en vigueur à la fin de l'ancien droit 1007. Mais l'art. 1912-1°, qui décide que le débiteur peut être contraint au rachat s'il a cessé pendant deux années d'accomplir ses obligations, est-il applicable même aux ren- tes constituées avant le code civil ? On peut dire pour l'affir- mative qu'il ne fait autre chose que de régler les conditions de la résolution du contrat pour cause d'inexécution des con- ditions, c'est-à-dire d'un fait qui se produit sous l'empire du 1 V. supra, n. 987. i-i V. supra, n. 7ii .<. («) V. supra, n. 974 s., k>88 s. ;*) Troplong, n. 444; Guillouard, n. 191 bis; Hue, XI, n. 205. («) Pothier, n. 16; Argon, II, p. 268 et liv. IV, ch. XVIII, II, p. 504. (6) Guillouard, n. 182. 1 V. supra, n. 966. Mlo! I INI I UN \ I |o\.\l. :;•>: Code; celle solution ne blesse donc |i;is le principe de la D0I1- rétroactivité d'une loi ('). Nmis préférons l'opinion contraire !), car il est de prin- cipe que les causes de résolution d'un contrat sont régies par la loi de l'époque où le contrat a été passé. Kl cela est natu- rel : les causes de résolution, en eii'el, reposent sur la volonté tacite des parties, et la preuve qu'il en est ainsi de la cause prévue par l'art. 1912. c'est que, de l'avis unanime, les par- lies peuvent y déroger. On objecte que les règles de la résolution de la constitution de rente variaient, dans l'ancien droit, suivant les provinces el que notre opinion empêche l'uniformité de s'introduire dans la législation: c'est un singulier argument : ne remar- que-t-on [»as qu'il tend a nier la non-rétroactivité de la loi ? § VIII. De la rente perpétuelle en droit international. 1008. La constitution de rente étant un prêt à intérêt, les règles auxquelles elle est soumise en droit internationl sont celles du prêt à intérêt. (') Cass., 4 nov. 1812, S. chr. — Cass., lu nos. 1818, S. chr. — Cass. civ., 25 nov. 1839, S., 40. 1. 252. — Liège, 27 mai 1891, l'asicr., 91. 2. 342. — Trib. civ. Hassell (Belgique), 19 juin 1872, Pasicr., 72. 3. 249. — Troplong, n. 185 : Duvergier, n. 355 s. ; Arntz. IV, n. L389; Guillouard, n. 206. *) Trib. civ. Vannes, sous Rennes. 25 août 1879, S., 80. 2. 198, D., 81. 2. 158. — Duranton, XVII, n. 615; Demolombe, 1, n. 55 ; Pont, I, n. 354 ; Aubry et Kau. I, § 30, note 53; Laurent, I, n. 226; 1 lue, I, n. 75 et XI, n. 208; Janssens, Servais et Leclerci], Suppl. aux Princ. de dr. civ. de Laurent, I, n. 84. — V. aussi les autorités citées par Baudry-Lacantinerie et Ilouques-Fourcade, 7Y. des personnes, I, n. 160. dt; dépôt et du séquestre CHAPITRE PREMIER GÉNÉRALITÉS SUR LE DEPOT SECTION PREMIÈRE DÉFINITIONS. Ai.TblS QUI CONSTITUENT DES DÉPÔTS 1009. Pothier défiait le dépôt : « Un contrat par lequel l'un des contractants donne une chose à garder à l'autre, qui s'en charge gratuitement et s'oblige de la rendre lorsqu'il en sera requis » ('). Nous trouvons dans l'art. 1915 une définition un peu diffé- rente : « Le dépôt, en général, est un acte par lequel on reçoit la chose d' autrui, à la charge de la garder et de la restituer » en nature ». Le législateur a substitué le mot acte au mot contrat, dont se sert Pothier, pour embrasser dans sa défini- tion Tune des variétés du dépôt, qui est plutôt un acte judi- ciaire qu'un contrat, le séquestre judiciaire (art. 1961 s.). D'autre part, l'art. 1915 efface de la définition de Pothier le mot de gratuitement parce que le séquestre n'est pas gra- tuit. C'est pour la même raison que l'art. 191o supprime les mots lorsqu'il en sera requis, le séquestre judiciaire gardant ses fonctions jusqu'à la fin de la contestation. Le mot dépôt se prend pour désigner soit le contrat qui va nous occuper, soit la chose déposée. Il est employé dans ce dernier sens par les art. 1941 et 1944. Celui qui fait le dépôt s'appelle le déposant; celui qui le reçoit, le dépositaire. l) N. 1. 528 DL" DÉPÔT ET Dl SÉQUESTRE 1010. L'intention des parties peut seule permettre de dis- tinguer le dépôt de plusieurs autres contrats avec lesquels il présente plus ou moins d'analogie. Ainsi, comme le prêt de consommation, le dépôt ne devient parfait que par la presla- tion de la chose, re perftcitur. Mais la tradition est faite, dans le prêt de consommation, pour que l'emprunteur consomme la chose, et dans le dépôt pour qu'il la garde. 1011. Nous étudierons, à propos de la restitution du dépôt, les différences entre le prêt de consommation et le dépôt irré- gulier ('). 1012. Le dépôt doit être distingué du prêt à usage, qui, comme lui, est un contrat réel et unilatéral, et oblige à la res- titution en nature de l'objet confié. La différence caractéris- tique entre ces deux contrats est, qu'à la différence du commo- dataire, qui emprunte un objet pour s'en servir, le dépositaire n'a pas le droit de se servir de l'objet déposé (s . En outre, le dépositaire rend un service tandis que le com- modataire en reçoit un ('}. D'autre part, le déposant, à la différence du commodant, peut reprendre la chose avant le terme fixé. En quatrième lieu, le dépôt peut être salarié tandis que le commodat est essentiellement gratuit. Enfin la responsabilité du dépositaire, qui rend un service, est moins étroite que celle du commodataire, qui, au contraire, reçoit un service. Le contrat par lequel un imprimeur reçoit d'un éditeur des clichés pour faire ses impressions est un prêt à usage et non pas un dépôt (*). La remise d'un objet à un tiers simplement parce que ce dernier a envie de le voir n'est pas un dépôt (5) ; c'est un prêt à usage. Il en est de même de l'acte par lequel des titres sont con- (') V. infra, n. 1092 s. (■ Argou, liv. III, cb. XXXIH, II, p. 330; Guillouard, Tr. du prêt, n. 14 et 25 et Tr. du dépôt, n. 24. — V. cep. Hue. XL n. 228. :1 Guillouard, Tr. du dépôt, n. 24. (*) Trib. com. Seine, 11 juin 1881, D., 83. 3. :>'». — Guillouard, Tr. du dépôt, n. 24: Hue, X. n. 230. (5) Cass., 21 avril 1866, S., 67. 1. 91. — Guillouard, n.27; Hue, XI, n. 230. m rES C098TITI \M DES DÉPÔTS 339 liés à un tiers qui doit les remettre en garantie d'un prél qui lui est fait ('). La remise d'objets dans une exposition pour être expos» - ■ans salaire, constitue non un dépôt, mais un prêta usage . 1013. Le dépôt doit être également, comme nous le mon- trerons, distingué du mandat (s) ; le mandataire, à la diffé- rence du dépositaire, a un rôle actif; il est chargé non pas de garder une chose, mais de faire quelque chose. Le dépôt de livres par un auteur chez un éditeur ou libraire ou par un éditeur chez un libraire n'est pas un véritable dépôt, mais un mandat, le prétendu dépositaire étant chargé de vendre. Il n'y a pas davantage dépôt dans l'acte par lequel un auteur s'engage envers un libraire à ne mettre ses ouvrages en dépôt que chez ce dernier ' . C'est une obligation de faire, rentrant dans les contrats innommés. Mais le contrat suivant par lequel le mandataire doit garder la chose jusqu'à ce qu'elle lui soit réclamée, devient un dépôt à partir du jour où le mandataire la reçoit 5 . 1014. La différence entre le dépôt et le nantissement est que, dans ce dernier contrat, la garde de la chose a lieu à titre de garantie (6). 1015. La remise d'une chose à la charge de la restituer ou d'en payer le prix est une vente à condition et non pas un dépôt (7). .NDtamment la remise d'un objet à un tiers, pour l'acheter {*) Trib. civ. Bruxelles, 22 nov. 1893, Pasicr., 94. 3. 85. — Contra Trib. coin, le Havre, 30déc. 1895, Bec. Havre. 96. 1. 12. L Hue, XI, n. 238. — Contra Trib. civ. Gaen. 19 janv. 1886. D., Bép.. Supp., v° Dépôt, n. 25. — Guillouard, n. 53. — V. à propos de la responsabilité infra, n. 1060. (*) V. noire Tr. des conlr. aléat., du mandat, etc.. n. 404 s. («) Contra Trib. civ. Seine, 29 nov. 1889, Loi, 30 nov. 1889. 1 Contra Hue, XI, n. 3'27. (6)Cass., 29 nov. 1866, S.. 67. 1. 188. —Laurent. XXVII, n. 75; Guillouard, n. 26. — V. cep. Cas?., 10 déc. 185". S.. 51. 1.243, I»., 54. 1. 399. — Lyon. 27 août L849, S., 49. 2. 557, D ,50. 2. 14. Ç'i Toulouse, 9juîl. 1891, I).. 94. 2. 138 (donc le détournement n'est pas un abus de confiance). — V. notre Tr. des contr. aléat., du mandat, etc., n. 369. SOCIÉTF. PRÊT. DÉPÔT. — 2e éd. 3'l .")30 DU DÉI'ÔT ET DU SÉQUESTRE s'il lui convient, est une vente conditionnelle et non un dépôt (■). Nous avons distingué déjà le dépôt du louage d'ouvrage, spécialement du contrat de transport (4) ; nous reviendrons sur ce dernier point à propos de l'art. 1952 et du dépôt sala- rié (•). SECTION II CARACTÈRE DU DÉPÔT. DIVERSES ESPÈCES DE DÉPÔTS 1016. Le dépôt, dans tous les cas au moins où il a une origine contractuelle, présente les caractères suivants : 1° Il appartient à la famille des contrats réels. L'art. 191.) nous l'a déjà donné à entendre : « Le dépôt... est un acte par lequel ou reçoit... », et l'ait. 1919 al. 1, placé à tort dans le chapitre Ihi dépôt proprement dit, le déclare en toutes lettres : <- // /l'es/ par fuit que par la tradition réelle ou » feinte de la chose déposée ». Pot hier affirmait plus explici- tement encore la réalité du dépôt ('). En effet le dépôt, comme le prêt, n'engendre aux yeux de la loi, au moment où il se forme, qu'une seule obligation, celle de restituer, et on ne peut être tenu de restituer qu'après avoir reçu. Le caractère de réalité du dépôt est admis partout (•). Nous ferons ici une observation déjà faite à propos du prêt : Quoique le dépôt soit un contrat réel, la promesse de rece- voir un dépôt est valable et le déposant peut contraindre le dépositaire à recevoir le dépôt;6). De son côté le dépositaire ne peut contraindre le déposant à faire le dépôt, d'abord parce qu'ayant promis un service gratuit il n'a aucun bénéfice à exiger que ce service soit réclamé ») Cass., 22 juin L860, S., 60. I. '.'17. !>., 60. 1. 471. — Cass., 21 août 1866, S.. 67. 1. 91. — C.uillouard, n. -'7. !> Y. notre Tr. du contr. de loiuif/e, lre éd., II, n. 1206 et 1642. 3) V. infra, n. 1169 et 1246. (*) N. 7. {*) Allemagne, Kivier, HoltzendorfT's Rechlslexikon, v° Depositum. 6 Troplong, Tr. du dépôt, n. 5; Larombière, Théor. et prat. des oblig., art. li"7. n. •".; Demolombe. XXIV, n. 31 s.; Laurent, XXVII, n. 69; Colmet de s>aiilerre, VIII, n. 130 >.; Guillouard, n. 12. — V. cep. Duvergier, n. 383. CARACTÈRE M DÉPÔT 531 de lui, ensuite parce que l'objet ■ dépositaire se trouée déjà nantiy à quelque autre tilrex de la . chose que l'on consent à lai laisser à titre de . Ainsi je vous ai prêté des couverts d'argent pour un repas de noces; après que vous les avez employés à cet usage, je conviens avec vous que vous les garderez à litre de dépôt pendant le cours d'un voyage que je vais entreprendre. Il ne peut pas être question de vous faire une tradition réelle des couverts, puisqu'ils sont déjà entre vos mains, niais seulement d'inter- vertir le titre en vertu duquel ils s'y trouvent. Vous les déte- niez comme emprunteur, vous lesdétiendrez désormais comme dépositaire; et notre seul consentement aura suffi pour pro- duire ce résultat. Est-il besoin, comme paraît le dire l'art. 1919, de faire intervenir la notion de la tradition feinte expression déjà employée par Pothieç) (1), appelée aussi par nos anciens docteurs traditio brevis mamis. « parce que, dit Pothier (a), elle renferme brevi compendio l'effet de deux tra- ditions »?0n suppose que l'emprunteur a restitué la cliose au prêteur et que celui-ci la luia remise immédiatement après à titre de dépôt, il y a donc bien là une véritable fiction. 1018. 2° Le dépôt est un contrat synallagmatique impar- fait dans la conception de la loi (s). Au moment où il se forme, elle ne voit d'obligation que d'un seul côté, du côté du dépo- sitaire qui s'engage à restituer, et le contrat semble ainsi être unilatéral. Mais des faits postérieurs pourront faire naître des obligations à la charge du déposant : notamment, si le dépo- sitaire est obligé de faire des dépenses pour la conservation de la chose déposée, le déposant sera tenu de les lui rem- bourser, et alors le contrat aura les apparences d'un contrat synallagmatique ou bilatéral, puisqu'il y aura des obligations des deux côtés. Le contrat de dépôt, comme le commodat et le gage, n'est donc, à proprement parler, ui unilatéral, parce («) N. 12. (' Loc. cit. 1 N". à propos du prêt, supra, n. o99, C03, T.'JG s. 5.32 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE qu'il engendre quelquefois des obligations de deux côtés, ni bilatéral, parce que, envisagé au moment de sa formation, il n'oblige que l'une des parties, que l'autre ne le sera peut-être jamais, et que, si elle le devient, ce ne sera pas précisément en vertu du contrat lui-même, mais seulement par suite des faits qui s'y rattachent. C'est cette nuance indécise qui a déter- miné les commentateurs à classer le dépôt, et avec lui tous les contrats qui présentent la même particularité, dans une caté- gorie intermédiaire que le code ignore, celle des contrats dits synallagmatiqiies imparfaits^) ; dans la classification du code, le dépôt, comme le commodat, est un contrat unilatéral 3° Le dépôt est ordinairement gratuit; cependant ce carac- tère n'existe pas dans le séquestre (3). Même salarié, le dépôt reste un contrat de bienfaisance ' . 11 n'est donc jamais un acte de spéculation, et ne peut avoir le caractère commercial (5). 1019. Aux termes de l'art. 1916 : « Il y a deux espèces de » dépôts : le dépôt proprement dit et le séquestre ». Nous verrons en outre qu à certains points de vue le dépôt nécessaire el le dépôl irrégulier se distinguent du dépôt ordi- naire. CHAPITRE 11 DU DÉPÔT PROPREMENT DIT SECTION PREMIÈRE DÉFINITION ET CARACTÈRES DU DÉPÔT 1020. Le dépôt proprement dit est un contrat par lequel une' personne (le déposant) remet une chose mobilière à une autre personne (le dépositaire), qui s'oblige à la garder gra- tuitement et à la rendre dans son individualité à première réquisition. (l) Larombière, I, art. 1102-1106, n. 2; (iuillouard, n. 13 et 108. • (iuillouard, loc. cit.: Hue, XI. n. 231. — Contra Larombière, loc. cit. (') V. sur la gratuité du dépùt. infra, n. 1168 s. («) V. infra, n. 1168 s. «; V. cep. Hue, XI, n. 233. oll.lll 533 1021. Le dépôl ordinaire présente les caractères <|ii<' nous avons reconnus au dépôl «-n général : il est réel et unilaté- ral(»). En outre le dépôt esl un contrat de bienfaisance, un office d'ami. Le dépositaire rend un service gratuit ; il ne reçoit pas en généra] d'autre rémunération que le témoignage d'estime et de confiance qu'implique le choix dont il a été l'objet de la part du déposant. Aussi l'art. I(.M7 dispose-t-il : « Le dépôX o proprement dit est un contrat essentiellement gratuit » (*) et c'était la solution de Pothier (3). Nous nous occuperons plus loin de la nature du dépôt où le dépositaire a stipulé un salaire (' . SECTION II OBJETS SUR LESQUELS PEUT PORTER LE DÉPÔT 1022. De la définition que nous avons donnée, il résulte que le dépôt proprement dit « ne peut avoir pour objet que » des choses mobilières » (art. 1918). Ce texte tranche une ancienne controverse sur le point de savoir si les immeubles peuvent être l'objet d'un contrat de dépôt. Pothier, qui la rapporte, donne en faveur de la néga- tive cette raison, que le dépôt a pour but la garde d'une chose et que, par conséquent, il n'est pas susceptible de s'appliquer aux immeubles, parce qu'ils n'ont pas besoin d'être donnés en garde pour que le propriétaire puisse les retrouver. Puis il continue : « Lorsque quelqu'un, en partant pour quelque voyage, confie à son ami les clefs de sa maison, le dépôt qu'il a fait à son ami est un dépôt de ses clefs ou même encore des meubles qui sont gardés sous ces clefs dans la maison : mais ce n'est pas un dépôt de la maison elle-même, qui, ne pou- vant être déplacée, n'a pas besoin qu'on la garde » (3). Il ' V. supra, n. 1016 et 1018. - Allemagne, Rivier, toc. cit. J N. 13. — Guillouard, n. 14. (*) V. infra, n. 1168 s. (') N. 3. — Allemagne, Rivier, loc. cit. — C. civ. 688. — En Prusse, le code général décidait le contraire. •331 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE ajoute (et nous reviendrons sur ce point) que si le dépositaire est chargé de faire à l'immeuble les réparations qui pour- raient être nécessaires, il y a mandat. Cette solution est également admise dans les pays étran- gers. Il nous parait cependant préférable, en législation, d'ad- mettre que le dépôt peut porter sur des immeubles. L'opinion contraire, nous l'avons dit, repose sur l'idée, exprimée par Pothier, qu'une chose immeuble « n'est pas de nature que celui à qui elle appartient puisse jamais avoir besoin de la donner en garde à quelqu'un, pour qu'il puisse la retrouver ». Et pourquoi donc? qu'y a-t-il d'impossible à supposer qu'une personne soit chargée de veiller sur un im- meuble, d'empêcher les déprédations, de le protéger contre les atteintes au droit du propriétaire? La preuve que ce con- trat est bien un dépôt, c'est que Pothier suppose lui-même qu'on peut confier à un ami « les clefs de sa maison » et dit que c'est là un dépôt ; mais, dit-il, le dépôt portera sur les clefs, ou sur les meubles qui sont gardés sous ces clefs dans la maison. Nous ne voyons pas pourquoi, dans cette hypothèse, le dépôt ne porte pas également sur les murs de la maison, sur ceux de ses meubles qui sont immeubles par destination, et pourquoi notamment, si le mobilier de l'immeuble est sou- mis au dépôt, il y a exception en ce qui concerne les glaces, les panneaux, etc. On peut, du reste, supposer que le gardien de la maison ne soit pas dépositaire des clefs, ou qu'au lieu d'une maison, il s'agisse d'un champ; n'y a-t-il pas là un dépôt? Ce qui milite encore davantage contre le système du code, c'est qu'il est impossible de qualifier les différentes conven- tions dont nous venons de parler si on n'y voit pas un dépôt. Ce n'est pas évidemment un mandat, puisque le mandataire a, comme le remarque Pothier dans le même passage, un rôle excédant la simple garde, et l'obligeant à une adminis- tration effective. De quelque manière d'ailleurs qu'on envi- sage ces conventions, on est, nous le répétons, conduit, ce qui est inadmissible, à dire que l'acte par lequel on confie à un fiers la garde d'une maison meublée est un dépôt en ce DIVERSES SORTES DE DÉPÔ1 ">.'{"> qui concerne les meubles qui ont juridiquement la qualitéde meubles, et autre chose en ce qui concerne les meubles con- sidérés par la loi comme immeubles par destination. Enfin la preuve que l'immeuble peut être l'objet d'un dé- pôt est que la loi admet le séquestre des immeubles, et le séquestre n'est qu'une variété du dépôt; il y a là une évidente contradiction. 1023. Il esta peine utile d'ajouter que le dépôt ne peut s'appliquer qu'aux choses corporelles. Les choses incorpo- relles n'ont pas besoin d'être gardées : peut-on songer par exemple à donner en dépôt un droit de créance (')? Il en se- rait autrement des titres qui constatent l'existence du droit. 1024. Le dépôt peut porter même sur des choses qui se consomment par le premier usage (2) ; car (comme l'étude du prêt nous l'a montré) rien n'empêche que ces choses soient considérées dans leur individualité propre et que le tiers chargé de les garder les restitue en nature; cela est plus vrai encore du dépôt que du prêt, puisqu'à la différence de l'emprunteur, qui a nécessairement le droit de se servir de la chose, le dépositaire n'a jamais ce droit. C'est d'ailleurs ce que suppose l'art. 1932, qui fait allusion au. dépôt de pièces de monnaie. 11 peut aussi être convenu que le dépositaire restituera les choses déposées par équivalent (3); il y a alors un dépôt irré- gulier, dont nous apprécierons plus loin la nature. SECTION III DIVERSES SORTES DE DÉPÔT ORDINAIRE 1025. Aux termes de l'art. 1920 : « Le dépôt est volontaire » ou nécessaire ». Le dépôt est volontaire, lorsque le déposant a pu choisir en .') Cass., 18 janv. 1831, S., 31. 1. 192. — Cass., 3 mai 1848, S., 48. 1. 321, D., 48. 1. 145. — Toulouse, 5 juin 1841, y., 42. 2. 12. — Riom, 30 mars 1844, S.. 41. 2. 321. — Pont, Tr. des petits contrats, I, n. 382; Aubry et Rau, IV, p. 617, § 400: Laurent, XXVII, n. 79; Colmet de Santerre, VIII, n. 129 bis, I; Guillouard, n. 19. (2) Colmet de Santerre, VIII, n. 129 bis, I; Guillouard, n. 19. 3) Troplong, n. 19; Colmet de Santerre, VIII, n. 129 bis, III; Guillouard, n. 20. 536 DU DÉPÔT KT DU SÉQUESTRE toute liberté la personne du dépositaire. Au cas où son choix est, sinon imposé, du moins dicté par les circonstances (in- cendie, ruine, pillage...}, on est dans l'hypothèse du dépôt nécessaire. Nous insisterons plus tard sur les traits distinctifs de cha- cun de ces dépôts et sur les différences qui les séparent. Nous parlerons également plus tard du dépôt irrégulier. SECTION IV DU DÉPÔT VOLONTAIRE ; I. Conditions essentielles à la formation et à la validité d" contrat. 1. Consentement. 1026. « Le dépôt volontaire se forme par le consentement » réciproque de ta personne gui fait le dépôt et de celle qui » le reçoit » (art. 1921). Le dépôt est un contrat réel ['), mais le consentement des parties n'en est pas moins nécessaire pour sa perfection, car il n'y a pas de contrat sans consentement. A cet égard, il en est du dépôt nécessaire comme du dépôt volontaire. Nous verrons cependant, à propos de l'art. 1949, qu'il existe, au point de vue du consentement des parties, une certaine opposition entre le dépôt volontaire et le dépôt néces- saire, opposition à laquelle le législateur songeait peut-être en écrivant notre article. 11. Capaeité. 1027, La loi n'exige pas chez les parties contractantes une capacité spéciale pour la validité du dépôt volontaire : la ca- pacité générale de contracter suffit. C'est ce qu'a voulu dire l'art. 1925 al. 1, qui ne t'ait que tirer une déduction du prin- cipe général formulé par l'art. 1124 : « Le dépôt volontaire 1 V. supra, n. 1016. CAPAI 1 1 1' Dl DÉPOSAS i '.YM » in i>rut avoir lien qu'entre personnes capables de contrac- ta ter ■>. Cette disposition est empruntée à Pothicr ' . A. Capacité du déposant. 1028. Pour l'aire valablement un dépôt, il suffi! d'avoir la capacité d'administrer (*), car le dépôt ne cause jamais aucun préjudice au déposaut et ne diminue en rien son patrimoine. Ainsi le mineur émancipé peut faire un dépôt ('). 11 en est autrement du mineur non émancipé ou de l'interdit (*) ; mais le dépôt peut être fait par leur tuteur (5). La personne pourvue d'un conseil judiciaire peut faire un dépôt sans l'assistance de son conseil ("). La femme mariée séparée de biens peut faire un dépôt (7). Il en est de même de la femme dotale en ce qui concerne ses meubles paraphernaux(8). La femme, sous tout autre régime, n'ayant pas l'administra- tion de ses biens, ne peut faire un dépôt (9). 1029. Ces règles de capacité s'appliquent même au dépôt salarié, car le dépôt salarié ne change pas de nature, et, au surplus, le salaire étant inférieur au service rendu, le dépo- sant ne saurait se nuire. 1030. Mais pour faire un dépôt irrégulier, il faut avoir la capacité d'aliéner; en admettant même (et c'est notre opinion) que le dépôt irrégulier est un dépôt véritable et non pas un prêt de consommation, on ne peut nier qu'il entraine l'alié- nation définitive des fonds prêtés. 1031. Le contrat de dépôt, dans lequel une personne inca- pable de contracter a figuré soit comme déposant, soit comme dépositaire, est frappé de nullité. Mais, conformément à l'art. 1125, l'incapable seul peut se prévaloir de la nullité, soit par 1 ! X. 6. >!l Guillouard, n. 33; Hue, XI. n. 236. •] Guillouard, loc. cil. *] Guillouard, loc. cit. (5) Guillouard, loc. cit. 6 Guillouard, loc. cit. C) Guillouard, loc. cil. - Guillouard, loc. cil. 9 Guillouard, loc. cil. 538 DD DÉPÔT ET I>U SÉQUESTRE lui-même, si son incapacité a cessé, soit par l'entremise de son représentant légal, si elle ri Lire encore ; l'autre contrac- tant, en le supposant capable, peut donc être forcé de subir 1 exécution du contrat. En d'autres termes, l'incapable ou son représentant légal peut opter entre le maintien et l'annula- tion du contrat. L'art. 1925 al. 2 dispose en ce sens : « Néanmoins, si une » personne capable de contracter accepte le dépôt fait par » une personne incapable, elle est tenue de toutes les obliga- » lions d'un véritable dépositaire ; elle petit être poursuivie par » le tuteur ou administrateur de la personne qui a fait lé » dépôt ». Presque toujours l'option de l'incapable sera faite dans le sens du maintien du contrat, parce que tel sera son intérêt ; alors le dépositaire sera tenu de toutes les obligations résul- tant du dépôt. Ainsi un interdit, durant un intervalle lucide, fait un dépôt entre les mains d'une personne capable. S>n tuteur, pendant la durée de l'interdiction, ou lui-même, après que l'interdiction aura été levée, ou ses héritiers majeurs, après son décès, pourront exiger l'exécution du contrat et notamment réclamer par une action personnelle la restitution du dépôt et le paiement d'une indemnité à raison des fautes dont la loi rend le dépositaire responsable ('). Pothier disait, à la vérité, qu'un contrat ne pouvant être fait avec un inca- pable, il y avait alors en réalité un quasi-contrat de gestion d'affaires, ou, si le dépositaire avait reçu la chose avec l'in- tention de s'approprier la chose déposée, un délit (*). Mais il est aujourd'hui sans difficulté que le contrat passé avec un incapable a. tant qu'il n'est pas annulé, le caractère des con- trats. A la charge, bien entendu, pour l'incapable, de satisfaire aux obligations dont est tenu le déposant, par exemple de rembourser au dépositaire les dépenses qu'il a été obligé de faire pour la conservation du dépôt : car le contrat ne peut pas être scindé, déclaré valable en tant qu'il oblige le dépo- sitaire, et nul en tant qu'il obligerait le déposant. (•) 1 tuvergier, n.39i : Pont, I. n. 41 s : Laurent, XXVII. n. 84 : ijuillouard. n. ."52. - \. 5. I \i'M 1 1 1. ni DÉPOSAN i 539 1032. Le seul moyen, pour L'incapable, d'échapper à ces obligations sérail de demander la nullité du contrat. Supposons qu'il opte clans ce sens. La situation respective des parties sera la même que s'il n'était intervenu entre elles aucun con- trat. L'action en revendication sera donc ouverte à L'incapa- ble ou à son représentant légal, pour réclamer la chose, objet du contrai annulé: le succès de celte action sera subordonné à la preuve du droit de propriété du revendiquant, tandis que cetle preuve n'est pas nécessaire pour réussir dans l'action depositi directa (art. 1938 al. 1). D'autre part, le dépositaire aura l'action de in rem verso contre l'incapable pour obtenir le remboursement de ses impenses; mais, par cette action, il obtiendra peut-être moins qu'il n'aurait obtenu par l'action depositi contraria; sans compter que le droit de rétention pourra lui être refusé. 1033. Si le dépôt est fait par une personne dont le con- sentement est non seulement vicié, mais frappé de nullité, le contrat ne se forme pas, puisque les contrats exigent le con- sentement des deux parties; la restitution du dépôt ne peut être demandée qu'en vertu d'un quasi-contrat ('). Ainsi en est-il d'un fou (2 ou d'un enfant qui est hors d'état de con- sentir (*). 1034. Normalement, le dépôt est fait par le propriétaire de la chose déposée ou par son mandataire. C'est ce que veut dire l'art. 1922 : « Le dépôt volontaire ne peut régulièrement » être fait que par le propriétaire de la chose déposée, ou de » son consentement exprès ou tacite ». Mais il ne résulte nulle- ment de ce texte que le dépôt de la chose d'autrui soit nul. En d'autres termes, il n'est pas nécessaire, pour la validité du contrat de dépôt, que le déposant soit propriétaire de la chose déposée (*). Cela résulte du mot « régulièrement », qu'emploie l'art. 1922 et, bien plus encore, de la disposition de l'art. 1938, que nous retrouverons, et qui règle la restitu- tion de la chose n'appartenant pas au déposant. Par exemple, i') Guillouard, n. a3. - Nimes, 13 août 1877, S., 78. 2. 140. — Guillouard, loc. cit. . (') Guillouard, loc. cit. (') Guillouard, n. 31 ; Rivier, loc. cit.: Uuc, XI, n. 232. oiO Dl DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE si je dépose entre vos mains une chose qui m'a été prêtée, de vous à moi, toutes les obligations résultant du dépôt prennent naissance et notamment vous devez me restituer la chose quand je vous la réclamerai, bien que vous ayez la preuve que je n'en suis pas propriétaire. Seulement le dépôt n'est pas opposable au propriétaire, parce qu'il est pour lui résinier alios acta; nous reviendrons sur ce point à propos de l'art. 1938 (*). A plus forte raison le dépôt peut-il être fait par toute per- sonne qui, sans être propriétaire de la chose, a sur elle un droit l'autorisant à opérer le dépôt (-). Tels sont le locataire (8), l'usufruitier (4), le gagiste (5). H. Capacité du dépositaire. 1035. La capacité d'administrer ne suffit pas au dépositaire, puisqu'il rend un service gratuit et s'oblige à conserver la chose qui lui a été confiée (9); il lui faut donc la capacité de s'obliger. Ainsi le mineur, même émancipé C), l'interdit (8), l'individu pourvu de conseil judiciaire •) sont incapables de recevoir un dépôt. La femme mariée ne peut recevoir un dépôt (l0); cela avait été jugé dans l'ancien droit (") : il en est ainsi même si elle est séparée de biens. 1036. Ici encore l'incapable peut seul se prévaloir de la nullité; son intérêt exigera plus souvent l'annulation du con- trat. Ainsi l'incapable a aliéné la chose déposée, ou bien il [') V. infra, n. 1131 s. -i Guillouard, n. 31; lluc, XI, m. 132. 1 tuillouard, toc. cit.; Hue, loc. cit. V i iuillouard, loc. cit.; IIuc, loc. cit. s] Guilluuard, loc. cit.; Hue, lac. cit. * Guillouard, n. 34. — Contra lluc, XI. n. 236. i iuillouanl, loc. cil. 8 Guillouard, loc. cit. 9 Guillouard, loc. cil. ,0) Guillouard, loc. cit. 11 Parlement de Paris. 14 août 1613, cité par Brodeau sur Louet, let. F, somm. 11. n. 5 et par Danty sua" Boiceau, De la preuve par témoins, addition au ch. III, n. -i. — Danty, loc. cit. CAPACI 1K Dl UÉI'OSI I V llli: 54 I l'a perdue, ou bieu il I a laissée dépérir faute de soins. Il échappera h toute responsabilité à raison <1<- ers faits, en demandant la nullité du contrai ' . I ne fois «clic nullité prononcée, l«' déposant n'aura contre l'incapable qu'une action en revendication s'il possède encore la chose, c'est le langage de la loi, et comme l'action porte sur l'objet nîême qui a été déposé, ce langage est exact (*) ; le déposant est soumis a une action de in rem verso, s'il ne l'a plus et qu'il en ail tiré quelque profit, par exemple à une action en resti- tution du prix que l'incapable aurait retiré de la vente de l;i chose, si ce prix se trouve encore entre ses mains ou s'il lui a profilé (';• C'était déjà la solution de Pothier (*). C'est aussi De qui nous parait résulter de l'art. 192G : « Si le dépôt a été » fait par une personne capable à une personne qui ne l'est •' pas, la personne qui a fait le dépôt n'a que l'action en re- » vendication de la chose déposée, tant quelle existe dans la - main du dépositaire, ou une action en restitution jusqu'à » < oncurrence de ce qui a tourné au profit de ce dernier ». Ainsi, si le dépôt est fait à une femme mariée, l'action du dépôt ne peut être intentée contre elle à raison de fautes com- mises. L'action en revendication seule peut être formée contre la femme si elle est restée en possession (s). Si la femme renonce à la communauté et que l'objet soit resté en communauté, il n'y a pas d'action contre la femme (6). Mais l'action existe contre le mari ou ses héritiers (7). Si le mari n'a pas profité du dépôt, il n'y a pas d'action contre lui (8). 1037. Dans tous les cas, l'incapable serait responsable des conséquences du dol qu'il aurait commis (C. civ. 1310). ' iuillouard, n. 34. 1 Troplong, n. 55. — Contra Aubry et Rau, II. p. 561, § 219, note 2 et IV. p. 61'.», § 402, note 2. i ;i i iuillouard, n. 36. m N. 55. Y. cependant Guillouard, n. 34. (6-7) Parlement de Paris, 14 août 1613. cité par Brodeau sur Louet, lettre F, somm. 11, m. 5, et par Danly sur Boiceau, De la preuve par témoins, addition au cliap. 111, n. 4. — V. Guillouard, loc. cil. * I >anty, loc. cil. 542 DL DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE Ainsi le dépositaire incapable qui a frauduleusement dé- tourné l'objet du dépôt doit une indemnité au déposant (1). 1038. Il va sans dire que le dépôt peut être fait entre les mains de plusieurs personnes aussi bien que d'une seule (2). III. Objet. 1039. Ainsi que nous l'avons dit, le dépôt ne peut porter que sur des meubles corporels (3), mais peu importe que ces meubles soient susceptibles d'être consommés par l'usag-e (*). Nous avons, d'autre part, examiné s'il peut porter sur la chose d'autrui g il. Preuve d" dépôt. 1040. Le droit romain avait fini par décider que le dépôt serait rédigé par un écrit signé de trois témoins (6). En France, le dépôt pouvait, comme tout autre contrat, se prouver par témoins. Lorsque l'ord. de .Moulins de 1509 (art. 51) eut exigé la rédaction d'un écrit au-dessus de 100 fr., on admit, malgré de graves controverses, que ce texte était applicable au dépôt (7) ; on avait objecté que, le dépositaire rendant un service d'ami, le déposant n'ose guère réclamer un écrit. Lord, d'avril 1007 (tit. 20, art. 2), pour mettre (in à la diffi- culté, soumit expressément le dépôt aux règles générales des contrats et c'est ce qu'ont fait encore les art. 1341 et 1923 C. civ. 1041. L'acte écrit constatant le dépôt n'est pas soumis à la formalité des doubles, prescrite par l'art. 1325 pour les Huranton, XVIII, n. 35; Troplong, n. 58; Duvergier, n. 31 i : Aubry et Kau, IV. p. 620, S 402, note 3: Guillouard, n. ::7. - (iuillouard, n. 30.] 1 V. supra, n. 1022. • Hue, XI, n. 228. "' V. supra, n. 1034. I.. 11, C, Qui pot. in pign., S. 18. lîrodeau sur Louet, let. D, sonim. 33, n. 3; Danty sur Boiceau, De la prêt ve pur témoins en matière civile, add. au chap. III, n. 1 s.; Argou, II, liv. III, chap. XXXIII, p. 333. actes synallagmatiques ('), car c'es! un contrai unilatéral (*); on ;i prétendu qu'il en est autrement dans notre système, qui considère le dépôt comme un contra! synallagmatique ira- parfail '). Cela n'est pas exact, car un contrai synallagma- tique imparfait n'est autre chose, suivant nous, qu'un contra! unilatéral. Peut-être y a-t-il, comme nous le verrons bientôt, une excep- tion à faire pour le dépôt salarié. 1042. Mais si le dépôt constaté par écrit porte sur des gommes d'argent ou des choses appréciables, il y a lieu de lui appliquer l'art. 1326, d'après lequel, clans ces conditions, les actes unilatéraux doivent être écrits en entier de la main de celui qui s'oblige, ou porter la mention bon ou approuvé écrite par lui (*). L'acte doit donc être écrit par le déposi- taire ou être muni de la mention que nous venons d'indiquer, de l'écriture du dépositaire. L'art. 1320 s'exprime, en effet, dans les termes les plus généraux ; d'autre part, le motif cer- tain de cette disposition est qu'on a voulu empêcher les faux consistant à obtenir la signature d'une personne au-dessous d'un écrit dont cette personne ne se serait pas suffisamment rendu compte ; on a surtout cherché à empêcher les abus de blanc-seing, par lesquels une obligation aurait été mise à la charge d'une personne qui aurait donné imprudemment une signature au bas d'un papier non encore couvert d'écriture. Or ces considérations s'appliquent au dépôt comme à tout autre contrat. On objecte que les blancs-seings sont moins fréquents pour les dépôts que pour les reconnaissances de dettes. Cette con- sidération est des plus singulières ; non seulement elle ne répond pas à l'argument que nous avons tiré de la généralité des termes de l'art. 1326. mais elle montre très clairement les dangers de l'opinion que nous combattons, car un blanc- i iuillouard, n. À); Hue, XI, n. 233. -i V. supra, n. 1018. 1 Ouillouard, Inc. cit. ' Cass., 12 janv. 1814, S. chr. — Troplong, n. 50 ; Duvergier, n. 420 et 421 ; Pont, I, n. 412; Guillouard, n. 44 ; fine, XI, n. 233. — Laurent soutient successi- vement notre système XIX, n. 2W et le système contraire (XXVII, n. 90). 544 DL PÉPÔT ET DU SÉQUESTRE seing, par essence même, n'indiquant pas la nature du con- trat, il suffirait au possesseur d'un blanc-seing, pour échap- per à la disposition de l'art. 1326, d'énoncer au-dessus de la signature une reconnaissance de dépôt au lieu d'une recon- naissance de delte ; ce serait un moyen sur d'échapper à une prohibition d'ordre public. On objecte encore que l'art. 1326 n'a pour objet que les actes portant obligation de choses tangibles ; les arguments cpie nous avons fait valoir prouvent (pie celte idée est fausse. 1043. En tout cas, celte dernière objection ne s'applique plus au dépôt régulier; donc, si même on refuse d'étendre l'art. 132(3 au dépôt, il faudra faire exception pour le dépôt irrégulier ; cela est évident dans le système qui assimile le dépôt irrégulier au prêt de consommation (') ; mais cela n'est pas moins vrai dans l'opinion contraire. 1044. Quant au dépôt salarié, il est, dans notre opinion, un contrai unilatéral aussi bien que le dépôt ordinaire: l'art. 1326 lui est donc applicable. l'ouï- les auteurs qui considèrent le dépôt salarié coin nie un louage d'ouvrage, le contrat, étant synallagmatique, n'est pas soumis à l'art. 1320; mais il tombe sous l'application de l'art. 132.'), relatif à la formalité des doubles. 1045. Aujourd'hui, nous l'avons dit, la preuve du dépôt volontaire reste soumise de tous points aux règles du droit commun. De là il résulte tout d'abord que la preuve de ce contrat, s'il n'y a commencement de preuve par écrit, ne pourra être faite par témoins qu'en matière n'excédant pas 150 fr. (*). L'art. 1341 l'a déjà dit; l'art. 1923 le répète : « Le » dépôt volontaire doit être prouvé par écrit. La prouve tesli~ » moniale n'en est punit reçue pour râleur excédant cent cin- » (/uanle francs ». Le législateur a cru devoir s'expliquer sur ce point, parce qu'on aurait pu croire que le déposant est dans l'impossibi- lité morale d'exiger une reconnaissance écrite du dépôt et que, par suite, il doit être admis à en faire la preuve par (') V. infra, il. 1094 s. -) Y. supra, 11. min. PRJ l \ I .'iï.") témoins quelle qu'en soil l'importance. En effet, le dépôl n'esl qu'une charge pour le dépositaire : en l«- lui confiant et • h le priant de vouloir bien s'en charger, le déposant lui demande un service; peut-il songera lui donner en même temps une marque de défiance en exigeant de lui une recon- naissance écrite du dépôt? — La réponse est simple. Là me- sure n'a rien de blessant pour le dépositaire, parce qu'elle est prise contre ses héritiers beaucoup plus que contre lui- même. Se montre-t-il froissé? Le déposant lui dira : « Si j'étais sur de n'avoir affaire qu'à vous, jamais je ne songerais i vous demander une preuve écrite du dépôt; votre parole me suffit. Mais vous pouvez mourir et, si vous ne nie donnez pas d'écrit, je me trouverai dans l'impossibilité d'établir mon droit à l'égard de vos héritiers qui, n'ayant pas connaissance du dépôt, m'en refuseront légitimement la restitution ». 1046. La preuve par témoins est permise s'il y a un com- mencement de preuve par écrit, conformément au principe général de l'art. 1347 ('). Elle est également permise s'il y a eu impossibilité de se procurer un écrit ou si l'écrit a été perdu art. 1348) ('). Enfin elle est toujours permise en matière commerciale (G. corn., 109) (»). 1047. Par application du droit commun, même en matière excédant loO fr., l'existence du dépôt pourrait être prouvée par l'aveu du défendeur, de sorte que, si le défendeur nie, le dépôt n'est pas prouvé (*). Supposons que le défendeur avoue le fait du dépôt, mais conteste son importance : par exemple le déposant prétend (') Cass., 3 déc. 1818, S. chr. — Gass., 6 oct. 1826, S. chr. — Angers, l»1' juill. 1850, S., 50. 2. 476, D., 51. 2. 134. — Troplong, n. 48; Pont, I, n. 402; Aubry et Kau. IV, p. 621, § 402, note 8; Laurent. XXVII, n. 89: Guillouard, n. 40 ; Hue, XI, n. 233. I2) Cass., 22 août 1840, S., 41. 1. 255. — Guillouard, loc. cit.; Hue, loc. cit. Metz, 5 août 1822, S. chr. — Rouen, 9 janv. 1829, S. chr. — Bruxelles. 17 déc. 1896, Pasicr., 96. 2. 165. - Guillouard, n. 40. 4 Cass., 21 mars 1811, S. chr. — Guillouard, n. 41 et 42; Hue, XI, n. 233. — La preuve du dépôt résulte d'une reconnaissance écrite trouvée dans une cas- sette chez le déposant à son décès, au moins si la cassette était accessible au dépo- sitaire. — Trib. civ. Bruxelles, 21 nov. 1894, Pasicr., 95. 3. 31. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 33 -")4G L>1 DÉPÔT ET L>1 SÉQUESTRE avoir déposé deux sacs de 1,000 fr., et le dépositaire soutient n'en avoir reçu qu'un : l'aveu du défendeur ne prouvera sa dette (jue jusqu'à concurrence de 1 ,000 fr., et par conséquent le déposant qui n'a pas de preuve écrite n'aura d'action que dans celte mesure: sauf la faculté qui lui appartiendrait, comme nous le dirons bientôt, de déférer le serment au défen- deur. De même en ce qui concerne l'identité de l'objet déposé ' . 11 est évident que ledéposant ne peut échapper à ces règles de preuve en faisant abstraction du dépôt et en cherchant à établir simplement la remise des objets (*). Si le dépositaire reconnaît le fait du dépôt, niais prétend en mèmetemps avoir restitué lachose déposée, le principe de l'indivisibilité de l'aveu ne permet pas au déposant de s'em- parer de la première partie de celle déclaration en répudiant la seconde. Le déposant n'aura donc pas d'action (:t). Tout ce que nous venons de dire est l'application du droit commun (*), comme on l'a fait remarquer lors des travaux préparatoires , et est contenu en substance dans l'art. 192i, ainsi coneu : Lorsque le dépôt, riant au-dessus de cent cin- •: q liante fram s, riesl point prouvé par écrit, celui qui est » attaqué < omme dépositaire, m est ira sur sa déclaration, - it pour le fait même du dépôt, soit pour la chose qui en » faisait l'objet, soit pour h- fait de sa restitution ». 1048. Quelle que soit la valeur de l'objet déposé, un inter- rogatoire sur faits et articles peut être provoqué par le dépo- sant pour amener le dépositaire à avouer le dépôt (6). Pour soutenir le contraire, on s'est prévalu de ce que l'art. 1924 dit que le dépositaire est cru sur sa déclaration; donc, dit-on, le 1 i iuillouard, n. 41 el 42. * Tril) civ. Toulouse, 13 mai 1805. Loi, 29 juil. 1895. ' Riom, 26 dé.-. L808, S. ebr. — Paris. 20 fév. 1852, S.. 52. 2. 124. — Cass. Belg., li mai 1864, l'osier., 64 1. W6. — (iuillouard, n. 41 et 42 : Hue. XI, u. 234. i« Laurent, XXVII, n. 92; (iuillouard, n. 41 ; Hue, XI, n. 234. 1 Discours de Favard au Corps législatif, Fenet, XIV, p. 511. «; Dijon, 12 mai 1876, S., 76. 2. 300, D., 77. 2. 12V. — Laurent. XXVII, n. '.'2; Arntz, [V, a. 1400; Guillouard, n. I0et4i; Hue, XI, n. 233 et 234.— Contra Pont, I. n. 106 s. nui \i: 547 défendeur ne peut provoquer qu'une déclaration, ce qui exclu! l'interrogatoire. Ces! !<■ contraire, à notre avis, qui résulte de l'art. 1924; car ce texte n'avait pas à indiquer la procédure à introduire pour provoquer la déclaration du dépositaire, c'est là une question qui rentre dans l'objet du code de procédure; or, la seule procédure organisée parce ouïe pour provoquer l'aveu est l'interrogatoire. 1049. Conformément au droit commun, si l'une des affir- mations émises par le dépositaire est invraisemblable, le juge n'a à tenir compte que du surplus de ses déclarations ('). 1050. Les déclarations du dépositaire ne peuvent être in- voquées dans les contestations qui s'élèvent entre les dépo- sants (*). Elles ne peuvent être invoquées davantage dans les contes- tations qui s'élèvent vis-à-vis des tiers (3). 1051. Le déposant peut, en tout état de cause, et quel que soit l'intérêt engagé, déférer le serment au dépositaire sur l'existence ou l'objet du dépôt (4). 1052. Ces règles de preuve sont applicables non seule- ment si le dépôt est prétendu devant un tribunal de l'ordre civil, mais encore quand le procès s'élève devant la juridic- tion criminelle (s). Il est de principe que les règles de la preuve ne varient pas suivant la nature du tribunal appelé à connaître du procès, et que si, en règle, tous les modes de preuve peuvent être invoqués devant la juridiction crimi- 1 Paris, 1er déc. 1876, D., 78. 2. 73. — Guillouard, n. 42. 2) Bordeaux, 27 janv. 1816, S. chr. — Paris, 10 fév. 1831, S., 31. 2. 233. — Guillouard, n. 42; Hue, XI, n. 234. (•») Cass., 15 juill. 1878, S., 79. 1. 399, D , 79. 1. 179. — Montpellier, 7 janv. 1841, - 51. 2. 141, D., 51. 2. 82. — Nîmes, 12 déc. 1850, S., 51. 2. 141, D., 51. 2. 82. — Trib. civ. Nivelles Belgique,, 29 fév. 1888, .lourn. trib. belges . 88. 578. — Pont, I, n. 408; Aubry et Ilau, IV, p. 621, S 402, note 10; Laurent, XXVII, n. 94; Guillouard, n. 42; Hue, loc. cil. 1 Aix, 18 fév. 1832, S., 33. 2. 517. — Troplong, n. 46; Ponl. I, n. 411 : Aubry et Rau, IV, p. 621, § 402, note 9: Guillouard, n. 40 ; Hue, XI, n. 233 et 234. 5) Cass., 31 juïl. 1812, S. chr. — Cass , 2 déc. 1813, S. chr. — Cass., 5 mai 1815, S. chr. — Cass., 10 avril 1819, S. chr. — Cass.. 12 août 1848, S., 49. 1. 298, D., 48. i. 99. — Limoges, 14 nov. 184». S., 45. 2. 177, D., 45. 4. 444. — Angers, 1<" juil. 1850, S.. 50. 2. 476, D.. 51. 2. 135. — Troplong, n. 47; Uuvergier, n 417; Pont, I, n. 404 ; Laurent, XXVII, n. 88; Guillouard, n. 45; Hue, XI, n. 234. 548 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE nelle, c'est parce qu'en général le demandeur n'a pu se pro- curer aucune preuve par écrit du fait délictueux; ce n'est pas ici le cas. Aussi était-ce déjà la solution de l'ancien droit ('). § III. Obligations du dépositaire. 1. Obligation de garder avec fidélité la chose. 1053. En confiant un dépôt à quelqu'un, on lui impose une charge, la garde de la chose déposée. Mais on lui donne en même temps un témoignage de confiance. Le dépositaire doit s'en montrer digne; la fidélité est son premier devoir. On peut tirer de ce principe plusieurs conséquences. A. Responsabilité du dépositaire. a. Appréciation de la {mile. 1054. • Le dépositaire doit apporter, dans la garde de la » chose déposée, les mêmes soins qu'il apporte dans la garde des choses gui lai appartiennent » (art. 1927) (*). En règle générale, le débiteur, tenu de veiller à la conser- vation d'une chose, est responsable de la faute que ne com- mettrait pas un Itiui père do famille [cidpa levis ia abstracto . L'art. 19"27 établit une dérogation à cette règle en ce qui con- cerne le dépositaire : il répond seulement de la faute qu'il ne commettrait pas dans la gestion de ses propres intérêts [culpa levis in concreto) (3). Cette solution était également admise à Rome (4 et dans l'ancien droit(5); elle Testencoreà l'étranger 6); on l'explique par l'idée que le dépositaire rend un service gratuit (7). Dans (') Denisart, v° Dépôt, § I, n. 9. 8" Rivier, toc. cit. • (iuillouard. n. u : Hue, XI. n. 237. — Il ne s'agit pas, comme on l'a dit (Trib. Alexandrie, 18 mars 1876, Joui n. dr. in!.. III, 1870. p. 398), de la faute lourde. (4j L. 31, I)., Depos. tel contra, 16. 3. (s) Domat, liv. I, tit. VII, sect. III, n. 1 et 2; Argou, liv. III, ch. XXXIII, II, p. 381. — Certains textes montrent simplement que le dépositaire est responsable. — Anciens usages de Bourgogne (XIV' ou X\"p s. . Rev. hist. de dr. fr., III, 1857, p. 541. ch. 15. illemagne. Rivier, loc. cit., C. ci v., art. 690. (• Domat, loc. cit.; Guillouard, n. 47. OBLIGATIONS Dl DÉPOSITAIRE ">ï-> (es travaux préparatoires, on invoque cette autre idée que si le déposant, « libre dans son choix, place mal sa confiance, il comme) une faute, .. 75. 1. 154. — Trib. com. Seine, 6 oct. 18^6, Journ. trib. eomm., 86. 4. — Guillouard, n. 49 ; Arntz, IV. n. 1402; Hue, XI, n. 237. (4) Trib. com. Seine, 1 i oct. 1886, Journ. trib. comm.,8$. 102 (incendie de tapis). — Trib. civ. Seine. 2 mai 1887, Gaz. Trib., 28 mai 1887. . (sj Contra Gand, 30 juil. 1891, Bely.jud., 91.1.493 (action solidaire contre le dépositaire et le tiers). — Hue, XI. n. 237 (action in solidum). (•) V. infra, n. 1094 s. (*) Guillouard, n. 22. [*) Pont, I, n. 435; Laurent, XXVII, n. 99; Guillouard, n. 53; Hue, XI, n. 238 OBLIGATIONS Dl DÉPOSI I \HU .")•")! / si le dépositaire s'est offert lin-même pour recevoir le dé- pôt; 2° s'il a stipulé un salaire pour la garde du dépôt ; » 3° si le dépôt a été fait uniquement /tour l'intérêt du dépo- sitaire; ■/" s'il a été convenu expressément que le dépositaire » répondrait de toute espèce de faute ». Les travaux préparatoires (' , en disanl que la loi ne donne pas an juge « une ligne de conduite, qu'elle s'en rapporte à va jurisprudence », montrent implicitement que dans tous ces eas la responsabilité du dépositaire est celle d'un bon père de famille. 1060. 1 " Si le dépositaire s'est offert lui-même pour recevoir le dépôt (2). En allant ainsi au devant de l'offre du déposant, le dépositaire s'est tacitement engagé à apporter tous les soins d'un bon père de famille à la garde de la chose ('); car il a pu empêcher, dit Pothier. que le déposant ne s'adressAt à une personne qui aurait été plus diligente que lui. C'est également le motif donné par les travaux prépara- toires (*), et c'était la solution du droit romain On cite les cas suivants : Un voyageur dépose ses colis avant de prendre son billet dont la possession est nécessaire pour les faire enregistrer: l'étude de ce cas rentre dans le louage (6). Tel est encore le cas où un banquier retient des valeurs à la suite de prospectus qu'il a adressés dans ce but Ç). Ou encore un dépôt est fait à une exposition organisée par l'Etat ou une ville (8), à supposer qu'il y ait là réellement un dépôt (9). < hi y assimile le cas où raison de sa situation une personne s'offre au public pour recevoir un dépôt " . par exemple ('j Discours de Favard au Corps législatif. Fenet, XIV. p. 512 s. ! Hivier, loc. cit. (3; Guillouard, n. 53. 4 Discours de Favard au Corps législatif, Fenet, XIV. p. 513. (s) L. 1, § 35, D., Depos. tel contra, ltj. :!. (*) V. notre Traité du contrat de louage, lre éd., II, n. 1658. 7, Paris, 13 janv. 1891, Fr.jud., 91. 2. 17. — Guillouard, n. 53. ■ Trib. civ. Caen, 13 janv. 1886, D. Kép.. Suppl., v° Dépôt, n. 25. —Guillouard. ii. 53. t9) V. supra, n. 1012. (,0) Troplong, n. 79 ; Guillouard, n. ô'î. 552 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE le cas d'un notaire auquel des testaments sont remis en dépôt ('). 1061. 2° S'il a stipulé un salaire pour la garde du dépôt. Il est tout naturel d'exiger une plus grande diligence de celui qui se fait payer ses soins que de celui qui les donne gratuitement. Nous montrerons ultérieurement quelle est, en pareille hypothèse, la nature véritable du contrat. 1062. Quoi qu il en soit, en pareil cas, la responsabilité du dépositaire est celle d'un bon père de famille (2). 1063. 3" Si le dépôt a été fait uniquement dons l'intérêt du dépositaire (*). Pothier cite l'exemple suivant qu'il em- prunte lui-même à l lpien (*). Vous proposant d'acheter un héritage, vous me demandez, au moment ou je vais partir pour un long voyage, de vous prêter la. somme nécessaire pour cette acquisition, au cas où vous concluriez le marché; alors je vous remets ù litre de dépôt la somme nécessaire, en convenant avec vous que, si vous faites l'acquisition, le dépôt se transformera en un prêt ;i votre profit. Nous nous occuperons ultérieurement de la nature véri- table de ce contrat ('] . 1064. Il faut appliquer la même solution au cas où le dépôt est fait dans l'intérêt des deux parties, par exemple où une personne remet une somme à une autre en dépôt avec la clause que si cette dernière en a besoin pour tel usage, elle s'en servira et payera les intérêts ("). Le motif de décider est le même que dans le cas précédent : le dépositaire ne rend pas un service. 1065. i S'il a été convenu expressément que le dépositaire répondrait de toute espèce de faute ' . 1066. On peut aussi convenir (pie le dépositaire répondra d'une certaine faute seulement. (') Troplong, ii. 79; Giiillouard, D. 53. | ruillouard, n. 5:5 el 55. ( ') Rivier. toc. cit. V L. i, 1)., De reb. cred.. 12. 1. V. infra, à propos du dépôt irrégulier, n. 17. i'\ Rivier, toc. cil. 0BLIGA1 IONS l>l DÉP08I l \liu-: 1067. A quel momcnl se calcule la valeur ) Lyon, 27 nov. 1863, S., 64. 2. 227. — Caen, 8 août 1872, S., 74. 2. 146, D., 74,. 2. 1%. — Lyon, 15 mai 1895, D., 96. 2. 139. — Troplong:, n. 95 ; Aubry etRau. IV, p. 625, § 403, note 18: Pascaud, Reu. crit., XII, 1883, p. 185 ; Guillouard, n. 77. — Contra Riom, 30 mai 1881, D., 82. 2. 38. — Dijon, 12 juin 1884, D., 85. 2. 146. (') Poitiers, 26 thermidor an X, S. chr. (motifs). (7) Trib. civ. Seine, 29 avril 1887, Gaz. Pal., 88. 1. Suppl., 42. — Le contraire a été décidé pour le dépôt salarié. Aix, 27 juil. 1886, Bull. d'Aix, 87. 103. (8) Lyon, 15 mai 1895, D.,96. 2. 139. —Trib. civ. Seine, 6 fév. 1893, Gaz. Tri/,.. 28 fév. 1893. — Labbé, Note, S., 86. 1. 450; Hue, XI, n. 237. 336 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE Cependant la solution contraire peut résulter de l'usage, notamment si le dépositaire est un dépositaire de profession (l). 1076. Si le dépositaire avait fait assurer contre l'incendie les objets dont il a la garde le cas le plus usuel est celui d'un commerçant qui fait assurer en bloc toutes les marchan- dises de ses magasins,, l'incendie causé par sa faute et dont il est responsable envers le déposant lui ouvre une action en indemnité contre l'assureur * . Mais il en est autrement si, l'incendie provenant d'un cas fortuit, le dépositaire n'encourt aucune responsabilité envers le déposant; il n'a alors aucune action contre l'assureur (s), parce que l'assurance, étant par essence un contrat d'indem- nité, ne permet de demander que la réparation d'une perte subie. Cependant le dépositaire ou le commissionnaire a une action contre l'assureur si. par une clause du contrat, il s'est chargé des cas fortuits (*). 1077. Par suite des principes qui précèdent, le déposant a une action indirecte contre L'assureur si le dépositaire est responsable de l'incendie ["), mais n'a contre l'assureur aucune action ni directe ni indirecte dans le cas contraire (6). Toutefois, si le dépositaire a aui comme gérant d'affaires du déposant, nous verrons (pie ce dernier a une action directe contre l'assureur :7j. et il semble que cette hypothèse doit être présumée (8), car le dépositaire, faisant assurer les objets eux- 1 Trib. i uni. Seine, cite par de Courcy, Le droit et /e? ouvriers, p. 118; Labbé. loc. cit.; de Courcy, loc cil.; de Lalande et Couturier, Tr. du tout, d'assur. contre l'incendie, n. 68. (») Cass. civ., 2 juin 1886, S., 86. 1. 449. D . 87. 1. 39 [motifs . — Lyon. 15 mai 1895, Mon.jud. Lyon. 1er juil. 1895, Journ. des assur., 95. 508. — Labbé, Xote, S., 86. I. il'.»: Massi^li. lier, cri/., XVI, 1887, p. 450; Lyon-Caen, Rev. erit., XVI. 1887, p Arrêts et auteurs précités. 1 Cpr. Cass. req., 28 janv. 1890, S-, 93, 1.470 pour le commissionnaire de transports). |5] Cass. civ., 2 juin 1886, précité. — Labbé, loc. cit. 6 Cass. civ.. 2 juin 1886. précité. — Lyon. 15 mai 1895, précité. — Labbé. /"<.-. cit.; Lyon-Caen, loc. cil. V. infra, note 5. 8 L'arrêt du 2 juin 1886 parait être implicitement d*avis contraire; mais, dans l'espèce, il était certain que le dépositaire entendait agrir dans son seul intérêt. OBLIGATIONS M DÉPOSITAIRE .">.")7 mêmes el non |»;is s;» responsabilité, 1rs fail assurer dans l'in- tti êl de Ions ceux .">!> 1082. Le dépositaire <|iii s 'es! servi de la chose s;ins autori- sation est tenu de la perte causée non seulement par s;i faute, mais encore par cas fortuit (' et il ne peut s'en dégager qu'en prouvant que la chose eût également péri s'il ne s'en étail |i.is servi (s). On peut invoquer en ce sens 1rs règles de la demeure, car la situation esl analogue : le dépositaire a com- mis une faute. 1083. Même dans le c;is où le dépositaire a méconnu ses obligations en se servant de la cliose, le déposant est tenu de prouver, si la chose périt, la valeur de la cliose; il n'est pas cru sur sa simple affirmation (!). Mais, comme il n'a pu se procurer une preuve par écrit de la valeur, il peut recourir aux témoins ou aux présomptions, quelque grande que soit cette valeur 'i Mêmes auteurs. liuillouard, n. 68. — Le < '.. civ. espagnol (art. 1769] décide le contraire. — V. tjuillouard, loc. cit. '• Guillouard, n. 68. ' V. infra, n. il 11. |«) N. 34. V. supra, a. 650. 560 DU DÉPÔT ET Di: SÉQUESTRE lui a données en dépôt a voulu les tenir cachées » ('). Au lieu de formuler ce principe, l'ait. 1931 s'est borné à reproduire les deux applications qu'en fait Pothier : « // [le dépositaire j ne doit point cherchera connaître quelles sont /es choses oui » ont été déposées, si elles lui ont été confiées dans un coffre » fermé ou sous une enveloppe cachetée ». Ce ne sont évidem- ment là que des exemples; il faut décider, comme Pothier, qu'en aucun cas le dépositaire ne doit chercher à connaître les choses déposées, si le déposant a voulu les tenir cachées * . Cette intention peut résulter soit des circonstances du dépôt (' soit de la nature des choses déposées ('). 1087. Le dépositaire qui viole le secret du dépôt est tenu envers le déposant des dommages-intérêts représentant la valeur du préjudice cause II. Obligation accidentelle de payer an salaire au déposant. 1088. I n salaire peut être attribué au déposant (6). En etl'et, la loi suppose que le dépôt peut avoir lieu dans l'inté- rêt du dépositaire, il est donc naturel que le dépositaire paye l'avantage que lui procure le dépôt. D'autre part, celui qui, essentiellement, rend un service gratuit, c'est le dépositaire; or. la loi l'autorise à stipuler un salaire à son profit: à plus forte raison le déposant peut-il stipuler un salaire. C'est ainsi que, dans le dépôl irrégulier, les déposants touchent souvent les intérêts de la somme déposée (7) ; par exemple, les caisses d'épargne, qui sont des dépositaires f); Guillouard, n. 68. if,l Wahl, toc. cil. infra, n. 1172. ;i propos du salaire du dépositaire. " Trib. civ. Remiremont, 20 mars 1880, S., 82. 2. 221. — Trib. civ. Cbauinont, 23fév. 1886, S., 91. I. 273 en noie). OBLIGATIONS M DÉPOSITAIRE 561 tics agissent dans un but de spéculation, el si eu fait le pré- tendu dépositaire a cherché à se procurer les f< >ticls qui lui étaient nécessaires, l'acte, en réalité, est un prêta intérêts ('). III. Obligation de restituer la chose. A. Restitution en nature ou par équivalent. 1089. Le principe est que le propriétaire doit restituer la chose déposée dans son identique individualité, in specie Ainsi, quand j'ai déposé un sac de mille francs, le dépositaire devra me restituer le môme sac de mille francs. Si j'ai dé- posé des pièces d'or à découvert, les mêmes pièces devront mètre restituées. L'art. 1932 semble dire qu'il suffirait de restituer des pièces semblables. Ce langage peut s'expliquer par cette considération qu'il est en général indiffèrent au dé- posant de recevoir les pièces mêmes qu'il a données ou d'au- tres du même type; mais il est préférable de maintenir le principe dans toute sa rigueur. Sous le bénéfice de cette observation, voici le texte de la loi : « Le dépositaire doit » rendre identiquement la chose même qu'il a reçue. — Ainsi, » le dépôt des sommes monnayées doit être rendu dans les mê- » mes espèces qu'il a été fait, soit dans le cas d'augmentation, » soit dans le cas de diminution de leur valeur » (art. 1932). Gela n'empêche pas, comme nous l'avons déjà montré, que le dépôt ne puisse porter sur des objets susceptibles de se consommer par le premier usage; si même le dépôt porte sur du blé, du vin ou de l'argent, la restitution doit être faite en nature (3). 1090. En cas de contestation sur l'identité des objets dépo- sés, c'est au déposant qu'il appartient de prouver cette iden- tité. Il ne peut recourir aux témoins que jusqu'à 150 francs, puisqu'il a pu, au moyen d'un acte descriptif de l'objet, se procurer une preuve écrite de cette identité. («) Cass., 12 déc. 1877, S., 78. 1. 81. — Cass. req., 2 déc. 1890, S., 91. 1. 273. — Trib. civ. Le Mans, 23 mai 188 i, Jauni, de l'Enreg., art. 22523. — Trib. civ. Chaumont, 23 fév. 1886, précité. — Wahl, loc. cit. — V. infra, n. 1094 s. (*) Argou, II, liv. III, cliap. XXXIII, p. 330. C) Argou, loc. cil. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 36 562 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE 1091. Le déposant doit également, si l'identité des valeurs déposées est contestée par les créanciers du dépositaire (l'hy- pothèse la plus pratique est celle de la faillite du dépositaire, où les créanciers de ce dernier prétendraient soumettre à leur gage les valeurs déposées), la démontrer. Aucune revendica- tion n'est possible si la démonstration de l'identité n'est pas faite. Il en est autrement dans le cas contraire. Cette solu- tion a été fréquemment appliquée, tant en cas de dépôt qu'en cas de mandat, aux monnaies et billets de banque (') et aux titres au porteur On a admis comme preuves suffisantes : l ne étiquette indiquant que les titres appartiennent à un client déterminé (*) ou portant seulement le nom du client (4) ; L'envoi au client des numéros de ses titres (5); L'inscription des titres avec mention spéciale sur un regis- tre ; La marque du déposant sur une boite, un coffre ou un sac contenant les valeurs déposées r ; La preuve que le dépositaire n'a reçu ni avant ni après le dépôt aucune valeur de même nature que la valeur dépo- sée (8). («) Lyon, 11 nov. 1863, S., 64. 2. 235, D., 65. 2. 69 (en note).— Bordeaux, 24 fév. 1886, S.. 88. 2. 92, D., 87. 2. 94. — Angers, 18 avril 1801, S., 91. 2. 159, D., 93. 2. 49 (molifs). — Angers, 9 avril 1892, Rec. d'Angers, 92. 168, D., 93. 2. 50. — Boistel, Pr. de dr. corn., n. 1001 et Noie D., 93. 2. 49; Daniel de Folleville, Tr. de la poss. des meubles et des lit. au porteur, n. 516 s. ; Wahl, Tr. des litres au porteur, II, n. 04'.". (*) Cass. req., 9 janv. 1888, S., 91. 1. 54, D., 89. 1. 207 (gage). — Bordeaux, 1 i mars 1892, liée, de Bordeaux, 92. 1. 235. — Boistel, Noie, D., 93. 2. 49. (») Cass. req., 9 janv. 1888, S., 91. 1. 54, D., 89. 1. 207. — Paris, 5 mars 1892, D., 93. 2. 17. («) Douai, 8 fév. 1867, D., 73. 1. 131 sous note). — Paris, 30 juin 1893, S., 94. 2.48. (5) Paris, 6 juillet 1870, D., 71. 2. 182. («) Paris, 6 juill. 1870, précité. — Angers, 18 avril 1891, précité. — Paris, 5 mars 1892, précité. " Esnault, Tr. des faill., III, n. 630; Laroque-Sayssinel et Dutruc, Formul. gén. des faill., II, n. 1590; Bousseau et Defert, Code ann. des faill., art. 574, n. 43; Pardessus, Cours de dr. comm., III, n. 1274 ; Alauzet, Comm. du C. corn., VIII, ii. 2821 ; Boistel, n. 1001; Dutruc, Dicl. ducont.comm., v° Faillite, n. 1461 ; Buben de Couder, Dict. de dr.comm., v» Revendication, n. 51. ngers, 9 avril 1892, D., 93. 2.50. OBLIGA riONS l>l DÉP081 i LIRE 563 1092. Le principe que le dépositaire doit restituer la ehose déposée en nature souffre exception dans l'hypothès< «lu dépôl irrégulier. On désigne sous ce nom le dépôt qui esl lut ivre autorisation, pour le dépositaire, de faire de la chose déposée un usage qui la consommera, et «le rendre, non la chose même qu'il a reçue, mais des choses semblables : comme si je dépose entre vos mains une somme d'argent, en convenant avec vous que vous la confondrez dans votre caisse avec l'argent qui vous appartient, que vous l'emploierez comme il vous plaira, et que vous me restituerez pareille somme. 1093. On admet, dans certains pays étrangers, que le dé- pôt de titres au porteur est présumé être irrégulier ('). Cette opinion nous parait difficile à soutenir. Mais le dépôt d'une somme d'argent doit être présumé irrégulier, les sommes d'argent étant rarement confiées pour être restituées en nature {-;. 1094. Quand le dépôt est irrégulier, c'est-à-dire quand l'objet du dépôt n'est pas restituable en nature, il est assez difficile à distinguer du prêt. Dans l'un et l'autre de ces deux contrats, il y a livraison d'une somme à charge de resti- tuer une somme équivalente et, dans les deux cas, la somme livrée devient la propriété de celui auquel elle est livrée et est mise à ses risques. H semblerait résulter des textes qu'une double différence existe entre le prêt et le dépôt irrégulier : un terme de resti- tution ne peut être stipulé que dans le premier (art. 1902 et 1944); des intérêts ne peuvent être également stipulés que dans le prêt (art. 1905 et 1917). Ce double critérium n'est pas acceptable (') : car, d'une (') Gareis, Holtzendorfl's Rechlslexikon, v» Depotgeschaefl. (*) Rivier, loc. cit. (s) Wahl, Sole, S., 01. 1. 274, Ann. dr.comm., V, 1891, jurispr., p. 1, et Exam. doc t. de la jurispr. d'e tirer/., Rev. crit., XXI, 1892. p. 196 ; Naquet, op. cil., infra, p. 198. — V. cep. en faveur du premier, Cass., 26 avril 1810, S. clir. — Sol. Régie, 14 août 1886, S., 88. 2. 224. — On a prétendu aussi que ce double crité- rium était adopté en droitromain. Naquet, op. cit. infra, p. 195, — et dansl'ancien droit, ibid. — C'est une erreur, le droit romain et l'ancien droit adoplaient déjà, sur le terme de restitution du dépôt, la solution du code civil. 5C4 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE part, nous savons que le prêt peut être stipulé sans terme, et le terme n'est pas incompatible entièrement avec le dépôt ; d'autre part, la stipulation d'intérêts, qui n'a rien d'obliga- toire dans le prêt, n'est pas inconciliable avec l'idée de dé- pôt. Toutefois il est vrai de dire que si un terme a été stipulé en dehors des conditions où il est valable dans le dépôt, l'acte doit de préférence s'analyser en un contrat de prêt ('). En outre, tandis que le prêteur ne peut immédiatement redeman- der la chose, le dépositaire, même irrégulier, le peut (s). De même nous montrerons que si l'intérêt d'un dépôt est exa- géré, l'acte dégénère en prêt (3). 1095. C'est un moyen très simple de trancher la difficulté que de soutenir avec quelques auteurs que le dépôt irrégulier est, en réalité, un prêt de consommation (4). Malheureuse- ment ce système revient a nier une tradition certaine, car déjà Pothier [■] qualifiait de dépôt irrégulier le contrat dont nous parlons et il disait formellement, comme nous le venons, que la restitution du dépôt irrégulier peut être réclamée à toute époque, ce qui est contraire aux règles admises dans le prêt ('). A pins forte raison faut-il rejeter une opinion d'après laquelle le dépôt irrégulier est originairement un dépôt, et devient un prêt lorsque l'objet est consommé (7). 1096. Le seul critérium certain est celui que fournit l'in- tention des parliez. Si la personne à qui les fondssont confiés a voulu rendre service en dégageant un tiers du souci inhérent à la garde de fonds, il y a dépôt. Il y a prêt si la partie à la- quelle des fonds sont conliés a voulu faire une spéculation et, à plus forte raison, si les deux parties ont recherché leur (•) Walil, loc. cit. - V. infra, n. H>96. V. infra, a. L096. ' Huranton, n. 15 el il : Guillouard. n. '20 et 22. — Cpr. Cass., 26 avril 1810, S. chr. — Ce système est, paraît-il, dominant en Italie. — V. Franchi, Ann. dr. corn., VI, 1895, p. 279. — Mais la jurisprudence Ta rejeté. — Venise, 19 sept. 1893, cité pur Franchi, loc. cit. («) N. 32 - 6 En ce sens, Pont, I. n. 445; Aubry et Rau, IV, p. C18, note 4; Naquet. Rép. périod. de l'enreg., 1882, d. ">'.' 5, p. 197. " Hue. XI, n. 229. OBLIGATIONS Dl DÉPOSI1 LIRE •'<>'> avantage commun ' .Telle élail déjà la solution dePothier ('). En principe, si l'intérêt est minime et si la restitution doit avoir lieu peu de jours après un avertissement, on doit pen- ser qu'il y a dépôt (s), car il n'est pas fréquent de voir aujour- d'hui un prêt consenti sans la fixation d'intérêts qui consti- tuent un loyer suffisant du capital et sans la stipulation d'un délai assez long pour assurer à l'emprunteur une jouissance entière de la somme empruntée ('). La faiblesse de l'intérêt est même à elle seule considérée quelquefois comme la caractéristique du dépôt (5y. Mais cela est inadmissible. Si l'intérêt est normal, en principe il y aura prêt (6). La concession d'un terme en principe doit, à elle seule, faire également admettre, en règle générale, l'idée de prêt (7). 1097. Les prétendus dépôts faits à la Banque de France ou à une société de crédit moyennant un intérêt générale- ment minime, sont de véritables prêts (8). La faiblesse de l'intérêt s'explique par le droit que se réserve, dans ce cas, le déposant de redemander les sommes déposées soit lorsque cela lui convient, soit au moins après un terme très court, ce (jui ne permet pas au dépositaire de donner" aux fonds un emploi définitif. Aussi tous les établissements de crédit ont- ils pour les dépôts un tarif d'intérêts qui varie suivant la lon- gueur du terme pendant lequel le déposant s'engage à ne pas réclamer les fonds déposés. 1098. Il y a prêt de consommation dans l'acte par lequel un patron s'engage à rendre à ses employés une somme équi- ' Cass. req., 2 déc. 1890, S., 91. 1. 273. — Cass. civ., 29 oct. 1894, S., 96. 1. 196. — Naquet, op. cit., p. 198; Wahl, Notes, S., 91. 1. 274 et y., 96. 1. 196. [*) N.83. (3) Pothier, loc. cit. (*) Wahl, Note, S., 91. 1. 274. — Dans toutes les circonstances de ce genre, la jurisprudence a de préférence reconnu l'existence d'un dépôt. !,i Xaquet, op. cit., p. 202. (6) Cass., 12 déc. 1877, Rép. périod. de l'enreg., n. 4844. — Trib. civ. Remire- mont, 20 mai 1880, S., 82. 2. 121. — Naquet, op. cit., p. 202. (7) Naquet, loc. cit. (8) Même conception en Allemagne, où ce contrat s'appelle également en prati- que dépôt. — Gareis, HoltzendorfT's Rechtsle.rikon, v° Depotgeschaefl. — Eu Italie, le contraire a été décidé. — Venise, 19 sept. 1893, précité. 566 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE va lente aux cautionnements qu'ils ont déposés; ce n'est ni un dépôt, ni un nantissement (*). 1099. Il y a des différences entre le prêt et le dépôt irré- gulier au point de vue de la responsabilité. D'autre part encore, l'art. 1293 C. civ., qui n'admet pas que la compensation puisse être opposée à la restitution d'un dé- pôt, s'applique, dans une opinion, au dépôt irrégulier et ne s'applique pas au prêt de consommation (*). Le défaut de restitution du dépôt, même irrégulier, est puni comme abus de confiance; il en est autrement du défaut de restitution du prêt. La loi du 29 juin 1872 soumet à une taxe sur le revenu les arrérages et intérêts annuels, des emprunts et obligations des sociétés, communes, etc. ; ce texte ne s'applique pas aux inté- rêts d'un dépôt irrégulier (3). Mais au point de vue des droits d'enregistrement le prêt et le « dépôt de sommes chez des particuliers » sont assi- milés (L. 22 frim. an VII, art. 09, § 3, n. 3) (4). 1100. Un a voulu distinguer du dépôt irrégulier le dépôt accompagné de la clause que le dépositaire pourra, s'il le désire, se servir de la chose et devra, dans ce cas, en restituer l'équivalent : il y a alors, a-t-on dit, un dépôt régulier suivi, en cas d'usage de la chose, d'un dépôt irrégulier ou d'un prêt de consommation (s). (•) Lyon, 20 nov. 1893. Gaz. l'ai.. 94. 1. 298 (donc leur détournement n'est pas un abus de» confiance . - Venise, 19 sept. 1893, précité. — Y. cep. infra, n. 1117. ss. req., 2 déc. 1890, s.. 9i. l. 273.— Wahl, Note, S.. 01. 1. 273. (*) On conclut généralement de là que la décharge d'un dépôt irrégulier, au lieu d être soumise au droit fixe de 3 fr., comme la décharge d'un dépôt ordinaire, est passible du droit proporlionnel de 50 cent. p. 100, auquel donne ouverture la quit- tance d'un prêt. Uict. de l'enreg , v° Décharge, n. 74 s.; Garnier, Rép. gén. de l'enreg., 7< éd., v° Décharge, n. 48. — Contra Championnière et Rigaud, Tr. des dr. d'enreg., I, n. 829. — On a même soutenu que dans la déclaration de succes- sion d'un dépositaire les sommes qui font l'objet du dépôt irrégulier sont assimi- lées aux dettes, qui, aux termes de la loi, ne doivent pas être déduites pour la per- ception du droit de mutation. G. Demante, l'rinc. de l'enreg., II, n. 693. — Mais cette solution a été rejetée. Trib. civ. Hazebrouk, 13 fév. 1864, Journ. Enreg., art. 17850. — Trib. civ. Sancerre, 24 déc. 1879, Rép. pér. de l'enreg., n. 5639; Dict. de l'enreg., v° Succession, n. 1919 s. (B) Duvergier, n. 404 ; Laurent, XXVII, n. 72 ; Guillouard, n. 21, 22 et 56. OBLIGATIONS DU DÉPOSITAIRE .")<»7 Il nous parait plus exacl de voir immédiatement dans ce contrat, suivant 1rs circonstances, un prêt de consommation ou un dépôt irrégulier ('). En quoi le contrat commencerait- il par être un dépôt régulier? En ce que le dépositaire, s'il n'use pas de la chose, a le droit de la restituer en nature? Mais on oublie que le dépositaire régulier ou l'emprunteur, obligé de rendre des objets de même nature et qualité que les objets prêtés, satisfait à cette obligation en restituant les objets prêtés eux-mêmes. Pothicr, à la vérité, enseignait la première opinion (2) ; mais il enseignait également la seconde (3). Le droit romain accor- dait bien l'action de dépôt tant que l'usage n'avait pas été effectué (') ; mais aucun motif n'était donné à l'appui de cette solution. 1101. Tout autre est l'hypothèse où le dépositaire reçoit le droit de se servir de la chose et d'en restituer l'équivalent dans le cas où tel événement surviendrait, par exemple où le dépositaire réaliserait une acquisition projetée et qui lui donnerait besoin des fonds prêtés. Ici, jusqu'au moment où la condition se réalise, il y a bien un dépôt puisque le dépo- sitaire est obligé de conserver les fonds prêtés (3) ; et c'est la conception de l'art. 1928-3°, qui, réglant la responsabilité du dépositaire en pareil cas, qualifie ainsi l'acte, à la suite du droit romain et de Pothier. 1102. A la différence de l'auteur d'un dépôt régulier, l'au- teur d'un dépôt irrégulier, n'ayant droit ni aux valeurs mêmes qu'il a déposées ni à celles qui se trouvent dans le patri- moine du déposant, est un simple créancier, soumis, en cas d'insuffisance de l'actif, à la condition ordinaire des créan- ciers (G). (') Trib. sup. Carlsrube, 18 déc. 1885, l'and. franc., $6. 5. 34. — Pont, I, n. 445 ; Aubry et Rau, IV, p. 618, § 401 ; Colmet de Santerre, VIII, n. 129 bis, III. l»)N. li. (») N. 82, 83. («) L. 1, § 34, D., Depos. tel contra, 16. 3. (s) Guillouard, n. 56. (6) Cass., 13 août 1856, S., 57. 1. 637, D., 57. 1. 22. — Pont, I, n.390; Laurent, XXVII, n.75; Boistel, Xole, D., 93. 2. 49; Guillouard, n. 23 (qui rattache à tort cette solution à ridée que le dépôt irrégulier est un prêt). 568 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE B. Restitution des fruits. 1 103. « Si la chose déposée a produit des fruits qui aient été » perçus par le dépositaire, il est obligé de les restituer. Il ne » doit aucun intérêt de l'argent déposé, si ce n'est du jour où » il a été mis en demeure de faire la restitution » (art. 1936). Cette dernière disposition ne contient pas à proprement parler une exception à la règle générale de l'art. 1153 al. 3, d'après laquelle une demande judiciaire est nécessaire pour faire courir les intérêts dune dette de somme d'argent; car le dépositaire n'est pas débiteur d'une somme d'argent, mais bien d'un corps certain. Parmi les choses productives de fruits sujets à restitution, doivent être citées les valeurs de bourse ('). C. Sanction de l'obligation de restituer. 1104. A défaut de restitution au moment où cette restitu- tion est demandée, le dépositaire doit au déposant des dom- mages-intérêts égaux au montant du préjudice que le retard a causé au déposant 1105. S'il s'agit de sommes d'argent, l'art. 1936 porte que les dommages-intérêts consistent dans les intérêts de la somme confiée (3). On revient donc au droit commun de l'art. 1153, sauf qu'une mise en demeure suftit, au lieu d'une demande en justice, pour faire courir les intérêts. 1106. lue sommation suffit et une demande en justice n'est pas nécessaire pour faire courir les intérêts de la somme confiée, même si le dépositaire a été autorisé à se servir de la chose, puisque le contrat garde son caractère de dépôt (*}. Quant au cas où le dépositaire se servirait de la chose sans autorisation, nous nous en occuperons ultérieurement. (') Colmet de Sanlerre, VIII, n. 148; Laurent, XXVII, n. 110: Guillouard, n. 80. Cass. civ., 2 mars 18%, D., 96. 1. 121. — < iuillouard, n. 81. 5 Ainsi le notaire chargé de toucher le prix d'une vente qu'il a faite en doit les intérêts à partir du jour de la sommation de consigner qui lui est adressée. Cass., 12 déc. 1826, S. chr. — Guillouard. n. 81. « Duranton, XVIII, n. 52; Pont, I, n. 467; Aubry et Ilau, IV, p. 623, §403, note 8; Laurent, XXVII, n. 111. — Contra Guillouard, n. 82. — Cet auteur se fonde sur ce qu'il y a alors prêt de consommation; il se met ainsi en contradiction avec lui-même. OBLIGATIONS DU DÉPOSI l VIRE 569 Une mise en demeure suffil également pour le dépol irré- gulier, puisque c'est un dépôl : 1rs auteurs qui y voient nu prêt de consommation décident logiquement le contraire ('). Enfin, il en est de même dans le dépôt salarié, à moins qu'on n'y voie un louage d'ouvrage, auquel cas une demande en justice est nécessaire. 1107. Le dépositaire ne peut évidemment être condamné ni à des intérêts, ni à des dommages-intérêts, s'il lui était in- terdit de restituer, par exemple si un tiers qui se prétend propriétaire ou créancier a fait opposition à la restitution (*). 11 n'est même pas nécessaire que le droit du tiers ait l'ap- parence d'être fondé (3), tout débiteur étant forcé de retenir les valeurs sur lesquelles saisie-arrêt est faite entre ses mains. 1108. Si le déposant est absent, le dépositaire a le droit de se faire ouvrir l'appartement du déposant pour y chercher l'objet déposé ('). 1109. Le dépositaire qui s'est servi de la chose ou l'a con- sommée à son profit en doit la valeur au jour soit où l'action en restitution est intentée, soit où la sommation de restituer lui est signifiée; de cette manière, il ne cause aucun préjudice au déposant, et ce dernier se trouve dans la même situation que s'il avait obtenu la restitution de l'objet déposé (5). Ces motifs nous empêchent d'accepter une opinion d'après laquelle l'estimation delà chose doit être faite au jour du dépôt (6); on dit à l'appui de cette solution que l'obligation de payer la valeur de la chose doit avoir la même date et la même étendue que l'obligation de restituer la chose elle- même, obligation à laquelle elle se substitue. C'est précisé- ment ce que nous soutenons : mais quelle est la date de l'obligation de restituer? C'est évidemment le jour où la resti- tution est demandée. Dans un dernier système, il faut se référer à celle des deux (') Guillouard, n. 82. — V. sur la loi du 7 avril 1900, la table, n. 799. ■ îass., 30 juil. 1855, S., 56. 1. 155, D., 55. 1. 278. — Gass., 11 juil. 1860, S., :. 971, D., 60. 1. 305. — Guillouard, n. 81. (') V. cep. Guillouard, n. 81. \l) Bertin, Chambre du conseil, I, n.317. « Trib. civ. Bruxelles, 3 nov. 1869, Belg.jttd., 70. 1. 308. — Hue, XI. n. 241. isi Aix, 1er déc. 1870, y., 72. 2. 109, D., 72. 2. 41. 570 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE époques, — dépôt et demande en restitution. — où l'objet déposé a ou aurait eu la plus grande valeur ('). A l'appui de ce système, qui est d'une grande injustice, on dit que, dans f l'opinion contraire, le dépositaire peut faire un profit illicite! en aliénant les objets au moment où ils sont en hausse. Ge^ n'est pas un argument de droit, et, au surplus, ce profit n'ai rien d'illicite, puisqu'il n'a pas pour corollaire un préjudice causé au déposant, 1110. Il va sans dire que si. outre la perte de l'objet, le déposant subit par l'effet de cette perte un préjudice spécial, i il doit être indemnité de ce préjudice (!). 1111. Le dépositaire doit-il de plein droit les intérêts des I choses dont il s'est servi contrairement à la loi du contrat? L'affirmative (3) s'appuie sur les arguments suivants : c'est! dit-on, la disposition des art. 18i(i et 1996 pour l'associé et le mandataire qui se servent des deniers de la société ou du mandant. Nous répondons que le soin pris par ces articles de faire courir les intérêts au profit de la société ou du mandant est déjà un argument suffisant pour empêcher d'étendre leur disposition au dépositaire. D'autre part, ces dispositions dé- rogent au droit commun, d'après lequel les intérêts courent seulement ;'i partir de la demande en justice. Enfin, les art. ISiO et 1996 ont une raison d'être; ils reposent sur l'idée que le détournement des fonds les a empêchés de fructifier au profit de la société ou du mandant. Rien de pareil en matière de dépôt, puisque les objets confiés au dépositaire devaient rester improductifs outre ses mains. L'analogie entre le dépôt et les deux situations que nous venons de rappeler est donc loin d'être aussi frappante qu'on veut bien le dire; au contraire, la comparaison entre ces diverses situations conduit à notre solution. <>u objecte encore que, d'après l'art. 1302, le voleur est responsable du cas fortuit : mais on est d'accord pour ne pas assimiler, au point de vue de l'art. 1302, l'abus de confiance 1 Guillouard, n. 78. - Guillouard, n. 78. (3) Duranton, XVIII, n. 53; Troplong, n. 1 « >4 ; Aubry et Rau, IV, § 403, p. 023, noie 9 : Pont, I. n. 468; (iuillouard. n. 74 et 83. OBLIGATIONS Dl DÉPOSITAIRE •' )7 I au vol. Au surplus l'art. 1302 ne .'I1S (8). La compensation est autorisée dans le dépôt irrégulier ; cela est certain dans l'opinion qui y voit un prêt de consom- mation (8), mais cela n'est pas moins vrai pour les auteurs qui, avec nous, le regardent comme un véritable dépôt. 1118. << Le ■ posée que dans l'état où elle se trouve au moment de la » restitution. Les détériorations qui ne sont pas survenues (l) Argon, II, liv. III, cli. XXXIII, p. 332. !) V. supra, n. 105 i s. t3) V. supra, n. 1075 s. « Y. infra, n. 1131 s. («) Argou, II, liv. III, cb. XXXIII, p. 331. ^fl; Guillouard, n. 22. OBLIGATIONS Dl DÉPOSITAIRE .'i7.'{ par son fait, sont à la charge du déposant » art. I '.).'{:{ ' 1119. « Le dépositaire auquel la chose a été enlevée par une force majeure et qui a revu un prix ou quelque chose à ■ la place, doit restituer ce quil a reçu en échange a art. 1934 . Ainsi j'ai déposé des denrées entre vos mains; une guerre étant survenue, vous ries obligé de livrer ces denrées sur une réquisition de l'autorité militaire. Vous ne scie/ tenu df me restituer que le prix que vous aurez reçu. De même, si le dépositaire est indemnisé du préjudice causé à la chose par un tiers, il doit rendre celte indemnité au déposant (*). Nous avons examiné plus haut si le déposant a droit à l'indemnité d'assurance que le dépositaire a pu sti- puler pour la perte de la chose (3). De même encore, lorsqu'un cas de force majeure a obligé le dépositaire à se dessaisir des objets déposés, il n'est tenu de restituer que les objets par lesquels il les a remplacés (*). Si, par exemple, le dépositaire a été forcé, pour échapper à des lois proscrivant la détention de For, de remplacer les pièces d'or déposées par des billets de banque, il n'a à resti- tuer que ces derniers (5). 1120. Si le dépositaire a vendu ou donné la ehose dépo- sée, le dépositaire a une action en restitution contre le tiers acquéreur; mais, presque toujours, comme il s'agit de meu- bles, l'acquéreur sera protégé par la règle en fait de men- hirs possession vaut titre. • La seule ressource du déposant sera alors d'intenter une action en dommages-intérêts contre le dépositaire; cette action, ayant pour but la réparation du préjudice causé, aura pour objet la valeur de la chose déposée au moment où l'ac- tion est exercée. 1121. Aux termes de l'art. 1935 : « L'héritier du déposi- » taire, qui a vendu de bonne foi la chose dont il ignorait le » dépôt, n'est tenu que de rendre le prix qu'il a reçu, ou de (') V. supra, n. 1054 s. • Guillouard, n. 79. (') V. supra, n. 1077 s. -.,' Guillouard, n. 70. |5) Cass., 27 fruclidor an V, D. Rép., \» Dépôt, n. 71. — Guillouard. n. 70. Oi\ DL DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE » céder son action contre l'acheteur, s'il n'a pas touche le » prix » ('). L'obligation de restituer passe à l'héritier du dépositaire. On suppose que cet héritier a vendu la chose déposée, (lovant qu'elle appartenait au défunt, de bonne foi par con- séquent : l'héritier ignorait le dépôt. Alors, s'il a reçu le prix, il sera quitte en le restituant, et, s'il ne l'a pas reçu, en cédant son action en paiement contre l'acheteur. Cette solution s'ins- pire d'indiscutables considérations d'équité (*). Une cession est nécessaire pour que le déposant puisse exercer cette action, et il n'y a pas, comme on l'a prétendu, une erreur juridique dans la disposition de notre texte qui l'ordonne; car l'action née de la vente ne peut appartenir qu'au vendeur, et non au propriétaire, qui est demeuré étran- ger à la vente ('). On a dit à tort que l'action n'appartient pas aux héritiers du dépositaire; c'est une erreur; il est, au con- traire, certain que le vendeur de la chose d'autrui peut récla- mer le prix à l'acquéreur, si ce dernier n'invoque pas la nullité de la vente. On a soutenu également à tort que si cette cession n'est pas impossible, elle est du moins inutile, le propriétaire pouvant agir directement contre le tiers acheteur; c'est inexact : il pourrait agir directement en restitution de la chose si Tache- ' teur de bonne foi ne pouvait se retrancher derrière la règle enfuit de meubles possession vaut titre, mais il ne peut lui réclamer un prix qu'il n'a pas stipulé. Par cela même que la cession est nécessaire, le déposant \ ne peut agir contre l'acquéreur qu'à la suite d'un acte volon- taire de cession ou d'une cession ordonnée par le tribunal, et cette cession doit, pour être opposable aux tiers, être signi- fiée à l'acquéreur, conformément à l'art. 1690 C. civ. (4). Enfin, les exceptions nées du chef du cédant sont opposa- bles au cédant (5). («) V. Rivier, loc. cit. (*) (iuillouard, n. 7i. i!) Laurent, XXVII, n. 109; Hue, XI, n. 2i2. — Contra Duvergier, n. 461 ; Pont, I, n. 462; Guillouard, n. 71. ' Laurent, loc. cit. — Contra Hue, loc. cit. v5) Hue, loc. cit. OBLIUA I IONS Dl M l»OSI l \ 1 1; I : OjO 1122. Si l'héritier du dépositaire a, de bonne foi, con- sommé la chose déposée, il est tenu d'en payer la valeur au moment où il l'a consommée, parée qu'il s'esl enrichi de cette valeur, el quand même celte valeur aurait augmenté lors de la restitution .' . Mais si la valeur a diminué, il ne doit que la valeur au moment de la restitution, car il ne peut être dans une situa- tion plus lâcheuse que le dépositaire lui-même ou l'héritier de mauvaise foi. 1123. Si l'héritier du dépositaire a, de bonne foi, donné l'objet déposé, il faut décider qu'il n'a rien à restituer (*) : l'art. 1935 ne l'oblige à restituer que son profit et il n'a tiré de la donation aucun profit. On objecterait à tort qu'il aurait donné ses biens propres, s'il n'avait pas donné l'objet déposé ; cela n'est pas certain, et la restriction que nous allons apporter a notre règle tient compte, dans la mesure où elle peut être exacte, de l'objection. 1124. Mais si l'héritier a tiré un profit quelconque de la donation, il doit faire compte au déposant de ce profit (3). Il en est ainsi notamment lorsqu'on fait l'héritier aurait, s'il n'avait pas donné les objets déposés, donné les siens pro- pres. Et cela est particulièrement fréquent en cas de consti- tution de dot. 1125. S'il y a plusieurs dépositaires ou que le dépositaire soit mort laissant plusieurs héritiers, la restitution peut être faite par celui d'entre eux qui détient la chose, sans que le consentement des autres lui soit nécessaire, puisque ces der- niers ne peuvent s'opposer à la restitution (4). Pour la même raison il doit faire la restitution sans pouvoir prétexter la nécessité d'obtenir le consentement des autres dépositaires ou héritiers (5). C'est ce que disait Pothier (6). S'il omet de faire la restitution, il peut, en sa qualité de Pont, I, n. 464; Golmet de Santerre, VIII, n. 147 bis, II; Guillouurd, a. 72. - Pont, I, n. 464 : Arntz, IV, n, 1469 ; Golmet de Santerre, VIII, n. 147 bis, II ; Aubry et Rau, IV, p. 622, § 403, note 6 ; Hue, XI, n. 242. (s) Guillouard, n. 72. (*) Guillouard, n. 97. (») Guillouard, n. 97 : Hue, XI, n. 247. (•) N. 65. 576 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE détenteur, être actionné pour le tout ('). C'est encore ce que disait Pothier (*). Mais comme tous les dépositaires ou héritiers sont obligés à restituer, chacun d'eux peut être actionné .en restitution pour sa part même s'il ne détient pas la chose déposée (3). Nous nous sommes déjà occupés des eftets de la perte de la chose au cas où il va plusieurs héritiers ou dépositaires ('•). E. .t qui doit être faite la restitution. a. Principe. 1126. « Le dépositaire ne doit restituer la chose déposée » qu'à celui qui la lui a confiée, ou à celui au nom duquel lé » dépôt acte fait, ou à celui qui a été indiqué pour le recevoir » (art. 1937). Ainsi le notaire est responsable de la remise de pièces entre les mains d'un prétendu ayant droit, sans le consentement de ceux qui lui onl confié ces pièces Si habilement donc qu'ait été contrefaite la signature du déposant, le dépositaire qui a restitué l'objet déposé au tiers qui a contrefait la signature en est responsable envers le déposant 1127. L'art. 1939 porte que dans le cas où il y a plusieurs héritiers la restitution doit leur être faite par portions si la chose est divisible et que, si la chose est indivisible, les héri- tiers doivent s'entendre pour la recevoir (7). La même solution est applicable au cas où il y a plusieurs déposants (8). 1128. Si le déposant est devenu incapable depuis l'époque où le dépôt a été effectué, la restitution doit être faite à son représentant légal. L'art. 1940 dit à ce sujet : « Si la per- (') Guillouard, n. 97. («) Loc. cil. s Hue, XI, n. 247. (*) V. supra, a. 1068. »; Paris, 15 déc. 1892, Droit, 11 août 1893. (•) Le contraire a été jugé en faveur des établissements de crédit. — Trib. civ. Lyon, 31 juil. 1886, Mon. jud. Lyon, 22 nov. 188 >. " V. in fra, a. 1142 s. (8) Guillouard. n. 95: Hue, XI, a. 244. — V. infra, n. 1142. OBLIGATIONS Dl DÉHOSITÀIBJ 'Ml sonne gui u fait le dépota changé d'état; par exemple, $i la femme, libre au moment où le dépôt a été fait, s'est ■ mariée depuis et se trouve en puissance de mari; si le ma- » jeur déposant se trouve frappé d'interdiction; dans t'tus ces » cas et autres de même nature, le dépôt ne peut être restitué qu'à celui qui a l'administration des droiti et des biens du a déposant ». De môme, si le dépôt a été l'ait par un incapable ou en sou nom, la restitution doit être faite à la personne chargée de le représenter, par exemple au mari ou au tuteur ('). 1129. En sens inverse, si le dépôt a été fait par le repré- sentant d'un incapable dont l'incapacité a aujourd'hui cessé. c'est à celui-ci que la restitution devra être faite. C'est ce principe qui a dicté l'art. 1941 : « Si le dépôt a été fait par » un tuteur, par un mari ou par un administrateur, dan* » l'une de ces qualités, il ne peut être restitué qu'à la per- » sonne que ce tuteur, ce mari ou cet administrateur repré- » sentaient, si leur gestion ou leur administration est finie ». 1130. L'art. 1938 al. 1, dispose : « // le dépositaire] ne » peut pas exiger de celui qui a fait le dépôt, la preuve qu'il » était propriétaire de la chose déposée ». b. Cas où un tiers est propriétaire de la chose. 1131. La règle posée par la loi soutfre une première exception, que l'art. 1938 al. 2 formule en ces termes : « Néan- » moins, s'il découvre que la chose a été volée et quel en est le » véritable propriétaire, il doit dénoncer à celui-ci le dépôt » qui lui a été fait, avec sommation de le réclamer dans un » délai déterminé et suffisant. Si celui auquel la dénonciation » a été faite néglige de réclamer le dépôt, le dépositaire est » valablement déchargé par la tradition qu'il en a fait à » celui duquel il l'a reçu ». Cette disposition est empruntée au droit romain (2) et à Pothier (s). On avait proposé, dans la discussion du code civil, que la (>) Pothier, n. 5 et 6; Troplong, n. 138 ; Pont, I, n. 476 : Guillouard, n. 84. H L. 31, § 1, I)., Depos. vel contra, 16. 3. N. 51. Société, prêt, oéiôt. — 2e éd. 37 o78 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE dénonciation du dépositaire, au lieu d'être faile au proprié- taire, fut faile à un officier de police; cette proposition fut rejetée avec raison : le dépositaire, a-t-on dit, n'est pas obligé de veiller aux intérêts du propriétaire avec plus de soie que le propriétaire lui-même et, au surplus, il s'expose- rail à être poursuivi comme calomniateur ('). Le dépositaire qui ne tient pas compte de la réclamation du propriétaire doit lui payer la valeur de la chose. Cependant certains auteurs se contentent de l'obliger à indemniser le propriétaire si ce dernier n'a pu se faire restituer la chose par le déposant auquel le dépositaire l'a remise (*). 1132. La réclamation que l'art. 1038-2° ini| ose au pro- priétaire doit être faite au déposant; il faut donc que, dans le délai suffisant fixé par le dépositaire, le propriétaire intente une action contre le déposant pour faire reconnaître sa qua- lité de propriétaire ; un jugement favorable au propriétaire est seul de nature à sauvegarder la responsabilité du dépo- sitaire vis-à-vis du déposant (*). Aussi était-ce la solution de Potbier(ê). Pour la même raison, le dépositaire n'est tenu d'exécuter le jugement rendu qu'après que ce jugement aura passé eu force de chose jugée. Mais il résulte de l'art. 1938-2° que le dépositaire doit dénoncer le vol au propriétaire ; si donc il est poursuivi en restitution avant d'avoir eu le temps de faire cette dénoncia- tion, il peut encore le faire ('), et celte dénonciation suspend l'instance jusqu'au moment matériellement nécessaire au propriétaire pour réclamer sa chose. 1132 bis. Le propriétaire peut, de son coté, prendre l'ini- tiative et former opposition à la restitution du dépôt (*). 1133. L'art. 1938-2°, dont la disposition est exceptionnelle et déroge au principe posé par l'art. 1938-1°, doit être inter- (' Observations de Porlali.s au conseil il'Klat. Fenet, XIV, p. i>C>. (*) Hue, XI, n. 2'*6. (») Hue, XI, n. 246. 4 N 51. (*) Arnlz, IV, n. 1412: Une. XI. n. 246. (6) V. infra, n. 1156. "III II. A ["IONS |t| DÉPOSI I AIRE .")79 prêté restrictivement. Ecrit en vue du dépôt d'une chose volée, il ut- saurai! donc être étendu au dépôl d'une chose perdue ('). Les travaux préparatoires monlrenl également <|iic l'art. 1938-2° doil être restreint au vol; nous avons rap- pelé la proposition qui avait été faite de remplacer la dénon- ciation au propriétaire par une dénonciation du délit à la police et les raisons qui ont fait écarter cette proposition; ces raisons, comme la proposition elle-même, montrent que, dans la pensée du législateur, il n'était question que d'objets volés. Du reste, et quoi qu'on ait dit le contraire, il n'y a pas les mêmes motifs de décider. Si l'objet est volé, on peut suppo- ser que le déposant a commis le vol, et cette crainte légitime l'art. 1938 2°. D'autre part, l'ordre public commande d'en- courager tous les faits destinés à la répression d'un vol. C'est commettre une erreur évidente que de rattacher l'art. 1938-2" à l'idée que chacun doit recevoir ce qui lui est dû; la preuve que cette idée doit être écartée, c'est que, de l'avis général, la certitude acquise par le dépositaire qu'un tiers est propriétaire de l'objet déposé, ne le dispense pas de faire la restitution au déposant. On objecte enfin que, pour les conditions de la prescription acquisitive, l'art. 2279 assimile la perte au vol; il esta peine utile de faire remarquer que les deux situations n'ont aucune analogie. 1134. Si le dépositaire a simplement la certitude que la chose déposée appartient à un tiers, il a le droit de la rendre au déposant (!). D'autre part, le tiers ne peut, en offrant seulement de prou- ver qu'il est propriétaire, réclamer la restitution (3). 1135. A plus forte raison, le dépositaire n'a pas en ce cas •] l'ont, I, n. 490; Aubryet Itau, IV, p. 625, § 103, note 15; Laurent, XXVU, n. 120; Hue, XI, n. 246. — Contra Duranton, XVIII, n. 58; Duvergier, a. 476 ; Colmet de Santerre, VIII, n. 150 bis, I ; Guillonard. n. 101. (J) V. cep. Cass. civ., 23 oct. 1889, S., 92. 1. 361 (cet arrêt, relatif au dépôt fait aux magasins généraux, s'appuie sur le principe de la faute délictuelle et néglige ceux du dépôt1. (*) Tnb. com. Sainl-Pélersbourg, i avril 1873, Jourri. *! tiers dans son propre intérêt, c'est-à-dire a, en réalité, insii- tué un mandataire '). 1140. Lorsque le dépositaire, tout en faisant le dépôt «mi son propre nom. indique un tiers pour recevoir la restitution, ce tiers osl un mandataire cl la restitution faite entre ses mains est valable, quelque usage que le tiers fasse des cho- ies restituées *). Il en est autrement cependant si le mandat est révoqué Nous examinerons plus loin si le dépôt peut encore, après la mort du mandant, être restitué au mandataire ' . 1141. Le droit, pour le dépositaire, de restituer le dépôt à un tiers résulte de ce que le dépôt est constaté par un ticket au porteur; la restitution peut être faite au porteur du tic- ket (*); ce n'est pas qu'il y ait là un mandat, comme on l'a prétendu (6), c'est parce que tout détenteur d'un titre au por- teur est réputé en être propriétaire. L'intérêt de cette considération est que non seulement le dépositaire peut, mais doit rendre le dépôt au porteur du ticket et n'est pas libéré par une restitution faite au déposant; si on considère, au contraire, le porteur comme le manda- taire du déposant, ce dernier peut révoquer le- mandat soit expressément, soit tacitement en réclamant lui-même la res- titution. e. Décès du déposant. 1142. L'art. 1939 prévoit le cas de mort du déposant avant que la restitution soit effectuée : « En ca* de mort naturelle ou civile] de la personne qui a fait le dépôt, la chose de'po- '•> ne peut être rendue qu'à son héritier. — S'il y a plusieurs » héritiers, elle doit être rendue à chacun d'eu r pour leur part » el portion. — Si la chose déposée est indivisible, les héri- • tiers doivent s'accorder entre eux pour la recevoir ». Le mot indivisible a, dans le premier alinéa de notre arti- 1 Laurent, XXVII, n. 114: (iuillouaid, n. 85. '- Cass., 13 mars 1861, S., 61. 1. 446. — Angers, 13 juin 1861. S.. 62. 2. 87. — tluillouard, n. 86. i'i Aubry et Rau, IV, p. 623, 5 W3; Guillouard, n. 86 et 87. • V. infra, n. 1143 s. 5 Oaen, 17 nov. 1873, S., 7»',. 2. 19. — Guillouard, n. 86; Hue, XI, n. 244. 8 i juillouard, n. 86. 582 DU DÉPÔT ET Dl SÉQUESTRE cle, un sens spécial : il fait, comme nous le dirons, allusion au cas où la chose déposée est un corps certain non susceptible de division matérielle ; peu importe qu'elle soit susceptible de division intellectuelle et divisible, par conséquent, dans le sens des art. 1:217 s. ('). Si le droit des héritiers n'apparait pas très clairement, le dépositaire peut exiger que les héritiers fassent la preuve de leur droit héréditaire (3). Si le dépôt a été fait au nom d'un tiers, l'héritier du véri- table déposant peut exiger la restitution en prouvant que ce tiers m agi pour le compte de son auteur ( ). Cette preuve ne peut être faite que conformément au droit commun : lesté- moins ne sont admis que jusqu'à 150 francs ou s'il y a un commencement de preuve par écrit ('). 1143. Le mandat de remettre l'objet déposé à un tiers cesse, comme t»ms les mandats, par la mort du mandant, c'est- à-dire du déposant (5) (C. civ., "2003,. Cela résulte aussi des travaux préparatoires (6). Mais, conformément au droit commun, le déposant peut déclarer que, môme après sa mort, l'objet déposé doit être restitué au tiers désigné par lui à titre de mandataire (7), En ce qui concerne particulièrement le dépôt, le droit romain V. infra, n 1148. i lass., 11 juill. 1860, S., ou. 1. V* 7 1 . D., 60. 1. 305.— Rouen, 26janv. 18J8, H., '.'n. 2. 251. — Trib. civ. Anvers. 26 juin lssr>. Poster., 85. 3. .'405. — Guillouard, m '.m;; Hue, XI. n. 247. (') Rouen. 26 janv. 189*. précité. — V". noire T> . tirs contr. aléal., du mandai, etc., m - ' Rouen, 26 janv. 1898, précité. ' I iss., 22 uov. 1819, S. chr. — Cass., 16 août 1842, S., 42. 1. 850. — Cass., 29 avril 1846, S . 16. 1. 689, D., 46. 1. 244. — Paris, 1" mars 1826, S. chr. — Bordeaux. 5 rév. 1827, S. chr. — Paris. 14 mai 1853. S., 53. 2. 507. — Paris. 2<> nov. 1888, Gaz. Pal., 88. 2. 658. — Pont. I. n. 48 J ; Laurent, XXVII, n. 1 17 : Guillouard, n. 87 ; Hue. XI. n. 244. (•) Exposé des motifs de Favard, Penet. XIV, p. 515. l'ont, I. n. 482 : Guillouard, n. 91. — Contra Cass., 12 déc. 1815, S. chr. — Chss., 2 avril 1823, S. chr. — Cass., 12 mars 1827, S. chr. — Montpellier, 6 mais 1828, S. chr. — Douai. 31 déc. 1834, S.. 35. 2. 215. — Bordeaux, 8 août 1853, S. 53. 2. 641, D., 5i. 2. 81. — Montpellier, 25 fév. 1862, S., 62. 2. 209. — Paris. 29 nov. 1888, précité. — Trib. civ. Le Mans, 24 janv. 1894, Rec. d'Angers: 1894, p. 193. — Troplong, n. 146 : Duvergier, n. 4f->3 s. : Aubry et Rau, IV. p. 625, § 403, noie 13; Laurent, XXVII, n. 118: Hue. XI. n. 245. 0BLI6A IImns Dl DÉP0S1 i \liu. 583 donnait celte solution ('), et il en était de même de l'ancien droit ■ L'opinion contraire se fonde sur < -e que le mandai 005/ morlem est nul el oblige, malgré toute clause contraire, le dépositaire à rendre l'objet déposé aux héritiers du dépo Ba ni ; cela est inexact ('). 1144. Si le tiers désigné est, en réalité, un donataire, et que lacté de dépôt n'indique pas que son droit est maintenu après la mort du déposant, le dépositaire ne peut faire la restitution au tiers désigné (') ; en effet, aux yeux du déposi- taire, le tiers n'est qu'un mandataire et il faut par consé- quent appliquer la règle que le mandat cesse par la mort du mandant. C'est, du reste, ce qui a été expressément indiqué dans les travaux préparatoires, dont il est bon, pour la solu- tion de la question suivante, de reproduire les motifs (5). « Le dépositaire ne peut pas, à l'insu de l'héritier, disposer du dépôt en faveur de la personne qui lui avait été désignée, parce que le dépôt serait un fîdéicommis qui aurait souvent pour but des dispositions prohibées. Le législateur a dû écarter soigneusement tout ce qui pourrait favoriser la dona- tion de la loi sur la disponibilité des biens, surtout après lui avoir donné la latitude qu'elle devait avoir dans les mœurs ». Mais s'il est dit expressément qu'en cas de mort du dépo- sant, la restitution devra être faite au tiers, donataire en réa- lité et désigné comme mandataire, faudra-t-il dire encore que la restitution ne peut être faite à ce tiers, ou devra-t-on adopter la solution contraire? Il va sans dire tout d'abord, que dans l'opinion qui an- nule le mandat post mortem mandantis, la restitution ne peut être faite au tiers, puisque le dépositaire n'a cà considérer la situation du tiers que telle qu'elle résulte de l'acte. Mais que décider dans l'opinion contraire? On admet quel- (') L. 26, pi\, Depos. tel contra, \t). 3. (*) Arrêts de 1708, 1745 et 1758. cites par Nouv. Denisirt v» Don. entre-vifs, 12. n. 11. — Nouv. Denisart, v° Don. entre-vifs, S 12. n. 11. (3) V. notre TV. des conlr. aléa t., du mandat, etc., n. 8 - 4 Pont, 1, n. 480; Guillouard, n. 87. s l'exposé des motifs de Favard. Fenet. XIV, p. 515. 58 i 1)1 DÉPÔT ET DL SÉQUESTRE quefois que la restitution ne peut être faite au tiers ('). On peut se prévaloir des considérations invoquées dans le pas- sage des travaux préparatoires que nous avons cité à propos de la question précédente ; c'est pour empêcher les donations déguisées qu'on a refusé tout droit au mandataire après la mort du déposant; or, il ne saurait appartenir à ce dernier de tourner une prohibition qui, comme celle-ci, a été introduite par la loi pour des raisons d'ordre public. On dit, dans le même sens, que le mandat déguisant une donation est nul, parce qu'il empêche l'irrévocabilité de la donation, et qu'en outre l'art. 1939 dispose d'une manière absolue que la resti- tution doit être faite aux héritiers. Nous écartons tout d'abord ce dernier argument, car s'il était exact, il conduirait à annuler le mandat de demander la restitution du dépôt après la mort du mandant, et, par hypo- thèse, ce mandat est valable. L'argument tiré de l'irrévocabilité des donations n'est pas plus fondé; car si la donation déguisée, aussi bien que la dona- tion ouverte, doit être irrévocable, elle est irrévocable aussi bien quand elle résulte d'un mandat que quand elle résulte de tout autre acte; sans doute, le mandat est ordinairement révocable, mais comme, en l'espèce, il déguise une donation, il n'est pas révocable; et si, en fait, le mandant révoque le mandat, le donataire fera tomber la révocation en prouvant sa qualité de donataire. La donation, objecte-l-on encore, exige le concours des volontés du donateur et du donataire, et ce concours ne peut plus s'opérer après la mort du donateur. Ce raisonnement repose sur une confusion ; dès le jour où le mandat déguisant une donation a élé accepté par le mandataire, le concours des volontés s'est opéré et la donation s'est effectuée; l'exécution seule en est retardée. Enfin le droit romain (2) et l'ancien droit étaient entièrement en notre sens ('). ') Duvergier, XXI, a. 483: Troplong, n. 146 s. ; Aubry el Kau, IV. p. 624, § 403, noie 13. L. 26, pr , D., Depos. vel contr., 16. 3. Arrêts de 1708, 17i5 et 1758, Souvenu Uenisart, v° Don. entre vifs, g 12, ail. 11. — Conlra An et du parlement de 1786, Souveau Denisart, loc. cit. OBLIGATIONS l»l DÉPOS1 1 \Uir. .">N."> Les travaux préparatoires, qui d'ailleurs n'examinent pas la question, ne peuvenl enlever leur valeur à une argumentation lussi sûre ('). 1145. Certains auteurs {-) font, à la suite de Denisart ('), une distinction : la donation est valable si le dépositaire agit au nom du donataire, parce qu'alors la donation est consom- mée, elle est nulle si le dépositaire agit au nom du dona- teur, parce qu'alors la donation n'est qu'en projet. Celte distinction nous paraît étrangère à la question; car si le dé- positaire agit pour le compte du donateur, la donation peut néanmoins avoir été consommée par l'accord de volontés entre le donateur et le donataire; au surplus, ce n'est là qu'une question de mots, car si la validité de la donation dépend d'une circonstance aussi insignifiante, il sera facile aux par- ties de déclarer dans l'acte de dépôt que le dépôt est fait pour le compte du donataire. Ajoutons (jue la doctrine que nous venons de combattre présente de grandes difficultés pratiques, car comment savoir si le tiers a agi comme représentant du donateur ou comme représentant du donataire? On dit qu'en principe, et par explication de l'art. 1939, la première solution doit être ac- ceptée (*), mais qu'il en est autrement si le tiers est tuteur, père, mandataire (5) ou même oncle ou tante (6) du dona- taire; cela est arbitraire. 1146. Toutefois si, en fait, la donation déguisée sous la forme du mandat est une donation à cause de mort, c'est-à- dire si le donateur se réservait effectivement le droit de la révoquer, la donation est nulle (7). Elle est également nulle, conformément aux principes des (') Cass. req., 11 déc. 1815, S. chr. — Cass. req., 2 avril 1823, S. chr. — Limo- ges. 9 juil. 1821, S. chr. — Lyon, 23 fév. 1835, S., 35. 2. 424. — Amiens, 16 nov. 1852, S., 54. 2. 60, D., 54. 2. 255. — Paris, 30 juin 1892, D., 93. 2. 513. — Pont, I. n. 482; Massé et Vergé. V, p. 9, note 17; Hue. XI, n. 245. (*) Guillouard, n. 71. ,sj Loc. cil. («) Guillouard, n. 92. (s) Denisart, loc. cit. 6) Parlement de Paris, 23 juin 175*. cité par Denisart, v° Dépôt, § 1. n. 12. — ♦ iuillouard, n. 92. : Bordeaux, 8 août 1853, S., 53. 2. 641, D.. 54. 2. 81. — Pont, I, n. 482. 586 DU DÉPÔT ET 1)1 SÉQUESTRE donations déguisées, si elle est faite à un incapable de rece- voir ('), et réductible si elle porte atteinte à la quotité dispo- nible (»). Enfin elle est nulle si le donataire n'a pas accepté la dona- tion du vivant du donateur (s). 1147. Il a été décidé que le dépositaire qui affirme aux héritiers du déposant que la restitution du dépôt a élé faite à un tiers indiqué pour le recevoir, doit faire connaître ce tiers, afin que les héritiers puissent s'assurer qu'il était, en effet, indiqué au dépositaire et qu'il était capable de recevoir du déposant. (4). Il sciait plus exact de dire qu'il appartient au dépositaire de prouver qu'un tiers a été désigné pour recevoir la restitution. Une fois que la preuve en est faite, les héritiers doivent, comme nous l'avons dit, si la chose n'a pas été encore restituée à ce tiers et s'ils en demandent la restitution, établir que ce tiers a agi pour le compte de leur auteur (5). 1148. On a vu qu'aux termes de l'art. 1939, la restitution doit être faite par portions divises entre les héritiers si la chose est divisible, et à la personne qu'ils désignent si la chose est indivisible Mais il ne s'agit pas ici d'une indivisibilité intellectuelle au sens de l'art. 1*217 G. civ. L'art. 1939 est fondé sur l'idée que la chose déposée ne doit être divisée (pie si elle peut l'être; il s'agit donc d'une indivisibilité matérielle (7). Ainsi, en cas de dépôt de monnaies dans un sac ou un coffre, la restitution ne peut être faite qu'à tous les héritiers du dépo- sant conjointement, car la défense faite par la loi au dépo- sitaire d'ouvrir le récipient lui interdit de diviser la somme déposée (8). ', Poul, I, n. 182; Guillouard, n. 93. ' Pont, I, n. 482; Guillouarl, n. 93. (") Guillouard, n. 71. [*) Hiom, 22 jhiiv. 1811, S. chr. "; V. supra, n. 11 12. («) V. supra, n. 1142. ') Duvergier, n. 481; Pont, [, n. 184; Aubry cl llau, IV, p. 624, g 403. note 14; Laurent, XXVII, n. 119; Guillouard, n. '.•!: Hue, XI, n. 247. ■] I îuillouard, n. 94. OBLIGA riONS Dl DÉI'OSI I VIRE >s i 1149. Si le dépôt, divisible ou non, est rendu à l'un des déposants ou héritiers, au lieu d'être rendu à tous, l<- dépo- sitaire doit évidenimenl une indemnité aux autres Ces derniers a'onl à justifier que d'une chose, c'est que le dépôt a déjà été restitué à l'un d'entre eux. S'ils ne sonl pas en étal de faire cette preuve; il sera possible au dépositaire d'échapper à la responsabilité en dissimulant la restitution H en offrant de restituer la chose aux réclamants à la condition qu'ils se inunissent du consentement de ceux qui. en réalité, oui obtenu la restitution (*). (l'est le moyen de défense qu'au dire de Loisel (3j, dans une anecdote bien connue, saint Yves suggéra à un dépositaire, alors que l'un des déposants, de complicité avec l'autre, avait profité de l'ignorance du dépo- sitaire pour obtenir la restitution du déposant, et qu'ensuite le second déposant avait également réclamé cette restitution. F. Epoque (/<■ lu restitution. 1150. L'art. 1944 porte : « Lr dépôt doit rire remis au déposant aussitôt qu'il le réclame, lors même que le contra/ » aurai/ fixé un délai détermine pour lu restitution ; à moins » qu'il n'existe, entre les mains dit dépositaire, une saisie- » arrêt ou une opposition ii la restitution et au déplacement » delà chose déposée ». 1151. L'obligation de restituer la chose déposée à toute réquisition, déjà admise en droit romain et dans l'ancien droit i'), dérive de l'idée que, le dépôt étant fait uniquement dans l'intérêt du déposant, le dépositaire n'a aucun intérêt à retenir une chose qui ne peut lui être d'aucune utilité (s). C'est le motif donné par Pothier (6). 1152. Cette obligation existe même dans le dépôt où le dépositaire est autorisé à se servir de la chose déposée; eu effet, c'est encore un dépôt et il tombe sous l'application de (') Bordeaux 27 juill. 1880, D. Rep.. Suppl., v° Dépôt, n. 37. — Guillouard. n. 'X> : IIuc, XI, n. 244. H Contra Hue, XI, n. 244. |') Loisel, Dialogue des avocats, dans Dupin. Prof, d'aooeat, I, p. 173. ' Argon, liv. lil,ch. XXXIII, p. 331. 5 Laurent. XXVII, n. 121: Guillouard. n. 103, « \. 58. 388 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE l'art. 1944, lequel est conçu en termes généraux. Du reste l'autorisation accordée au dépositaire de se servir de la chose n'empêche pas que le dépôt ne soit fait dans l'intérêt du dépo- sant. Mais la même obligation existe aussi si le dépôt est fait dans l'intérêt du dépositaire; ici elle s'explique moins, mais l'art. 1944 ne distingue pas. File existe encore dans le dépôt salarié, et cela n'a rien d'injuste puisque ce dépôt a lieu dans l'intérêt du déposant; il en est autrement cependant dans l'opinion qui regarde le dépôt salarié comme un louage d'ouvrage. 1153. L'obligation de restituer à première réquisition existe même dans le dépôt irrégulier (l) ; mais cela n'est exact (pie dans notre opinion, d'après laquelle le dépôt irrégulier est un véritable dépôt; dans l'opinion qui y voit un prêt de consommation, il faut appliquer l'art. 1900, d'après lequel la restitution doit être faite au terme fixé, et, s'il n'y a pas de terme, à l'époque déterminée par le juge(! . La première solu- tion était celle de Pothier 1154. La stipulation d'un terme dans le contrat de dépôt n'a rien d'illicite, quand le terme est court, et qu'il a été imposé au déposant pour éviter les difficultés qu'aurait le dépositaire à faire immédiatement la remise de l'objet ('). En dehors de ces conditions, on doit supposer que les parties ont entendu faire un prêt (*). Mais s'il est démontré qu'elles ont réellement voulu faire un contrat de dépôt, la stipulation du terme doit être réputée non écrite. 1155. Nous citerons plus loin un cas où, par exception, le dépositaire peut retenir la chose déposée. C'est celui où ses créances nées a l'occasion du dépôt ne sont pas acquittées (*). 1 Colmel de Sanlerre.YIlI, n. 129 bis. Bordeaux, fi fév. 1840, S., 40. 2. 267. — Guillouard, n. 20 el 22. (») N. 8:3. (*) Trib. civ. Remiremont, 20 mars 1880, S., 81. 2. 225. — Sol. de la Régie, 3 fév. 1876, Joum. de l'Etirer,., art. 19961. — Sol. de la Régie, 14 août 1886, S., 88. 2. 224. — Pont, I. n. 494; Wahl. Sole, S., 91. 1. 273 et Eœam. doclr. île la jurispr. d'enreg.,Rev.crit., XXI, L892, p. 196. (s) V. supra, n. 1094 s. ^fi) V. infra, n. 1 17T» s. 0DL1GA I IONS l>l DÉPOS11 \llil 589 D'un autre ciiic, le dépositaire peu! el it retenir la chose déposée si elle a clé votée •■! s'il on découvre le véritable propriétaire. Nous nous sommes demandé s'il eu est de même dans le cas où une instance est engagée suc la propriété ('). Enfin l'art. lOii lui interdit la restitution en cas de saisie- arrèt ou opposition : c'est le droil commun, car une saisie empêche le détenteur de la chose d'autrui de s'en dessaisir. Aussi faut-il décider que celle saisie-arrêt est soumise aux formes prescrites par les art. o.">7 et suiv. C. proc. (*). 1156. Toutefois, l'art. 5)57 C. pr. n'exige ces formes que si la saisie émane de créanciers; en d'aulres termes, s'il s'agit d'une saisie-arrêt. Si la saisie est faite par un tiers qui se prétend propriétaire (ce qui est une saisie revendication), aucune forme n'est nécessaire (3). Mais le dépositaire ne peut, par la simple raison qu'il con- naît le propriétaire véritable de l'objet, et à moins de lui taire une dénonciation (*), refuser la restitution au déposant ; il ne peut, à plus forte raison, la refuser par la raison que la propriété de l'objet serait litigieuse (s). 1157. De son côté, le dépositaire ne peut pas, si aucun terme n'a été tixé pour la restitution, restituer le dépôt quand cela lui convient (G); du moment qu'il s'est obligé à garder la chose, il ne peut, de sa propre autorité, se dégager de cette obligation. Le déposilaire, objecte-t-on, n'a pris aucune obligalion au sujet de la durée du service qu'il rend. C'est précisément pour cela qu'il ne peut se dégager de lui-même. On ne peut lui donner le droit de restituer le dépôt sans subordonner ses obligations à son propre caprice. Il va sans dire que, néanmoins, le déposilaire n'est pas tenu indéfiniment; il appartient au juge de décider, d'après la nature du dépôt, la situation respective des parties, ou tou- 1 V. supra, n. 1131 s. [*) Bordeaux, 28 fév. 1849, S., 49. 2. 400, D.. 49. 2. 154 (sol. implic). — Duver- gier, n. 497; Pont, I, n. 496; Aubry et Rau, IV, p. 625, § 403, note 16; Laurent, XXVII, n. 122; Guillouard, n. 104; Hue. XI, n. 250. (•) Bordeaux, 28 fév. 1849, et tous les auteurs précités. \ V. supra, n. 1131 s. (5) Hue, XI, n. 250. (*) Contra Guillouard, n. 103. 390 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE tes autres circonstances, quelle durée maxima on a voulu donner au dépôt . 1153. A plus forte raison, le dépositaire ne peut-il pas, si un tenue a été fixé, restituer le dépôt avant l'arrivée de ce terme (1). Il méconnaîtrait ses obligations d'une manière positive et, en oulrè, on se demande à quoi servirait la fixa- tion d'un ternie si le dépositaire aussi bien que le déposant pouvait le méconnaître. C'est une objection peu fondée que de dire qu'un service ne doit jamais nuire à celui qui le rend nrmini beneficinm débet esse damnosum) ; cette maxime signifie qu'un donateur ne peut souffrir que le préjudice qu'il a voulu souffrir; clic ne signifie pas — ce qui serait absurde — que celui qui promet un service peut refuser de le rendre, et h\ doctrine que nous combattons aboutit cependant ;'i < <■ résultat. Nous n'approuvons pas la solution contraire de certaines législations ( i. lÀeu de la restitution. 1159. Art. 1942. Si le contrat de dépôt désigne l<- lieu dans lequel la restitution doit être faite, le dépositaire est le nu d'y porter la chose déposée. S'il y a des frais de trans- port, ils sont à la charge du déposant. Art. 1043. Si le contrat ne désigne point le Heu de la resti- tution, elle doit être faite dans le lieu mime du dépôt. C'est- à-dire dans le lieu où se trouve la chose au moment de la restitution du dépôt ('). La tradition est en ce sens (v). Toutefois, si le dépositaire change ce lieu pour rendre la restitution plus onéreuse au déposant, l'art. 1943 cesse de s'appliquer (• . C'est ce (pie décidaient le droit romain (fi) et Pothier (7). 1 Contra Guillouard, n. L03. Espac/ne. C. civ., art. 1770. — Italie. C. civ., art. 1860. J) Durantoii.XVUI. n. 67; Troplong.n. 168; Du verrier, n. 488; Pont, f, n. 492j Guillouard, n. 102; Hue, XI, n: 249. ' I.. 12, § 1, D-, Depos.velcuulra, 16. 3. — Polliier, n. 57. Guillouard, n. 102; Hue, loc. cit. tsj Loc. cit. I1! Loc. cil. RI MBOI RSI MI.n l t't^ l>l il 591 Il . /• nus de lu restitution. 1160. L'art. 19i:{ porte que « s'il \ ;i des lï;iis dé trans- port, ils sont à la charge du déposant ». Cette solution esl fondée, comme le disait Polluer ' , sur l'idée que !<■ déposi- taire rond un service au déposanl el ne doil en équité sup- porter aucun frais. S IV. Obligations du déposant. I. Remboursement des dépenses et des perles. 1161. « La personne qui a fait h- dépôt est tenue de rem- » bourser au dépositaire les dépenses qu'il a faites pour la eon- » servation de la chose déposée, et de l'indemniser de toutes 1rs » pertes que le dépôt peut lui avoir oecasiojinées » (art. 1977 . Nous avons déjà fait remarquer que ces obligations, dans le système de la loi, n'enlèvent pas au dépôt son caractère unilatéral (2). On fonde le droit du dépositaire sur ce que le dépositaire a implicitement reçu mandat de faire les dépenses nécessaires ' . Cela est inexact; car il faudrait alors dire que le dépositaire n a aucune action s'il a fait les dépenses contre le gré du dépo- sant mandataire. On dit encore que le dépositaire doit être complètement indemnisé de ses dépenses. Cela est exact, mais, en principe, la loi considère qu'un créancier, qui s'abstient de réclamer sa dette, ne ferait aucun usage des fonds auxquels il a droit el c'est pour cette raison qu'elle lui refuse tout droit aux intérêts. 1162. Le dépositaire n'a aucune action pour les dépenses voluptuaires, il n'a que le droit de les enlever; c'est la solu- tion donnée d'une manière générale par l'art. 599 C. civ. '• . 1163. Si l'art. 1947 ne parle pas des dépenses utiles, ce n'est pas pour les exclure (:i); il serait, en effet, injuste que 1 N. 56. - Argou, II, liv. III. ch. XXXIII. p. 333. ' V. supra, n. 1178. 1 Laurent. XXVII, n. 128; Guillouard, n. 109. (*) Aubry et Rau, IV, p. 626, g 404, note 6: Guillouard, n. 111 ; Hue. Vf. n. 251. ,3) V. les autorités citées à la note suivante. — Contra Laurent, XX VII. n. 128; Hue, XI, n. 251. Ï592 DU DÉPÔT ET DL SÉQUESTRE le dépositaire n'eût aucune action pour leur remboursement; ce serait contraire à la règle que nul ne peut s'enrichir aux dépens d'autrui; nous tirons dans le même sens un argument a fortiori de l'art. 535, qui donne au possesseur, même de mauvaise foi, le droit de demander le remboursement de ses dépenses utiles; on peut également invoquer l'art. 1375, qui donne le même droit au gérant d'affaires, car le dépositaire, au moins dans le cas le plus usuel, celui où il n'a pas le droit d'user de la chose, ne poursuit évidemment, comme le gérant d'affaires, en faisant les dépenses utiles, qu'un but, celui de rendre service au déposant. Enfin, l'art. 1947, en disant (pie le dépositaire doit être indemnisé de toutes les dépenses que le dépôt lui a causées, peut s'appliquer à la question. En vain •lit-on que le déposant ne peut être, en équité, tenu de rem- bourser les dépenses qu'il n'a pas autorisées; les arguments que nous avons invoqués prouvent le contraire. Mais, conformément au droit commun, les dépenses utiles ne sont remboursées que pour la plus-value et non pas pour leur montant total (*). 1164. Par application du droit commun, les intérêts des impenses nécessaires ne devraient être dus qu'à partir de la demande en justice (*). Cependant on a soutenu (s) qu'ils courent dès le jour des dépenses. On se fonde sur l'art. 2001 , qui le décide ainsi pour les dépenses faites par le mandataire et à l'objection tirée de ce qu'un texte restrictif ne peut s'étendre, on répond que le dépositaire a agi comme manda- taire. Cela est douteux, comme nous l'avons montré. A raison du caractère restrictif de l'art. 2001, il est encore plus dan- gereux peut être d'en tirer un argument a fortiori, en disant que le dépositaire qui rend un service gratuit doit être traité plus favorablement que le mandataire. 1165. Quant aux impenses utiles, la question de savoir à partir de quel moment les intérêts en sont dus a paru à cer- M Duranton, XVIII, n. 73; Duvergier, n. 502; Arnlz, IV, n. 1417; Pont, I, n. 508; Guillouard, n. 112 (v. cep. n. 31). I») Pont, I, n. 509; Laurent. XXVII, n. 129. (*) Bruxelles, lo août 1855, Pasicr., 56. 2. 3». — Guillouard, n. 110 et 113, Hoc, XI, n. 251. REMBOI R8I mi. M DKS DÉP1 NSES -i'.KÈ tains auteurs dépendre du poinl d<- savoir si l'art. 2001 s'appli que ou non à la gestion d'affaires ('), el c'esi également notre avis. 1166. Si la restitution est faite au véritable propriétaire, alors c|iit' le dépôt a été l'ait par un tiers, le dépositaire pourra demander au véritable propriétaire l<- remboursement de ses impenses nécessaires (*) ; c'est le droit commun, car ee remboursement est accordé même au possesseur de mauvaise foi el repose sur le principe que nul ne peut s'enrichir aux dépens d autrui. Pour la même raison, il pourra demander au véritable propriétaire le remboursement de ses impenses jusqu'à con- currence de la plus value (8), mais jamais au-delà, même dans l'opinion qui lui accorde un droit au remboursement intégral contre le dépositaire (*). Il ne pourra demander au déposant le remboursement de ses impenses même nécessaires; nous avons, en effet, fondé l'action en remboursement sur le profit que les dépenses ont procuré au déposant; or ici, le déposant n'a tiré aucun profit des dépenses. La solution nous parait devoir être, en matière de dépen- ses nécessaires, différente dans l'opinion qui fait reposer sur un mandat du déposant le droit, au remboursement de ses dépenses. 1167. Le déposant doit aussi, d'après notre article, indem- niser le dépositaire de toutes les pertes que le dépôt lui a occasionnées (5), par exemple des pertes résultant des vices cachés dont la chose était atteinte et qui se sont communiqués à d'autres choses appartenant au dépositaire (";. Peu importe même que le déposant n'ait pas connu ces vices (7). (») Guillouard, n. 112. (») Guillouard, n. 31. (3) Guillouard, n. 31. (*) Guillouard, loc. cit. (B) Rivier, loc. cit. («} Guillouard. n. 113; Hue, XI, n. 251. (7) Uuc, loc. cit. Sor.rKTK. PRÊT, DÉPÔT. — 2e éd. 38 59i L>1 DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE Nous avons cité également le cas où le dépositaire laisse périr sa chose pour sauver celle du déposant ('). II. Obligation de payer le salaire. 1168. L'art. 1917 dit que le dépôt est essentiellement, mais non exclusivement gratuit, et cette simple remarque permet de concilier liés facilement ce texte avec l'art. 1928-2°, duquel il résulte que la stipulation d'un salaire par le dépositaire ne transforme pas nécessairement le dépôt en un louage de ser- vices argument des mois dépositaire, dépôt). Le salaire sti- pulé peut n'être qu'une faible compensation des soins qu'exige la garde du dépôt, et .dors le contrat conserve dans une certaine mesure le caractère d'un acte de bienfaisance; il ne cesse pas d'être un dépôt *). En d'autres termes, il est essen- tiel, pour qu'il y ait dépôt, qu'une pensée de bienfaisance anime le dépositaire, mais il n'est pas nécessaire qu'il agisse sous l'influence d'un mobile exclusivement désintéressé. Le salaire stipulé par le soi-disant dépositaire est-il l'équivalent exact du service qu'il rend en se chargeant de la garde de la chose? C'est d'un louage de services qu'il s'agit; peu importe que l'opération ait été qualifiée dépôt; car le nom que les parties donnent à un contrat n'en saurait changer la nature. .Mais, si le salaire stipulé par le dépositaire ne constitue qu'une rémunération tout à fait disproportionnée avec la valeur du service qu'il rend, le contrat ne cesse pas d'être un dépôt, c'est-à-dire un contrat de bienfaisance, pas plus qu'il ne perdrai! ce caractère si le déposant allouait volontaire- ment au dépositaire une gratification qu'il ne lui a pas pro- mise. Le code modifie ainsi la conception de Pothier, d'après lequel, si le dépositaire « exige quelque rétribution pour sa garde, le contrat n'est plus un contrat de bienfaisance, il ne renferme plus unservice d ami...c'estuncontratde louage par lequel le gardien loue sa garde pour le prix convenu ' V. nipra, a. I07l l. ,- Pont, I, n. 377: Aubry et liau. IV, p. GIS. § 101, note .">. _ »ii, II. liv. III. rli. XXXIII. p. 330. — V. cep. înfra, n. 1169. PAIEMENT l-l SALAIRK 595 Si Polhier s'exprime en termes aussi exclusifs, c'esl évidem- ment qu'il n'a pas songé a l'hypothèse où le gardien se fait promettre un salaire inférieur a la valeur .lu service rendu- il est impossible de nier qu'en pareille hypothèse le gardien oc rende encore « un servie,, d'ami ». Aussi ne peut-on qu'ap- prouver le code d'avoir rangé ce cas dans le dépôt. 1169. Nous repoussons donc une opinion qui compte d'assez nombreux partisans et d'après laquelle le moindre salaire stipulé au profit du dépositaire convertit le dépôt en louage d'ouvrage ('). Cette opinion invoque tout d'abord l'autorité de Pothier, mais Pothier, si on interprèle sainement sa pensée, lui est contraire; il n'a, nous l'avons montré, envisagé que l'hypo- thèse où le salaire répond au service rendu, puisqu'il dit qu en pareil cas il n'y a pas « service d'ami » ; Pothier décide donc implicitement que si le salaire est inférieur au prix du service, il y a bien dépôt, parce qu'il v a bien alors le service d ami. Du reste, plus loin (»)-, Pothier dit seulement que le dépôt salarié n'est « pas un vrai contrat de dépôt, mais un contrat gui lient plutôt du louage ». Ailleurs encore (■"•), il voit le trait caractéristique du louage d'ouvrage et" la différence entre ce contrat et le dépôt en ce que le locateur d'ouvrage s'engage non pas seulement à garder une chose, mais à « faire quelque chose pour l'utilité de celui qui a fait la tradition ... On peut interpréter de la même manière un passage où Domat (*) dit que « le dépôt doit être gratuit, autrement ce serait un louage >,. Au surplus, si Pothier était contraire à notre doctrine, toute la conclusion qu'il faudrait tirer de cette observation est que le code aurait innové, car l'art. 1928 sup- pose formellement qu'il a été « stipulé un salaire pour la garde du dépôt ». On a bien essayé de détruire la portée de eel article en le mettant en opposition avec l'art. 1917. mais, j] Riom, 30 mai 1881, D.. 82. 2. 38. - Duranton, XVIII, „. 20; Trônions "•Ils.; Duvergier, n. 409; Laurent, XXVII, „. 77 ; Pascau.I. Rev. cril XII, l*W, p. 184; Ciuillouard, n. 16, 17 et 55 : Hue XI n •>'!! : N. 31. ■] N. 9. Loc. cit., § 2. 596 DU DLP0T ET Dl SÉQUESTRE nous l'avons dit, si le dépôt, aux termes de celle dernière disposition, est essentiellement gratuit, cela signifie simple- ment qu'il suppose nécessairement une intention libérale de la part du dépositaire et cette intention est compatible avec la fixation d'un salaire modéré. Et si l'on veut consulter d'une manière complète les pré- cédents, on est conduit bien plus encore à adopter notre solution, car le droit romain distinguait, au point de vue de la responsabilité, le dépôt ordinaire et le dépôt salarié, celui où des honoraires ont été stipulés '/tierces accessit) ('). Le contrat, objecte-on encore, contient tous les éléments indiqués par l'art. 1710 ;i propos du contrat de louage d'ou- vrage; c'est une erreur: le contrat de louage exige, aux termes de ce texte. « un prix . el un salaire modéré n'est pas un prix. 1170. Le contrat par lequel, moyennant un salaire, un commerçant ou un industriel, qui en l'ait profession, garde certains objets n'esl pas un dépôt, mais un louage d'ou- vrage ' : meubles ou tapis conliés à un tapissier ou à un garde-meuble, fourrures confiées à un marchand de fourru- res, farines confiées à un fabricant. La principale question à laquelle donne naissance ce con- trat est celle des droits du locateur et du maître vis-à-vis d'un assureur 1171. Le contrat par lequel une personne ou un établisse- ment de crédit s'engage, moyennant un salaire modéré, à garder des fonds ou valeurs, peut être, comme nous l'avons montré, un dépôt 11 en est de même du contrai portant sur la garde de mar- chandises (5). Mais la cour de cassation a jugé avec raison qu'il faut voir un bail à loyer, et non un dépôt salarié, dans la convention . Ulpien, L. d. § 2, D.. Comm. rel contra. 13. 6. On oppose la L. i, §§ 8 et '.», Depos. vel contra, 16.3, mais ces lexles supposent la stipulation d'un prix équiva- lent au service. ' Cpr. Massigli, Rev. cit.. XVI. 1887, p. 430. V. supra, n. 1075 s. 1 V. supra, n. 1012. — Contra Guillouard, n. 16. i ; Contra < iuillouard, n. 16. SOLIDARITÉ l.Mlil. LES DÉPOSANTS -"»')7 ;ui\ termes de laquelle le propriétaire d'une maison s'eng ( \ recevoir des marchandises moyennant une somme fixée suivanl lu quantité do marchandises, suis contracter l'obli- gation de rendre les marchandises ni celle de les surtu 1172. En cas de dépôt irrégulier, le salaire « 1 1 1 *■ prévoit l'art. 1028 peut être stipulé sous forme d'intérêts des som- mes déposées [-). Il n'y a là, en effet, qu'un mode spécial de calcul du salaire, lequel est proportionnel aux sommes dépo- sées, et ce mode de calcul n'a rien que de très naturel, les difficultés de la surveillance croissant avec le montant de la somme déposée. Même alors que l'intérêt est peu élevé, il n'y a pas nécessai- rement dépôt; l'intérêt du prèl peut être peu élevé, puisqu'il [•eut même ne pas exister [*). Nous avons vu quel critérium il faut employer à cet égard (*). 1173. Le paiement du salaire repose sur la convention qui a fixé ce salaire. Le véritable propriétaire n'en est donc pas tenu, alors même que la restitution lui est faite au lieu d'être faite au déposant, puisqu'il n'a pas participé à cette conven- tion; il serait d'ailleurs inique de lui réclamer le paiement dune garde dont il n'a pas profité. En revanche, le salaire peut, en toute hypothèse, être réclamé au déposant non propriétaire. III. Solidarité entre les déposants. 1174. Les déposants ne sont pas tenus solidairement des obligations qu'ils contractent vis-à-vis du dépositaire (3), car la solidarité ne se présume pas et toutes les dettes de som- mes d'argent se divisent entre les débiteurs. ') Cass., 23janv. 1884, S., 85. 1. 60. — Contra Riom, 30 mai 1881, D..82. 2. 38. — Pascaud, Reo. ait., XII, 1883, p. 184. ! Wabl, Sole. S., 9! 1. v!7i et F.j . doc t. de la jurigpr. d'enreg., Hev. c/H.. XXI, 1892, p. 1%. Trib. civ. Remiremont. 20 mars 1880, S., 81. 2. 221. - Wahl. Note, S., 91. 1. ■>!!. (*) V. supra, n. 1094 s. 5 liuillouard, n. 171; Hue, XI. n. 232. 598 DL DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE Il s'est élevé quelques difficultés à cet égard pour le séques- tre, où on a invoqué en sens contraire certains arguments qui pourraient être également opposés ici à notre solution ' . IV. amanites de l'exécution des obligations du déposant. 1175. Pour garantir l'exécution des diverses obligations dont le déposant est tenu à raison du dépôt, la loi accorde au dépositaire un droit de rétention sut' la chose déposée (-' . Il est consacré par l'art. 1948, ainsi conçu : « Le deposi- » taire peut retenir le dépôt jusqu'à l'entier paiement de ce » qui lui est dû à raison du dépôt ». Le dépositaire peut notamment retenir la chose pour ce qui lui est dû pour son salaire. Ainsi le banquier, dépositaire de titres que les proprié- taires le chargent de remettre à une société, ne peut être forcé de les remettre a celte dernière avant le paiement de ses droits de commission (8). Mais le droit de retenir la chose déposée n'est accordé au dépositaire, comme le montrent les termes de l'art. 1958, que pour les créances résultant du dépôt ('). Il est donc certain (pie le dépositaire qui a restitué les choses déposées ne peut, pour ce qui lui est dû a l'occasion de ces choses, retenir d'autres choses qui lui ont été égale- ment déposées (*). 1 \ . infra, n. 1265. L'art. 113 do la coût, de Paris accordait ce droit de rétention à l'holelier sur les effets du voyageur. — Le droit commun allemand refuse au dépositaire le droit de rétention et le code civil n'en fait pas mention, mais le code général prussien lui accordait ce même droit. La plupart des autres codes le lui accordent. — Has- Canada, C civ., art. 1812; Espagne, C. ci v., art. 1780; Hollande, C. civ., art. I7t>('>: Italie, C. civ., art. 1863; Uruguay, C. civ., art. 2*2 iT>. (3) Contra Paris, 13 avril 1892, D., 93. 2. 228 (cet arrêt prétend que la commis- sion n'est pas due pour le dépôt, c'est une erreur de fait;. — Hue, XI, n. 252 (même observation). • Paris, 18déc. 188i, D. Hép. Suppl., \° Dépôt, n. 50. — Aix, 24 fév. 1887, lUill. d'Aix, 87. 373. — Trib. civ. Cbambéry, 1«- août 1888, Mon. jud. Lyon, 18 oct. 1888 (aubergiste). — Trib. civ. Chambéry, 6 mars 1889, Mon. jud. Lyon. 27 avril 1889 (aubergiste). *) Rouen, 1« avril 1892, Gaz. Pal., 93. 1. 2' p.. i7. — Rouen, 24 mai 1892, Rec. de Rouen. 92. 1. 154. GARANTIES d'eXÉi l NON 599 Il en est ainsi même si Ions ces objets on! été J«j>« »s«'*s en même temps ('). Mais le dépositaire qui a restitué une partie des objets déposés peut retenir le surplus, même pour les Irais qu'il a faits sur les objets restitués (*). 1176. On admet que le droit de rétention est réel, c'est-à- dire ojqxisa Me non seulement au déposant, mais aussi aux tiers, par exemple à l'acquéreur de la chose déposée ou au créancier hypothécaire du déposant (*) ou à son créancier chirographaire (3). 1177. Quoique l'art. 1948 ne fasse aucune distinction, le droit de rétention n'existe que contre le déposant ou ses repré- sentants ; il ne peut être opposé au véritable propriétaire réclamant la restitution du dépôt fait par un tiers. En effet, l'art. 1948 sert de sanction aux dispositions qui le précèdent, et qui visent exclusivement les rapports du dépositaire avec le déposant. D'un autre côté, le droit de rétention est, d'après nous, le droit étroit et ne peut résulter que d'un texte formel. Aussi les auteurs qui accordent au dépositaire un droit de rétention contre le véritable propriétaire ne se fondent-ils pas sur l'art. 1948, mais bien sur une théorie générale qui n'est pas la nôtre et d'après laquelle le droit de rétention peut être exercé sur une chose pour toutes les dépenses faites à l'occa- sion de cette chose (6). Dans celte opinion, le dépositaire peut opposer le droit de rétention au véritable propriétaire pour ses impenses (7). Mais il ne peut l'opposer pour son salaire, car ce n'est pas là une dépense faite sur la chose ; au surplus, il serait singulier 1 Rouen, 13 avril 1892, Rc. du Havre. 92. 2. 47. (*) Gênes, 20 fév. 1885, cilé par Franchi. A»n. du dr. corn., I, 1886-87, Docte. p. 5i. — Le contraire a cependant été décidé pour des objets divisibles, comme des sacs de grains. — Rouen, 24 mai 1892, Rec. de Rouen, 92. 1. 154. (») Cass., 10 déc. 1850, S., 51. 1. 243, D.. 5i. 1. 399. — Cass., 8 déc. 1868, S.. ti9. 1. 272, D., 69. 1. 77. — Lyon, 27 août 1849. S., 49. 2. 557, D., 50. 2. 14. — Pont, I, u. 511; Aubry et Rau, IV. p. 627, J 404, note i: Guillouard, n. 115. — Contra Hue, XI, n. 252. (4) V. pour et contre cette opinion le> auteurs cités à la note précédente. (5) Mêmes auteurs. — Hue, loc. cil. (6) Guillouard, n. 31. ") Guillouard, loc. cil . 600 DU DÉPÔT ET Dl SÉQUESTRE (juc le véritable propriétaire pûl être tenu, même indirecte- mont, d'une dette qui ne lui a causé aucun profit. 1178. Le droit de rétention est, comme son nom l'indique, subordonné à la possession de la chose (*). 1179. Il ne permet pas au dépositaire de se payer par pré- férence sur le prix de la vente de l'objet déposé, même s'il provoque cette vente avec l'autorisation de la juslice (2). 1180. Indépendamment de ce droit de rétention, le dépo- sitaire a un privilège sur la chose déposée pour les impenses de conservation ^art. 2102-3°), c'est-à-dire pour les dépenses nécessaires^3;. Le privilège n'existe pas pour les dépenses utiles (') ou les pertes faites à l'occasion de la chose (5). Ce privilège a sur le droit de rétention la supériorité de n'être pas subordonné à la possession de la chose et de ne pas se perdre en cas de vente de la chose aux enchères sur la réquisition du dépositaire. j; V. Du dépôt volontaire en droit international. 1181. Les règles du droit international relatives au dépôt sont I application du droit commun. La capacité de chaque partie est réglée par sa loi nationale, la forme du contrat par le lieu ou il est fait, la preuve par la loi du lieu où l'exé- tion esl demandée (6). Quant à la manière dont se forme le dépôt et aux obliga- tions des parties, on leur appliquera, conformément au droit commun, la loi nationale des parties, si les parties appartien- ') Troplong, d. 5;. 5 404, noie G ; Col met de San terre, VIII, n. 159 bis, II et III ; G-uillouard, n. 1 1G. 1 Guillouard, n. 117. • înillouard, n. 117. (•) Albéric Rotin, Princ. du dr. int. privé, III. n. 1359. — Cependant cet auteur dit ijne l'application des art. 1925. al. 2 et 192G, reposant sur l'équité, doit être laite en toute hypolh<'-»e par les tribunaux du pays où ces articles sont en vigueur. hïl'nl M • KSSAini 601 iicut ;'i la môme nationalité et, dans le cas contraire, la loi du lieu où le contrat a été passé ' . Cependant certains auteurs ge réfèrent dans ce dernier cas à la loi du domicile «lu dépo- sitaire, par la raison que le dépôt « comporte la carde de la chose, fait d'une certaine durée qui doit se réaliser au lieu du domicile du débiteur » (2); mais d'une part, la continuité de l'obligation n'a rien de spécial au dépôt; d'autre part, ou ne voit pas pourquoi elle conduirait à écarter les principes; enfin ce n'est pas toujours au domicile du dépositaire que doit avoir lieu la garde. SECTION V DU DÉPÔT NÉCESSAIRE 1182. Le dépôt est volontaire, lorsque le déposant a pu choisir en toute liberté la personne du dépositaire. Au cas où son choix a été dicté, sinon imposé par les circonstances, on est dans l'hypolbèse du dépôt nécessaire, l.a loi établit assez mal cette opposition : « Le dépôt volontaire se forme par le consentement réciproque de la jtersonne qui fait le dépôt et o de celle qui le reçoit >•, nous a dit l'art. 11)21 ; et on lit dans l'art. 1949 : « Le dé put nécessaire est celui quia été forcé par - quelque accident, tel qu'un incendie, une ruine, un pillage, " an naufrage ou autre événement imprévu ». Il semblerait résulter de la combinaison de ces deux textes que le consen- tement des parties, essentiel à la formation du dépôt volon- taire, ne l'est plus pour la formation du dépôt nécessaire et, en effet, les travaux préparatoires qualifient le dépôt néces- saire de quasi-contrat (:i) et certains auteurs ont. adopté cette manière de voir(*). Mais telle n'a pu être la pensée du légis- lateur. Le dépôt ne cesse pas d'être un contrat, quand il de- vient nécessaire à raison des circonstances; or il n'y a pas de Vincent et Penaud, Dicl. de dr. int., v° Dépôt, n. 1. ' Ilolin, op. cit., III, n. 1357 et 1358. — Pour les obligations de l'héritier du dépositaire qui a vendu de bonne foi la chose dont il ignorait le dépôt, il applique la loi qui règle la succession (n. 1360 . 1 Kxposé des motifs de Kéal. iïenel, XIV. p. 507. *• Troplong, n. 208. 002 M DÉPÔT ET 1)1 SÉQUESTRE coq Irai sans consentement art. 1108) ('). Tout ce que la loi veut dire, c'est que le dépôt nécessaire est celui qui est im- posé par les circonstances et que le déposant peut être oblige, au cas de dépôt nécessaire, de confier le dépôt à la première personne qui consentira à son charger. Aussi l'art. 1917 dit- il en termes généraux que le dépôt est un contrat et l'art. 1951 soumet-il le dépôt nécessaire aux règles du dépôt vo- lontaire. Les circonstances qui donnent naissance au dépôt néces- saire sont presque toujours malheureuses, et c'est pourquoi la loi romaine désignait ce dépôt sous la dénomination de deposilum miserahite. Voici les principales hypothèses <>ù un dépôt est considéré comme nécessaire : L'incendie (!) ; Le pillage Le naufrage (*); La ruine d'une maison Ces quatre événements sont indiqués par l'art 1949 qui, d'après ses termes mêmes, n'a rien de limitatif (6). Ajoutons : L'invasion L'émeute 9 ; L'inondation :' : Un tremblement de terre '" . 1183. On a considéré comme nécessaire le dépôt de meu- bles fait à son mari par une femme séparée de biens, en se fondant sur ce que la femme est tenue d'habiter avec son ■ Duvergier, n. 509; Pont, I, n. 515: Aubry et ilau, IV, p. Ùil, < 405, noie ! : Laurent. XXVII, n. 132; Guiilouard, n. 123; lluc, VI, n. 253. e I- I. §2 et:;. 1».. Depos. vel contra, M. .'!. — Pothicr, n. 75; Duve Rjvier, loc. cit. *j Polbier, n. 75: Kivier, loc. rit. (*) Polbier, n. 75; Rivier, loc. cit. Polbier, n. ^5: Duvergier, n Troplctog, 11.207; Laurent. XXVII, n. 134; Guiilouard, n. 122 t'i Guiilouard, n. 122. (*) Guiilouard, n. 122. lillouard, n. 122. ['•, Guiilouard. n. 122. dépôi kéi essai rk 603 niari ' . Mais cela esl évidemment inadmissible; ce n'est pas la un accident ou ///* événement imprévu, el, d'autre part, lu femme esl libre de se choisir un autre dépositaire. Xous pensons également qu'il n'\ ;i pas dépôt nécessaire dans le dépôt, ctîectué par une personne qui entre dans un asile ou dans un établissement hospitalier, de ses effets ou de son argenl entre !<•> mains du directeur ou de l'économe Ici encore, il n'y pas d'événement imprévu forçant le dépo- sant à remettre ces objets au premier venu. 1184. Le dépôt n'est pas nécessaire par cela seul que le déposant a éprouvé une grande difficulté à trouver un dépo- sitaire (:i). Il ne suffit même pas, pour que le dépôt soit nécessaire, qu'un danger puisse être prévu; il faut que ce danger soit assez pressant pour que le déposant ait besoin de faire le dépôt et n'ait pas le temps de trouver un dépositaire (*). 1185. La précipitation avec laquelle il faut agir au cas de dépôt nécessaire ne permet pas au déposant de songer à se procurer une preuve écrite du dépôt. C'est la raison pour laquelle (5) l'art. 1950, dérogeant sur ce point aux règles du droit commun, dispose, à l'exemple de l'ancien droit (6) : « La preuve par témoins peut rire reçue pour le dépôt néces- » saire, même quand il s'agit d'une râleur au-dessus de cent » cinquante francs ». C'est une application de l'art. 1348-2". Il y a lieu de remarquer que la preuve testimoniale est admis- sible, non seulement pour établir le fait du dépôt, mais aussi pour prouver la nature et la valeur des choses déposées. Xous examinerons d'une manière plus détaillée les ques- tions de preuve à propos du dépôt d'hôtellerie (7). 1') Trib. civ. Valence, y mai 1888, Mai. jud. Lyon, 13 juil. 18KS. =) Conlra Lyon, 23 juil. 1897. D., 97. 2. 244. (3) Cass., 12 août 1848, S., 49. 1. 298, D., i8. 5. 99. — Guillouard, n. 29; Hue. Xf, n. 253. (') Cass., 17 mai 1818. D. Rép., v° Dépùl, n. 150. — Cass., 12 aoûl 1848, S., i9. 1. 298, D., 48. 5. 99. — Rennes, 2 août 1819, S. chr.. D. Rép., loc. cit. — Trib. eiv. Chartres, 2 juil. 1830, D. Rép.. loc. cil. — Guillouard, n. 122. (B) Polhier, n. 7G; Guillouard, n. 124 et 125. («) Ordonnance de 1067. tit XX,ari. 3. — Argou, liv. III, ch. XXXIII, H, p. 333. H V. >n/Vfl, n. 1229 s. 601 DO DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE 1186. « Le dépôt nécessaire est d'ailleurs régi par toutes les règles précédemment énoncées » (art. 1951). SECTION VI M DÉPÔT D'HÔTELLERIE S 1. Motifs de la responsabilité spéciale. Droit comparé. 1187. Pothier donne le nom de dépôt d'hôtellerie aux dé- pôts que les voyageurs l'ont de leurs effets dans les hôtelleries. L'art. 1952 assimile le dépôt d'hôtellerie au dépôt néces- saire. <■ Les aubergistes <>u hôteliers, sont responsables, commr dépositaires, >rres d'effets doit être regardé » comme un dépôt nécessaire ». En réalité, non seulement il no s'agit pas d'un dépôt néces- saire, il ne s 'agil même pas d'un dépôt, puisque la responsa- bilité de l'aubergiste n'est pas subordonnée à une remise faite entre ses mains et que. d'autre part, ce dépôt n'a rien de gra- tuit de la part de l'aubergiste. Aussi le droil romain ne rangeait-il pas le dépôt d'hôtelle- rie au nombre des dépôts. Il donnait contre les hôteliers nautée, ruuponcs au t. stabu- larii une action . M) s. PÔ1 D ii'iii.i.i.i.nii. 605 dépôts, [loin ,iit être prouvé par témoins '). On donnait comme motif de cette solution la nécessité où se trouvaient les parti culiers de s'adresser ;i ces dépositaires (*)", le peu de confiant qu'on avait en eux (') et l'usage établi de ne pus demander des reçus aux aubergistes (*). L'ordonnance de 1667 (lit. 20, art. \ consacra cette solution en ce qui concerne les « dépôts faits en logeant dans une bôtellerie entre les mains de l'hôte ou de l'hôtesse », en per- mettant ;«ux juges d'admettre les preuves qu'ils jugeraient utiles « suivant la qualité des personnes et les circonstances du fait ». Des mesures de police complétèrent cette règle et vinrent attester en même temps le peu de confiance qu'on avait dans les hôteliers. Lue ordonnance de police du 12 lévrier 1367 leur défendait d'ouvrir leur porte le matin avant d'avoir de- mandé à leurs hôtes s'ils n'avaient rien perdu durant la nuit précédente (r< . 1 189. Aujourd'hui que* les aubergistes et hôteliers sont placés sous une surveillance étroite de la police et qu'ils ne méritent plus, au reste, la défiance dont ils étaient environ- nés autrefois, ce motif a disparu (,;). Mais il en-est un autre (jui justifie la disposition de l'art. 1952, c'est que, les hôleU et auberges étant ouverts à tout le monde, les vols y sont faciles et ne peuvent être évités que par les constantes pré- cautions de l'aubergiste (7 . Les législations étrangères suivent en général, sur la res- ponsabilité des aubergistes, les principes du droit français (8 . (') Arrêt du 25 oct. 1584, cité par Louct. let. D, n. 33. — Argon, II, liv. 111. cli. XXXIII, p. 334; Danty sur Boiceau, 7V. de la preuve par témoins en matiè •■ civile, add. sur le cl). III, n. 18 et 19, d'api es lequel la jurisprudence de tout royaume était en ce sens. (*) Danty, /;J. comprend certainement tous les objets a son usage que le muet. — Autriche. Le dépôt d'hôtellerie est soumis aux règles du dépôt ordi- naire. — Angleterre. L'hôtelier esl responsable des bagages des voyageurs 26 et 27 Vict. c. 41). Il n'est pas responsable des bagages laissés ou déposés dans un café annexé à l'hôtel [Law 'limes Hep., N. .-.. 77 i ou lai -ses dans l'hôtel par une per- sonne qui n'y séjourne pas el se rend seulcmentdana un café annexe (Haute-Cour, Banc de la Heine. 22 nov. 1883, Journ. dr. int., XIII, 1886, p. 117. . Du res e, l 'hôtelier esl responsable, si brève que soil la durée de ses rapports avec le voya- geur. Bennelt c. Mellor, 5, Times Hep.. 273. L'act sur les aubergistes '26 el 27 Vict. c. il) exempte l'aubergiste de touie responsabilité pour les effets d'une va- leur excédant 30 livres, à condition duo avis dans les chambres, et sauf la faute uu la • de l'aubergiste ou de ses serviteurs. — Bas-Canada. <7. civ., art. 1677 el 1816. Responsabilité ordinaire, mais le voyageur est cru sur son serinent pour la valeur en ce qui concerne ses bagages el à condition qu'ils soient « d'une valeur modérée el convenable à la condition du voyageur ». Ceci s'applique à ceux qui tiennent auberge, maison de pension, et hôtellerie arl. 1815). La respon- sabilité comprend le t'ait « des étrangers allant et venant dans la maison », sauf, dans ce dernier cas, si le dommage est arrivé par la négligence ou l'incurie de la personne qui en réclame le moulant. — Expagne. (7. civ., art. 178:!. Le dépôt dans les auberges et hôtelleries est réputé nécessaire, mais à la condition que les aubergistes ou leurs préposés soient avertis de l'introduction des effets dans leur maison et que le* voyageurs observent les précautions qui leur sont recom- mandées en vue de la garde. — Etals-Unis. Même responsabilité de l'aubergiste qu'en France. Kent. Commenlaries, II. p. 595 et les décisions citées infra, pas- sim; l'aubergiste y échappe, dans l'Elat de New- York, par un avis de déposer les objets entre ses mair. s statut de 1*57 . Y. appel New-York, nov. 1883, Journ. dr. int., XI, lSH-i, p. 530. Dans l'Etat de New-York, le tenancier d'une maison garnie n'est pas soumis à la responsabilité exceptionnelle. Appel New-York, nov. 1883, précité. Maine. L'aubergiste est responsable « pour les habits, objets por- tés sur la personne, d'une valeur raisonnable, bagage personnel et argent né- cessaire pour les dépenses du voyage et l'usage personnel •> (Statuts révi-e-. eh. XXVII, art. 7). II est responsable pour la montre et aux autres bijoux personnels, i .. supr. Maine, 3 juin 1885, Journ. dr. int., XI Y, 1887, p. 755. Michigan. Même responsabilité qu'en l-'rance; au-dessus d'un certain chiffre, obligation pour le voya- geur de déclarer les bagages. Décidé que cette déclaration n'est pas nécessaire pour les marchands en ce qui concerne les objets de leur commerce. C. sup. Michigan, 18 juin 1884, Journ. dr. int., XII, 1885, p. 578. — Italie. L'art. 1866 C. civ. repro- duit à peu près les termes de notre ai t. 195*2. — Monaco. Les art. 1791 et 1792 I .. civ. de 1889 reproduisent les art. 1952 et 1053. Le code de 1818 contenait une limitation analogue à celle de notre loi de 1889, mais cette limitation a disparu. V. de Rolland, Journ. dr. in/.. XX, 1893, p. 4 77> '* . Décidé que l'aubergiste est res- ponsable des objets qui ne lui ont été ni con'iés ni déclarés, pourvu que ces objets ne soient pas d une valeur excessive étant donné la condition el la fortune du DÉl'ôl i» ih'h ii i.i un (107 voyageur transporte avec lui ' : linge, vêtements, etc., même les bijoux '). Il comprend ;uissi l'argent comptant ' . les billots de banque et les autres litres au porteur que le voya geur apporte dans l'hôtellerie. Cela était autrefois admis sans aucune difficulté et cela résulte implicitement de la loi du 18 avril 1889, qui, en pareil cas. se contente de limiter le montant de la responsabilité ('). L'art. 1952 s'applique également aux marchandises (jue le voyageur emporte avec lui (5). 1191. Mais on ne peut considérer comme effets les che- vaux ou autres animaux et les voitures du voyageur (6). Le sens du mot est opposé à celte extension; du reste, la loi parle d'effets apportés et on ne peut dire que le voyageur ap- porte sa voiture et ses chevaux ; enfin, comme la disposition de l'art. 1952 est exceptionnelle, elle ne peut être étendue. La solution contraire est cependant exacte clans l'opinion qui applique l'art. 1932 aux locateurs d'écuries (T). 1192. Dans tous les cas, à raison des règles générales, l'au- bergiste répond de l'accident survenu dans son hôtel au che- val d'un voyageur, lorsque la cause de cet accident est incon- nue ou si l'hôtelier ne démontre pas qu'il n'est pas en faute i8 . voyageur. Trib. sup. Monaco, 6 mai et 11 nov. 1892, Joui», dr. inl.. XX, 1893, p. 154. — Suisse. G. (éd., art. 486. L'aubergiste est responsable, sauf s'il prouve que le dommage est imputable soit au voyageur lui-même, soit à l'une des personnes qui l'accompagnent ou qui sont à son service, ou qu'il résulte d'un événement de force majeure ou de la nature même de la chose déposée ». (') Guillouard, n. 142; Hue, XI, n. 261. -) Rouen, 18 juill. 1889, <ïaz. Pal., 90. 1. 125 (et un grand nombre de décisions citées infra dans les notes suivantes). — Hue, XI, n. 261. [*J Paris, 7 mai 1838, D. liép.. \° Dépôt, n. 174. — Laurent. XXVII, n. 155; Guillouard, n. 142; Hue, toc. cil. (') V. infra, n. 1225. [* Guillouard, n. 142. (6) Contra Hennés, 2b' déc. 1833, S., 34. 2. 286. — Besancon, 21 mai 18c)'.1, D., 59. 2. 166. — Trib. civ. Lyon, 23 déc. 1865, D., 66. 3. 40. — Trib. civ. Orange, 5 déc. 1890, Rec. proc. civ., 91. 154. — Guillouard, n. 1.2: Hue, XI, n. 261. 7j V. infra, n. 1245. (8) Trib. corn. Saint Xazaire, 5 janv. 1894, l'uml. franc., 95. 2. 104. — Trib. civ. Toulouse, 2 juin 1894, Gaz. Trib., 24 août 1894. — Comme en toute matière, l'im- prudence du voyageur atténue la responsabilité de l'hôtelier. — Trib. com. Sain!- Nazaire, 5 janv. 1894, précité (voyageur qui ne veille pas à ce que sa jument soit placée loin d'un autre de ses chevaux, .equel est difficile). 008 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE 1193. Mais les objets "<•>! l'ait précéder h lïiolrl ' 1197. Dans notre ancien droit on pouvait soutenir que l'aubergiste n'était responsable des effets apportés par les voyageurs dans l'hôtellerie qu'autant que le dépôt en avait été fait entre ses mains. Cela résultait de l'ord. de 1GG7. qui parlait exclusivement du dépôt fait entre les mains de l'hôte ou de l'hôtesse, et telle était l'opinion de Pothier (*). Cependant la jurisprudence s'était prononcée en sens contraire \3). On admettait que si L'aubergiste n'avait pas reçu entre ses mains, avec désignation détaillée. les objets précieux, l'auber- giste n'en était pas responsable, à cause de la dii'liculté qu'il y avait à en apprécier l'existence et la valeur ('). 1 198. Au contraire, aujourd'hui, L'aubergiste est responsable même des effets qui n'ont pas été déposés entre ses mains (s). Car une disposition en ce sens du projet a été repoussée sur observations suivantes du tribunal : « fl a paru beaucoup trop rigoureux d'assujettir les aubergistes ou hôteliers, sans distinguer aucune circonstance et sans excepter aucun cas, à la responsabilité de tout ce qu'un voyageur aurait apporté chez eux, quand même ce serait des objets du plus léger vo- lume et du plus grand prix et que même le voyageur n'aurait prévenu personne. Celte extrême rigueur deviendrait quel- quefois une grande injustice et, comme il est impossible que 1 ) Trib. sup. Berlin, 30 sept. 1875, Arc/tir /'. Rechlsfaelle, XCIV, p. 181, Journ. dr. int., IV, 1877, p. 239. — Flach, Journ. dr. int., IV, 1877, p. 240. (») N. 79. (s) Parlement de Paris, 14 août 1582, cité par Cbarondas le Caron, Ubs. du droit français, 1614, p. 530. — Danty sur Poiceau, op. cit., addit. sur le e!i. III, n. 21. (*) Arrêts des 27 août 1677 et 3 fév. 1687, cités par Merlin, Rép.. v° Hôtellerie, § 1; Deuisart, v° Aubergiste, § 3, n. 3. («)Cass , 11 mai 1846, S., 46 1. 36i. — Paris, 15 sept. 1808, S. chr. — Paris, 14 mai 1839, S., 39. 2. 264. — Amiens, 4 déc. 1846, S., 17. 2. 237, D., 47. 2. 76. — Rouen, 4 fév. 1847, S., 48. 2. 152. — Rouen, 18 juil. 18S9. Gaz. Pal., 90. 1. 125.— Trib. coin. Seine, 27 oct. 1898, Loi, 30 déc. 1898. — Trib. paix Hennés, 19 août 1893, Rrv.just. paix,9i. 210. — Cass. Belgique, 26 nov. 1896, D.,98.2. 5, Pasicr., 97. 1. 24. — Troplông, n. 207 et 2)8; Duvergier, n. 515; Arntz, IV, n. 1 124; Pont, I, n.530 s.; Aubry et Ilau, IV, p. 628, § 406, noies 5et 6; Guillouard, n. 1 ii ; Hue. XI, n. 260. Société, p:ikt, dépôt. — 2'' éd. 39 610 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE la loi prévoie ces différents cas, elle doit se contenter d'éta- blir le principe général et doit laisser le reste à l'arbitrage du juge » ('). C'est à la suite de ces observations qu'on supprima l'art. 39 du projet, lequel disposait : « L'hôtelier ou aubergiste est res- ponsable des effets apportés par le voyageur, encore qu'ils n'aient point été remis à sa garde personnelle ». La comparaison entre les termes de l'art. 1932 et ceux de l'ordonnance de 1667 conduit à la même solution, surtout si l'on songe que sous l'empire de l'ordonnance de 1667 et mal- gré ses expressions très catégoriques en apparence, la juris- prudence ne restreignait pas la responsabilité de l'aubergiste au cas d'un dépôt l'ait entre ses mains. Enfin, notre solution est seule d'accord avec les motifs dont s'est inspiré l'art. 19.'i2 : c'est que, par sa destination, un hôtel doit être ouvert à tout moment et être l'objet d'une sur- veillance incessante qui garantisse la sécurité de touteequi s'y trouve. L'aubergiste est donc responsable des effets déposés dans un endroit quelconque de son auberge, par exemple, comme cela a été jugé dans l'ancien droit, dans une écurie (*). L'aubergiste est responsable également des effets déposés dansla chambre du voyageur sansavoirpassé parsesmains(8). Il est même responsable des effets déposés en dehors de l'auberge, dans une remise de cette auberge ou dans un en- droit où l'aubergiste a coutume de faire placer les effets des voyageurs 1199. Toutefois, il ne suffit pas, pour que l'hôtelier soit responsable dans les termes de l'art. 19o2, ni même pour 1 Fenet, XIV. p. ,. • Parlement de Toulouse, 21 fév. 1584, Maynard, Arrêts, cli. LXXXIII, n. s. (3) Cass. Belgique, 26 nov. 1896, précité. — C'est tout à fait à tort qu'on a décidé <|\ie. le voyageur d'un wagon-lit gardant ses bagages à enté de lui, la compagnie dts wagons-lits n'en est pas responsable. — Oa-s. civ., 3 fév. 1896, S., 96. 1. 165, D., '.,s. 1. 502. I>ans une auberge, il est certain que l'hôtelier est responsable des bagages volés dans la chambre du voyageur; par suite si on assimile la com- pagaie des wagons-lits à un aubergiste (V. infra, n. 1246), elle est responsable des bagages gardés par le voyageur à côté de lui. - Nîmes, 29 janv. L896, Mon. jnd. Midi, 16 fév. 1806. — Trib. civ. Alais, 10 juin 1895, Loi, 23 déc. 1895. DÉPÔT u inYl i il : un. (il I qu'il encoure aucune responsabilité, que les < • I i « • t m «lit voya- geur aienl été introduits «lins l'hôtel : il faul qu'ils '"aient été avec le consentement de l'hôtelier ou de l'un de ses prépo- . D'abord, on ne comprendrait pas que l'hôtelier fût tenu de surveiller «les ell'ets dont il ne connall même pas |V\istence dans son hôtel. Ensuite la responsabilité de l'hôte- lier est une responsabilité essentiellement contractuelle, et, dans l'hypothèse que nous envisageons, il n'y a pas de contrat. 1200. Si le voyageur arrive en état d'ébriété, l'hôtelier n'en est pas moins responsable de ses bagages (-), car le dé- pôt ne s'en est pas moins effectué par le consentement des deux parties. 1201. L'aubergiste ne répond pas, dans les termes de l'art. 1952, des ell'ets déposés par un voyageur qui loge ailleurs (3), car l'art. 1952 parle seulement du voyageur qui loge chez l'aubergiste auquel sont confiés ses ell'ets. On conçoit, d'ail- leurs, que l'aubergiste n'exerce pas une surveillance plus droite que tout autre dépositaire sur les objets que lui confie un voyageur logeant ailleurs. Toutefois il en est autrement pour le temps qui s'écoule entre le moment où les bagages sont confiés à un préposé de l'aubergiste (par exemple au conducteur de son omnibus et le moment où le voyageur, ne pouvant trouver place dans l'auberge ou renonçant à y loger, la quitte (*). Car durant ce temps le voyageur devait loger chez l'aubergiste. 1202. L'art. 195:2 ne s'applique donc pas aux objets confiés à un hôtelier par un voyageur qui quitte l'hôtel (5) ; cette hypo- thèse est en dehors du texte, qui y est également étranger par son esprit ; car le voyageur, s'il lui est difficile de se sé- (') Contra Danty. loc. cil. — Guilluuard. n. 1 ii. C. stip. Micbigan, 18 juin 1884, Journ. dr. int., XII, 1885, p. : (5) Trib. paix Libourne, 26 oct. 1895, Rec. Bordeaux, 96. 3. 8 i bicyclette déposée dans une écurie). — Conlra Metz, 17 avril 1812, S. chr., D. Rép., v° Dépôt, n. 160. — Trib. civ. Orange. 5 déc. 1890, Bec. proc. civ., 91. 154. — Flach, Journ. dr. int.. IV, 1*7 7. p. 240. (*) Rennes, 26 déc. 1833, 1». Rép., v° Dépôt, n. 170. — Trib. civ. Bruxelles, 10 juin L876, l'asicr., 96. 3. 234. — Hue, XI. n. 260. (5) Cass., 4 juillet 1814, S. chr. — Cass., 10 janv. 1832, S.. 32. 1. 91. — Guil- Juuard, n. lil : Hue. XI, n. 258 : Kayscr, loc. cit. — Contra Flach, Journ. dr. int.. IV. 1877, p. 240. (il 2 DU DEPOT ET DU SÉQUESTRE parer de ses effets pendant son séjour à l'hôtel, peut, lors de son départ, les confier aussi bien à toute autre personne qu'à l'aubergiste. Aussi assimilerons-nous à cette hypothèse celle du voya- geur qui s'absente momentanément ('). 1203. Il en est de même de l'hypothèse où une personne confie des objets à un hôtelier pour être remis à un tiers qui descendra ultérieurement dans l'hôtel ('). 1204. Nous montrerons plus loin que, pour certains objets précieux, la responsabilité de l'aubergiste est limitée s'ils n'ont pas été remis entre ses mains (!). ^ IV. Cas d'application de la responsabilité de l'aahcr- giste et personnes dont il est responsable. 1205. Le dépositaire, même quand le dépôt est nécessaire, ne répond en principe que de la faute qu'il ne commettrait pas dans ses propres affaires, cidpalevis in concreto (art. 19:27 . C'est une exception aux règles du droit commun, d'après les- quelles le débiteur, obligé de veiller à la conservation d'une chose, est tenu de la faute que ne commettrait pas un bon père de famille, de la cittpa levis in abstracto (art. 1 137). Mai^ nous savons que cette exception cesse elle-même de s'appli- quer, et que par conséquent on rentre dans la règle, lorsque le dépositaire a stipulé un salaire (art. 11)28-2°) ('). C'est pré- cisément le cas de l'aubergiste, qui ne fait rien gratuitement pour les voyageurs qu'il reçoit. Aussi telle était la solution et tel était le motif donnés par le droit romain (5) et Pothier (Cl. L'aubergiste est donc tenu de la cidpalevis in abstracto (7). Nous voyons même que l'art. 1953 parait aggraver singulièrement, à première vue, pour lui la responsabilité du droit commun, (') Trib. corn. Seine, 3 déc. 1890, Loi, 7 janv. L89i. (2) Laurent, XXVII, n. loi ; Guillouard, n. 141. — Contra Paris, 6 avril 1829, S. chr. — Pont, 1, n. 534. (•■») V. infra, a. 1225 s. l4i V. supra, a. 1061. L. 5, lu, Sauta", coup., slabit/.. i. '.». '• N. 77. " Trib. paix Oran, 30 nov. 1892, Loi, 13 déc. 1892. — Guillouard, n. 130; Hue, XI, n. 25ô ; Kayser, loc. cit. DÉPÔT d'hÔI i i i.i km: 613 <>n mettant ;'i sa charge, s;ms distinction aucune, «1 «*s événe nicnts, qui, dans bien des circonstances, semblent constituer des cas fortuits :« Ils sont responsables du vol ou du dommage des effets du voyageur, soit que le vol ait été fait ou que le • dommage ait <'■/>■ causé par les domestiques et préposés de i l'hôtellerie, ou par des étrangers allant et venant dans V hôtellerie ». En tant que co texte déclare l'aubergiste responsable «lu roi ou du dommage commis par les domestiques et préposés de l'hôtellerie, il ne fait que lui appliquer la responsabilité du droit commun; mais il semble, h première vue, la dépasser en le rendant responsable en outre du vol ou du dommage commis par les personnes allant et venant dan* ^hôtellerie : expressions qui paraissent bien comprendre dans leur géné- ralité, non seulement les voyageurs habitant l'hôtellerie, mais aussi les étrangers qui s'y sont introduits furtivement ('). L'aubergiste, nous venons de le dire, peut ainsi avoir à répon- drcdevols, qui, dans toute autre circonstance, demeureraient, ce semble, à la charge du propriétaire comme constituant des cas fortuits. C'était déjà la solution du droit romain (2). 1206. Toutefois la dérogation au droit commun n'est qu'ap- parente. D'après le droit commun l'aubergiste tomberait sous l'application de l'art. 1384 G. civ., qui rend le patron respon- sable du fait de ses préposés, et cela quoique la responsabi- lité de l'aubergiste soit contractuelle; l'art. 1384 est, en effet, une disposition générale qui ne s'applique pas seulement à la responsabilité délictuelle; il ne fait que formuler cette règle que le patron coupable d'avoir insuffisamment surveillé ses préposés commet une faute personnelle, et on est respon- sable de ses fautes personnelles autant en matière de contrat qu'en matière de délit. C'est à ce défaut de surveillance que tous les auteurs ratta- chent l'art. 1381 3). <>r le même fondement devait conduire 1 Pont, I, n. 537: Aubry et Rau, IV, p. 029, § 406, note 7: Laurent. XX VII, lu 141; Guillouard, n. Ii5 : Hue, XI, n. 261. — Cpr. Paris, 29 août 1844. D., '<<;. 2. s',. (*) L. 1, § 8; L. 2, 3; L. 5, D., de recept. — Kayser, loc. cit. i3i V. les auteurs cités par M. Wahl, Sole, S., 95. 1. 417. 614 DL" DÉPÔT ET Dl SÉQUESTRE la loi à rendre l'hôtelier responsable du dommage causé aux effets du voyageur même par un tiers. Le dommage causé à un voyageur dans un hôtel (et il en est de môme pour une voiture, un chemin de fer ou un navire), est toujours causé par la faute de l'hôtelier, qui doit choisir des préposés offrant les garanties nécessaires et pratiquer sur eux une surveillance étroite, et exercer un contrôle efficace sur tous ceux qui circu- lent dans l'auberge, et qui ne peuvent s'y introduire sans le consentement ou la négligence de L'hôtelier. L'art. ID.'i.'î n'est donc pas, comme on le prétend généra- lement ('), une aggravation du droit commun formulé par L'art. 1384; il est, comme l'art. 1381 lui-même, une applica- tion du principe que chacun, dans les contrats comme dans les délits, répond de sa faute personnelle. On ne s'explique- rait pas d'ailleurs pourquoi la responsabilité du droit com- mun serait aggravée au préjudice de l'aubergiste : dire que la ligueur de la loi à son égard s'explique « par l'impos- sibilité où l'on serait de descendre dans les hôtels si l'on n'était pas assuré d'y trouver la sécurité » (2), c'est taxer la loi d'injustice, car c'est reconnaître que les cas fortuits sont ! à la charge de l'hôtelier, et ce serait là une dérogation injus- tifiable aux principes généraux relatifs aux risques (a). Les observations qui précèdent sont, comme on le verra, d'une très grande importance pour la solution de diverses questions. 1207. L'aubergiste est responsable du vol commis par ses domestiques ou préposés, môme agissant en dehors de l'exercice de leurs fonctions ('), et notamment si ces derniers s'introduisent dans la chambre du voyageur dans le but spé- cial de le voler (5). Ce n'est pas, comme le dit la jurispru- dence ("), parce qu'à la différence de l'art. 1384, l'art. 1933 ne limite pas textuellement la responsabilité de l'hôtelier au (') Pont, II, n. 53C et 537; Guillonard, n. 145. (*) Guillonard, loc. cit. (3) Wabl, loc. cit. («) Cass. req., 5 fcv. 1894 [impl.), S.. 95. 1. 417 (voiturier). — Saigon. 13 mai 1893, sous Cass., 5 fév. 1894, S., 95. 1. 417 (te/.). — Wahl, S'oie, S.. 95. 1. 417. -aïgon, 13 mai 1S93, précité. — Wahl, Inc. cit. '*) Arrêts précités. DÉPÔ1 l> ll< M I III KO. 615 is où l<- préposé a agi dans l'exercice de ses fonctions il pesterait, en effet, à démontrer <|u<- ce silence s'explique par l'intention non pas de se référer, pour les conditions de la responsabilité, à l'art. 1384 formulani le droit commun, mais ■ l«' déroger à cet article), c'est [jarre que, dans le cas de dépôl d'hôtellerie, le dommage causé au voyageur par le préposé es! toujours imputable à une faute tic l'aubergiste. Taudis l DÉPÔT ET 1)1 SÉQUESTRE l'aubergiste à sa responsabilité ;'); ce n'est pas là une force majeure, car il aurait pu être évité par dos verrous ou des serrures de sûreté. II en est de même du vol avec escalade et effraction (*) ; on a beau objecter que le pore de famille le plus diligent ne sau- rait l'éviter : une surveillance très attentive de la part de l'hôtelier le mettra à l'abri. De même encore du vol commis à l'aide d'un trou fait dans la muraille (3). Cela a été ainsi jugé dans l'ancien droit (*). 1212. L'incendie, comme en toute matière, et notamment comme en cas de dépôt ordinaire, n'exonère pas par lui-même l'hôtelier; il faut que ce dernier fasse la preuve d'une force majeure ayant donné lien à l'incendie (s), mais alors il est libéré (•) . 1213. L'aubergiste est. par exception, responsable même de la force majeure, si elle est le fait de ses préposés (7); il rst. en effet, de principe que le patron ne peut s'affranchir du fait de son domestique en démontrant qu'il n'a pu l'empê- cher, car il est, en ce cas, coupable d'avoir mal choisi son domestique. 1214. L'aubergiste cesse d'être responsable, s'il prouve que la perte dont se plaint le voyageur a été occasionnée par la faute ou l'imprudence de celui-ci *,. En effet, on admet d'une l'ont, I, n. 540; Gnillonard, n. liT. Cass., 2 thermidor an VIII, S. clir. — Paris, •'! mai 1831, S., 33. 2. 186. — Troplong, a. 23ï ; Aubry et Rau, IV, p. 629, § 106, i.otc 9; Laurent, XX Vil, n. 1 12 ; Guillouard, n. 117. — Contra Pont, I. n. 540. 3 < luillouard, n. 1 17. (' Parlement de Toulouse, 27 fév. ir>8i, cite par Maynard, Arrêts, liv. LXXXIIl, n. s. B) Colmar, 8 avril 1845. D., 19. 5. 345. — Paris, 17 janv. 1850, S., 50. 2. 167, D., 51. 2. 122. — Trib. paix Saint-Astier, Mun. just. paix, 94. 216. — Aubry et Rau, IV, p. 629, § 406, noie 8; Laurent. XXVII, n. 146; (luillouard, n. 146. 6 C. Michigan, .'30, Michigan, 259, Anal, journ. dr. int., IV, 1877, p. 265. — C. Michigan, 13, Alb. lave journ., 130. — La loi de 1866, de l'Elat de Michigan (cb. 658), le dit textuellement. — Contra C. New-York, .'33, New- York, 571. Cass., 11 mai 1846, S., 16. 1. 364, D., 46. 1. 192. — Amiens, 4 déc. 1846, S., 47. 2. 237. — Trib. empire d'Allemagne, 11 déc. 1885. S., 87. 4. 18. — Trib. paix lleinis. 19 août 1893, Rev. jttst. de paix, 94. 46. — Trib. paix Uoullens, 5 sept. 1894, Pand. franc., 95. 2. 199 (impl. . — Pont, I, n. 536; Wahl, Note, S., 95. 1. 419. 8; Parlement de Paris, 27 août 1677, cité par Merlin, Iiép., \» Hôtellerie. — Paris, 2 avril 1811, S. clir. — Rouen, 4 fév. 1847, S., 48. 2. 452, D., 47. 2. 74. — DÉP01 IMK'I I I I.IHIK (il 7 manière générale que l'imprudence <>u la faute de la victime viennent à la décharge ) Peu importe même que la chambre soit à deux lits et ne ferme pas a clef- Trib. paix Doullens, 5 sept. 1894, précité. Wahl, Note, S., 95. 1. 419. — Contra Paris, 14 déc. 1881, S., 82. 2. 219. — V. supra, n. 1205. 018 DU DÉPÔT ET DL SÉQUESTRE terait-on que l'hôtelier peut refuser d'accueillir les voyageurs suspects, ou épier leurs démarches. Il n'eu reste pas moins vrai que le voyageur, dans un hôtel aussi bien que partout ailleurs, doit manifester une attention suftisante. 1216. L'aubergiste n'est pas responsable du vol commis ou du dommage causé par les domestiques du voyageur ('); car d'abord, le voyageur est en faute de n'avoir pas surveillé ou. bien choisi ses domestiques; ensuite, et par application de l'art. 1384 C. civ., l'aubergiste a un recours contre celui dont le préposé a commis le vol; l'éventualité de ce recours empêche d'aboutir l'action du voyageur contre l'aubergiste. Il avait été statué en ce sens dans l'ancien droit (2). 1217. Mais la règle que l'aubergiste n'est pas tenu du dommage cause au voyageur par sa faute ou son imprudence n'est pas applicable dans le cas où le dommage est causé par les préposés de 1 aubergiste c'1). Yis-à-vis de ces préposés, la négligence du voyageur n'est pas une faute; le voyageur, en effet, n'a aucune précaution à prendre vis-à-vis des domesti- ques de L'hôtelier, lesquels, loin de mériter sa défiance, sont destinés à le protéger contre les tiers. D'ailleurs on ne peut plus ici prétendre que l'hôtelier n'ait rien à se reprocher : il a eu le tort de ne pas choisir des préposés offrant des garan- ties suflisantes. Telle a été la solution de la jurisprudence quand elle a eu à statuer directement sur ce cas ('), et les arrêts qui ont sous- trait l'aubergiste à toute responsabilité dans le cas de faute du voyageur sont relatifs à l'hypothèse où le dommage est causé* par un tiers (5). ( ) Troplong, n. 237; Guillouard, n. 145; Hue, XI, n. 261. — Il ne lui suffi) pas île prouver la présence d'un domestique du voyageur dans la chambre de celui-ci. Bruxelles, 31 janv. 18%, Pasicr., %. 2. 152. I*) Arrêt des (jrands Jours de Clermoul cité par Merlin, loc. cit. (5) Tril). paix Reims, 19 août 1893, Rev.just. paix, 94. 210. — Delangle, Con- clusions sous Cass., 11 mai 1846, cilé infra; Massé et Vergé, loc. ciL\ "Wahl, Sole. S., 95. 1. 418. 1 Cass., 11 mai 1846, S., n>. 1. 364, D., 46. 1. 192. — Cass. req., 5 fév. 1894 (impl.), S., 95. 1. 417. — Amiens, 4 déc. 1846, S.. 47. 2. 237. — Saigon, 13 mai 1893, S.. 95. 1. 417. I5) S'ils n'indiquent pas cette circonstance, c'est parce que, jusqu'à preuve con- traire, le vol est censé avoir été commis par un étranger. — V. infra, n. 1231. DÉl'ÔJ n'noi lui i;ii: (il!) 1218. Cette restitution donne lieu à «1rs difficultés n peul admettre que la grande connaissance des lieux manifestée par le voleur permet d'imputer le vol à un do- mestique de l'hôtel ' . Mais, en dehors de cette présomption, il appartient au voyageur de prouver que le vol est imputable à un domestique; l'hôtelier ayant démontré que le voyageur a commis une imprudence, ce dernier, qui soutient que cette imprudence n'aggrave pas sa situation, à raison de la qualité du voleur, doit démontrer cette qualité (-). 1219. La taule du voyageur peut, si elle s'unit à celle de L'hôtelier, mitiger seulement la responsabilité de l'hôtelier (*). 1220. Aux termes formels de l'art. 19o2, l'aubergiste est responsable non seulement du vol, mais du dommage causé aux effets du voyageur. On a cité comme exemples les acci- dents causés aux chevaux du voyageur dans les écuries de l'hôtelier (*), à moins que l'accident ne provienne du manque de précautions nécessitées par la nature de l'animal, sur la- quelle le voyageur n'a pas attiré l'attention de l'hôtelier (5). Nous avons dit que l'aubergiste répond, dans les condi- tions du droit commun, du dommage causé au voyageur lui- même (,;). ï Y. Montant de la responsabilité. 1221. En droit romain, l'aubergiste était tenu, par une actio in factum, du double de la valeur des effets. Cette obli- gation au double a disparu dans les législations mêmes qui suivent de très près le droit romain 1 Wahl, Noie, S.. 05. i. 419. (*) Wahl, loc. cit. — V. cep. Trib. paix Reims, 19 août 1893, précité. (3) Trib. coin. Nantes, 10 juill. 1880, Bec. Nantes, 86. 413. — Trib. civ. Saint- Xazaire, 5 janv. 1 89 i , Droit, 25 janv. 1894. — Trib. paix Doullens, 5 sept. 1894, précité. — Hue, XI, n. 266. («) Besancon. 21 mai 1859, D., 59. 2. 166. — Bourses, 17 déc. 1877, S., 78. 2. US, U., 78. 2. 39. — Trib. civ. Lyon, 23 déc. 1865, D., 66. 3. 40. — Guillouard, n. I io. Hue, XI, n. 261. — V. supra, n. 1191. (5) Mêmes arrêts. — Guillouard, loc. cil. : Hue. loc. cil. 6 Y. supra, n. 1194. (7; Kayser, loc. cit. 020 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE Mais l'aubergiste est tenu de la valeur totale des effets dis- parus ou de la valeur totale de la détérioration. 1222. Nous avons déjà vu que, dans l'ancien droit, l'auber- giste n'était pas responsable des objets précieux qui ne lui avaient pas été confiés avec désignation détaillée ('). Au contraire, sous l'empire du code civil (et sauf le tempé- rament introduit par la loi du 18 avril 1889) (*), l'aubergiste est tenu indéfiniment des objets les plus précieux (s). Car la loi ne l'ait aucune distinction et les ait. 1052 et 105.'} s'expri- ment en termes généraux. Au surplus on peut dire que l'au- bergiste, étant en mesure de fournir une surveillance très étendue, ne peut se plaindre. D'autre part, les bijoux et l'ar- genterie étaient, lors de la promulgation du code civil, presque les seuls objets précieux connus et le législateur, guidé par une pensée traditionnelle de défiance à l'égard des aubergistes, à pu craindre que, malgré une description très exacte, l'auber- giste, si des bijoux lui étaient confiés, ne les remplaçât par des bijoux faux. Cette opinion nous parait implicitement consacrée par la loi du 18 avril 1880, qui admet la responsabilité indéfinie de l'aubergiste pour les objets précieux, en se contentant d'exiger que certains d'entre eux soient remis entre ses mains. 1223. Cependant on admet généralement que la responsa- bilité des aubergistes, en ce qui concerne les objets précieux, est limitée à la valeur des objets précieux que. suivant sa con- dition, le voyageur a dû raisonnablement emporter avec lui (4). On a invoqué en ce sens l'équité; nous avons montré qu'au contraire l'équité commande notre solution. On a invoqué aussi l'ancien droit; mais l'ancien droit allait plus loin encore, il affranchissait l'aubergiste de toute respon- 1 Y. supra, n. 1197. l) V. infra, n. 1225. ' Rouen, 18 juil 1.1889, G«~. £a/., 90. 1. 125 bijoux).— Trib. paix Reims, 19 août 1893, Reo. jusl. paix, '.'i. 210. — Laurent. XXVII, a. 156 et 157; Hue, XI, n. 262. V Paris, 21 nov. 1836, S.. 37. 2. 78. — Paris, 26 dée. 1838, D. liép., v> Dépùl, n. 174. — Paris. 2'.» août 1844, D., 56. 2. Si. — Rouen. 4 fév. 1847, S., 18. 2. 453, D.,47. 2. 74. — Trib. ci v. Nantes, 2(1 avril Istii. I).. 7:5. 5. 161. —Trib. civ. Mais, 19 juin 1895, Loi, 23déc. 1895. — Troplong, n. 225 et 220; Duvergier. n. 519; Aubry ni Rau, IV, p. 630, § 406, note 10; Guillouard, n. 149. DÉPÔ1 1» HÔTELLERIE 021 sabililé relativement aux objets précieux, el relie solution n'esl évidemment plus admissible. On a rappelé, en outre, que l'art. 1348 permet d'admettre ou de rejeter la preuve testimoniale suivant la qualité des personnes ou les circonstances du l'ait; l'ait. 1348 n'a rien ;'i voir dans une question de responsabilité, puisqu'il concerne exclusivement la preuve. Enfin on s'est prévalu de la suppression, sur les observations du tribunat, de la disposition qui restreignait la responsabi- lité de l'aubergiste au cas où les eilets lui avaient été remis: il est indéniable que les observations du tribunat donnaient la solution de nos adversaires, mais en présence d'un texte for- mel il n'y a rien à inférer de ces observations, lesquelles n'ont d'ailleurs aucun rapport avec le texte supprimé. L'opinion que nous avons réfutée a encore trouvé des par- tisans depuis la loi du 18 avril 1889 ('). 1224. Dans tous les cas, si le dommage est causé par les domestiques de l'hôtelier, ce dernier en est toujours tenu in- définiment, par application de l'art. 1384 C. civ. <*). 1225. La responsabilité illimitée s'applique-t-elle à l'ar- gent, aux billets de banque et autres titres au porteur? L'affirmative était admise avec raison par une jurispru- dence constante, et les aubergistes se trouvaient ainsi soumis à une responsabilité écrasante, dépassant de beaucoup les prévisions des auteurs du code civil, car les voyages se sont beaucoup multipliés, les valeurs au porteur de toute nature ont singulièrement augmenté depuis 1c commencement du siècle, et il n'est pas rare aujourd'hui que des voyageurs transportent avec eux des sommes ou valeurs considérables. C'est en vue de restreindre cette responsabilité dans les limi- tes raisonnables qu'a été décrétée, sur la pétition des auber- gistes eux-mêmes, la loi du 18 avril 1889 f3). En voici le texte : (') Guillonard. loc. cit. cet auteur cependant parait dire le contraire au n. 15'.' . ' Cass . 11 mai 1846, S., 46. 1. 364, D., 46. 1. 192. — Amiens, 4déc. 1846, S.. 47. 2. 237. — Aubry et Rau, IV, p. 630, § 106, note 11; I iuillouard, n. 120. — V. cep. Douai. 19 août 1842. S., 42. 2. 422. 1 Rapport Bérenger au Sénat, annexe au procès-vetba! de la séance du 11 avril 1889. 622 hl DÉPÔT ET l>l SÉQUESTRE Article unique. — Il sera ajouté à l'arliclc 1953 du code civil un paragraphe ainsi conçu : — « Cette responsabilité est » limitée à mille francs (1 ,000 fr.), pour les espèces mon- » nayées et les valeurs ou titres au porteur de toute nature non déposés réellement entre les mains des aubergistes ou » hôteliers ». Ce texle laisse subsister intacte la responsabilité de l'hôte- lier pour tous les eflcts du voyageur autres que les espèces monnayées et les titres au porteur ('). La situation de l'aubergiste n'est modifiée qu'en ce qui concerne les espèces monnayées et les titres ou valeurs au porteur de toute nature apportés par le voyageur dans l'hô- tellerie et non déposes réellement entre les mains de l'hôte- lier. Celui-ci n'en est responsable, dans les termes des art. 1952 et 1953, (pie jusqu'à concurrence de 1,000 fr. Inutile- ment donc le voyageur prouverait-il que les espèces ou titres par lui apportés dans l'hôtellerie avaient une valeur plus considérable. Certains codes étrangers contiennent des règles analo- gues -' 1226. La loi de 1889 laisse subsister dans son intégrité la législation du code civil relativement aux espèces monnayées et aux valeurs ou titres au porteur déposés réellement entre les mains de l'hôtelier. Comme par le passé, ce dépôt conti- nue à être un dépôl d'hôtellerie, un dépôt nécessaire par conséquent, dont la preuve peut être faite par témoins, quelle que soit la valeur: il ne devient pas un dépôt volontaire dont la preuve devrait être faite par écrit au-dessus de 150 fr. ('). 1 llouen. 18 jui II. 1889, précité (bijouz . — V. supra, n. 1223. '■ Bas-Canada, i i.ii nm: li-J.'È Pour la preuve, il en ost de même si le dépôt n'a pas lieu entre les mains de l'hôtelier ' . 1227. En limitant la responsabilité de l'hôtelier, la loi ne dispense évidemment pas le voyageur de prouver qu'il avait en sa possession des espèces ou des valeurs (*). Cette preuve peut être laite par témoins et par présomp- tions (3). 1228. Si l'existence d'une faute de l'hôtelier est démontrée, ce dernier est responsable de la valeur entière des objets non déposés entre ses mains (*). C'est l'application des art. 13S-2 s. Le rapport de la loi de 1880 à la Chambre dit également : « Cette responsabilité spéciale est indépendante de celle du droit commun, dérivant des art. 1382 à 138(3 », et le rapport au Sénat porte que rien n'est changé « aux règles ordinaires du code, lorsqu'il y a eu faute de l'hôtelier » '). Il en est de même s'il y a faute des personnes dont l'hôtelier répond aux termes de l'art. 138i C. civ. (6). Nous avons vu que celte solution a toujours été admise avant la loi de 1889. Mais, conformément au droit commun, c'est au voyageur qu'il appartient de prouver cette faute (7). § VI. Preuve en matière de dépôt d'hôtellerie. 1229. Conformément au droit commun, c'est au voyageur qu'il appartient de prouver le fait du dépôt. La preuve par témoins est admissible, même au-dessus de lot) fr., pour établir en cas de besoin le fait du dépôt d'hùtel- (') Guillouard, a. 158; Walil. Tr. théor. elprat. des litres nu porteur. II, n. 1128, '-) Riom, 7 qov. 1894. D., 95. 2. 558 (présomption résultant de l'honorabilité du voyageur). — Trib. civ. Reims, 14 déc. 1803, Mon. jud. Lyon. 22 fév. 1894. — Trib. paix Sceaux, 25 juin 1897, Loi, 5 juil. 1897. — V. infra, n. 1229. Trib. civ. Reims, 14 déc. 1893. précité. — Trib. paix Sceaux. 25 juin 1897, précité. (*) Bordeaux, 20 mai 1892, S.. 93. 2. 51, 1)., 93. 2. 182 (le voyageur prévient l'hôtelier de bruits suspects). — Caen, 13 déc. 1892, liée. Rouen. 93. 2. 127. — Guillouard, n. 158. — Contra Hue. XI. n. 264. (■) Rapport Bérenger, S.. Lois annotées, 1885-1890. p. 551, lre col. (6) Bordeaux, 20 mai 1892. précité.— Caen, 13 déc. 1892. précité. — Guillouard, n. 158. — Rapport liérenger, précité. — Contra Mue, toc. cit. 7 Bordeaux, 20 mai 1892, précité.— Caen, 13 déc. 1892. précité.— Décidé qu'il lui suffit de prouver le vol. — Riom. 7 nov. 1894. Loi. 2i déc. 1894. 02 ï DL DÉPÔT II LU SÉQUESTRE lerie et son importance. Cela résulte de l'art. 1348 C. civ. et de ce que l'art. 1952 assimile le dépôt d'hôtellerie au dépôt né- cessaire ('). Et toutefois, le principe de l'admission indéfinie de la preuve testimoniale reçoit ici une importante limitation, qui d'ailleurs n'est pas particulière au dépôt d'hôtellerie : elle s'applique à tous les autres cas de dépôt nécessaire : et, si nous en parlons ici, c'est qu'elle reçoit surtout son application au dépôt d'hôtellerie. Celte limitation résulte des mots qui terminent l'art. 1348-3° et qui sont la reproduction littérale du texte de l'ordonnance de 1667 (lit. XX, art. 4) : « le tout •■ suivant la qualité des personnes et les circonstances du » fait ». La loi investit donc le juge d'un pouvoir discrétion- naire d'appréciation en ce qui concerne l'admission ou le rejet de la preuve testimoniale (2), et c'est ce qu'ont formelle- ment indiqué les travaux préparatoires (3). « Autrement, comme le dit Pothier, si celte preuve était indistinctement accordée à loutes sortes de personnes, les aubergistes seraient à la discrétion des liions; un filou viendrait loger dans une auberge, demanderait à faire la preuve d'un prétendu dépôt qu'il prétendrait avoir fait à l'aubergiste; et pour faire cette preuve, il ferait entendre comme témoins deux filous de ses camarades » ('). 1230. Comme en matière de dépôt ordinaire, le déposant peut agir contre l'aubergiste alors même qu'il n'était pas pro- priétaire de la chose (8). Il n'a donc pas à prouver sa propriété. 1231. Le voyageur doil prouver qu'il avait en sa posses- sion les objets qui lui ont été enlevés ('). La preuve peut être faite par tous moyens (T). (') Paris, 14 déc. 1881, S., 82. 2. 219, D. lié/... Suppl., v» Dépôt, n. 64. — B »r- deaux, 20 mai 1892, S.. '.»:;. 2. 51, l).. '.«. 2. 182. — Guillouard, n. 148. 1 Bourges, 9 rév. 1820, S. cur. — Duvergier, a. 517; Pont, I, n. 524; Laurent, XXVII, n. 139; Guillouard, n. 1'^. (•) Observations du tribunal, Fenet, XIV, p. 195. (s) Rivier, loi. cil.; Kayser, IIullzendorfTs Reclitslexikon, v° Réception nau- tarum. (6) Trib. civ. Bordeaux, 12 déc. 1894, Rec. Bordeaux, 95. 2. 20. — V. pour les effets précieux, supra, n. 1225 s. V. supra, n. 1227. DÉPÔ1 D HÔTELLERIE 625 (l'est au voyageur qu'il appartient également de prouver !<• l'ail de la soustraction ou «le l'endommagemenl (' . (l'es! encore à lui qu'il appartient de prouver que le dommage ;i été causé dans l'auberge (*). Mais c'est à l'aubergiste, conformément au droit commun, qu'il appartient de faire la preuve de la force majeure (*). Nous avons également montré que c'est à lui qu'il appar- tient de prouver la faute du voyageur ('), et nous avons exa- miné d'autres difficultés de preuve relativement au cas où le dommage provient d'un étranger ou d'un préposé de l'au- bergiste (•). 1232. Les règles relatives h la charge de la preuve subis- sent, pour les effets précieux, des modifications que nous avons déjà indiquées (*). § VII. Actes et conventions modifiant les règles de la responsabilité. 1233. La disposition de l'art. 1952 n'est pas d'ordre pu- blic: comme elle repose sur l'idée que le voyageur n'a pas pu connaître le degré d'honnêteté de l'aubergiste, une con- venlion formelle peut écarter cette disposition. Il n'y a aucun doute sur ce point (''). Une déclaration formelle de l'aubergiste, portée à la con- naissance du voyageur, produit le même résultat (8), car le voyageur, par son entrée dans l'auberge, a accepté cette déclaration. (•) Trib. paix Reims, 30 déc. 1893, Loi, 2 janv. 1894. Rev. just. paix, 94. 319. — Tiih. sup. Monaco, 11 nov. 1892, Anal. joum. dr. inl., XX, 1893, p. 454. — Hue, XI, n. 2G6. (*) Hue, XI, n. 266. (») Bourges, 17 déc. 1877, S., 78. 2. 112, D., 78. 2. 39. — Paris, 14 déc. 1881. S., 82. 2. 219. 1 V. supra, n. 1214. — Guillouard, n. 146. (s) V. supra, n. 1218. (•i V. supra, n. 1225 s. (7) Trib. sup. Cologne, 29 déc. 1894, S., 97. 4. 5. — Kayser, loc. cit.; Hue, XI. n. 265. (8i Kayser, loc. cil. C'était la solution du droit romain (si praedixeril, dit la loi 7 pr.. D., De recepl.). Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 10 G26 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE Aussi faut-il que la déclaration soit antérieure, non pas, comme on le dit, à l'entrée du voyageur, mais à l'entrée des effets dans l'auberge ('). 1234. L'aubergiste peut-il limiter l'étendue de sa respon- sabilité a l'aide d'un avis affiché dans la chambre du voya- geur ou dans les corridors de l'auberge? La question se pose également pour le voiturier. Fille doit être tranchée par la négative (*), car il faut, pour que la loi cesse de s'appliquer au profit du voyageur, que ce dernier ail renoncé à son droit; or on ne peut affirmer qu'il ait connaissance de l'avis, ni, s'il en a eu connaissance, qu'il ait entendu s'y conformer. <>n a dit, dans le même sens, que, le voyageur étant forcé de descendre dans un hôtel, l'opinion contraire permettrait aux hôteliers de modifier, par une entente entre eux, les règles de leur responsabilité. Si cel argument était sérieux, il revien- drai! à dire que l'hôtelier ne peut, même par une convention faite avec le voyageur, se décharger de sa responsabilité, ce qui est inadmissible. Toutefois, il en est autrement si l'attention du voyageur a ('•lé spécialement portée sur l'avis et s'il n'a pas protesté. De même, s'il a connu l'avis et qu'en fait on puisse dire qu'il a commis une faute en ne s'y conformant pas (3). 1235. De même l'aubergiste peut, par une convention for- melle, subordonner sa responsabili é a un dépôt fait entre ses mains. [ci encore un règlement ne suffit pas (4). 1236. Une convention formelle peut aller jusqu'à dégager (') Kayser, loc. cil. '- Rouen, 4 rév. 1847, S., 18. 2. 452, D., 17. 2. 74.— Caen, 17 déc. 1875, D., 76. 2. l'.M'. — Rouen, 18 juil. 1889, Gaz. Pal., 90. 1. 125. — Trib. civ. Toulouse. 2 juin 1894, Gaz. Trib., 24 août 1894. — <;. supr. Massachusetts. 7 janv. 1887, Journ. dr. //,/., XIV, 1887, p. 500. — Trib. sup. Cologne, 29 déc. 1894, y., 97. 4. 5. — Troplong, I, n. 241 : Pont. 1. n. 543; Aubry et Rau, IV, p. 630.5 406, nolei2; Laurent, XXVII, n. 146: Guillouard, n. 151 ; Walil, Tr. des litres au porteur. II. n. 1125; Hue, XI. n. 265. — C. féd. Suisse, art. is7. — ConlraJug. clans Souffert, Archiv, X. p. 162, et Blaell. f. RechUanwendung in Baiern.XXU, p. 193. — Goldschmidt, Zeitschr. /'. Bandelsrechl, III, p. 331 s.; Kayser, loc. cil. — V. notre Tr. du conlr. de Image, l'« éd., II, n. 1723, 1732 bis. Troplong, Pont, Laurent, Guillouard, locc. ci/1. (*) Contra Guillouard. n. 137. dépôt d'hôtellerie (>27 l'aubergiste de sa faute (',, car tel est le droit commun ; il n'y a d'exception que pour la faute lourde et le dol. § VIII. De ce qu'il faut entendre par aubergistes ou hôteliers et par voyageurs. 1237. Les textes relatifs au dépôt d'hôtellerie ont un carac- tère exceptionnel. Or ils parlent des aubergistes ou hôteliers; si cette expres- sion doit être considérée comme comprenant tous ceux qui font profession de loger les voyageurs, elle doit néanmoins être interprétée restrictivement et ne s'applique pas à toutes les personnes qui font profession de recevoir, moyennant salaire, chez elles les objets d'une nature déterminée qu'on voudra leur déposer ou les personnes qui se présenteront (*). L'opinion contraire s'appuie sur l'idée que les motifs de déci- der sont les mêmes; mais cet argument n'est, on le sait, d'aucune valeur quand il s'agit de dispositions exceptionnelles. On invoque encore un avis du conseil d'Etat du 10 octobre 181 1, qui n'a pas le sens qu'on lui prête et dont nous donne- rons l'explication v3). 1238. Toutefois l'art. 1952 s'applique aux aubergistes qui ne fournissent pas la nourriture, c'est-à-dire à ceux qui tiennent des hôtels garnis (4), ou aux aubergistes en ce qui concerne les effets des voyageurs auxquels ils ont loué une chambre au mois sans leur fournir la nourriture (3). Non seule- (') Contra Trib. sup. Cologne, 29 déc. 1894, S., 97. 4. 5. (2) Duvergier, n. 522 ; Aubry et Rau, IV, p. 628, § 406, note 1 : Pignon, Coud. sous Trib. civ. Seine, 14 mai 1892, S., 92. 2. 156, D., 93. 2. 179, — et les autorités ci-après. — Jug. dans Sœuiïert, Archiv, II„n. 372 et XVII, n. 42; Goldschmidt, Zeilsc/i /'. Handelsrecht, 111, p. 61; Harder, Giess. Zeitsch. (nouv. sér.), XVIII, p. 221 ; Kayser, loc. cit. — Contra Laurent, XXVII, n. 147; Guillouard, n. 133; Hue, XI, n. 25i), — et les autorités ci-après. («) V. infra, n. 1238. (*) Trib. civ. Lyon, 24 mai 1899, D., 99. 2. 443. — Trib. paix Reims, 30 déc. 1893, Loi, 2 janv. 1894. — Trib. paix Doullens, 5 sept. 1894, Pand. franc., 95. 2. 199, Droit, 17 janv. 1895. — Trib. paix Sceaux, 25 juin 1897, Loi, 5 juill. 1897. — Duvergier, n. 522; Aubry et Ilau,TV, p. 628, § 406, note 1; Guillouard, n. 135 et 136; Hue, XI, n. 256 et 257. — Contra Kent, Comment.. II, p. 395. — Décisions américaines citées Joi/rn. dr. in t., V, 1878, p. 548. [5) Contra Kayser, loc. cil. ()28 DU DÉPÔT KT DU SÉQUESTRE nient les molifs de décider sont les mômes, mais il s'agit bien là de véritables hôteliers. Aussi le conseil d'Etat, dans un avis interprétatif du 10 octobre 1811, a-t-il appliqué aux vols commis dans une maison ou hôtel garni l'art. 386 G. peu., qui punit les vols commis dans les hôtels. Il en est de même des personnes qui louent des apparte- ments garnis ('); d'abord on peut bien les qualifier de tenan- ciers d'hôtels garnis; ensuite il n'y aurait aucune raison de les distinguer de ces derniers; enfin la loi du 25 mai 1838 art. 2 assimile, au point de vue de la compétence des juges de paix, t< les contestations entre les hôteliers, aubergistes ou logeurs, et 1rs voyageurs ou locataires en garni » et c'est encore une preuve que ces professions sont en réalité consi- dérées comme étant les mêmes. Peu importe, d'ailleurs, que la location soit faite à des personnes qui sont de passage ou qui sont à demeure (!). 1239. Mais l'hôtelier n'est plus soumis à la responsabilité exceptionnelle de l'art. 1952 lorsqu'il loue des appartements à un tiers qui en assume lui-même l'entretien. Par exemple un hôtelier loue à l'année des magasins et une chambre à un négociant pour lui servir de bureau (3). L'ait. 1952 ne s'applique pas davantage h ceux qui acci- dentellemenl louent une chambre garnie à une personne qu'ils connaissent, ou sur laquelle ils ont des renseigne- ments particuliers, en un mot à raison des qualités person- nelles du locataire; non seulement on ne peut qualifier de logeurs en garni ces locateurs, — car ils ne font pas profes- sion de loger eu garni, — mais les motifs d'appliquer l'art. 1952 n'existent pas. car il ne s'agit pas de personnes qui s'offrent au public pour le recevoir (v). (') Mme?. 18 mai 1825, S. cbr. — Trib. civ. Lyon. 24 mai 1899, précité. — Tiib. paix Reims, 30 déc. 1893, précité. — Trib. paix Doullen.», 5 *ept. 1894, Pand. franc., 95. 2. 199. Droit, 17 janv. 1895. — Duvergier, n. 522; Aubry et Rau, IV. p. 6^8. § 406, noie 1 ; Gnillouanl, n. 135 et 136; Hue, XI, n. 256 et 257. - l'i il), civ. S, in*-, 22 avril 1896, r.az. Trib., 6 oct. 1896. — Trib. paix Reims, 30 déc. 1893, Loi, 2 janv. 1894. — Une. XI, n. 256 et 257. — Conlia Trib. civ. Lyon, 24 mai 1899, précité. Angers, 15 juil. 1857, D., 57. 2. 167. — Guillouard. n. 140; Hoc, XF, n. 258. (*) Kayser, loc. cit. DÉPÔT d'hÔTEI I I.ItlK 629 Mais il en esi autrement si accidentellement, à l'occasion d'une foire, d'une fête, d'une exposition, d'un concours régional, d'une saison d'eau, etc., un propriétaire fait îles locations en garni ('); il exerce bien alors la profession de logeur en garni, il s'offre au public pour le recevoir, cl la seule différence entre sa situation et celle des logeurs en garni dont nous avons parlé jusqu'alors, c'est qu'il n'exerce pas cotte profession d'une manière permanente; mais la loi n'exige rien de ce genre. Sans doute aussi il est exempté de la patente (L. 25 avril 18ii, art. 13, n. 4; L. 15 juill. 1880, art. 17, n. 3), mais c'est que la patente ne frappe que ceux qui exercent un commerce. 1240. Etablies en faveur des voyageurs, les dispositions exceptionnelles de nos articles ne peuvent être invoquées par ceux qui n'ont pas cette qualité, par exemple par une per- sonne qui, ayant loué un appartement dans une hôtellerie de la localité qu'elle habite, y a apporté des ellets (s). D'ailleurs le motif de la loi manque ici aussi bien que son texte. 1241. Les art. 1952 à 195i ne s'appliquent pas si le dépôt est fait à un cafetier ou restaurateur (';, sauf si, en fait, celui- ci reçoit des personnes pour y passer la nuit (J). 1242. Les art. 1952 à 195 i ne s'appliquent pas au dépôt de vêtements faits dans le vestiaire d'un théâtre, quoique ce (') Guillouard, n. 136; Hue, XI, n. 257. — Contra Nimes, 18 mai 1825, S. chr. (pour une foire ou une affluence extraordinaire d'étrangers). (*) Aubry et Rau, IV, p. 628, § 406, note 1. — Contra Guillouard, n. 136; Hue, XI, n. 256 et 257. (s) Rouen, 15 mai 1897, liée. Rouen, 98. 1. 234 (bicyclette remise au chasseur d'un café . — Trib. civ. Seine, 30 juil. 1867, D.,75. 1. 220. — Trib. civ. Pontoise, 30 nov. 1892, Loi, 10 déc. 1892. - Trib. civ. Seine, 27 juin 1896, Gaz. Pal., 96. 2. 524. — Trib. civ. Seine, 19 mai 1897, Droit, 11 juil. 18y7 (bicyclette). — Trib. civ. Xantes, 21 mai 1897, Gaz. Pal., 97. 1, Sappl.36. — Trib. civ. Liège, 29 avril 1871, Jnrispr. des trib. (belges\ 71-72. 417. — Duranton, XVIII, n. 78; Duvergier, n. 52; Pont, I, n. 528; Arntz, IV, n. 1422; Aubry et Rau, IV, p. 628, § 406, note 3 ; Guil- louard, n. 139; Goldschmidt, Zeitch. f. Handelsrecht, III, p. 61; Harder, Giess. Zeilsch. (nouv. série . XVIII, p. 221 s. ; Kayser, loc. cit.; Kent, Commentaires, II, p. 595 et décisions américaines citées Journ. d>\ inlern., V, 1878, p. 548: Hue, XI. n. 25S. — Contra Merlin. Quest.. v° Dép. néces. ; Troplong, n. 229; Sourdat, 7V. de la responsab., II, n. 939. — On cite aussi en sens contraire Aix, 20 juin 1867, qui n'a pas ce sens. — V, la note suivante. (*) Aix, 20 juin 1867, D.. 67. 5. 332 (par exemple dans un but de libertinage). 630 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE dépôt ne puisse pas être fait ailleurs et qu'il ne soit (en réalité) pas gratuit ('). 1243. Ils ne s'appliquent pas aux objets et notamment au linge apporté clans un bateau-lavoir (*) ; du reste, il faut dire que ces objets sont sous la surveillance conslante, pendant le blanchissage, des blanchisseuses qui les apportent et queT si, pendant le séchage, ils sont étendus dans des cabines, il appartient encore aux blanchisseuses de les surveiller. 1244. Les art. 1952 à 1954 ne s'appliquent pas au dépôt l'ait dans les bains publics (3). Ici encore on n'a pu invoquer en sens contraire que l'identité de motifs, et nous avons vu pourquoi cet argument est insuffisant. Certains partisans de l'opinion contraire (*) exigent une vigilance moins grande du tenancier qui demande un salaire très faible; cette distinction n'a aucune raison d'être. Il en est de même, pour les mêmes motifs, des effets lais- sés par un baigneur dans une cabane de bains qui lui est louée sur une plage (5). (>) Trib. civ. Seine, 26 déc. 1898, Gaz. Pal., 99. 1. 67. — Contra Trib. civ. Seine, 5 janv. 1888, S., 88. 2. 45. — Trib. paix Bordeaux, 3 rév. 1892, Loi, 14 mars 1892. — Guillouard, a. 138; Une, XI, n. 258. —Jugé même que les vêlements con- fiés dans le cours d'une représentation à l'ouvreuse des loges donnent lieu à la responsabilité des art 1952 et 1953. — Trib. civ. Bruxelles, 10 nov. 1872, Pasici'., 73. 3. 8. — Contra Hue. XI. n. 258. — En tout cas il a été décidé que le directeur n'encourt pas de responsabilité si. tante de vestiaire, les spectateurs ont suspendu leurs effets à des porte-manteaux se trouvant dans les couloirs. — Trib. coin. Ver- \iers. 5 avril 1888, Gaz. Pal., S*. 2, Suppl., 50. ass., 26 janv. 1875, S., 75. 1. 256, D., 75. 1. 210 (cet arrêt s'appuie encore sur ce qu'il s'agit non de dépôt, mais de bail ; ce n'est pas une raison . — V. infra, a. 12 i8. — Guillouard, n. 139; Hue, XI, n. 258. 1 l'rib. coi r. Seine, 22 juin 1870, 1). lié[>. Suppl., v> Dépôt, n. 74-3». — Du- vergicr, n. 522 : Aubry et Hau, IV, p. 628, § -406. note 4; Laurent, XXVII, n. 151; Ortlieb, Soie, S., ::>. 2. 19. — Contra Trib. civ. Rouen, 21 mars 1883, S., 85. 2. 167, D., 84. 3. 8. — Tiib. paix Paris, 27 juill. 1887, Mon. juges de paix, 87. 402.— Trib. civ. Bruxelles, lOfév. 18%, Pasicr., 96. 3.08. — Merlin. Quest., \° Uép. néces. et Concl , sous Cass., 4 juil. 1814, S. chr. ; Troplong, n. 210; Pont, I, n. 527: Guillouard, n. 137; Hue, XI, n. 257. — En tout cas ils ne s'appliquent pas aux objets que baigneur n'était pas obligé d'apporter avec lui. — Trib. civ. Bruxelles, 10 l'év. 1806, précité bicyclette déposée dans un endroit aménagé à cet effet par le tenancier). («) Pont, loc. cit. (5j Caen, 17 déc. 1875, S., 76. 2. 40, D., 76. 2. 190. — Trib. civ. Bruxelles, 16 déc. 1875, Pasicr.. 76. 3. 213. Anal.joum. dr. int., III, 1876, p. 476. — Ort- ieb, loc. cit. DÉPÔT D'HÔTELLERIE <).'H 1215. Nos textes ne s'appliquent pas aux objets ou ani- 1 1 1 ; i u x confiés à un navire. La solution contraire était sur ce point admise en droit romain et se trouve reproduite par certaines législations modernes ('). La solution exceptionnelle tle la loi ne s'applique pas davan- tage au cas d'un dépôt d'animaux fait au propriétaire dune étableou d'un autre local, comme cela est fréquent Ions les jours de foire ou de marché (2). Le droit romain était, il est vrai, en senscontraire ('•); mais c'est une raison pour décider que l'art. 1952, n'en ayant pas reproduit les termes, a voulu y déroger. Cela est d'autant plus exact que ce propriétaire, à la différence d'un aubergiste, ne donne pas la nourriture aux animaux ('). 1246. Récemment les tribunaux ont eu à examiner le point de savoir si l'art. 1952 s'applique à la compagnie des wagons- lits. La compagnie des wagons-lits se charge, par un contrat qu'elle passe avec les compagnies de chemins de fer, et auquel les voyageurs restent étrangers, de transporter ces derniers dans ses wagons, de les y coucher dans des sortes de lits qui sont situés dans les compartiments (b) ; elle offre même, mais moyennant un prix spécial, directement payé à ses préposés, la nourriture aux voyageurs dans ses wagons-restaurants. Enfin elle l'ait exercer sur les voyageurs une surveillance par ses préposés. En cas de perte d'un colis voyageant avec lui, le voyageur a-t-il le droit de considérer la compagnie des wagons-lits comme un aubergiste responsable en vertu de l'art. 1952, ou (') Etals-Unis, G. sup. Kentucky, 29 oct. 188i, Alb. law journ., XXX, p. 424, Anal, jourrt. dr. int., XIII, 1886, p. 742 (motifs) (bateau à vapeur qui transporte les voyageurs et leur donne la nourriture,. — Allemagne, Droit commun. — Kay- ser, toc. cit. (2) Trib. civ. Lyon, 3 juin 1892, Gaz. Pal., 93. 1. 10 (surtout dans le cas où les chevaux sont remisés par les propriétaires eux-mêmes). — Contra Trib. civ. Dom- front, 26 fév. 1887, Rec. Caen, 88. 562 (blessure par un cheval à un autre cheval . — Guillouard, n. 135. (3) Allemagne, Droit commun. — Kayser, loc. cil. (*) Trib. civ. Lyon, 3 juin 1892, précité. («) D'après Cass. civ., 3 fév. 1896, S., 96. 1. 165, D., 98. 1. 502, il paraîtrait que le contrat est quelquefois passé entre le voyageur et la compagnie des wagons-lits, qui se charge directement du transport. 632 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE cette compagnie n'est-elle, au contraire, regardée que comme un voiturier? La jurisprudence adopte cette dernière solution ('), à laquelle nous croyons devoir nous ranger. L'argument qui nous décide est que le rôle de la compa- gnie des wagons-lits est uniquement de se substituer à la compagnie des chemins de fer en opérant le transport que le voyageur a stipulé par la convention passée avec cette der- nière; la compagnie des wagons lits est donc un sous-voitu- rier qui remplit les obligations imposées au voiturier; on admettra évidemment que si le voyageur ne trouve pas dans le convoi le wagon-lit auquel son billet lui donne droit, il a une action contre la compagnie du chemin de fer; c'est donc celte dernière qui s'est engagée envers lui et la compagnie des wagons-lits ne fait qu'exécuter cet engagement. Cela étant, on ne voit pas pourquoi cette compagnie, avec laquelle le voyageur ni pas contracté, el qui exécute un contrat de transport, sciait un hôtelier. Il est bien vrai que les wagons contiennent des lits; mais les compagnies de chemins de fer ont également des wagons où se trouvent des lits, et personne ne songe à dire qu'elles peuvent être traitées, vis-à-vis des voyageurs qui occupent ces wagons, comme des aubergistes; cette réponse nous parait suffire; elle est bien supérieure à celle que nous lisons dans les décisions judiciaires, et qui consiste à nier que le Casa, civ., 3 ré». 1896, s . 96. 1. 165, D., 98. 1. 502. — Trib. cit. Nice,9 fév. 1892, 1).. 93. 2. 179 (cependant la compagnie est responsable des bagages rendus par ses employés à un autre que le voyageur. — V. noire 7V. du louage, lro éd., II, i). 1736 . — Trib. civ. Seine, 14 mai 1892, S.. 92 2 156, D.,93. 2. 179. —Trib. civ. Seine, 25 bot. 1892, S., 98. 2. 107, I)., 93. 2.587. — Denisse, Ann. dr. corn., 94. 2. 170; Hue, X, n. 401 et 105. — C. sup. Kenlucky, 29 oct. 1884, Alb. Loi'. journ., XXX, p. 42i. Anal, journ. dr. int.. XIII, 1^6, p. 742. — Contra Pignon, 'usions, sou* Trib. Seine, 14 mai 1892. précité. — C. Illinois, Amer, law /■evieir. XII, p. 173, Aital. journ. dr. inl., V. 1878, p. 547 (sleeping cars delà compagnie Pullmannf. — C. sup. Pennsylvanie, 12 nov. 1883, Alb. law journ., XXIX. p. 8, Anal, journ. dr. int., XI, 1884. p. 548. — La jurisprudence améri- caine décide même que la compagnie de chemins de fer peut être actionnée en responsabilité, le voyageur devant supposer «pie tout le train est sous sa direction. — ( ;. sup. Ohio, 7 dec. 1882, Amer, law rev., IV, n. 8, p. 1 16, Anal, journ. dr. inl., X, 1883, p. 406. — Sur la responsabilité qui en découle. V. notre Tr.du contr. tic louaye, ir« éd., II, n. 1695 s. dépôt d'hôtellerie 033 logement roulant soit un véritable logement ou qu'un wagon eoutenHiit plusieurs lits soit une chambre d'hôtel. D'une part, s'il est habituel qu'un hôtel, comme tout immeuble, soit fixe, aucune raison juridique ne s'opposerait à ce qu'un hôtel iùt mis en mouvement. D'autre part, il y a bien des cham- bres d'hôtel qui contiennent plusieurs lits, et n'y en eût-il pas dans la pratique, que ce fait ne constituerait [tas em une raison juridique. Il est donc très insuffisant de répondre que si certaines chambres d'hôtel contiennent plusieurs lits. ce n'est pas dans le monde auquel appartiennent les occu- pants des wagons-lits. Il est bien vrai également qu'en ce qui concerne la nourri- ture fournie aux voyageurs, la compagnie des wagons-lits est un restaurateur; mais on ne peut conclure de là qu'elle soit un hôtelier pour les lits qu'elle fournit; car, tandis que le logement du voyageur lui est promis par la compagnie de chemin de fer aux termes du contrat de transport, la nourri- ture est fournie par la compagnie des wagons-lits aux termes d'une convention spéciale, et dans le cas seulement où le voyageur la demande. On a invoqué encore, en faveur de la doctrine que nous défendons, l'idée que la surveillance dans les wagons-lits est plus diflicile que dans les hôtels; ce n'est là qu'une considé- ration de fait, qui nous parait sans influence sur la ques- tion. Nous en dirons autant delà considération que les règlements n'imposent aucune surveillance à la compagnie des wagons- lits et de l'argument tiré de ce qu'à la différence d'un hôtelier la compagnie des wagons-lits ne peut refuser les voyageurs suspects. Ne pourrait-on pas dire avec autant de vérité que la compagnie de chemins de fer, à la différence d'un voiturier ordinaire, doit accepter tous les voyageurs? Il est cependant certain qu'une compagnie de chemins de fer est un voiturier. Il n'est pas plus exact de dire que l'art. 1952, fournissant au voyageur la compensation du droit de rétention et du privi- lège conférés à l'hôtelier pour le paiement du prix (art. 1948 et '2102, § 5 , ne peut s'appliquer à une société qui exige d'avance le prix et n'a besoin, par conséquent, ni de privilège 034 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE ni de rétention. Si la compagnie des wagons-lits était un dépositaire, cet argument serait sans valeur, car l'art. 1932 s'exprime en termes généraux. Au reste, il est entièrement faux que ce texte soit la contre-partie des art. 1948 et 2102 ; il s'explique tout autrement. Il suit de notre opinion que la responsabilité de la compa- gnie des wagons-lits obéit aux règles de la responsabilité d'une compagnie de transports. En tout cas, la compagnie doit exercer une surveillance sur les effets i\u voyageur ('). 1247. L'ait. 1952 est inapplicable aux maîtres de pen- sions - . Le patron dans rétablissement duquel le domestique, l'em- ployé <>u l'ouvrier laisse ses effets ou ses outils n'est pas non plus un dépositaire nécessaire (*). 1248. Dans toutes les hypolhèses dont nous venons de parler, c'esl le droil commun qui redevient applicable. Nous pensons donc que, la garde des objets ayant été confiée au commerçant, celui-ci doit les restituer, s'il ne démontre pas qu'ils ont disparu par cas fortuit (*). La principale diffé- rence entre ces hypothèses et celle de l'art. 1932 est que dans celles qui nous occupent ici la preuve d'un simple cas fortuit suffît pour dégager la personne responsable (5). Lesjugesdu fond ne pourraieut, même en prétendant interpréter une con- vention tacite, assimiler celte personne à un hôtelier (6). Cette convention ne peut, en effet, exister que relativement à la garde (et elle existe généralement sur ce point); s'ils suppo- saient qu'elle existât aussi quant au degré de responsabilité, les juges assimileraient à l'aubergiste un industriel qui n'est pas aubergiste. ' C. sup. Massachussels, 7 janv. 1887. Journ. dr. int., XIV, 1887, p. 500. (*) Trib. civ. <;aen, 12 mars 1888, liée, Caen, 89. 133 mais ce jugement dit à lort que la faute du maître de pension doit être démontrée pour qu'il soit respon- saLlj . • Y. nuire Tr. d i conlr. de louage, lre éd., II, n. 1281 s. « Trlb. paix Paris, 31 mai 1880, Loi. 6 juil. 1889 (restaurateur). (s) Décidé que le vol n'entraîne aucune responsabilité. Trib.civ.Pontoise,30nov. 189,', Loi, 10 d^c. 1892. nlra Hue, XI. n. 259. SÉQUESTRE 635 ï IX. Eœercice de l'action. 1249. L'action peut être dirigée contre 1rs héritiers de l'aubergiste ('). 1250. Si les objets ont été confiés à plusieurs aubergistes, ils n'en sont pas tenus solidairement (-). Il en esl autrement cependant si les eflels ont été confiés à un préposé commun a ces divers aubergistes (s). 1251. L'action en dommages-intérêts pour la perte d'un objel doit être portée devant le tribuual civil. 1252.11 en est ainsi même si le dépositaire est un commer- çant, quand le dépôt ne se rattache pas à son commerce et n'est pas commercial. Telle doit être la solution pour le dépôt au vestiaire d'un théâtre, car ce dépôt est gratuit et le directeur du théâtre n'en tire aucun profit direct (' . CHAPITRE III DU SÉQUESTRE SECTION PREMIÈRE DÉFINITION ET NATURE DL SÉQUESTRE 1253. Le séquestre constitue une mesure conservatoire. C'est la remise à un tiers, à l'amiable ou sur l'ordre du juge, d'une chose sur laquelle plusieurs personnes ont ou préten- dent avoir ou s'attribuer respectivement des droits, en atten- dant le règlement définitif de ces droits. Il résulte de cette définition qu'il existe deux espèces de sé- questre, le séquestre conventionnel et le séquestre judiciaire. C'est en efiét ce que va nous apprendre l'art. 1955 ^s). Le plus souvent, le séquestre a lieu à l'occasiond'une chose (') L. 3, § 4, D., De recept. ; Kayser, loc. cit. (*)L. 7, § 5, D., De recept. ;L. 4, pr., D., De exercit. act., 14.1 ; Kayser, loc. cit. (3) Mêmes textes. — Kayser, loc. cit. ■ Trib. corn. Alger, 21 mars 1887, Rev. algér., 87. 467. (5) V. aussi n. 1310. 636 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE contenlieuse ou litigieuse, ce qui explique le langage des art. 1956 et 1961; mais cette condition n'est pas essentielle; ainsi l'art. 602 porte que si l'usufruitier ne trouve pas de cau- tion, les immeubles sont donnés à ferme ou mis en séquestre. Le mot séquestre est aussi employé quelquefois pour dési- gner la personne qui se charge du dépôt (C.civ., art. 2066 4°, C. proc, art. 681 ). 1254. Le séquestre est, selon le code, unevariétédu dépôt. Cette conception, qui était admise dans l'ancien droit ('), est également adoptée à l'étranger (*). Cependant, on considère quelquefois le séquestre comme un mandataire (s) et, abstraction faite dos textes, cela est plus exact, car le séquestre n'a pas seulement la garde de la chose, il l'administre dans une certaine mesure (v) et en retire les produits. Nous venons, d'autre part, que, si le séquestre est salarié, il se rapproche du locateur d'ouvrage (5). En tout cas, entre le séquestre et le dépôt, il existe de grandes différences que les développements qui suivent feront ressortir : 1° Le dépôt ne peut avoir pour objet (pie des meubles ; le séquestre peut avoir pour objets des immeubles; 2° Le dépôt es! un contrat; le séquestre peut être ordonné par la justice ; 3° Le dépôt est gratuit, sauf convention contraire; le sé- questre est souvent salarié, sauf convention contraire; 4° Le salaire du dépositaire ne peut être égal à ses peines sans dénaturer le contrat; le salaire du séquestre est égal à ses peines ; 5° Le dépôt n'est pas relatif à une chose litigieuse; le sé- questre est relatif à une chose litigieuse ; 6° Le dépositaire doit restituer la chose à première réquisi- tion du déposant; il en est autrement du séquestre ; ; Domat, Lois civ., lut dépôt el du sé:{7 7" Le dépositaire peut, d'après beaucoup d'auteurs, resti- tuer le dépôt quand il lui convient; il en esl autrement du séquestre ; 8° Le séquestre peut et doit accomplir des actes d'adminis- tration sur la chose. SECTION II DU SÉQUESTRE CONVENTIONNEL 1255. Le séquestre est « ou conventionnel ou judiciaire » (art. 1955). Nous verrons qu'il existe aussi un séquestre lé- gai f). « Le séquestre conventionnel est le dépôt fait, par une ou » plusieurs personnes, d'une chose contentieitse entre les moins » d'un tiers qui s'oblige de la rendre, après la contestation » terminée, èi la personne qui sera jugée devoir l'obtenir » (art. 1956). Pothier (-), à qui cette définition a été empruntée, dit avec raison (*) : par deux ou plusieurs personnes ; et, en effet, si la chose contentieuse est déposée par un seul des prétendants, c'est le cas du dépôt ordinaire et la chose doit être rendue à première réquisition au déposant (*). Licet deponere tam unies quant //lares possunt, altamen apiul sequestrum tiônnisi plu- res deponere possunt (5). La différence de rédaction entre Po- thier et l'art. 195b' ne peut guère s'expliquer que par une inadvertance des rédacteurs du code civil. 1256. Aux ternies île l'art. 1957: « Le séquestre peut » n'être pas gratuit •>. C'est dire qu'il est gratuit de sa nature: une convention spéciale est nécessaire pour que celui qui s'est chargé du séquestré conventionnel ait droit à un salaire. Les effets de ce contrat varient suivant qu'il est gratuit ou salarié. («) V. infra, n. 1310. (*) N. 85. (3) Duranlon, XVIII, n. 85 ; Troplong, n. 249 ; Aubry et Rau, IV. p. 630, § 408, note 1 ; Pont, I, n. 547 ; Laurent, XXVII, n. 163 ; Guillouard, n. 164 et 166. — V. cep. Colmet de Sauterrc, VIII, n. 168 bis, I et III. (*) Mème~ auteurs. (*) L. 17, D., Depos. tel contra. 638 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE 1257. Si le séquestre est salarié, le contrat, comme le remarque fort justement Pothier ('), tient alors plutôt du louage que du dépôt (') : ce qui a surtout de l'importance au point de vue de la prestation des fautes, celui qui loue ses services étant tenu de la eulpa levis in abstracto, tandis que le dépositaire n'est tenu que de la eulpa levis in concreto (art. 1927) (*). C'est encore ce que disait Pothier ('). Si le séquestre est gratuit, le contrat est un véritable dépôt, sauf quelques différences. Aussi l'art. 1958 dit-il que, si le séquestre est gratuit, « il esl soumis aux règles du dépôt proprement dit, sauf les dif- férences ci-après ». C'est même un mandat en ce qui concerne les immeu- bles (5), si on attribue au séquestre les pouvoirs que lui re- connaissent la généralité des auteurs. 1258. Le séquestre est. du reste, gratuit par sa nature, de sotte qu'une convention formelle est nécessaire pour y atta- cher uu salaire ' . Cela résulte de ce que la loi en fait une variété du dépôt et aussi de ce que les mots « le séquestre peut n'être pas gratuit » paraissent considérer la gratuité comme la règle. Cl ce salaire doit, en raison de l'intention des parties, rémunérer exactement les peines du séquestre, car ce der- nier n'a pas agi dans une pensée libérale. 1259. « Le séquestre peut avoir pour objet, non seulement » des effets mobiliers, mais même des immeubles » (art. 1959). Au contraire, le dépôt ne peut avoir que des meubles pour objet. La mission du séquestre, au moins en ce qui concerne les immeubles, ne diffère-t-elle pas de la mission du dépositaire? La plupart des auteurs disent que, s'il s'agit d'immeubles, le séquestre conventionnel a la charge de les administrer, de 1 \. 90. (*) Laurent, XXVII, n. 16G ; Guillooard, n. 167 ; Hue, XI, n. 268. (3) Guillouard, n. 167. 1 N. 90. Guillouard, a. 168. 6 (îuillouard, n. lfiT. SÊQ1 ESTRE CONVENTIONNEL les louer, d'y faire les réparations, «le percevoir 1rs revenus ('). 1260. Tandis que dans le contrai i 1 principes, accordée que contreceluiqui a ordonné les dépenses, et, du reste, nous avons montré qu'elle ne peut être intentée • nuire le déposant dans le cas où la restitution est faite ;i un tiers. (»n se contente de dire en sens contraire que le séques- tre doit avoir en équité une action contre tons ceux qui lui ont confié la garde de la chose : cela est insuffisant. 1265. Dans le cas où les déposants non gagnants sont sou- mis à l'action du dépositaire, y sont-ils soumis solidairement ou seulement pour leur part dans la dette commune? Nous adoptons cette seconde solution ('), qui a le double avan- tage d'être d'accord avec les principes que nous avons rap- pelés en parlant de l'action du dépositaire contre les dépo- sants, et avec la solution qu'on admet sur ce dernier point. Polluer (') exprimait l'avis contraire, auquel se sont rangés plusieurs auteurs modernes (!). II se fondait sur ce que cha- cune des parties est déposante pour le tout; mais ne peut-on pas dire aussi bien que toutes les fois que diverses personnes confient une chose à une autre, elles la confient chacune pour te tout? On a dit encore que le dépositaire a suivi la foi de tous les déposants; mais ne pourrait-on pas en dire autant dans le dépôt ordinaire? On a invoqué enfin l'art. 2002 C. ciw, mais ce texte est spécial au mandat. 1266. Les pouvoirs du séquestre conventionnel sur la chose qui lui est confiée sont les mêmes qu'en matière de séquestre judiciaire (*). SECTION II DU SÉQUESTRE JUDICIAIRE 1267. De la rubrique de la section III (du séquestre ou dé- pôt judiciaire), il résulte qu'aux yeux' de la loi, le séquestre (')Guillouard, n. 171. (2) N. 89. (') Pont, I, n. 549; Aubry el liau, IV, p. 631. p. i08, note 3. — Cpr. Laurent, XXVII, n. 167; Hue, XI, n. 269. (*) V. infra, n. 1293 s., el supra, n. 1259. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. -il 642 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE judiciaire et le dépôt judiciaire ne sont qu'une seule et même opération ('), et c'est encore ce qui ressort de l'art. 1961, qui énumère les différents cas de séquestre ou de dépôt avec la qualification unique de séquestre. Polhier (2) disait égale- ment : « Il y a plusieurs cas de dépôt judiciaire » et en énu- mérant ces cas il leur donnait indifféremment le nom de dé- pôt ou de séquestre; il importe donc peu qu'il traite ensuite séparément le séquestre des choses litigieuses et le dépôt des choses non litigieuses. Cependant divers auteurs disent qu'il y a séquestre en cas de litige (art. 1961-2°) et dépôt dans le cas contraire (art. 1961-1° et 2° (3). On n'attache à cette solution aucun intérêt pratique. § 1. Cas dans lesquels il y a lieu à la nomination du séqucsti e judiciaire. 1268. « La justice peut ont miner le séquestre. — 1° Des » meubles saisis sur un débiteur ,' — $" lé un immeuble ou » d'une chose mobilière dont lu propriété ou lu possession est » litigieuse entre deux ou plusieurs personnes; — S0 Des cho- » ses qu'un débiteur offre pour sa libération » (art. 1961). Pothier, outre ces cas (v), en citait d'autres (5) : celui d'une contestation sur une succession ; mais il disait ne formuler que des exemples (6). 1269. C'est déjà une raison suffisante pour affirmer avec la jurisprudence, et contrairement à une opinion assez répan- due, que l'art. 1961 n'est pas limitatif (7). ') Guillouanl. n. 172. *)N. 91. ;•*) Troplong. n. 275: Duvergier, n. 536: Laurent, XXVII, n. 171: Hue, XI, n. 270. 1 N. 91 et 98. s N. 98. « N. 98. "i Cass., 21 doc. 1826, D. Rép., V> Dépôt, n. 22G. — Bourges, 8 mars 1822, S. chr. — Agen, 8 janv. 1825, S. chr. — Bordeaux, 17 mai 1831, S., 31. 2. 287. — Paris, 6 et 23 janv. 1866, S., 66. 2. 41, D., 67. 2. 157. — Paris, 4 août 1871, D., ;::. 2. 21. — Nancy, 26 fév. 1876, sous Cass., 10 juif. 1876, S., 76. 1. 405, D., 76. 1. 313. — Bordeaux, 29 mai 1883, D. Rép., Suppl., \» Divorce, n. 347. — Paris, 15 avril 1885, S., 87. 2. 183, D., 86. 2. 127. — Nancy, 31 oct. 1885, S., 86. 2. 239. — Pari*, 21 avril 1886, S., 87. 2. 203, D., 87. 2. 52. — Bordeaux, 2 déc. 1897, Rec. SÉQUESTRE JUDICIAIRE oi.'f Ce (jtii confirme la tradition historique, c'est que l'ordon- iKiiicc d'avril Hib7 tit. 19, art. '1 disait plus clairement en- core : « Les séquestres pourront être ordonnés tant sur la demande des parties que d'office, en cas que les juges esti- ment qu'il y ait nécessité de le faire ». Les travaux préparatoires n'indiquent pas l'intention d'in- nover, eteependant celte innovation est trop grave pour qu'on puisse facilement l'admettre en dehors d'une intention mani- festée par le législateur. Quant au texte de l'art. 1901, il contient, à la vérité, une énumération, mais rien n'indique qu'elle soit limitative; et la preuve qu'elle ne l'est pas, c'est que nous rencontrerons d'autres textes autorisant, dans diverses hypothèses, l'éta- blissement d'un séquestre. Au surplus, l'interprétation contraire abouti à un résultat des plus fâcheux, car elle empêche les tribunaux de s'opposer à de mauvaises gestions ou à des dilapidations. En vain dit- on que le possesseur apparent doit pouvoir, en équité, pro- fiter des avantages de sa possession ; sasituation, tout d'abord, n'est pas plus favorable que toutes celles où la loi autorise formellement un séquestre, et, d'autre part, l'établissement d'un séquestre, chargé d'administrer pour le mieux, n'est pas dénature à nuire au possesseur. 1270. Enfin certains auteurs admettent le caractère limi- tatif de l'art. 1961, en dehors des instances relatives à la possession ou à la propriété, et, au contraire, permettent, dans toutes les instances de ce genre, la nomination d'un séquestre ('). Les arguments que nous avons invoqués nous Bordeaux,^. 1.129. — Trib.com. Nantes, llaoût 1886, Rec. Nantes, 87. 36. — Trib. coin. Nantes, 20 nov. 1886, Rec. Nantes, 87. 97. — Trib. civ. Bruxelles, 3avril 1895, l'asicr., 95. 3. 164. — Trib. civ. Toulouse, 28 juil. 1897, Gaz. Trib. Midi, 6 fév. 1898, — et les arrêts cités dans notes suivantes. — De Belleyme, Ordonn., II, p. 208 s.; Larombière, 77/. et prat. des oblig., art. 1180, n. 6; Laurent, XXVII, u. 173; Colmet de Santerre, VIII, n. 172 bis, II; Guillouard, n. 175. — Conlra Cass., 13 juil. 1851, D.. 51. 1. 269. — Cass., 10 juill. 1876, S., 76. 1. 405, D., 76. 1. 313. — Paris, 5 mars 1870, S., 70. 2. 204, U., 71. 2. 89. — Paris, 5 mars 1885, D. Rép., Suppl., v» Dépôt, n. Si. — Paris, 2 avril 1895, Gaz. Pal., Table, )er sem. 1895, V Séquestre, n. 1. — Trib. civ. Oran, 2 oct. 1894, Droit, 11 oct. 1894. — Trib. civ. Seine, 8 juil. 1898, Droit, 8 oct. 1898. (•) Poat.I, a.560;Aubry et Rau, IV, p. 632 et 633, § 109, notes 4 s. ; Hue, XI, n. 271. Oïl DU DÉPÔT ET DL SÉQUESTRE empêchent d'accepter celte distinction ; notamment divers textes, autres que l'art. 1961, prévoient des cas de nomina- tion de séquestre en dehors de toute instance. 1271. Par application du principe qui précède, en cas de procès en divorce ou en séparation de corps, les tribunaux peuvent, pour empêcher les dilapidations du mari, ordonner le séquestre des valeurs de la communauté ('). Ils peuvent en faire autant, pendant ou après l'instance en séparation de biens, pour les biens qui étaient communs ou ceux qui sont restés indivis (*). 11 peut être encore nommé un séquestre : Après l'ordonnance du président qui a envoyé le légataire en possession, à la requête des héritiers qui contestent la vali- dité du legs et, en attendant que la question soit tranchée au tond, craignant les dilapilations du légataire (3) ; Pendant une expertise destinée à apprécier le bien fondé d'une demande en résolution intentée par le bailleur contre le preneur (*) ; Lorsqu'une donation est réductible, jusqu'au partage entre le donataire et les héritiers (5) ; Pour percevoir le prix de la vente de marchandises faite par le preneur, si les droits du bailleur sont en dan- ger C) ; Pour empêcher qu'un débiteur ne détruise les biens qu'il a affectés à la garantie de sa dette (7) ; Pour empêcher l'exécution d'une vente d'immeubles que les créanciers du vendeur prétendent avoir été faite en fraude de leurs droits (s) ; (') Cass. civ., 10 juin 1898, D., 98. 1. 536. — Cass. req., 28 juin 1899, D., 99. 1. 447. — Guillouard, n. 175. — Cpr. Bordeaux, 11 juin 1893, D., 93. 2. 518 (biens propres de la femme). — Contra Lyon, 25 mai 1892, D., 92. 2. 135. — Trib. civ. Bruxelles, 25 dov. 1893, Pasicr., 94.3. 43. — Hue, XI, n. 272. (») Chambéry, 27 jnil. 1898, D., 99. 2. 352. (SJ Nancy, 20 déc. 1892, D., 94. 2. 9 (legs universel). — Cohendy, Note, D., 94. 2.9. (*) Cass. req., 9 janv. 1893, D., 93. 1. 120. (5) Paris, 17 avril 1894, Gaz. Pal., 94. 2. 25. (6) V. notre Tr. du contr. de louaye, 2? éd., I, n. 711. (') Trib. civ. Orlbez, 21 fév. 1893, Loi, 28 mars 1893. (*) Trib. civ. Toulouse, 28 juil. 1897, Gaz. Trib. Midi, 6 fév. 1898. SÉQUESTRE JUDICIAIRE ')'»•"> Pour garder une somme offerte par le débiteur à son créan- cier el que ce dernier juge insuffisante (')• 1272. Mais, en dehors d'un texte, le séquestre ne peut être ordonné qu'en cas de litige (*). Cela résulte des exemples mêmes de la loi et aussi de ce qu'en dehors d'une contesta- tion les tribunaux n'ont aucun pouvoir- que ceux que les tex- tes leur accordent, leur rôle étant exclusivement, en principe, de trancher des contestations. Cependant la cour de cassation s'est récemment prononcée en sens contraire (3). Dans tous les cas, en décidant qu'il faut que ce litige porte sur la propriété (*), on a interprété trop étroitement l'art. 1061-2°. 1273. Il est même arrivé aux tribunaux d'ordonner le séquestre d'un document dont la propriété n'était pas con- testée, à raison de l'intérêt que des tiers pouvaient avoir à le consulter (5). 1274. Le séquestre ne peut porter sur des objets dont la gestion n'est pas susceptible d'être confiée à des tiers. Ainsi, on a décidé que la gestion d'une pharmacie ne peut être con- fiée à un séquestre (8). Il en serait de même d'un office mi- nistériel. 1275. Le séquestre des choses qu'un débiteur offre pour sa libération et dont parle l'art. 1901, § 3, est une reproduc- tion de l'art. 1264, qui décide que si le corps certain dû est otlert par le débiteur et refusé par le créancier, le débiteur v') Décidé cependant qu'il n'y a pas lieu, en ce cas, à la nomination d'un séques- tre, le créancier ayant pu délivrer quittance de la somme offerte, sous réserve de ses droits. Lyon, 3 déc. 1897, Mon. jud. Lyon, 8 mars 1898. H Nancy, 31 oct. 1885, S., 86. 2. 239. Cass. req., 21 fév. 1899, S.-, 99. 1. 212, D., 99. 1. 245.— Cet arrêt admet qu'il peut y avoir lieu à séquestre si un débiteur se reconnaît dans l'impossibilité d'ad- ministrer ses biens et s'il consent à la nomination d'un séquestre, demandéeparses créanciers hypothécaires. Mais la cour de cassation se contente de mentionner les faits ; la question de savoir si un séquestre judiciaire peut être désigné en dehors d'une contestation n'avait pas été posée et n'a pas été explicitement résolue. 4 Nancy, 31 oct. 1885, précité. — Cpr. svpra, n. 1270. i5i Trib. civ. Nancy, 12 fév. 1895, Rec. Nancy, 95. 157 dossiers et archives dé- pendant de la succession d'un architecte et transmis à son successeur; séquestre pour que les héritiers les aient à leur disposition en vue des actions en responsabi- lité dirigées contre eux). il Lyon. 12 mai 1894, Loi, 9 fév. lsr.C>. 646 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE pourra obtenir de la justice la permission de le mettre en dépôt dans quelque autre lieu. Pour le cas où il s'agit d'argent, les art. 1257 à 1263 orga- nisent la procédure, laquelle est poursuivie sans la permis- sion du juge. D'ailleurs, le séquestre d'une somme d'argent ne peut jamais être ordonné, l'ordonnance du 3 juillet 1816 (art. 3) défendant aux tribunaux d'autoriser ou ordonner des consignations ailleurs qu'à la caisse des dépôts et consigna- tions ('). C'est une question délicate et étrangère à notre sujet que de savoir laquelle de ces deux procédures est applicable aux dettes de genre. Quoiqu'on soutienne que l'art. 1264 ne s'applique qu'aux meubles, à raison du mot d'enlèvement qu'il emploie, l'art. 1961, qui use du terme de chose*, s'applique aux immeu- bles ('-). 1276. D'après l'art. 46o C. inst. crim., si un accusé ne se présente pas, le président de la cour d'assises ordonne que les biens seront <- séquestrés osons la garde de l'administra- tion des domaines. 1277. L'art. 681 C. pr. établit un cas de séquestre dans les termes suivants : « Si les immeubles saisis ne sont pas loués ou affermés, le saisi restera en possession jusqu'à la vente, comme séquestre judiciaire, à moins que, sur la de- mande d'un ou plusieurs créanciers, il n'en soit autrement ordonné par le président du tribunal, dans la forme des or- donnances sur référé ». Il suit de là que le président peut nommer séquestre le créancier saisissant ou toute autre personne (3). 1278. L'art. 602 C. civ. porte que si l'usufruitier ne trouve pas de caution, « les immeubles sont donnés à ferme ou mis sous séquestre •>. 1279. L'art. 29 du décret du 28 fév. 1852, sur les sociétés (l) Rouen, 17 fév. 1894, Rec. Rouen, 94. 1. 178. (*) V. en ce sens Larombière, Th. et prat. des obli;/., art. 1264, n. 8; Guillouard. n. 202. (») Montpellier, 14 août 1849, S., 50. 2. 16, D., 50. 5. 419. — Guillouard, n. 175. — V. aussi Lyon. 27 mars 1873, D., 75. 2. 149. SÉQUESTRE JUDICIAIRE 0Î7 de Crédit foncier, dispose qu'en eus de retard du débiteur, la société peut, en vertu d'une ordonnance rendue sur requête par le président du tribunal civil de première instance, et quinze jours après une mise en demeure, se mettre en pos- session des immeubles hypothéqués, aux frais et risques du débiteur en retard. D'après l'art. .'50 : « Pendant la durée du séquestre, la société perçoit, nonobstant toute opposition ou saisie, le mon- tant des revenus ou récoltes, et l'applique par privilège à l'acquittement des termes échus d'annuités et des frais ; ce pri- vilège prend rang, etc. ». Il ne résulte pas de ce texte que les saisies et oppositions faites sur les objets séquestrés soient nulles ('), elles sont seu- lement sans influence sur la perception des revenus et des récoltes par le Crédit foncier (-). L'opinion contraire aurait le grave inconvénient d'empêcher tout créancier, même privi- légié et quelque favorable que soit son privilège, de se mani- fester vis-à-vis du Crédit foncier, alors cependant que l'art. 30 fait passer avant le privilège du Crédit foncier certains autres privilèges. En vain dit-on qu'une saisie implique main-mise sur l'objet saisi et que cette main-mise appartient déjà au Crédit foncier; la saisie n'implique pas main-mise effectuée sur les objets saisis. En vain encore dit-on que le séquestre du Crédit foncier est une antichrèse ; c'est une erreur. Il s'agit bien, dans le décret de 1852, d'une mise en séquestre (:i), et non pas, comme on l'a prétendu, d'une antichrèse (*). En effet le droit conféré aux sociétés de Crédit foncier est opposable aux tiers sans trans- cription, tandis que l'antichrèse estsoumise à la transcription. En outre, tandis que fantichrésiste impute sur les fruits qu'il perçoit des intérêts de sa créance, le Crédit foncier ne peut imputer sur les fruits que les annuités en retard. (•) Cass. civ., 23 fév. 1892, S., 92. 1. 237, D., 93. 1. 425. — S., loc. cit., D., loc. cil. (2) Cass. civ., 23 fév. 1892, précité. — S., loc. cit., D., loc. cit.; .Tosseau, Tr. du crédit fonc, I, m. 424; Montagnon, Tr. sur les soc. de crédit fonc. n. 169; Girault, Les privil. du crédit fonc, n. 123. 3 Girault, op. cit.. n. 123. .* Montagnon, op. cit., n. 168. 648 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE 1280. Si l'immeuble est loue, la quittance de loyers ou fermages donnée ou, si elle porte sur trois ans au moins de loyers ou fermages non échus, transcrite conformément à l'art. 2 de la loi du 23 mars 18oo) avant l'inscription hypo- thécaire prise par le Crédit foncier lui est opposable, confor- mément au droit commun ' . Si la quittance est postérieure (ou transcrite postérieure- ment) à l'inscription du Crédit foncier, elle ne lui est pas oppo- sable, quoique le Crédit foncier n'en soit pas encore mis en possession; car la mise en possession a sa cause générative sans l'hypothèque, et produit ses effets du jour de l'inscrip- tion (*). A plus forte raison la quittance n'est-elle pas opposable au Crédit foncier si elle est donnée (ou transcrite) postérieure- ment à la mise en possession de ce dernier ('). 1281. Le cas de meubles saisis sur un débiteur, que l'art. 1961 a rangé au nombre des séquestres judiciaires, est un cas de séquestre légal que nous traiterons à part. 1282. I n séquestre ne peut être, d'après l'opinion géné- rale, nommé pour gérer et liquider le patrimoine entier d'un débiteur, notamment en cas de déconfiture de ce débiteur ('). D'une part, dit-on, le séquestre n'est, par essence, qu'une mesure conservatoire, puisque la loi le qualifie de dépôt. D'autre part, l'art. 1961 n'admet le séquestre que sur un immeu- ble déterminé et non pas sur un patrimoine tout entier. Enfin, le séquestre, à moins d'être ordonné sur la demande de tous les créanciers, porte préjudice à certains d'entre eux, puisque les créanciers qui n'auraient pas participé à la demande de séquestre verraient, malgré eux, suspendre leur droit de poursuites individuelles. On ne peut donc, d'après l'opinion 1 .lusseau. o]>. cit., 3» éd.. [, n. 125; Girault, op. cit., n. 122. - Aix, 2 mars 1891, S., 94. 2. 1T2. — Jousseau, loc. cit. — Contra Giraull, loc. cit. (*) .losseau, loc. cit.; Girault, loc. cit. (*) Cass., 17 janv. 1855, S., 55. 1. 97. — Gass. civ., LO juil. 1870, S., 76. 1. 405, ]).. 76. 1. 313. — Gass. civ., 13 nov. 1889, S., 9o. 1. 8, D., 90. 1. 34. — Poitiers, 20 juil. 1892, Gaz. Tri/,., 20 août 1892. — Trib. civ. Orthez, 21 Tév. 1893, Loi, 28 mari 1893. — Garraud, Dp lu déconfiture, p. 224; Gharmont, Rev. crit., XX, 1891, p. 81 s. ; Mue. XI. n. 273 et 274. — Contra Guillouard, n. 176. -i 01 l 8TRE Jl DU IAIIU 6 '»•» commune, nommer un séquestre au patrimoine d'un débiteur en déconfiture. L'opinion contraire est peut-être préférable; d'abord elle o'arrive pas ;'i soutenir nécessairement, comme on le prétend, que les poursuites individuelles soient ;ilU SÉQUESTRE d'un séquestre, le tribunal n'est jamais tenu de faire cette nomination (M; l'art. 1951 dit qu'il « peut » ordonner le séques- tre, et il est, du reste, naturel qu'on ne recoure pas à cette mesure si les circonstances ne l'exigent pas. Ainsi il n'y a lieu à nomination d'un séquestre pendant le litige relatif à la propriété d'un immeuble, que si une mau- vaise gestion est à craindre du possesseur (*). § 11. Mode de nomination du séquestre judiciaire. 1287. La nomination du séquestre judiciaire doit être faite en audience publique et non en chambre du conseil, car le séquestre est nommé à la suite d'une contestation (s). 1288. Le juge des référés peut ordonner le séquestre judiciaire ' , sauf en matière commerciale, où il n'a aucun pouvoir (8) et aussi, par application du droit commun, si la mesure préjuge le fond ») ou n'est pas urgente (7). (') Guillouard, n. 180. 28 avril 1813, S. chr. — Guillouard, n. 180. 1 I >'une statistique dressée par M. Berlin eu 1876, il résulte que le tribunal de la Seine a nommé des - qoeslres sept l'ois à l'audience et quatre fois en chambre du conseil. Hloch, préface de Berlin, Chambre du conseil, 3" édit., 1894, p. 9. 1 Cass., 12 avril 1869, S., 69. 1. 252, 1).. 69. 1. 133. — Cass., 14 mars 1882. s., 82. 1. 349, D., 82. 1. 241. - Cass. civ., lOjanv. 1898, D., 98. 1. 536. — Cass. req., 21 fév. 1899, S.. 99. 1. 212, D , 99. 1. 245. — Cass. req., 28 juin 1899, D., 99. 1. 447. - Bordeaux, 4 avril 1855, S., 56. 2. 117. — Paris, 23 janv. 1866, S., 6G. 2. 41, D.. 66. 2. 28. — Paris, 18 nov. 1871, S . 71. 2. 197. — Nancy, 26 fév. 1876, sous Cass., 10 juil. 1876, S . 76. 1. 405, 1).. 76. 1. 313. — Caen, 23 juil. 1878, S., 79. 2. 15. — Riom, 0 déc. 1878, D., 80.2. 3. — Paris. 15 avril 1885, S., 87. 2. 183, 1»., 86 2. 127. - Nancy, 31 oct. 1885, S., 86. 2. 239. — Paris, 21 avril 188(5. S., 87. 2. 2 >:'>. D.. 87. 2. 52. — Paris, 12 janv. 1sn7, Mon.jud. Lyon, 22 avril 1887. — Grenoble, 16 janv. 1888, liée. Grenoble, 88. 76. — Angers, 26 juin 1889, S., 81». 2. 237. — Nancy, 20 déc. 1892, D., 94. 2. 9.— Bordeaux, 31 janv. 1893, Bec. /;..,- deaux,9i. 1. 23 (choses formant l'objet d'une instance). — Chambéry, 27 juil. 1898, I».. 99. 2. 352. — Trib. civ. Orlhez, 21 fév. 1893, Loi, 28 mars 1893. — Trib. civ. Guelma, 21 mai 1896, Gaz. Trib.. 27 mai 1896. — Trib. civ. Bordeaux, 29 nov. 1897, liée. Bordeaux, 98. 2. 17. — De Belleyme, Ord. sur req., II, p. 208 s. — Guillouard, n. 178: Cobendy, Noie, I)., 94. 2. 9: Hue, XI, n. 278. (5) Paris, 5 mai 1888, Ann. dr. corn., 1888, p. 153 faillite . (6) Nancy, 31 oct. 1885, précité (le juge des référés doit refuser de nommer un séquestre des fonds d'une loterie, si les défendeurs contestent la qualité d'admi- nistrateurs de la loterie qui leur est attribuée par les demandeurs). (7) Grenoble, 16 janv. 1888, précité il n'y a pas urgence lorsque la personne qui BÉQI i BTRB .il DICIAIRE 651 Ainsi il est certain (m'en ordonnant l'expulsion ;is le fond, puisqu'elle est purement conservatoire. L'art. 1961, fût-il limitatif, est étranger à la question, que résont l'art. 806 G. pr., en permettant au juge des référés de prendre toutes mesures conserv atoires. Le président du tribunal peut également nommer un séquestre par une ordonnance rendue sur requête (*). Car Itout d'abord, il y a des cas nombreux où la nomination d'un séquestre ne fait pas partie de la juridiction contentieuse, et, comme on ne peut alors s'adresser au tribunal (le tribunal n'est compétent en matière gracieuse que dans les cas où un texte établit celle compétence), il faut bien s'adresser au pré- sident. D'un autre coté, l'art. 54 du décret du 30 mars 1808 dispose : « Toutes requêtes à lin d'arrêt ou de revendication de meubles ou autre* mesures d'urgence seront présentées au président du tribunal, qui répondra par son ordonnance ». Quant à l'art. 11)61 , il dit simplement que la justice peut ordonner le séquestre, et c'est arbitrairement qu'on traduit ce mot comme désignant le tribunal. Mais les partisans de notre système l'appliquent sans dis- tinguer entre le cas où il y a contestation et le cas où le séquestre est demandé en dehors de toute contestation. Or il nous semble que dans la première de ces hypothèses le séquestre ne peut être nommé par une ordonnance sur re- quête; cette ordonnance a un caractère essentiellement gra- cieux. demande la nomination d'un séquestre à une succession n'établit pas l'existence de ses droits). — Trib. civ. Guelnia, 21 mai 18%, précité. (') Paris, 21 août 1876, S., 76. 2. 317. — Paris, 21 avril 1886, S., 87. 2. 203, D., 87. 2. 52. — Paris, 10 fév. 1888, 24 fév. 1888, 6 août 1889, S., 92. 2. 249 (sous-note), D., 89. 2. 233. — Paris, 21 janv. 1891, S., 92. 2. 249. — Gérard, Ont. sur placet, p. 120; Agnel, Code man. du locataire, n. 1131 ; Tissier, Note, S., 92. 2. 251, § 3. (2) Note, D., 66. 2. 25; Berlin, Droit, 6 et 9 janv. et 15 mars 1866. — Contra Paris, 6 et 23 janv. 1866, S., 66. 2. 41, D., 66. 2. 27. - Paris, 4 mai 1867, S., 67. 2. 169, D., 67. 2. 157. — Riom, 6 déc. 1878, D., 80. 2. 3. — Hue. XI, n. 278. 632 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE < III. Choix dit séquestre judiciaire. Caractère de sa mission. 1289. Aux termes de l'art. 1963: « Le séquestre judiciaire » est donné, soit à une personne dont les parties intéressées » sont convenues entre elles, soit éi mie personne nommée d'of- » fice par le juge. — Dans l'un et l'autre cas, celui auquel la » chose a été confiée est soumis à toutes les obligations qu'em- » porte h' séquestre conventionnel ». Il résulte de ce texte que le juge ne peut désigner un sé- questre que si les parlics ne s'entendent pas sur le choix ('); la désignation faite par le juge ne ligure eu eilet dans le texte qu'eu second lieu ; du reste, Polluer v-) s'exprimait formelle- ment en ce sens ; et il est enOn naturel que les parties, qui connaissent mieux les qualitésdes personnes, puissent s'accor- der sur le choix du séquestre. Aussi le choix du juge n'est-il que subsidiaire et ne doit-il l'emporter que si les parties ne s'entendent pas (3). 1290. Nous avons déjà dit que le caractère du séquestre judiciaire se rapproche du dépôt ('). Le séquestre judiciaire est nommé pour sauvegarder des intérêts privés. Cependaut la jurisprudence le considère comme chargé d'un service public (5). 1291. On s'est demandé si la nomination d'un séquestre judiciaire est un contrat ; la question n'a d'ailleurs aucun intérêt pratique, puisque la loi détermine les obligations du séquestre. Klle nous parait singulière; la nomination du séquestre est un jugement et on n'a jamais songé à qualifier un jugement de contrat ou de quasi-contrat. C'est ce que dit Domat 6 . Polluer admet qu'il y a contrat (') Guillonard, n. 181 bis. — Contra Laurent, XXVII, n. 181. - Tr. de la pi oc. cic . n. 306. (3) Guillouaril, toc. cil. — Contra Laurent, loc. cit. i'i V. supra, a. 12r>i. (r') Cass. ciim., 16 déc. 180.'}, tf.. 95. 1. 201 et Trib. corr. Carcas qui en concluent que l'injure adressée à un séques- tre tombe sous l'application de l'art. 224 C. pén.}. (") Lois civiles. Du dépôt el du séquestre, Introduction. BÉQI i BTBE -il DU MIRE (i.">:{ si le juge sanctionne le choix des parties el quasi-contrat dans le cas contraire (') et la même idée a été reproduite bous le code civil (*). Cela est faux, car si même les parties B'entendenl sur le choix du séquestre, il n'en est pas moins \r;ii que l'ordre de mise sous séquestre est donné par le juge- Enfin certains auteurs disent qu'il y a toujours quasi- contrat (3). 1292. Le séquestre n'est pas forcé d'accepter la mission qui lui est confiée (*). 11 en est ainsi même des séquestres ou administrateurs inscrits sur une liste dressée d'avance par le tribunal § IV. Droits el obligations du séquestre judiciaire. 1293. Aux termes de l'art. 1962 : « L'établissement d'un » gardien judiciaire produit entre le saisissant et le gardien » des obligations réciproques: Le gardien doit apporter pour » la conservation des effets saisis les soins d'un bon père de » famille. — // doit les représenter, soit à la décharge du » saisissant pour la vente, soit à la partie contre laquelle les » exécutions ont été faites, en cas de main-levée de la saisie. » — L'obligation du saisissant consiste à payer au gardien le » salaire fixé par la loi ». 1294. Le séquestre est soumis aux obligations du déposi- taire même dans les cas où l'opinion commune voit un dépôt judiciaire (6). 1295. La nomination d'un séquestre, étant spéciale et pro- visoire, laisse, à la différence de la faillite, intacte la capacité de la personne dont les biens sont séquestrés ; elle peut donc s'engager et ses engagements sont valables sur tous ses 1 n. 98. - Laurent. XXVII, n. 172. (*) Guiilouard, n. 181. («) Paris, 17 janv. 1SS9, S., 89. 2. 230 (impl.J. — Paris, G mars 1890, sous Cass., 29 janv. 1891, D., 91. 1. 395. — Massé et Vergé, V, p. 17, § 742, note 8; Anbry et Rau, IV, p. 633, § 409, note 8; Hue, XI, n. 278. (•) Paris. 17 janv. 1889, précité. — Hue, toc. cit. I6l Guiilouard, n. 172. 654 DU DÉPÔT LT DU SÉQUESTRE biens (*). C'est ce que Loisel exprimait ainsi : « Séquestre garde, et la main de justice ne dessaisit et ne préjudicie à personne » ('). Elle peut donc aussi disposer de ses biens (3). El le peut notamment donner un mandat (') et ce mandat l'obligea rembourser les frais et les avances du mandataire (s). De même le mandataire reste comptable envers la personne dont les biens sont séquestrés et ne le devient pas envers le séquestre (6), et la compensation légale est admise entre sa créance et sa dette (7). 1296. La possession des biens séquestrés n'est même pas enlevée au débiteur (8J. C'est contre lui et non contre le séquestre que les actions en justice doivent être intentées 9 . 1297. Pour la même raison, en admettant qu'un séquestre puisse être nommé aux biens d'un débiteur en déconfiture (,0), celte nomination n'enlève pas aux créanciers le droit d'exer- cer des poursuites individuelles contre le débiteur (n), car la déconfiture, dans notre droit, n'entraîne aucun dessaisisse- ment. 1298. Le séquestre, aux termes de l'art. 1902, ne peut faire que les actes conservatoires, c'est-à-dire les actes desti- nés à empêcher que les objets qui lui sont confiés ne se dété- riorent. Gela résulte aussi de l'assimilation que la loi établit entre le séquestre et le dépositaire. Toutefois, l'opinion commune permet au séquestre de fnirc ' Cass. belg., 6 oct. 1892, S., 93. i. 19. — Mesdach de ter Kiele, Concl. sous Cass. belg., 6 oct. 1892, précité. | l.iv. V. tit. IV. n. 769. 1 ( !ass. belg., 6 oct. 1892, précité. — Mesdach de ter Kiele, Inc. cit. ' Cass. belg., 6 oct. 1892, précité. I iass. belg., 6 oct. 1892, précité. ' i iass. belg., 6 oct. 1892, précité. C) Cass. belg., 6 oct. 1892. précité. * Dumoulin, Coût, de Paris, tit. I, Des fiefs, § 1, n. 21. ' Trib. civ. Lyon, 15 mars 1889, Mon. jud. Lyon, 12 juin 1889. (,0) V. supra, n. L282. Cass., 17 janv. L855, S.. Tk>. 1. 97, D . f.ô. 1. 11. — Nancy, 26 fév. 1876, sous Cass., 10 juil. 1876, S., 76. 1. 403, 1».. 76. 1.313. — Amiens, 22 fév. 1884, D. Hép.. Suppl., \° Dépôt, a. 8i. — Cuillouard, n. 176. — Contra Lyon. 27 mars 1873, 1».. 75. 2. 149. - Charmont, Reo. cit., XX. 1891, p. 81 s. SÉQUEST11Ë M DU IAIRE 655 les actes d'administration provisoire (' . parla raison qu'ils sont nécessaires a la conservation d<- la chose. Cela est évi- demment inexact. On admet (jne le séquestre peut faire les baux de courte durée (*), et on entend parla les baux de trois ans ('), par-ana- logie avec la si I nation de l'administrateur des biens d'un aliéné. 1299. Le séquestre peut faire les dépenses nécessaires à t'entre tien de la chose ('•). Les fournisseurs et ouvriers employés par le séquestre dans les limites de ses pouvoirs ont le droit d'agir directement contre la partie qui a obtenu gain de cause, puisque le sé- questre est mandataire de cette dernière (3). Ils ont même le privilège des frais de justice sur les biens séquestrés (e). 1299 bis. Le séquestre doit consigner à la caisse des dé- pôts et consignations les fonds qu'il touche ("), car l'ordon- nance du 3 juil. 1810 (art. 2, n. 5) le dit expressément pour tous les capitaux touchés par les séquestres. Il ne peut en faire emploi, même au profit des biens sé- questrés (8), il ne peut donc les employer au payement des dettes. Le séquestre qui omet de faire à la caisse des dépôts et con- signations les dépôts des capitaux, en doit les intérêts, car il a commis une faute dont il est responsable. On décide cependant qu'il ne doit les intérêts que des som- mes dont il tire profit (9). (l) Cass., 17 janv. 1855, S., 55. 1. 97, D., 55. 1. 11. — Lyon, 18 avril 1874, D., 70. 2. 195. — Laurent, XX, n. 183; Guillouard, n. 177. (*) Rennes, 23 déc. 1818, S. chr. — Toulouse, 26 avril 1893, S., 96. 2. 252, D., 94. 2. 556 (par exemple deux ans). — Guillouard, n. 182. (3) Guillouard, n. 182. — Il ne peut faire un bail de neuf ans. — Trib. civ. Bruxel- les, 14fév. 1894, Pasicr., 94. 3. 340. (♦) Bordeaux, 27 juil. 1830, S. chr. — Guillouard, n. 183. H Bordeaux. 27 juil. 1830, S. chr. — Guillouard, n. 183. (') Cass., 29 juin 1875, S., 75. 1. 397, D., 75. 1. 471. — Cass., 26 juin 1878, S. 78. 1. 460, D., 78. 1. 343. — Cass., 18 mai 1881, S., 82. 1. 57. — Cass.. 30 mars 1886, S., 86. 1. 264. — Guillouard, n. 183. I1) Chambéry, 15 juil. 1890, Rec. de Grenoble, 91. 2. 67 (pour les sommes tou- chées et pour le reliquat de compte). — Guillouard, n. 187. B Gonlra Chambéry, 15 juil. 1890, précité. I ' Guillouard, n. 187. 656 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE Mais il no doit les intérêts qu'au taux servi par la caisse des dépôts et consignations, car c'est à cela que se réduit le préjudice causé aux parties ('). 1300. Le séquestre judiciaire est. comme tout détenteur de la chose d'aulrui, responsable de sa faute. S'il reçoit un salaire il répond de sa faute légère in abs- tracto {-). S'il ne reçoit pas de salaire, on admet qu'il ne répond que de sa faute lourde, comme dépositaire (s). 1301. Les tribunaux ne peuvent donner au séquestre judi- ciaire des pouvoirs que la loi ne lui accorde pas, c'est-à-dire, d'après la jurisprudence, le droit de faire des actes excédant l'administration provisoire (*). Les tribunaux ne peuvent donc pas confier au séquestre la mission de vendre les biens séquestrés (5), de toucher des sommes dues ('), de payer les dettes (7), d'exercer, d'une ma- nière générale, toutes poursuites [8), de procéder à des dis- tributions amiables entre créanciers (•). Cependant, en matière de succession, les tribunaux s'auto- risent à donner de larges pouvoirs au séquestre ('"). 1302. Le séquestre judiciaire peut de plein droit, à moins de décision contraire, réclamer un salaire, car telle est la règle pour tous ceux qui obtiennent une mission de justice ("). (•) Chambéry, 15 jui!. 1890, liée. Grenoble, 91. 2. 67. — Guillouard, n. 187. — V. cep. Trib. corn. Marseille, 17 mai 1867, D., 07. 3. 7'.». (') Guillouard, n. 186. Tr'.b. civ. Sainl-Lô, 12 fév. 1886, Pand. franc., 87. 2. 138. « Cas*., 14 nov. 1883, S., 85. 1. 423. — Cass. civ., 12 nov. 1889, S., 90. 1. 8, ]>.. 90. 1. 34. — Lyon, 16 janv. 1879, S., 81. 2. 69. — Caen, 23 juil. 1878, S., 79. 2. 15. — Poitiers. 20 juil. 1892, Gaz. Trib., 20 aoù 1892. — Trib. civ. Orlliez, 19 mars 1891, Loi, 26 juin 1891. — Guillouard, n. 177. — Contra Grenoble, 22 déc. 1888, Bec. Grenoble, 89. 70. (s) Trib. civ. Liège, 1er août 1874, Poster., 75. 3. 32. — Mesdach de 1er Kiele, loc. cit. (Gj Cass. civ., 13 nov. 1889, précité. (7) Le contraire a été décidé pour les dettes urgentes. Cass. civ., 9 mai 1899, D., 99. 1. 365. (8) Cass. civ., 13 nov. 1889, précité. (») Ciss. civ., 13 nov. 1889, précité. (,0) V. notre Tr. des suce, 2e éd., II, n. 2091 s. Caen, 23 juil. 1878, S., 79. 2. 15. — Cbambéry, 15 juil. 1890, Bec. Grenoble, 91. 2. 67. — Guillouard, n. 184 ; Hue, XI, n. 279. SÉQI l.siiu JUDICIAIRE 7 Ces honoraires sont fixés par les tribunaux ('). Si le séquestre judiciaire est nommé au coins d'un litige, les frais el honoraires du séquestre sont ta\<'-s par le juge qui connaît de l'instance et non par le juge qui a ordonne le sé- questre, car c'esl un incident de l'instance (*). En dehors d'une instance, la taxe est faite par le juge qui a ordonné le séquestre (3). 1303. On décide que le séquestre judiciaire a, pour le payement de son salaire et le remboursement de ses frais, une action solidaire contre toutes les parties qui ont figuré dans l'instance (*), par analogie de la règle adoptée en ma- tière de séquestre conventionnel. À plus forte raison a-t-il pour le tout une action contre celui qui aurait reçu l'attribution de l'objet litigieux (5). 1304. Les contestations qui s'élèvent entre le séquestre et l'un des intéressés doivent être déférées au tribunal civil, même si le séquestre a été nommé en matière commerciale (6). g V. Cessation des pouvoirs du séquestre judiciaire. 1305. Les pouvoirs d'un séquestre nommé pour un litige cessent lorsque le litige est terminé (7). La séquestre nommé en dehors d'un litige cesse ses pou- voirs quand sa mission a pris fin (8). 1306. Le séquestre qui veut se démettre de ses fonctions avant l'époque normale de cessation de ses pouvoirs doit faire agréer sa démission par le tribunal qui l'a nommé et en invo- (') Lyon, 7 mai 1890, Gaz. Pal., 90. 2. 201. — Ces honoraires ne sont pas de plein droit ceux fixés par les art. 34 à 45 du tarif du 10 fév. 1807. — Chambéry, 15 juil. 1890, précité. (*) Angers, 12 fév. 1868, sous Cass., 22 août 1871, S., 71. 1. 228, 1)., 71. 1. 136. — Guillouard, n. 184. (*) Angers, 12 fév. 1868, précité. — Guillouard, n. 184. («) Ciss., 27 avril 1859, D., 59. 1. 171. — Guillouard, n. 185; Hue, XI. n. 278. (s) Cass., 27 avril 1859, précité. — Guillouard, n. 185. («) Aix, 5 janv. 1887, Bull. d'Aix, 87. 332. (7) Trib. civ. Charleroi, 2 mai 1895, l'asicr., 95. 3. 294. — Guillouard, n. 188. — I! importe peu que le séqueslre n'ait pas été partie à l'instance. — Trib. civ. Char- leroi, 2 mai 1895, précité. (' Guillouard, n. 188. Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 42 658 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE quant des causes légitimes ('). En principe donc, sa démis- sion ne peut être acceptée; cette solution dérive de ce qu'il touche un salaire. 1307. L'ordonnance sur requête qui nomme un séquestre judiciaire ou remplace un séquestre judiciaire décédé ou dé- missionnaire rentre dans la juridiction gracieuse et n'est pas susceptible d'appel (*). 1308. Le tribunal, sur une demande tendant à désigner un séquestre pour remplacer une personne désignée par cer- taines parties et qui ne satisfait pas les autres, ne peut statuer que sur une instance contradictoire et non sur requête, puis- qu'il y a contestation ('). 1309. Le séquestre, si on admet qu'il a un droit et un devoir d'administration, a un compte a rendre comme tout mandataire (*). SECTION IV m SÉQl I STRE LÉGAL 1310. On peut dire que le séquestre est légal lorsque la loi l'impose et que la justice n'y intervient pas. Le séquestre « des meubles saisis sur un débiteur », que Part. 1961 range au nombre des séquestresjudiciaires, est, en réalité, un séquestre légal. Car les art. 596 et 597 G.pr. exigent l'établissement de ce séquestre, dont le gardien est choisi par la partie saisie, à la condition qu'il soit solvable et se charge de la garde « volontairement et sur le champ » (art. 596) et, ;i défaut de ces conditions, par l'huissier. Pothier (8) essayait cependant de justifier la qualité de dé- pot judiciaire quedéjà il attribuait à cette sorte de séquestre; il se fondait sur ce que le gardien est choisi par un huissier, c'est-à-dire un officier de justice. Pothier confondait donc ', Guillouard, n. 188. ' Paris. 2r> avril 1874, D., 74. :>. 206. — Caen, 20 dov. 1893, D., 94. 2. 167. Lyon, 26 nov. 1880, D., 82. 2. 88. — Berlin, Ch. du conseil, 3* éd., 1, n. 25. 1 Lyon. 23 juin 1831, S.. 32. 2. 344, I). Rép., \" Vente, n. 1377. — Guillouard n. 189. ■ N. 91. SÊQI KSTRE LÉGA1 659 ,i\cc l'autorité qui ordonne le séquestre, — c'est la loi, - celle qui choisit le séquestre. 1311. On admettait généralement, sous l'empire de l'ordon- nance de 1(>(>7, que le gardien choisi par l'huissier oe pouvait refuser sa mission, celle ordonnance décidant que le séquestre peut être « contraint par amende et saisie de ses biens à prê- ter serinent » (tit. IX, art. 6) ('). Il en est autrement aujourd'hui en l'absence de textes (*). 1312. La nomination du séquestre aux meubles saisis est un contrat de dépôt régi, quant à sa preuve, par le droit commun applicable au dépôt volontaire (3). 1313. On a cependant décidé que le gardien n'est tenu des obligations du dépositaire qu'à la condition que le procès- verbal de saisie soit signé sur l'original et la copie par le gardien ou qu'il y soit fait mention que le gardien ne sait pas signer (*). 1314. Si le gardien est désigné par l'huissier, il n'est le mandataire que du saisissant au nom duquel il a agi (5) ; si au contraire le gardien est désigné par la partie saisie, il est le mandataire de cette dernière et du saisissant (6). Cette dif- férence était déjà signalée par Poîhier Ç). La première de ces deux solutions résulte de l'art. 1962-1", d'après lequel « l'établissement d'un gardien judiciaire produit, entre le saisissant et le gardien, des obligations réciproques ». 1315. Le gardien désigné par l'huissier peut, de plein droit, exiger un salaire (8i. On a prétendu qu'il en est autre- ment du gardien choisi par le saisi (9). Cela n'est pas exact, (') Jousse, Nouveau comment, sur l'on/, civ. d'uvri/ 1667, lit. XIX. art. 6. (*) Merlin, Ré/>.. \° Séquestre; Carré, Lois de la procéd., de la saisie-e.récul., n. 2052; Aubry et Rau, IV, p. 633, § 409. note 8 ; Guillouard, n. 193. 3) Cass., 15 nov. 1344, S., 45. 1. 398, D., 45. 1. 66. — Guillouard, n. 196. (') Cass., 15 nov. 1844, S., 45. 1. 398, D., 45. 1. 66 cet arrêt, outre la solution donnée au texte, dit que cette formalité est \apreuve du équestre ; cela est contra- dictoire). — Lyon, 5 janv. 1881, S., 81. 2.252, D., 81. 2. 168. —Guillouard, n. 1%. (cet auteur s'exprime dans les mêmes termes que l'arrêt de 1844 . "') Guillouard, n. 192. (s) Guillouard, n. 192. (7) N. 95. (•) Guillouard, n. 192. (') Guillouard, n. 192. — V. cep. le même auteur, u. 198. 660 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE car l'art. 1962, § 3 dit que « l'obligation du saisissant consiste à payer au gardien le salaire fixé par la loi ». Ce salaire est fixé par l'art. 34 du tarif du 16 fév. 1807. 1316. Si le gardien des meubles saisis rend un service gratuit, il est traité plus favorablement au point de vue de la responsabilité que le gardien auquel sont dus des honorai- res ('). Pothier le disait déjà (a). Il répond toujours, conformément au droit commun, de sa faute lourde (*)„ 1317. Le gardien choisi par le saisissant n'a pas de res- ponsabilité directe envers le saisi (*), puisqu'il ne s'est établi aucun lien juridique entre eux. Mais le saisi, qui a une action contre le saisissant pour les fautes du gardien, dont le saisissant est responsable (G. civ., 1384), peut, comme exerçant les droits du saisissant, agir con- tre le gardien (5). D'autre part, si la saisie est levée, le saisi a une action en représentation des objets saisis contre le gardien, conformé- ment à l'art. 1962, £ 2, d'après lequel le gardien est tenu de « représenter les objets saisis, soit à la charge du saisissant pour la vente, soit à la partie contre laquelle les exécutions ont été faites, en cas de main-levée de la saisie ». 1318. Le gardien peut demander sa décharge, si la vente n'a pas lieu au jour indiqué, et, en cas d'empêchement ne provenant pas du saisissant, deux mois après la saisie (C. proc, 605). («) Guillouard, n. 192. ' N. 96. (») Nancy, 22 janv. 1840, D. Rép., \° Saisie-exécution, n. 224. — Guillouard, n. 195. — Il y a faute lourde à ne pas veiller à la nourriture des animaux saisis. Nancy, 22 janv. 1840, précité. — Guillouard, loc. cil. («) Guillouard, n. 195. (*) Cass., 31 janv. 1820, S. chr., D. Rép., v° Saisie-exécution, n. 223. — Guil- louard, n. 195. Fin TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME DU CONTRAT DE SOCIETE (N" Page» 1. Utilité de L'étude des sociétés civiles I CHAPITRE PREMIER DÉFINITION ET CARACTÈRES D1 CONTRAT DE SOCIÉTÉ 2. Indication générale des caractères de la sociélé 2 3. Caraclère contractuel. Distinction avec l'indivision 2 4. Caraclère consensuel 2 '.>. Caraclère synallagmalique 3 <">. Caraclère onéreux. De l'apport fictif et de l'inégalité dans les apports 3 7. Suite. Présomption de libéralité indirecte 4 8. Caraclère commutatif 5 9. Nécessité d'un fonds commun et de la recherche'de bénéfices. Différences avec l'association 5 10. Nécessité d'un partage de bénéfices communs. Du cas où les parties doivent tour à tour recueillir les bénéfices. Tontine . 7 11. Les sociétés civiles ont-elles la personnalité morale"? 8 12. Suite. Des sociétés civiles à siège fixe 17 12 bis. Suite. Des sociétés de mines. Des sociétés civiles à forme com- merciale 17 13. Suite. Des sociétés en participation 18 li. Suite. Intérêts de la question au point de vue de la rétroactivité des partages et au point de vue de la nature des droits des associés 18 15. Suite. Intérêts au point de vue des droits des successeurs d'un associé sur sa part, au point de vue de ses rapports avec son conjoint et au point de vue de la capacité pour aliéner .... 19 16. Suite. Intérêts au point de vue des formes de l'appel, de l'assi- gnation et de l'instance 20 17. Suite. Intérêt au point de vue de la capacité de la société à l'effet de recevoir des libéralités 21 18. Suite. Intérêts au point de vue du concours entre créanciers de ■ la société et d'un associé et au point de vue de la compensa- tion 21 19. Suite. Intérêt au point de vue du recours de la sociélé contre les associés 22 662 DU CONTRAT DE SOCIÉIÉ 20. Suite. Inlérèl au point de vue des hypothèques provenant des associés 22 21. Suite. Intérêt au point de vue fiscal 22 CHAPITRE II CONTRATS un CONSTITUENT DES SOCIÉTÉS 21 bis. Souscriplion de risques maritimes. Mise en commun d'immeubles. 22 22. Distinction avec la vente. Exploitation d'une coupe vendue « à moitié perte et profit ». Contrat d'édition 23 23. Suite. Vente d'un fonds de commerce ou d'un office moyennant une part des bénéfices 24 24. Distinction avec le bail. Bail dont le prix consiste en tout ou partie dans une fraction des sous-locations 25 25. Distinction avec la cession de bail. Cession de droit indivis ... 26 26. Suite. Cession de bail de maison ou de terrains 26 27. Suite. Cession de bail de chasse 26 28. Distinction avec le métayage et le cheptel 27 29. 1 distinction avec le louage d'ouvrage. Participation aux bénéfices. i ionlrat entre officier^ ministériels pour leurs affaires. Mission de recouvrer une créance 27 30. Mélange entre la société et d'autres contrats. Prêt par un associé OU compte-courant avec lui. Distinction de la société avec le mandat et le prêt 28 31. Distinction avec l'indivision et l'association 28 CHAPITRE III FORMES ET PREUVE DE Là SOCIÉTÉ SECTION PREMIÈRE DE LA FORME DU CONTRAT. DE LÀ PROMESSE DENTRER EN SOCIÉTÉ 32. La société n'est soumise à aucune forme. Exceptions : brevet d'invention, mandat de constituer hypothèque 29 33. Validité et elfels de la promesse de société 29 34. Formes de la -ociélé en droit international 30 SECTION II PREUVE DU CONTRAT 35. Ancien droit. Application du droit commun 3o 36. Suite. Calcul de l'objet de la société au point de vue de la preuve. 33 37. Formalité des doubles pour l'acte sous seing privé 34 38. Preuve des modifications 35 39. Preuves à apporter pour l'interprétation 35 40. Preures que peuvent invoquer les tiers 35 41. Sociétés auxquelles s'appliquent les règles de preuve. Sociétés f romagères 36 I UH.i. DES ma l [ÈRES »i«i.'{ 111*1 42. Suite. Sociétés minières :t7 43. Suite. Sociétés entre concubins :i7 CHAPITRE IV DES CONDITIONS ESSENTIELLES A [/EXISTENCE ET A i.\ VALIDITÉ DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ 44. Indication de ces conditions ;\n SECTION PREMIÈRE DU CONSENTEMENT ET DES VICES UV CONSENTEMENT 45. Caractère essentiel du consentement 38 46. Société simulée 39 47. Vices du consentement :î9 SECTION II DE LA CAPACITÉ ET DU POl VOlli 48. La capacité nécessaire est celle de s'obliger ou d'aliéner 40 49. Capacité spéciale en matière de société universelle. Renvoi . . . 40 50. Capacité de la femme mariée ÎO 51. Pouvoirs du mari sous le régime dotal 40 52. Nullité des sociétés entre époux 41 53. Suite. Cas où les époux sont séparés de biens 42 54. Suite. Cas où la société est convenue dans le contrat de mariage. 42 55. Suite. Cas où la société est particulière 42 56. Suite. Opinions dissidentes 42 57. Suite. Société en nom collectif entre époux 43 58. Suite. Société entre les époux et un tiers. Cas où les époux sont commanditaires ou actionnaires 43 59. Suite. Dissolution de la société par le mariage des associés. . . . 43 60. Société entre concubins 4 4 61. Capacité du mineur, de l'interdit et de l'aliéné 45 62. Capacité de l'individu pourvu d'un conseil judiciaire 45 63. Mandat et porte-fort 46 64. Révocation de la société pour cause de fraude 46 SECTION III DE L'OBJET ET DE LA CAUSE 65. Ce qui constitue l'objet de la société. L'objet doit être illicite . . iT 66. Sociétés ayant pour objet l'usure, l'exploitation d'une maisonde jeu ou de tolérance, des opérations relatives au jeu, une entrave à la liberté du commerce, l'exercice illégal de la médecine, la contrebande, la vente d'objets hors du commerce, des faveurs illicites décorations ou fonctions publiques 48 67. Société relative à l'exercice d'une fonction publique, engagement de retirer une candidature moyennant une part de bénéfices . i'.i 664 DU CONTRAT DE SOI. 1 ÉTÉ (N-) Piges 68. Société pour l'exploitation d'un office. I Cession d'une part d'office. Société pour l'exploitation d'un cabinet d'affaires 49 69. Société pour l'exploitation d'un monopole. Chemin de fer. Facteur aux halles 51 70. Société pour l'exploitation de fonctions exigeant des garanties de capacité : pharmaciens 51 71. Société formée au préjudice d'un monopole: allumettes, négocia- tions de valeurs. Syndicat-; financiers 52 72. Société pour échapper à un impôt 53 73. Société pour faire des actes interdits à un associé à raison de sa profession. Société entre un officier public et un tiers pour faire le commerce ou acheter des immeubles 53 74. Société pour se partager le bénéfice d'actes que l'un des associés n'a pas le droit de faire. Société entre un officier d'administra- tion ou un employé de commerce et un tiers 54 75. Société pour entraver la liberté des conventions. Société pour li- miler ou hausser les prix. Accaparements 54 76. lé pour aider au fonctionnement d'une entreprise illicite. Congrégation 55 76 bis. Société pour une exploitation soumise à l'autorisation 56 77. Société pour un acte illicite à faire en pays étranger. < Contrebande, jeu 55 78. Suile. Cas où l'opération est permise par la loi étrangère el inter- dite par la loi française, ou réciproquement 57 79. Suite. Société obligée, pour accomplir ses opérations, de rompre un blocus 58 80. Suile. Société illicite devenant licite: l'action en nullité peut-elle élie intentée? 58 SECTION1 IV SANCTION I)KS CONDITIONS D 'EXISTENCE BT DE VALIDITÉ ItKS SOCIÉTÉS § I. Personnes qui peuvent provoquer /'>■'> 92. Suite. Si les bénéfices ne sont pas parlâmes, chaque associé peut- il en demander sa part? Société pour l'achat d'un billet de loterie fin '.•3. Suite. Cas où les béuélices sont entre les mains d'un tiers .... G5 '.ti. Suite. Partage du fonds social. Mode de règlement 65 95. Suite. Attribution du fonds dans le cas où certains associés n'ont pas les qualités nécessaires. Pharmacie 6fi 96. Nullité pour cause d'incapacité. Société entre époux 66 97. Société entre concubins 66 98. Les juges peuvent-ils donner à un associé le droit d'acquérir par préférence le fonds social ? 67 99. Effets de la nullité relativement au nom commercial 67 C. Effets entre les associés pour l'avenir. 100. La société nulle ne produit pas d'effets pour l'avenir. Réalisation des apports 67 101. Sort de la marque de fabrique 67 III. E/fels de la nullilé entre les associés ri les tiers. 102. Les associés peuvent opposer la nullité auv tiers 68 103. Les tiers peuvent ils opposer la nullité aux associés ? 68 CHAPITRE V DES DIVERSES ESPÈCES DE SOCIÉTÉS SECTION PREMIÈRE DES SOCIÉTÉS CIVILES ET DES SOCIÉTÉS COMMERCIALES 104. Intérêts delà distinction entre les sociétés civiles et commerciales. Sociétés civiles à forme commerciale 69 105. Le caractère civil ou commercial d'une société dépend de son objet. Influence de la forme commerciale. Influence de la qua- lité des parties Tu 106. Cas où les opérations sont à la foi- civiles et commerciales. ... 71 f)66 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ |N<") T,gt» 107. Sociétés de transports ou de chemins de fer 72 108. Sociétés pour l'achat et la revente, la location ou la mise en va- leur d immeubles. Société pour la construction d'immeubles. 72 109. Sociétés pour l'exploitation d'un commerce, d'un cabinet de den- tiste ou de médecin 73 110. Sociétés pour la rédaction et l'exploitation d'un livre ou d'un jour- nal 73 111. Sociétés pour l'exploitation d'eaux minérales ou thermales .... 73 112. Sociétés pour l'exploitation des produits du sol : élevage des che- vaux, exploitation de la chasse 74 113. Soeié.és pour la vente des produits d'an fonds: pétrole. Cas où les produits ont été préalablement préparés : conversion des betteraves en sucre 74 114. Sociétés relatives aux mines 75 115. Suite. Ce sont de- sociétés de personnes et non de capitaux. ... 70 116. Société pour la construction ou l'exploitation d'un canal 78 117. Sociétés d'éclairage ou de distribution d'eau 79 118. Société d'entraînement ou d'engagement d'un cheval 79 119. Société pour la perception de taxes 79 120. Sociétés de crédit ou faisant des opérations de bourse 79 121. . Sociétés coopératives 80 121 bis. Sociétés d'assurances 81 122. Sociétés d'instruction ou d'éducation 81 123. Sociétés pour l'exploitation d'un cercle ou d'une exposition ... 82 124. Pouvoirs du juge 82 SECTION II DES SOCIÉTÉS UNIVERSELLES ET DES SOCIÉTÉS PARTICULIÈRES 125. Définition 82 ii 1. Des sociétés universelles. 126. Définition 82 I. Entre quelles personnes peut intervenir une société universelle. 127. Conditions spéciale-; de capacité empruntées à la capacité en ma- tière de donation 83 128. Sanction de cette condition 84 129. Cas où l'avantage dépasse la quotité disponible 84 130. Sociétés univers* Iles entre époux qui ont des enfants d'un précé- dent mariage 85 131. Sociétés universelles entre concubins 85 132. Capacité en matière de sociétés de gains 86 133. La société universelle n'est pas en principe une donation déguisée 86 134. Par suite, il n'y a pas lieu au rapport des avantages en résultant. 86 135. Elle n'est pas révocable pour ingralitudeou survenanee d'enfants 87 136. Kn dehors des conditions spéciales, la capacité est la même que pour les autres sociétés 87 Table des ratières 667 II. Diverse» espèces de sociétés universelles. \M. Division 87 A. Société universelle de tous biens présents, 138. Définition 88 139. Pourquoi les biens à venir sont exclus 88 I K). Ce qu'il faul entendre par biens possèdes, bien- appartenant aux associés sous condition suspensive 89 141. Biens à venir 89 142. Gains 90 143. • Dettes présentes ou futures des associés. Entretien des associés ou de leur famille 'JO 144. Nature de la nullité de la société comprenant à la fois des biens présents et à venir 91 B. Société universelle de gains. 1 i5. Eléments dont se compose cette société 92 146. Clauses modifiant ces éléments 93 147. Dettes des associés. Entrelien des associés 94 C. Interprétation des sociétés universelles. 148. On doit de préférence supposer la société de gains 95 § II. De la société particulière. 149. Définition 95 CHAPITRE VI POINT DE DÉPART DE LA SOCIÉTÉ 150. La société commence au jour du contrat, sauf clause contraire. . 96 151. ... ou sauf preuve contraire % CHAPITRE VII OBLIGATIONS DES ASSOCIÉS ENVERS LA SOCIÉTÉ SECTION PREMIÈRE OBLIGATION DE FOURNIR LES APPORTS § I. Nécessité, montant et nature de l'apport. 152. Chaque associé est débiteur de son apport 96 153. Il est donc nécessaire que chaque associé fournisse un apport, mais non que les apports soient égaux. Peu importe l'origine de l'acquisition 96 154. Nature de l'apport. Cas dans lesquels il est une vente ou un bail. 97 155. Pouvoirs des associés pour ordonner l'augmentation des apports. 98 156. Personnes qui peuvent invoquer la nullité pour absence d'apports. Cas où l'absence d'apports déguise une donation 99 668 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ (N~) Page» 157. Validité de la société si l'apport de tous les associés est soustrait au.v risques. Apport d'une chose achetée en commun 99 § II. Des objets qui peuvent être apports*. 158. Apport des biens incorporels, d'un secret, d'un brevet d'inven- tion, d'une marque de fabrique, d'un fonds de commerce. . . 99 159. Apport d'un office, d'une fonction publique, du crédit politique ou commercial 100 159 bis. Apport du nom 101 160. Apport d'une ouverture de crédit 102 161. Apport d'une chose future 102 § III. De la transmission des apports entre l'associé et la société. 162. L'apport peut être en propriété ou en jouissance 102 163. Règles d'interprétation sur ce point 102 I. Apport en propriété. 164. Epoque où est transférée la propriété d'un corps certain 103 164 6/.S. Suit.'. Brevel d'invention 103 165. Kpoque où est transférée la propriété d'une chose de genre. . . . 104 L66. Le transfert est définitif. Attribution de l'apport à l'associé qui l'a fait 105 II. Apport en jouissance. 167. L'apport peut être fait à litre d'usufruit ou de jouissance person- nelle. Différences au point de vue des risques 105 168. I tègles d'interprétation sur !<■ point de savoir si l'apport a lieu en propriété ou en jouissance 106 169. Rescision pour cause de Lésion en cas d'apport d'un immeuble estimé 108 170. Règles d'interprétation sur le point de savoir si l'apport en jouis- sance est fait à lilrj personne] ou réel 108 171. De l'apport en jouissance pour un temps déterminé et de ses effets en cas de dissolution de la société 109 S IV. De la transmission des apports vis-à-vis des tiers. 172. Apport de meubles corporels. Tradition 109 173. Apport d'immeubles. Transcription 109 17 i. Suite. Apport d'un immeuble en usufruit ou en jouissance person- nelle 111 175. Apport d'une créance 111 175 bis. Suite. Paiement de la dette par le débiteur qui n'a pas connu la société 113 17o. Apport d'un brevet d'invention ou d'une licence 113 S V. Intérêts <-t fruits des apports. A. Fruits, 177. Les fruits ne sont dus qu'à partir de la mise en demeure de l'associé 114 TABLE DES ma ni l;i s 669 (V) V»g>* 178. Dommages interdis dus par ]'a9socié en relard 114 li. Intérêts. 17'.». L'associé esl lenu de plein droit des intérêts même dans le cas où son retard n'a pas préjudicié à la société lir» 180. Prescription des intérêts, notamment dan- le cas où chaque cié administre 116 181. Du cas où les intérêts ne suffisent pas a indemniser la société . . 116 181 bis. Résumé 117 SECTION II OBLIGATION DE GARANTIE 182. La garantie existe dars toute- li ■- -in- iôtés sauf les sociétés univer- selles 117 183. Les obligations de l'associé garant sonl relies du vendeur. Consé- quences pour les dommages-intérêts 117 184. Obligation de garantie pour les servitudes passives ou les vices. 118 185. Obligation de garantie pour les hypothèques 118 186. Obligation de fournir la contenance 119 186 6i*. Obligation de garantie pour les créances 119 187. Obligation de garantie pour l'apport d'un usufruit 119 188. Obligation de garantie pour l'apport d'une jouissance personnelle 120 189. Obligation de garantie pour l'apport d'industrie 120 189 bis. Obligation de garantie pour l'apport d'une invention ou d'un bre- vet d'invention 121 SECTION III OBLIGATION DE TENIR COMPTE DES VALEURS SOCIALES DONT l'aSSOCIÉ A TIRÉ PROFIT 190. Si un associé prend des sommes dans la caisse sociale, les intérêts courent de plein droit. En outre, l'associé peut être tenu de dommages-intérêts 121 191. Mêmes solutions pour les sommes que l'associé empêche d'entrer dans les caisses sociales ou pour les sommes ne provenant pas d'apports 122 192. Cas où l'associé n'a pas lire profit des valeurs 122 193. Ces règles s'appliquent même aux sociétés universelles 123 194. Preuve du fait que l'associé a employé les fonds de la société à son profil 123 SECTION IV OBLIGATION DE VEILLER AUX INTÉRÊTS DE LA SOCIÉTÉ 195. L'associé doit agir en bon père de famille , 124 196. 11 peut s'obliger à ne vendre qu'à la société les produits de sa fabri- cation 125 197. Lafaule s'entend mêmedelanégligence : surveillance insuffisante, acquisition manquée. Du cas fortuit 125 670 DL' CONTRAT DE SOCIÉTÉ 198. Disparition de la peine de l'infamie 126 199. L'associé peul-il compenser les dommages-intérêts avec les profits que son industrie a procurés à la société ? Devoirs de l'associé en cas de conflits d'intérêts 126 200. Imputation des sommes payées par un tiers qui est à la fois débi- teur de la société et d'un associé. Hypothèses diverses . . . . 127 201. A quels associés sont applicables les règles de l'imputation. Admi- nistrateur et non administrateur 129 202. Obligation de rapporter la paît reçue dans une créance sociale. . 129 202 bis. Devoir- de l'associé qui fait pour son compte une opération qu'il devait faire pour la sociélé. Du cas où une opération sociale est préjudiciable à l'associé 130 203. Contribution aux dépenses et aux pertes. Renvois 130 204. Effets du détournement 130 2. L'associé peut-il exploiter un commerce similaire de celui de la société .' 131 SECTION V SANCTION DBS OBLIGATIONS HE l'aSSOCIÉ 206. Dommages-intérêts 131 207. Dissolution de la sociélé ou exclusion de l'associé. L'associé est-il dispensé de remplir ses obligations si les autres associés ne remplissent pas les leurs? 131 2ns. L'exclusion de l'associé esl prononcée par le tribunal. Clause qui réserve ce droil à la sociélé. Recours contre l'usage de ce droit 132 209. Aprè< l'exclusion d'un associé, la sociélé resle la même 132 210. L'associé exclu perd tous ses droits dans la sociélé 132 211. Point de départ des effels de l'exclusion 132 212. Effets de l'exclusion sur la raison sociale 132 212 bis. Kffels de l'exclusion au poînl de vue des rapports de l'associé exclu avec les tiers 133 213. Défense à l'associé exclu d'exercer un commerce similaire . . . . 133 CHAPITRE Mil DROITS DES ASSOCIÉS ENVERS LA SOCIÉTÉ - CTION PREMIÈRE INDEMNISATION DES DÉPENSES FAITES ET DES OBLIGATIONS CONTRACTÉES POUB LA SOCIÉTÉ 214. Indemnité pour les dépenses faites au compte de la société. Exem- ple. Indemnité pour les dettes grevant l'apport 133 215. Intérèt< de l'indemnité. Application au cas où l'associé n'est pas administrateur 13» 216. Intérêts des intérêts 135 217. Recours pour les obligations contraclées dans l'intérêt de la so- ciété. Exemples 136 TABLE DIS MATIÈRES <>7 I (N") Pag* 218. Indemnité pour Les risques de gestion. Exemples 136 219. Hypothèse où l'associé a commis une imprudence. Exemple . . . 137 220. Contre, qui l'associé agit-il en indemnité? Les coassociés sont-ils tenus solidairement? Cas ou l'un des associés esl insolvable . 137 SECTION II DROIT D'USER DES CHOSES APPARTENANT A LA SOCIÉTÉ 221. Conditions dans lesquelles l'associé peut user des choses de la so- ciété i:jh 222. Chaque associé peut obliger les autres à contribuer aux dépenses. Renvoi 138 223. Droit d'administrer la société. Renvoi 139 SECTION ni DROIT DE CÉDER, DE S'ASSOCIER UN TIERS, D 'ALIÉNER ni D'HYPOTHÉQUER SA PART £ I. Association avec un tiers. 224. L'associé ne peut s'associer avec un tiers sans le consentementde ses coassociés. Motifs. L'association avec un tiers esl libre dans les sociétés de capitaux. Preuve du consentement. Le consen- tement n'est- il opposable aux tiers que s'il leur esl communi- qué? 139 225. Un associé n'a pas besoin du consentement <\e< autres pour asso- cier un tiers à sa part. Le contrat ainsi passé est une société. Croupier 141 226. Le croupier reste étranger à la société. Conséquences 142 227. La clause que la société, en cas de mort d'un associé, continuera entre les autres est elle applicable dans les rapports entre l'as>ocié et le croupier? 143 228. Droits des tiers contre le croupier 143 229. Causes de dissolution de la société avec le croupier. Droits des héritiers du croupier 144 230. Situation du croupier dans les sociétés de chasse 144 § II. Cession des droits de ^associé. I. Validité et effets de la cession. 231. La part sociale peut être cédée, mais la cession n'est pas opposable aux tiers 144 232. La cession est une vente et non une société. Signification de la cession 145 233. Cession de part dans une société minière 1 »5 234. La cession est inopposable aux associés même si la société n'est pas intuilu personœ. Société entre un auteur et un éditeur. . 146 235. Suite. Société minière lîC 236. Les coassociés peuvent consentir h la cession. Forme du consen- tement 147 672 l»l CONTRAT DE SOCIETE IN", pai;e, 237. Kn dehors de ce cas, le cessionnaire n'a pas d'action contre la so- ciété. Exemple 147 238. Peut-il critiquer la répartition des bénéfices? 147 239. Peut-il réclamer la communication des livres, critiquer les actes de la société, exercer les actions sociales? Obligations du cessionnaire envers la société 147 240. Rapports du cessionnaire avec le cédant. Saisie-arrêt. Action en garantie 148 241. Situation du cédant au point de vue des dettes 148 II. Retrait social. 242. Conditions du retrait social prévu par le contrat de société. . . . 149 243. Contre quels actes le retrait peut être exercé 150 244. Le retrait social n'existe pas en dehors d'une convention 150 S III. Hypothèque. 244 bis. L'associé peut-il hypothéquer sa part sociale? 150 SECTION IV RÉPARTITION liKS BÉNÉFICES ET DES PERTES £ I. Principes généraux sur In répartition despertes et des bénéfices. 2i5. Ces bénéfices se partagent après prélèvement îles dépenses. Pré- lèvement des avances faites par les associés 150 246. Point de dépari des intérêts des sommes avancées par les asso- ciés 151 247. Ces associés sont-ils tenus solidairement pour les avances de leur coassocié? 151 248. Stipulation d'un prélèvement périodique pour les appointements des associés. Nature de ce prélèvement. Prélèvement pour prix d'une vente ou d'un bail fait par un associé 151 249. Nature de l'attribution faite à un associé comme gérant, comme prix de denrées, comme rémunération d'un apport d'industrie. 152 250. Le .juge des référés peut il statuer sur les prélèvements men- suels? 152 251. Le partage s'applique également aux perles 152 252. La pari dans les bénéfices et les pertes est fixée par la conven- tion. Réparlilion des pertes dans le cas où le contrat ne fixe que la répartition des bénéfices 153 253. Ca clause qui répartit inégalement les pertes doit-elle être obser- vée si les apports sont égaux et ont élé perdus ? Ca clause qui repartit également les perles doit-elle être observée si les apports ont élé inégaux? 153 254. A quelles conditions les clauses qui répartissent la perte sont- elles opposables aux tiers? 154 255. Du cas où la réparlilion est laissée à l'arbitrage des tiers. Sort de la société si cet arbitrage n'a pas lieu, ou si les parties ne dési- gnent par les tiers 155 I \l;i.l. M S MATIÈRES (iT.'i (N") Pi«m 256, Recours contre l'arbitrage du liera 156 257. Délai de ce recours. Poinl de départ el (1ns il<' non re< evoir. ftôle du tribunal. Cumul avec l'action en nullité du partagi .... 1 r>« > 858 Fixation légale de la répartition à défaul de clause ou d'arbitrage. La répartition est proportionnelle même -i les apports n'ont pas été estimés 157 259. Part de bénéfices de l'associé qui fait des apports successifs. . . . 15X 259 Ai*. Part de bénéfice: de celui qui n'a apporté que son industrie. La fixation légale ne s'applique pas à l'associé qui a apporté à la fois son industrie el autre chose 159 260. Elle ne s'applique pas ,-i un autre associé a apporté son industrie et autre chose 160 261. Elle ne s'applique pas si tous les associés n'ont apporte'' que leur industrie, mais n en est autrement si quelques-uns n'ont ap- porté que leur industrie 160 202. L'apport du crédit commercial n'est pas assimilé à l'apport d'in- dustrie 161 263. Calcul de la part de bénéfices de rapporteur d'industrie 161 264. Bénéfices attribués à l'apporl d'industrie si la société se dissout avant le terme fixé ou si rapporteur d'industrie esl resté quel- que temps éloigné de la société 161 §11. Clauses interdites au sujet de la répartition des pertes et des bénéfices. 265. Division 162 1. Clauses relatives aa.r bénéfices. 266. On ne peut attribuer à un associé la totalité des bénéfices. Il en est ainsi même si l'associé privé des bénéfices 1 esl aussi des perles 162 267. La clause privant un associé de tout droit aux bénéfices est éga- lement nulle 163 268. Mais ces clauses peuvent valoir comme donation. La donation qui n'est qu'apparente est nulle 163 269. La part dans le gain et la perle peut n'être pas proportionnelle aux apports, à condition que la diiïérence ne soil pas exagé- rée. La part dans la perte peut n'être pas la même que le gain. Clause qu'un associé participera au gain et non à la perte. . . 163 270. Ces clauses peuvent déguiser une libéralité 164 271. Clause que tous les bénéfices seront pour le survivant. Distinc- tion avec la tontine 164 "272. Clause que l'un des associés ne participera aux bénéfices que s'ils atteignent un certain chiffre. Clause qu'un associé n'aura droit aux bénéfices que si les dépenses n'atteignent pas un certain chiffre 165 273. Clause qu'un associé choisira entre une part de bénéfices et une somme fixe 105 27i. Clause qu'avant la liquidation le survivant profilera seul des béné- fices 105 Société, prêt, dépôt. — 2e é I. 43 674 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ (H») Pages. If. Clauses relatives aux perles. 275. Prohibition de la clause qui affranchit un apport des pertes. . . . 166 276. Clause qui garantit par une hypothèque le remboursement d'un apport 167 277. Clause qui soustrait un apport aux pertes dans une hypothèse convenue 167 278. La clause qui affranchit un apport des perles est nulle, même si les associés ont une part plus forte dans les bénéfices 167 279. i '.lause que la perte d'un associé sera limitée à son apport. Clause qui répartit inégalement la perte. Cession de la part de béné- fices d'un associé moyennant une somme à forfait. Clause de non-participation aux perles pour un apport en jouissance . . 168 280. i ilause de non participation aux perles pour un apport d'industrie ou de crédit 169 281. Clause que le prix d'un apport ou de tous les apports sera rem- boursé par la société 170 282. La clause qui affranchit un apport de la perte est valable si elle déguise un prêt, ou si l'associé affranchi de la perle est un commanditaire. Prêt d'un associé en dehors de son apport. . 170 283. Les clause- qui affranchissent de la perte sont nulles, même si elles sont postérieures à la formation de la société 171 281. Elles sont nulles, même si la garantie contre les pertes est four- nie par un associé, même à un commanditaire, ou par un acte postérieur à la formation de la société 171 >r> De la garantie contre les perles fournie par un tiers, notamment par la femme d'un associé, ou par un tiers et un associé. . . . 172 286. De la garantie contre les perles au moyen d'une assurance con- tractée par la société ou les coassociés 172 287. Rareté d'application de la prohibition 173 III. Sanction des prohibitions. 288. La nullité des clauses entraîne celle de la société. Par qui peut être invoquée cette nullité. Ses effets 173 § III. Epoques de la répartition l \ lll.lti s 671 CHAPITRE \ RAPPORTS DES VSSOCIÉS ET DE LA SOCIÉTÉ IVEC LES TIERS SECTION PREMIÈRE EFFETS DES ENGAGEMENTS CONTRACTÉS ENVERS LES TIERS § I. Engagements contractés au nom personnel des associés. (N") . Paçei 334. Ces engagements n'engagent ni les coassociés ni la sociélé . . . . 202 335. L'engagement contracté pour la sociélé est un engagement per- sonnel de l'associé s'il n'indique pas la sociélé 202 § II. Engagements contractés au nom de lu société. 336. Distinction 203 I. Engagements contractés par tous les associés. '.'i2. Engagements du gérant sans mandat formel 207 343. Engagements pris au nom de la société, mais pour le compte de l'associé 207 344. Opposabililé aux tiers de la clause qui modifie les obligations des associés. Renvoi 208 345. Etendue de l'obligation des associés autres que celui qui s'est engagé 208 345 bis. Applications de l'idée que la sociélé est obligée dans les limites de son enrichissement pour les engagements de l'associé . . . 208 346. Limites de l'obligation de chaque associé quand la société n'est tenue que pour son enrichissement 209 347. Responsabilité vis-à-visdestiersde l'associé qui a engagé la société sans en avoir le droit 209 348. Responsabilité de la personne qui s'est fait à tort passer pour associée 209 III. Solidarité entre les associés. 349. La solidarité existe dans certaines sociélés commerciales, mais non dans les sociétés civiles. Sociétés à forme commerciale. Socié- 678 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ (N") Pages tés civiles formant une personne morale. Sociétés minières . 210 350. Clause de solidarité dans le pacte social ou dans une convention . 210 SECTION II DROITS DES CRÉANCIERS SOCIAUX ET DES CRÉANCIER- DES ASSOCIÉS SLR LES BIENS DE LA SOCIÉTÉ ET DES ASSOCIÉS § I. Droits des créanciers relativement à la gestion. 351. Les créanciers ne peuvent s'immiscer dans la gestion. Ils ne peu- vent demander la dissolution de la société 211 S; II. Droits respectifs accordes aux créanciers de la société et des associés sur les biens de la société. 352. Un créancier d'un associé peut être en même temps créancier de la société. Exemple 211 353. Les créanciers de la société sont-ils sur les biens sociaux préfé- rés aux créanciers des associés '.' 212 354. Ce droit de préférence survit-il à la dissolution? 214 355. Suite 214 356. Les créanciers d'un associé ne peuvent saisir, pendant que dure la société, les droits de leur débiteur dans la société, mais ils peuvent saisir sa part dans les prolits. Droits de l'adjudica- taire sur saisie 214 357. Les créanciers de la société peuvent saisir les biens sociaux . . . 216 358. Les créanciers d'un associé ne peuvent pas saisir la part de leur débiteur même après la dissolution et jusqu'au partage . . . . 216 359. Les créanciers d'un associé, à la différence des créanciers sociaux, n'ont d'action que sur la part de leur débiteur 216 360. Limites de leur droit de saisir-arrèler une créance sociale . . . . 217 361. Les créanciers des associés peuvent-ils acquérir une bypolhèque sur les immeubles sociaux? 217 «S III. Droits respectifs accordés aux créanciers de la société et des associés sur les biens des associés. 362. Les créanciers sociaux peuvent-ils saisir les biens des associés ou participer à la saisie? 217 363. Les créanciers des associés peuvent saisir leurs biens. Immeuble qui doit entrer en société mais est acquis par l'associé en son nom personnel 218 364. Opposabililé aux créanciers des clauses fixant la répartition des pertes et bénéfices 218 § IV. Compensation entre les créances ou les dettes des associés et de la société. 365. Compensation dans le cours de la société 219 366. Compensation après la dissolution de la société 219 TABLE l>i:s MATIÈRES 679 CHAPITRE XI DE LA DISSOLUTION DE LA SOCIÉTÉ ET DU PARTAGE DE LA SOCIÉTÉ SECTION PREMIÈRE CAUSES DE DISSOLUTION DE LA SOCIÉTÉ ET PERSONNES QUI PEUVENT LES INVOQUER fN") Pa&w. ;UJ7. Enumération de la loi. Elle esl incomplote 220 :$6S. Distinction entre les clauses qui niellent lin à la société de plein droit et celles qui exigent une manifestation de volonté ou un jugement 220 3G9. Aucune notification n'est nécessaire 221 370. Dérogations conventionnelles aux causes de dissolution 221 5; I. Causes qui mettent fin à lu surjeté de plein droit. 1. Expiration du temps pour lequel la société a été contractée. 371. La société prend fin de plein droit au terme fixé. Cependant la volonté des parties peut être contraire 221 372. Les parties peuvent, dans le cours de la société, augmenter ou dimi- nuer la société. Preuve de la clause qui proroge la société. . 222 373. La progalion tacite esl permise. Preuve 223 374. La prorogation exige le consentement unanime des associés sauf convention ou usage contraire. Sociétés fromagéres. Preuve de la prorogation résultant de l'usage 224 375. La prorogation doit êtreconvenue avant la dissolution de la société pour ne pas constituer une société nouvelle 224 376. Nature et preuve de la prorogation avec changement d'objet. . . 225 376 bis. Durée de la prorogation 225 377. Durée de la société en droit international 226 II. Extinction de la chose. 378. C'est une application des principes 226 379. Y assimiler l'événement qui soustrait !e fonds commun à l'exploi- tation. Confiscation, révocation de concession ou d'autorisa- tion, cessation de bail, ele 226 380. Perle partielle de la chose. Perle d'un apport. Perle du capital social 227 III. Consommation de la négociation. 381. C'est une application de l'expiralion par le terme. Exemple. . . . 227 382. L'extinction de la société se produit même si le terme fixé n'est pas expiré, bi le terme arrive avant la consommation de la négo- ciation, la société se dissout-elle? 228 IV. Mort de l'un des associés. A. Fondement et portée de cette cause de dissolution. -83. Klle est due au caractère personnel du lien social 229 680 DV CONTRAT DE SOCIETE N") Pages 384. S'applique- l-elle à la promesse de société ? 230 385. Application aux sociétés à durée limitée ou illimitée, aux sociétés minières, a la société concernant l'exploitation d'immeubles, aux sociétés de capitaux 230 386. La dissolution n'est subordonnée à aucune publication. Cas où la société continue en fait. Les héritiers n'ont pas à donner avis du décès aux coassociés 231 15. Conventions écartant celle cause de dissolution. 387. Historique 232 388. Aujourd'hui ces conventions sont valables. Diverses espèces de conventions 232 a. Clause que la société continuera et pourra continuer avec les héritiers ou représentants. 389. La clause que la société continuera est obligatoire pour les asso- ciés et pour les héritiers du défunt. < llauses obligeant les héri- tiers à administrer 233 390. La clause que la société continuera avec l'un des héritiers n'est pas obligatoire pour ce dernier. Droit des autres héritiers. . . 234 391. Clauses d'où résulte la volonté de continuer la société avec les héritiers 235 392. Les successeurs irréguliers, légataires universels ou à litre uni- ver.-el, l'Etat, le- cessionnaires de droits successifs, sont-ils des héritiers? Sens «le la clause que la société continuera avec les représentants 235 3926/s. Effets de la clause que la société continuera avec la veuve .... 236 393. L'héritier bénéficiaire peut-il se prévaloir de la clause et lui est- elle opposable? 236 394. Quid de l'héritier mineur ? 237 395. Suite. L'héritier mineur doit-il être autorisé à faire le commerce s'il s'agil d'une société commerciale? 238 3%. Quid de l'héritier interdit ou qui devient ensuite interdit? .... 239 397. La clause peul être invoquée par les héritiers mineurs aussi bien que contre eux 239 398. Nature de la renonciation par un héritier à la continuation de la société 239 399. Limites de l'obligation de l'héritier bénéficiaire ou mineur rela- tivement aux délies sociales 239 399 bis. Clause que la société sera en commandite avec l'héritier mineur. 240 400. Les statuts peuvent modifier les droits des héritiers. Exemples. . 240 b. Clause que la société continuera ou pourra continuer entre les associés survivants. 401. Validité de la clause 240 402. La société peut-elle conserver dans sa raison sociale le nom du défunt? 241 i02 bis. Clause que la société appartiendra au survivant 241 403. Xature de la clause que les associés survivants pourront conti- nuer la société 241 404. Celte clause est opposable aux héritiers mineurs 242 TABLE DES M Mil lu S 681 (N"| Pa,,, 106. Sorl des opérations postérieures- vis-à-vis des hériliera 106. Lea héritiers sont tenus de continuer l'acte commencé par leur auteur 242 107. La liquidation esl faite d'après l'étal au décès. Les héritiers peu- vent-ils réclamer une pari dans le fonds de réserve? .... 242 108. ' ilause que les droits de l'associé seront établis d après le dernier inventaire. Opposabililé aux héritiers des mineurs 2ir! 109. Clause que l'inventaire 9era amiable. Opposabililé aux héritiers mineurs 243 110. Les héritiers peuvent-ils réclamer une part dans les bénéfices faits depuis le dernier inventaire jusqu'au décès? Qu'est-ce que le dernier inventaire? 243 ill. Les héritiers ne peuvent réclamer que des valeurs d'inventaire. Ils peiiMMii exercer un commerce similaire 241! C. Clause que la société p*,\-/-ra être dissoute ou continuer entre les associés ou avec 1rs héritiers. 412. Validité de celle clause "24 4 V. Absence de l'un des associés. * 13. L'absence ne peut donner lieu qu'à la dissolution judiciaire. . . . 245 VI. Interdiction ou folie de l'un des associés. Nomination d'un conseil judiciaire. 414. L'interdiction judiciaire ou légale d'un associé dissoul la société. 245 '415. Il en est autrement de la nomination d'un conseil judiciaire . . . 246 ilG. ... ou du placement d'un associé dans un établissement d'aliénés. 246 417. La dissolution par l'interdiction opère de plein droit. Mlle peut être invoquée par le représentant de l'interdit 247 418. Clause que la société continuera malgré l'interdiction 247 419. L'interdiction met fin à toutes les sociétés civiles. Sociétés mi- nières 247 VII. Déconfiture faillite ou liquidation judiciaire. 420. Historique 247 421. Il faut que la déconfiture de l'associé soit constatée par jugement. Mais la dissolution a lieu de plein droit 248 422. La saisie et la vente du patrimoine ou de la part sociale n'est pas la déconfiture 248 423. La faillite d'un associé met fin à In société 249 424. Il en est de même de sa liquidation judiciaire 25't 425. Toutes les sociétés prennent lin par ces événements. Sociétés minières 250 426. La faillite ou la déconfiture de la société ne mettent pas fin à son existence 250 427. La dissolution peut être invoquée par les coassociés, par l'insol- vable et ses créanciers 251 428. Elle peut être invoquée par l'adjudicataire ou l'acquéreur de la part d'un associé 252 429. Clauses excluant celte cause de dissolution 252 682 DL' CONTRAT DE SOCIÉTÉ IN") Page». 430. Elles peuvent être tacites 253 431. La société ainsi constituée esl-elle une société nouvelle ? 253 432. La société dissoute par la faillite ne revit pas par le concordat. . 253 VIII. Impossibilité où se trouve l'un des associés de réaliser son apport. 433. (Jette impossibilité dissout la société. Motifs. Hypothèse où l'ap- port consiste dans la propriété on l'usufruit d'un corps cer- tain ou d'un genre. Hypothèse où la propriété ne doit être transférée que plus lard. Apport conditionnel 253 433 bis. Du cas on l'associé ne fournil pas son apport sans que cet apport ail péri 255 433 1er. Perle de l'apport en argenl bu en choses de genre 255 43i. Perle partielle 256 435. Eviction totale de l'apport 256 136. Hypothèse où l'apport consiste dans un droit personnel de jouis- sance 257 IX. Volonté de Ions les asso 437. invention est valable, mais elle doit émaner de tous les asso- ciés. Suri, 'ic par actions 258 5; 11. Causes de dissolution qui n'opèrent pas de plein droit. I. Volonté d'un ou plusieurs associés. A. Sociétés auxquelles s'applique celte cause de dissolution. Clause contraire. 438. Historique et motifs. Cette cause de dissolution s'applique seule- ment aux sociétés ,i durée illimitée 25.S I tel) ni lion de la Bociélé à durée illimitée. Une société dont le terme n'esl pas indiqué n'est pas née ssairemenl à durée illimitée. . 259 4 M). Une société contractée pour une durée supérieure à la vie humaine n'esl pas à durer illimitée 259 441. Il en e-l de mêi les sociétés a vie 260 442. 11 en e-t autrement si le terme est très éloigné et incertain. So- ciétés minières 260 443. Une société contractée pour une affaire déterminée n'est pas à durée illimitée 2<">0 iii. La cause de dissolution s'applique aux sociétés de toute nature : sociétés en participation, sociétés de fait 261 445. Clauses excluant celle clause de dissolution 261 445 bis. Usage excluant celle cause 263 446. Celte cause de dissolution s'applique-t-elle aux sociétés où les associés ont le droit de céder leur part sociale? 263 447. Sociétés minières 26i 448. Sociétés par actions 264 13. Conditions auxquelles est subordonnée cette clause de dissolution. 449. Deux conditions. Bonne foi de l'associé. Opportunité de la renon- ciation. Exemples de renonciations faites en fraude. Clause contraire 265 I Mil I. DES M Mil III - 683 |N~) Vit-. 150. Exemples de renonciations failes à contre temps 266 151, La renonciation régulière ne donne pas lieu à des domms intérêts 266 't~>2. La renonciation «luit être notifiée. Formes de la notification . . , 153. Preuve de la notification y>l Nullité <1<- la renonoialion contraire à la loi. Qui peut invoquer la nullité 268 (55. De la notification faite à certains seulement des assoeiés 208 ir>t;. Sociétés Cromagères de l'Est II. Dissolution judiciaire pour justes motifs. ( ©7. Texte de la loi 269 A. I);m~ quelles sociétés existe celle cause de dissolution. 458. Sociétés à lerme. Sociétés à durée illimitée 269 459. Sociétés minières. Sociétés commerciale*. Promesses de société. 270 B. Faits < j 1 1 i peuvent motiver la dissolution judiciaire. 460. Clause que l'exclusion d'un associé peut être prononcée par ses coassociés 270 461. Pouvoirs du juge du fait. Classement des faits 270 462. Perle partielle du fouets social. Cas où l'objet principal fait défaut. Perte partielle d'un apport. Absence de bénélices. Change- ment du siège social 271 463. Dation d'un conseil judiciaire à un associé. Placement dans un établissement d'aliénés. Absence. Négligence 272 464. Mésintelligence entre associés. Exemple. < ïuerre entre deux pays. 27:'. 465. Cas où un associé manque à ses engagements. Malversations. Prélèvements exagérés 274 466. Inconduile 274 C. Conventions écartant la dissolution pour justes motifs. 467. Ces conventions ne sont pas valables d'une manière générale. Clauses confiant aux associés le droit de prononcer la dissolu- tion 275 D. Personnes qui peuvent invoquer les motifs graves. 468. S'il y a f&ute d'un associé, ses coassociés peuvent seuls demander la dissolution. Exemples 275 469. L'associé chez qui nait la cause de dissolution sans sa faute peut demander la dissolution. Exemples 276 470. Les créanciers des associés ne peuvent demander la dissolution. 277 471. Il en est de même des créanciers de la société 277 SECTION II CONSÉQUENCES DE LA DISSOLUTION § I. Des dommages-intérêts dus par suite de la dissolution. 472. Dans quels cas ces dommages-intérêts sont dus 277 684 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ £ II. Cessation des pouvoirs des associés. (N-'J Pagei 173. . Le droit d'administration cesse. Du cas où, après le décès d'un associé, des opérations sont faites pour le compte de la société. Du cas où le nom d'un associé continue à figurer dans la rai- son sociale 278 47 i. Si la société continue en fait, les associés sont tenus de ses enga- gements 279 §111. Scellés i't inventaire. 475. Le juge peut ordonner les scellés et des mesures accessoires. La clause contraire est valable, elle est opposable aux créanciers des associés 279 476. Elle est également opposable aux créanciers de la société. De même pour les héritiers. Héritiers réservataires ou mineurs. 279 477. L'inventaire peut être exigé. Clause contraire 280 178. De la clause que les droits du décédé seront constatés par un inventaire antérieur au décès et amiable 280 i; IV. Ihi partage du fonds suri, il. 479. Chaque associé peut demander le partage. Les règles du partage ,1,., successions ^ont applicables 280 'i80. Epoque à partir de laquelle peut être demandé le partage d'une société nulle 280 181 . Convention prolongeant l'indivision. Point de départ de la liqui- dation 280 482. L'action en partage peut être intentée par les créanciers. Adjudi- cataire d'une pari sociale 281 is::. Intervention et opposition des créanciers au partage 281 ,-,. La demande ne peut avoir pour objet que le fonds social tout entier. Las où certains associés ont fait une opération indé- pendante de la société 281 185. For du partage. Conditions de la I ici talion. Clause que l'un dés associés prendra tout l'actif. Cette clause est opposable aux héritiers mineurs 281 Forme du partage dans le cas où il y a des mineurs. Clause con- traire 282 -487. Rapport de< dettes. Hetrait successoral. Divertissement et recel. Fruits des choses sujettes à rapport 282 488. Les livres de la société font preuve pour les comptes 283 489. Désignation d'un liquidateur 283 490. Du fonds à partager 283 191. Effet déclaratif du partage 284 492. Sort des diplômes et médailles de la société 284 192 bis. Brevets d'invention 285 493. ^orl de la marque de fabrique 285 494. A qui sont attribués le< livres de commerce. Communication de ces livres 285 l Mil .1 M S MATli RI - 685 m«i 195. Rectification du partage à la suite du recou\ rement de (m de l'impossibililé de le9 recouvrer 286 196. Obligation de garantie. Rescision pour cause de lésion 197. Tribunal compélenl 498. Compétence du jug>- des référés § Y. Reprise des apports, 499. L'apport fait en propriété ne peul être repris. Clause contraire. . 287 500. L'associé reprend les cboses qu'il a livrées à la société en jouis- sance. Il en est autrement des cboses données en quasi-usu- fruit ou qui se détériorent par l'usage 288 501. Epoque où se calcule la valeur des choses qui se détériorent par l'usage 2*9 501 -bis. En cas d'estimation, c'est le montant de l'estimation qui est res- titue 289 502. Reprise de l'apport d industrie 289 503. Reprise de l'apport du nom 289 504. Garanties de restitution 289 § VI. Droit d'exercer un commerce similaire, 505. Les associés et Nuis héritiers ou ayants cause peuvent exercer un commerce similaire à celui de la société 290 506. Clauses contraires 290 CHAPITRE XII DE LA COMMUNAUTÉ OU INDIVISION SECTION" PREMIÈRE DISTINCTION DE LA COMMUNAUTÉ AVEC LES AUTRES LAITS JURIDIQUES. ACTES QUI LA CONSTITUENT 507. Silence du code sur l'indivision 291 508. Distinction avec la sociélé 291 509. Suile. Objet et caractère passif 291 510. Suite. Le consentement des parties n'est pas essentiel 292 511. Suite. Causes de dissolution 292 512. L'indivision n'est pas une situation de fait, elle dérive de la volonté des parties Exemple : legs, achat en commun 293 513. Si les héritiers exploitent les biens indivis, il y a associé 293 514. L'achat d'un objet pour le partager est une communauté. 11 en est autrement si l'immeuble doit être revendu. Acquisition d'un immeuble pour le mettre à la disposition d'une congrégation. 293 515. Distinction avec le mandat. Mandat d'acheter un immeuble qui sera partagé avec le mandataire 294 516. Communauté sur un immeuble indispensable aux immeubles voi- sins. Nature de celte communauté 294 517. Suile. Les règles de la propriété sont applicables à cette commu- nauté. Exemples 295 686 DU CONTRAT DE SOCIÉTÉ (N-) Paees 518. Suite. Cas où existe celle sorte de communauté : puits, fosses d'ai- sances, cours, elc 295 519. Suite. Acquisition de celle communauté par la prescription . . . 296 SECTION II ! SAGE DE LA CHOSE COMMUNE 520. Chaque communiste peul user de la chose commune, en rem- ployant suivant sa destination et les intérêts de la commu- nauté. Il ne peut nuire aux autres communistes 296 521. Droit plus plein sur les choses utiles à plusieurs fonda 297 522. Innovations sur l'objet commun. Exhaussement d'une cour com- mune 298 523. Travaux d'entretien, recours contre les copropriétaires 299 524. Exemples d'actes qui peuvent ou qui ne peuvent pas être faits sur une chose commune : passage, puits, cour, canal, mare, allée, terrain 299 525. Suite. Ruelle 300 526. Suite. Cour commune, puits commun 300 527. Suite. Passage 301 528. Le copropriétaire peut-il user de la chose pour le service d'autres immeubles? 301 529. Peut-il, si son immeuble est démoli, user de la chose pour son nouvel immeuble? 301 530. Répression des atteintes à la propriété. Action possessoire . . . . 302 531. Chasse sur le terrain commun. Constitution de servitudes .... 302 532. Le communiste peut aliéner son droit, mais non la chose. Retrait contre l'aliénation. Constitution d'hypothèques 302 533. Cession de paris dans un immeuble indispensable au service d'au- tres immeubles 303 534. Interprétation des droits des communistes par l'usage 303 535. Compétence du juge des référés 303 SECTION m ADMINISTRATION DE LA CHOSE COMM1 NE 536. Le communiste chargé de l'administration doit prendre soin de la chose, rendre compte des profils et fruits 304 537. Mode de révocation du mandat 304 538. Si l'administrateur paye un loyer, l'acte est un bail 304 539. S'il n'y a pas de mandat, chaque communiste n'a pas mandat d'ad- ministrer. Capacité pour faire des baux, des aliénations, des constructions, des réparations, elc 305 540. Un communiste peut-il obliger les autres à contribuer aux dépen- ses nécessaires ou d'amélioration ? 306 541. Il a un recours pour les dépenses qu'il a faites 306 542. Proportion dans laquelle les dépenses sont supportées 307 543. Un communiste peut-il refuser de contribuer aux dépenses en abandonnant sa part'.' 307 I \ltl.h DES HATIÈBES C87 IN") ***** 544. Un communiste ne doil pu de plein droit les intérêts des sommes prises dans la caisse commune. Exception pour le cas où il emploie les sommes dans son intérêt .Vi.">. Un comi ii~te n'esl pas forcé de tenir compte aux autres com- munistes des sommes qu'il a reçues de son débiteur ou d'un débiteur de la communauté 309 5*6. Poursuite contre les communistes des engagements pris par l'un d'eux 309 547. La dette des communistes pour les travaux n'est pas solidaire . . .'MO ôi*. Les créanciers peuvent-ils saisir la part de leur débiteur dans l'immeuble ? . . . 310 SECTION IV 1 IN DE LA COMMUNAI TÉ 549. Diverses causes de (in de la communauté 311 550. Les communistes peuvent, à toute époque, demander le partage. Exception pour les biens nécessaires aux immeubles voisins . 311 551. Forme du partage 312 552. Opposition et intervention des créanciers au partage 312 553. Effet déclaratif du partage 312 CHAPITRE XIII DES ASSOCIATIONS 554. Définition. Historique • 312 SECTION PREMIÈRE FAITS QUI CONSTITUENT L'ASSOCIATION 555. Mise en commun d'un objet dont les associés percevront alterna- tivement les bénéfices 313 556. Partage de courtages. Répartition des marchandises entre des négociants 314 557. Tontine. Caractères spéciaux 314 558. Contrat entre plusieurs personnes pour éviter une perte ; défense d'intérêts communs; contrat entre porteurs d'obligations; contrat entre propriétaires voisins pour faire un ouvrage d'utilité commune 314 559. Sociétés hippiques ou de courses. Sociétés d'exposition 315 560. Syndicat professionnel 315 561. Sociétés pour la direction d'une maison d'éducation .">15 562. Sociétés de secours mutuels. Caisses de secours. Assurances mutuelles. Sociétés de reconstitution des capitaux. Sociétés coopératives 316 562 bis. En tout cas, l'assurance mutuelle n'est pas une société commer- ciale 317 563. Sociétés d'agrément: cercles, sociétés de musique, de chasse, etc. Associations de charité, philanthropiques ou religieuses . . . 318 688 bl CONTRAT DL SOCIÉTÉ SECTION II VALIDITÉ DES ASSOCIATIONS (N««) Pages. 564. Les associai ions sont valables en principe. Associations entre obligataires. Sociétés d'agrément 320 565. Nullité de certaines associations de courses 320 566. Nullité des associations non autorisées de plusde vingt personnes 320 SECTION III CARACTÈRE JURIDIQUE DES ASSOCIATIONS 567. Les associations n'ont pas d'existence légale. Motifs 321 r.i'.s. Exemples : loges maçonniques, so< iélés d agrément, cercles . . . 321 569. Les associations n'ont pas de personnalité, même si elles sont fondées dans un but d'intérêl général. Associations entre obligataires. Sociétés d'agrément, de courses 322 570. Suite. S - d'assurances mutuelles de secours mutuels. As- i liions syndicales, syndicats professionnels. Sociétés de capitalisation ; 322 571. Les associations sous formede sociétés commerciales n'acquièrent pas la personnalité 325 7.7 j. Suite. Législation comparée. Point de vue législatif 32r> 573. Le d crel qui reconnail une association comme élanl d'utilité publique lui confère la personnalité morale 326 ,*>7 i. En e>l il de même des associations fondées dans un but d'utilité générale avec la permission de l'autorité .' Sociétés hippiques, de secours mutuels, d arrosage, de tir, de gymnastique. . . . 326 .'>7J. En toul cas leur personnalité n'esl pas complète 328 SECTION IV DROITS ET OBLIGATIONS - SSOCIÉS. FIN DE L'ASSOCIATION .">7'>. L'élude des associations pourvues de la personnalité rentre dans le droit administratif 328 .'>77. Les associations dépourvues de la personnalité ne peuvent ester en justice. Mais les associés peuvent agir. Gérants 328 57£ Les associations ne peuvent ni avoir un patrimoine ni contracter. 329 579. Les solutions relatives aux obligations des associés vis-à-vis des tiers sont applicables aux associations. Droits des créanciers. 329 580. Les membres de l'association peuvent-ils revendiquer les biens acquis au nom de l'association? 33" 581. Consécration des droits du propriétaire. Exhaussement d'un mur. Acquisition pour le compte des associés 331 582. A qui appartiennent les biens acquis qui se trouvent en posses- sion d'un tiers 331 583. Dans quels Cas les associés sont tenus des dettes 331 584. Dans quelle mesure ils en sonl tenus 332 585. Application aux congrégations 332 586. Pours die d'un délil commis contre l'association 332 TABLE DES H Uliiu 8 689 IN") P*g*i Validité des engagements des associés vis a- vis de l'association. Paiement des cotisations >*. Suite. Paiement des amendes r>s*.». Application des principes aux sociétés d'agrément 590. Application aux cercles '■'<'■'>'> 591. Rapports réciproques des membres d'une association. Reddition décompte. Indemnité '■'■''> r>'.»'J. Compétence 334 593. Les associations ne peuvent recevoir des libéralités 334 SECTION V SOLUTION DES VSSOCJ Kl 10KS 594. Modes de dissolution 334 594 bis. Effets 335 DU PRÊT CHAPITRE PREMIER CARACTÈRES GÉNÉRAUX DO PRÊT 505. Définition. Le prêt est un contrat réel 337 396. Cependant en législation celle conception esl critiquable 337 597. La promesse de prêt est obligatoire 33S 598. Le prêt esl formé dès que la chose est remise à un tiers pour le compte de l'emprunteur 338 599. Le prêt esl unilatéral 338 '.'m. Deux sortes de prêt 339 601. Interprétation de la volonté des parties à l'effet de faire -oit un prêt à usage, soit un prêt de consommation 339 602. Intérêts delà distinction 312 603. Le prêt à usage est le plus ancien 343 CHAPITRE II Dl PRÊT A l SAGE OU COMMODAT 604. Définition 344 SECTION PREMIÈRE CARACTÈRE DU PRÊT A USAGE. ACTES QUI LE CONSTITUENT. PRO : -- PRÊT 605. Le prél est unilatéral • 344 606. Il est en général un contrat de bienfaisance. Nature du contrat lorsque le prêteur reçoit un avantage. Diffère ices avec la do- nation. !>'• la rémunération fournie sans avoir été convenue . 345 607. Cas" ou le prôt à usage n'est pas un contrat de bienfaisance. . . . 347 608. Différences avec la constitution d'usufruit 317 Société, prêt, dépôt. — 2" éd. 44 690 DU PRÊT IN») PftjM. 609. Livraison d'un objet à un liers pour l'essayer 347 610. Différences avec le louage de choses 348 611. Contrat par lequel un maître -'engage à loger son domestique. Réserve du droit de chasse au profit d'un vendeur ou dona- teur 34* 612. Distinction avec le mandat et le dépôt. Renvoi 350 613. Caractère obligatoire de la promesse de prêt. Le prêt à usage est un contrat réel» Intérêts de cette solution 350 SECTION II 1>1 CONSENTEMENT ET DE SES VICES 614. Application du droit commun. Cas où l'une des parties entend faire une donation et l'autre un prêt à usage 351 SECTION III CAPACITÉ r.N MATIÈRE DE PRÊT A L'SAUE i I. Capacité du prêteur. c,ir>. La capacité d'administrer suffît. Personne pourvue d'un conseil judiciaire. Mineurémancipé. Femme séparée de bien*. Tuteur. Mari 352 616. Usufruitier. Locataire. Créancier gagiste 353 617. Les personnes détenant une chose pour autrui peuvent la prêter au propriétaire 353 $ II. Capacité de l'emprunteur. 618 La capacité est celle d'administrer. Femme séparée de biens. Mi- neur. Femme mariée. Individu pourvu d'un conseil judiciaire. 354 618 6i5. Nature et effets île la nullité du prêl à usage fait à un incapable. 355 SECTION IV DE L'OBJET KT DE LA GAI SE 619. On peut prêtera usage tout ce quiestdans le commerce. Immeu- bles. Choses qui se consomment par l'usage 355 619 6<>. Ce qu'il faut entendre par choses hors du commerce 356 620. Le prêt à usage de la chose d'autrui est valable 356 621. Il en est de même du prêt fait par un voleur. Obligation de dé- noncer le prêt au propriétaire 356 622. Le prêt de la chose d'autrui n'est pas opposable au propriétaire. Effets de la revendication du propriétaire 357 623. Prêl de la chose de l'emprunteur 357 624. Prêt d'un immeuble dotal 357 625. Prêts d'écrits dont la suppression a été ordonnée. Prêt de mauvais livres 357 626. Prêt d'armes de guerre ou d'objets de contrebande 358 621. Prêt du nom patronymique 358 I AMI. M S MA I H RI - <)'H IN") P»g<* f,28. Prôl dont la destination est immorale. Armes ou échelles pour commettre un crime X>x 629. Suite. Le prêteur a-t-il alors une action en restitution? SECTION V l'ItKl VE EN MATIÈRE DE PRÊT A USAGE 630. Application du droil commun 369 631. Formalité des doubles 359 SECTION VI OBLIGATIONS DE LEMPRl INTEl H 632. Division 360 $ I. Responsabilité de l'emprunteur. 633. L'emprunteur est tenu de sa faute légère in absiraclo.Fa.uie très légère 360 634. Il n'est tenu que des suites immédiates de sa faute 361 635. 11 n'est pas tenu du cas fortuit et de la force majeure. Preuve du ras fortuit. Preuve directe ou indirecte 361 636. Exemples de cas fortuits : incendie, vieillesse, maladie, vol. . . . 361 637. Les détériorations résultant de l'usage ne sont pas à la charge de l'emprunteur 362 638. Le cas fortuit libère l'emprunteur même s'il est dû à l'usage. . . 362 639. Cas où le commodataire répond du cas fortuit. Convention ex- presse ou tacite. Estimation 363 640. Suite. Cas fortuit précédé d'une faute. Hypothèse où l'emprun- teur aurait pu garantir la chose en employant la sienne. . . . 364 641. Suite. Hypothèse où l'emprunteur a mieux aimé sauver sa chose que la chose prêtée 365 642. Suite. L'emprunteur n'est pas responsable s'il n'a sauvé que sa chose sans la choisir 365 6't3. Suite. L'emprunteur esl responsable pour avoir préféré sa chose même si elle vaut plus que la chose prêtée 366 6 il. Suite. Responsabilité du cas fortuit si l'emprunteur a employé la chose à un autre usage ou pour un temps supérieur au temps fixé ; mais l'emprunteur n'est pas alors responsable s'il prouve que la chose aurait péri même s'il n'avait pas commis de faute 366 645. Suite. Il est responsable alors du cas fortuit même s'il n'a pas été mis en demeure 368 646. Suite. Cas où l'emprunteur garde la chose au-delà du temps fixé, mais sans se servir d'elle 368 647. L'emprunteur tenu de la perte ou de la détérioration peut exer- cer les actions contre les tiers. 11 peut se faire rembourser les dommages-intérêts -i la chose revient aux mains du prêteur. 369 § Iï. Usage de l estitulion. 660. A défaut de convention, la restitution a lieu au domicile du prê- leur. En est-il ainsi même si le prêteur a changé de domicile? Ou si l'objet a été cherché ailleurs qu'à son domicile ? .... 375 1Y. Action en restitution. 661. Le prêteur a contre l'emprunteur et ses ayants cause une action personnelle prescriptible par trente ans. Action eu revendi- cation. Prescrip ion de cette action 376 i; IV. /}<■ In solidarité entre les emprunteurs. La solidarité existe pour la restitution et la responsabilité. Elle n'existe pas entre les héritiers 376 i; Y. Droit international. 662 bis. Application des principes " 377 TABLE DES MATIÈRES 'i'.KÈ SECTION Vil DROl rS ET OBI [GATIONS DU PRÊTEUR § I. Obligations relatives à l'usage. (N") Page» 663. I ne peut empêcher l'emprunteur d'user de la chose, n'est pas obligé de le faire jouir 377 sj II. Droits et obligations relatifs aux dépenses. I. Cas mi les dépenses incombent au préteur ou à l'emprunteur. 664. La dépense nécessaire laite par l'emprunteur peut être recouvrée conlre le prêteur, même si ce dernier n'a pas été prévenu . . 378 665. Mais, à moins qu'il n'ait été prévenu, le préleur qui n'est plus possesseur de la chose ne peut être actionné 378 666. Remboursement îles dépenses utiles 379 667. Dépenses d'entretien 370 II A cl ion en paiement des dt:])en.ses. 668. Le prêteur n'échappe pas à son obligation en abandonnant la chose 379 669. Privilège et droit de rétention 379 670. Compensation entre les créances et les dettes de l'emprunteur. . 381 § III. Obligations relatives aux défauts de la chose. 671. Le prêteur est responsable des défauts de la chose 382 672. Il n'est pas tenu du vice qu'il ignorait 382 673. 11 n est pas tenu du vice que connaissait l'emprunteur ou du vice apparent 382 67 i. Le prèleur est tenu de sa faute légère si le prêt a été fait dans son intérêt 383 674 bii. L'emprunteur a-t-il un droit de rétention ? 383 § IV. Obligation relative à la restitution de la chose. 675. Le préteur ne peut redemander la chose avant le terme fixé . . . 383 il V. Possession de la chose. 676. Le prêteur conserve la possession de la chose. Mais l'emprunteur peut exercer les actions contre les tiers 383 677. Le droit de l'emprunteur est personnel et non réel 384 § VI. Droit international, alibis. Application du droit commun 384 SECTION VIII FIN DU PRÊT A USAGE 678. Le prêt se lermine par le terme ou l'usage fixés. Il se transmet aux héritiers 385 69 i DU PRÊT 679. Kst-il opposable à l'acquéreur île l'immeuble? 385 680. L'emprunteur ne peut transmettre son droit à un tiers 386 680 bis. Loi qui régit la fin du contrat 386 SECTION IX COMPÉTENCE EN MATIÈRE DE PRÊT A l SAGE C8i. Le prêt à usage esl civil, sauf -'il esl (ail dans l'intérêt d'un com- merce 386 SECTION X Dl PRÉCAIRE 682. Définition. Distinction avec le commodal 387 683. Nature du contrai 388 684. Le précarisle a la possession de la chose 388 685. Fautes dont il répond 388 686. Du cas où une prestation esl imposée au précarisle 388 CHAPITRE III Dl PRÊT DE CONSOMMATION 01 SIMPLE PRÊT 687. Définition 388 SECTION PREMIÈRE ACTES QUI CONSTITUENT DES PRÊTS DE CONSOMMATION 688. Distinction avec la vente. Obligations émises par une société . . 381» 689. Achat de reconnaissances du Mont-de-Piété 389 690. 1 »istinction avec le louage. Intérêt de la distinction 390 691. Distinction avec le quasi-usufruit 390 691 bis. Distinction avec la donation 391 692. Distinction avec le prêt à usage 391 693. Distinction avec la société. Avames moyennant une part de bénéfices 3[»1 693 bis. Suite. Cas où le bailleur de fonds participe à la direction. Cas où le bailleur de fonds renonce aux bénéfices. Las où le capital n'est apporté qu'en jouissance, lias où il donne lieu à la fois à un intérêt el à une part des bénéfices 393 694. Suite. Pouvoirs du juge du fait 39:» 695. Suite. Intérêts de la distinction entre le prêt et la société 39» 6%. Distinction avec le dépôt 39i 697. De l'escompte 394 698. Des avances sur litres 395 699. Renvoi pour la distinction entre le prêt à intérêt et d'autres con- ventions 395 TA Ml l DES MATIÈRES 698 SECTION II CARACTÈRES Dl Plu 1 DE ■ ONSOMMATION. DE LA PROMESSE DE PRÊT (N") Pa«M 700. Le prêl de consommation esl un contrat réel. La livraison trans- fère la propriété 3'jr» 701. La promesse de prêt esl valable 3'.»5 702. Epoque où les risques sont à la charge de l'emprunteur 306 703. Sanction de l'obligation de prêter les fonds promis 396 704. Le prêl qui s'applique h une chose déterminée esi-il un contrai réel ? 705. Prêts différés du Crédit foncier 398 706. Tradition fictive si l'emprunteur est déjà en possession 399 707. La tradition peut s'effectuer par le droit de toucher une créance ou de vendre un objel 399 708. L'emprunteur devient propriétaire même de l'objet déposé entre les main-; d'un tiers, par exemple d'un notaire 399 709. Dans ce cas, à la charge de qui sont les risques? 399 710. Si la destination imposée à l'emprunteur n'est pas observée, le contrai peut-il être résolu? 400 711. Le prêt de consommation est gratuit par sa nature et unilatéral . 401 SECTION III FORME ET PREUVE DL CONTRAT 712. La formalité du bon pour ou approuvé est applicable 401 713. Le prêt n'est pas soumis à la formalité desdoubles. Prêt sur gage. Est-il soumis à la formalité du bon pour'.' 401 714. L'emprunteur choisit le notaire rédacteur de l'acte 402 SECTION IV CAPACITÉ DES PARTIES § I. Capacité du prêteur. 715. Le préteur doit èlre capable d'aliéner. Mineur, interdit, personne pourvue d'un conseil judiciaire . .' 402 716. Femme mariée. Prêt au mari 403 716 bis. Envoyés en possession provisoire des biens d'un absent. Mari. Tuteur 404 716 1er. Nature el effels de la nullité du prêt fait par un incapable .... 404 717. Suite. Cas où l'emprunteur a consommé la chose 404 £ II. Capacité de l'emprunteur. 718. L'emprunteur doil avoir la cap ici té de s'obliger. Tuteur. Père administrateur légal. Personne pourvue d'un conseil judiciaire. Envoyé en possession provisoire des biens d'un absent. Admi- nistrateur provisoire en cas d'interdiction. Conseils des Uni- versités *0*> 719. Prohibition de prêts par les officiers aux matelots 406 720. Ancienne incapacité des fils de famille 406 696 DU PRÊT (N-) Pages 721. Nature et effets de la nullité du prêt à un incapable 406 722. Ancienne responsabilité des membres d'une fabrique pour les emprunts irrégulièrement contractés par la fabrique 407 723. Droit international 407 T'-'i. Suite. Incapacité du Gis de famille 407 SECTION V OBJET ET MODALITÉS DU PRÊT 725. Le prêt de consommation peut porter même sur des choses qui ne se consomment pas par L'usage. Renvoi pour les autres objets suscepsibles d'être prêtés. 4"7 726. Le prêt de la chose d'aulrui est nul. Le propriétaire peut reven- diquer. L'emprunteur pi-ul se prévaloir de la nullité 408 7 J 7 . Il peut demander des dommages-intérêts si le préteur a su que la chose était à autrui 408 728. Le préleur de bonne foi ne doit pas de dommages-intérêts, même -i le prêt est à intérêt 409 729. Le prêteur peut-il invoquer la nullité? 409 730. Si L'emprunteur consomme la chose de bonne foi ou l'acquiert de bonne fui, le propriétaire ne peut la revendiquer et le prêt devient valable 409 731. S'il est de mauvaise loi un consomme la chose de mauvaise foi, il n'est tenu qu'envers le propriétaire. Il en est de même s'il est de bonne foi et que la chose ail été perdue ou volée. . . . 410 732. Nullité du prêt fait sous une condition illicite ou impossible. . . 411 733. Nullité du prêt fait pour une maison de tolérance ou un jeu. . . 411 734. Le prêteur peut- il réclamer le remboursement des sommes prêtées en vue d'une destination illicite.' 412 735. Prêt à un non pharmacien pi un- l'acquisition d'un fonds de phar- macie 412 SECTION VI CARACTERE LNILATÉKAL LU l'HII ET OBLIGATIONS Dl PRÊTEUR ii I. Caractère unilatéral du prêt. 736. Le prêt de consommation est unilatéral 112 737. Le prêt sur nantissement ou en échange d'autres prestations esl-il synallagmalique? 413 738. Le prêta intérêt est unilatéral 41i § II. Obligations du prêteur. 1. Obligation de verser les fonds. 739. Le prêteur doit verser les fonds, sauf si le prêt est nul il i 40. ...ou sauf si l'emprunteur tombe en faillite, ou en déconfiture, ou diminue les sûretés promises 414 741. Intérêts dus par le prêteur qui ne verse pas les fonds. La résolu- tion du contrat est-elle possible ? 414 TABLE l'KS MATIÈRES ()07 ( N") Pagn 7 i'2. Une société peut stipuler que si les versements ne sonl pas faits, elle pourra vendre les obligations en bourse, Indemnité 'lue en ce cas par l'obligataire '» 1 r» 7i:î. La société peul stipuler que l'obligataire ne louchera pas le lot afTérenl .1 l'obligation Sort du loi a défaut de clause 115 II. Responsabilité du prêteur. 7ii. Responsabilité pour les vices de la ebose. Choses détériorées-, titres remboursés, chose d'aulrui Ï16 745. Pas de responsabilité pour les vices apparents 417 746. Pas de responsabilité pour le prêteur de bonne foi, même dans le prêt ii intérêts __ 417 III. Obligation Pagts. II. Epoque du remboursement. 764. A (lél'uul île convention, le juge lixe le lerme du remboursement. 424 763. II peul ifèlre fixé aucun terme 424 766. Clauses que l'emprunteur remboursera quand il le pourra ou en aura les moyens, ou quand il aura gagné quelque argent, ou quand sa situation le lui permettra 424 767. Clauses que l'emprunteur remboursera quand il en aura les moyens ou en cas de retour à meilleure fortune 423 768. Clause que l'emprunteur remboursera quand il le voudra 423 769. Clauses que le prêteur s'en rapporte à la loyauté ou à la bonne foi de l'emprunteur, ou que le remboursement aura lieu à la disposition de l'emprunteur 426 77' l. Clauses que l'emprunteur remboursera à sa convenance, ou par fractions et à sa convenance, ou quand le prêteur le deman- dera à l'emprunteur 427 771. Remboursement avant terme si le débiteur tombe en faillite, en déconfiture, en liquidation judiciaire, ou diminue les sûretés. Résolution dans le même ras 427 772. Remboursement en cas de fusion «le la société débitrice avec une autre société, de dissolution ou de mise en liquidation de cette société 428 i 73. I .!■ défaut de paiement autorise-t-il la demande en remboursement du capital? Renvoi 428 77 i. Le prêteur ne peul réclamer, en cas de faillite ou de liquidation, des sûretés spéciales. Application aux obligataires d'une société. 428 775. Le prêteur ne peul demander la restitution de lachose parce qu'il lui en survient un besoin pressant 428 776. L'emprunteur peul anticiper le remboursement. Mais il en est autrement en matière de prêt à intérêt 429 777. sauf circonstances contraires 430 778. Les obligations émises par souscription publique ne peuvent être remboursées par anticipation sans le consentement du créan- cier 430 La société qui a fixé une période pour le remboursement ne peut eboisir dans celte période le moment le plus favorable. . . . 432 Application de la prohibition du remboursement anticipé aux obligations à rots 432 780. Application au prêt stipulé remboursable par annuités 432 781. Pouvoir souverain du juge du tond sur ces divers points 433 En matière commerciale il ne peul y avoir de remboursement anticipé sans le consentement du prêteur 433 783. Sanction de l'obligation d'une société de se conformer à son tableau d'amortissement 433 784. Le remboursement anticipé ne peut avoir lieu même si la des- tination a cessé 433 785. La société en liquidation peul rembourser immédiatement ses obligataires 433 786. Il en est ainsi même si la liquidation est volontaire. Vente d'un réseau de chemin de fer à l'Etat, décision de l'assemblée générale. Dommages-intérêts dus en ce cas 434 i \ni r DES ma in m i 699 N-) Pa«M 787. Légalité de la convention autorisant le remboursement uni Exemple 134 788. Droil de remboursement anticipé accordé au Crédit foncier de France ..... 434 III. Lieu iln remboursement. 739. Si le prêl est sans intérêts, le remboursement es risques particuliers n'empêchant pas la limitation de s'appliquer. Obligations émises par une société 457 TABLE DES MATIÈRES TOI lvo*) Paget Suite. Prôl i'i un 'militaire avec garantie >l une prime de ri ment. Prôt sur garantie d'une pension Suite. Le juge du rail décide si le prôl esl aléatoire 158 Kl'.». La limitation ne s'applique pas au cas où 1 inli rèl représente quel que chose de plus que le loyer de l argeul 458 840. Suite. Commission des banquiers 841. Suite. La jurisprudence réduit la commission si elle esl exagérée. 460 842. Suite. Celte jurisprudence peut nuire au banquier. Autre justifi- cation de la commission Calcul de la commission i60 843. Suite. Mandataire qui négocie un prêt ;t;i 8ii. Suite. Le prêteur qui prêle ses capitaux ne peul réclamer un droit de commission supérieur au taux maximum. . . . '. 462 845. Suilc Preuve que le prêteur prête ses capitaux i<>2 846. Suite. Commission dans le cas où (intermédiaire s'est entendu avec le propriétaire des fonds 4G2 847. Suilc. Pouvoirs du juge du fail en matière de droit de commission. 462 8i8. Suite. Droit de commission pour l'escompte d'un effet de com- merce 462 849. Suite. Cession de part sociale avec promesse de report, moyen- nant une commission de plus de 5 p. 100 463 850. Change stipulé par le banquier dans la négociation d'effets de commerce 163 851. Honoraires d'un axone, frais de poursuites, frais de toute nature ou perles ajoutés à l'intérêt. Intérêts supplémentaires m cas de prorogation du prêt. ( Ibligation de parfaire une différence de cours 463 852. Addition des frais née ssités par le lieu où doil se faire le rem- boursement 164 853. Stipulation que les intérêts seront prélevés en dedans 464 854. Clauses relatives à la capitalisation des intérêts 464 855. Clause que les intérêts seront calculés suivant l'année commer- ciale de 360 jours 465 nx'.. Reconnaissance d'une dette supérieure a la somme prêtée 465 857. Obliga ion de rembourser une somme supérieure à la somme prêtée 465 858. Conbaclus trium. Mohalra 166 859. Contrat pignoratif . 466 860. Suite. Cas où le contrat pignoratif déguise un prêt usuraire. . . . 466 801. Anlichrèse déguisant un prêt usura.ire 466 862. Echange déguisant un prêt usuraire 467 863. Société déguisant un prêt usuraire 467 864. Vente à réméré déguis mt un prêt usuraire 467 865. Obligations à prime 467 866. Pouvoirs du juge du fait en matière de prêt usuraire 467 ( '.. Lois spéciales dérogeant à la limitation du taux. 8666/5. Essais de modificali ns à la loi de 1807 167 867. Colonies. Algérie 467 868. Avances de la Banque de France 468 702 Dl PRÊÏ (N») Pane. 869. Emprunts d'Etat 468 870. Avances du Monl-de-piélé 468 871. Prêts hypothécaires sur navire 468 872. Prèls commerciaux. Loi du 12 janvier 1886 468 s7:î. Les juges ne peuvent réduire en matière commerciale ni l'intérêt excessif ni le droit de commission 468 874. Le prêt est civil ou commercial suivant la destination des fonds empruntés 469 875. Il s'agit de la destination indiquée au prêteur et non de la desti- nation réelle 470 876. Opinion qui considère la qualité de l'emprunteur 470 877. Opinion qui considère la qualité du prêteur 470 878. Le prêtpour payer un prix d'immeuble est civil, même si l'im- meuble est acquis pour un commerce. Le prêt pour l'achat d'une mine est civil 470 879. Le prêt pour les besoins d'un commerce, pour l'acquisition d'un fonds de commerce ou pour le fonctionnement d'une société commerciale esl commercial 471 --" Le prêt Fail par un banquier est-il commercial? 471 881. Suile. Cas où l'acte indique la destination civile du prêt. Prêl hypothécaire 473 vv'J Suite. Prêt étranger aux Opérations du banquier 474 --:;. Suite. Conséquence de la jurisprudence au point de vue de la sup- pression du délit d'usure 474 884. L'acheteur de reconnaissances du Mont-de-pieté et le prêteur sur sont des banquiers 474 >-r. Le prêt relatif à un brevet d'invention est-il commercial? .... 475 v-' Le prêt à une société civile de forme commerciale est-il com- mercial? 475 s>7. Le prêt civil destiné à une société commerciale o'esl lia- néces- sairement commercial. Présomption de commercialité du prêt fait à un commerçant 475 v-v La liberté du taux de l'intérêt commercial esl applicable même au prêt illicite 476 1>. Sanction de la limitation du taux de l'intérêt. 889. La sanction civile est l'imputation et la res'itulion des perceptions usuraires. Dommages-intérêts 476 890. En ce qui concerne les intérêts payés, l'imputation seule est per- mise 477 891. Renonciation ou confirmation par l'emprunteur. .Ingénient rendu contre lui 477 892. Donation de l'excédent faite par l'emprunteur 477 893. La sanction est la même si le prêt usuraire est déguisé 478 894. Suite. Contrai pignoratif 478 895. Suile. Le prêt déguisé ne produit pas les effets du contrat qui le dissimule 478 896. Délai de la réclamation de l'emprunteur 479 897. Sanction pénale de l'usure 479 TABLE DES HATIÈRKS "70.J N") Pm« Preuve du prèl usuraire 999. Preuve dans le cas où l'acte est aulhenlique E. Rétroactivité des lois relatives au taux maximum de finit 900. Ces lois rétroagissent comme l"i- pénales, mais non comme lois ••i \ iles. Effet ilf la ratification, postérieure i la loi de 1886, d'un prêl usuraire antérieur 1\ . Forme et preuve de lu stipulation d'intérêts. 901. Celle convention n'est soumise à aucune forint' sacramentelle . 902. Mais l'existence d'une convenlio . . . .' 481 003. Sens de la slipulation que le prêt est sans intérêts jusqu'à l'échéance Î81 904. Sens de la slipulation que le prétest à intérêt jusqu'à l'échéance . 905. La nécessité d'une stipulation exisle même dans le prêl commer- cial 4S2 906. Exception pour les comptes courants commerciaux 483 907. Le lauxde l'intérêt doit être fixé par écrit. Preuve de la convention 11 ne s.iffit p.- s que la convention d'intérêt soil écrite. Mais il suffit que le chiffre même des intérêts soit indiqué 48 1 909. Si it s intérêts consistent en denrées, il suf.it d'indiquer la nature des denrées 185 910. Si le prêt est déguisé, la nécessité dune stipulation écrite ne dis- paraît pas 485 911. La preuve d'une stipulation d'intérêts usuraires peul être faite par tous moyens iSS 912. Les intérêts payés sans stipulation sont payés légitimement. Mo- tifs .... ". -486 913. Suite. Paiement des intérêts faits par erreur 487 913 bis. Suite. Il peut être démontré que le paiement d'intérêts a lieu à titre de donation iVN 914. Si les parties omettent de fixer le taux, le taux légaKest applicable, i"-" V. Lieu de paiement des intérêts. 915. Les intérêts sont payables au domicile du débiteur, sauf clause contraire 488 VI. Epoques de paiement des intérêts. 916. Liberté de la convention 488 VII. Preuve du paiement des intérêts. '.'17. Application du droit commun 918. Cependant la quittance du capital fait présumer le paiement des intérêts. Motifs 'v'-' 919. Cette présomption ne peut êtrecomballuepar lapreuve contraire. 489 920. Cependant elle peut être détruite par l'aveu et le serment .... i90 921. La quittance d'une frac'ion du capital fait présumer le paiement des intérêts de et-tte fraction, mais non des intérêts du sur- plus 190 704 m prêt |NM| pM*» Ylll. Temps pendant lequel les intérêts sont dus. 922. A défaut de convention, l<'- intérêts courent du versement des fonds 491 923. La faillitf arrête le- intérêts des dettes du failli. Portée de celle solution 491 924. En dehors de ce cas, lesinlérêls sonl dus jusqu'à l'échéance, mais non au delà 491 925. Si le porteur d'un litre amorli a continué à toucher les intérêts, ces intérêts peuvent-ils être retenus sur le capital? 491 926. Suite. Opinion affirmative 492 927. Suite. En loul cas, la société esl tenue de in rem verso 493 927 bis. Suite. Opinion d'après laquelle la société ne doit que la moitié des intérêts 493 928. Suite. Validité '\r< clauses autorisant la retenue des intérêts. . . 493 929. Suite. Faits don résulte celle clause 494 930. Suite. Si la société connaissait l'amortissement du litre, la con- tinuation du service des intérêts peut être considérée comme une renonciation à l'action 495 931. Suite. Recours du porteur du litre amorti contre son vendeur . . 195 932. Suite. Solution donnée par la loi du l-r aoûl 1893 : interdiction de la répétition des in érèls. Portée de celte solution 495 933. Suite. Le droit de répéter les intérêts est subordonné à une pu- blicalion des Litres amortis 496 IX. Sanctions de l'obligation de payer les intérêts. 934. Droit pour le créancier de faire courir les intérêts des intérêts. . 496 935. Le créancier peut il réclamer la restitution du capital? 496 X. Des intérêts / prêt en droit international. 936. La question de -avoir -i le prêl porte intérêt et quel esl le maxi- mum du taux e-t tranchée par la loi qui règle les effets des obligations 497 937. Opinion qui applique la loi du lieu où les fonds sont versés. . . . 498 938. 11 n'y a pas lien de s'occuper de la nationalité ou du domicile des parties ni du lieu du remboursement 498 939. I..- parties ne peuvenl se référera une autre loi pour le taux maximum. Cas où les parties dressent frauduleusement l'acte a l'étranger 499 940. » Ipinions qui appliquent la loi du lieu où le capital doit être em- ployé ou la loi du domicile du créancier 499 oil. La limitation du taux de l'intérêt est-elle d'ordre public? 499 942. La prohibition de l'inlé et, daus I'- législations qui l'admettent, est-elle d'ordre public? 500 943. Les intérêts moratoires -oui régis par la loi du contrat 501 944. ( Ipinion qui leur applique la loi du lieu on | action est intentée. . 501 945. Loi qui régit les intérêts moratoires quand la convention fixe le taux de l'intérêt jusqu'au remboursement 501 946. |.a forme de la stipulation de l'inlérêl esl régie par la loi du lieu i\u contrat 501 TABLE DES MATIÈRES 705 SECTION VIII DELA RENTE PERPÉTUELLE 01 CONSTITUÉE § I. Historique. (N*g! Page.". 947. But de l'inslilulion de la rente perpétuelle dans l'ancien droit. . . 502 948. La renie perpétuelle en droit romain 502 949. Lois qui limitaient dans l'ancien droit le taux de la rente perpé- tuelle 502 950. Applications actuelles de la rente perpétuelle 503 § II. Diverses sortes de rentes constituées. Nature de lu constitution d<- rente. 951. Différence- de la rente perpétuelle avec la rente viagère et la rente foncière 504 952. La rente perpétuelle est un prêt 504 953. Différences avec la vente 505 954. Conséquences de l'assimilation avec le prêt 505 955. La rente perpétuelle est meuble 505 956. En échange de quelsobjets peul être stipulée la rente perpétuelle? . 506 957. La clause de remboursement quand l'emprunteur le voudra, fait- elle du prêt une constitution de rente? 506 S III. Forme et preu.ee du contrat. 958. Aucune forme n'est exigée par la loi. Cependant, en général, le contrat doit être l'ait par écrit 506 959. Preuve du contrat 507 960. Le fait d'avoir reçu les arrérages pendant trente ans ne fait pas naî're la rente. Mais plusieurs reconnaissances peuvent tenir lieu du litre primordial 507 fcj IV. Obligations de l'emprunteur ou dèbi-rentier. I. Paiement des intérêts. 961. Cette obligation est la même, en principe, que dans le prêt. . . . 508 A. Montant et divisibilité des intérêts. 962. Les lois limitatives du taux s'appliquent 508 963. Mais il en est autrement si le capital aliéné ne consiste pas en une somme. Au contraire les lois limitatives s'appliquent dès que le capital consiste en une somme, alors même que les arréra- ges consistent en denrées 508 964. La stipulation que les arrérages seront en denrées est valable . . 509 965. Estimation des denrées pour calculer si le taux maximum est dépassé 509 966. Suite. Abrogation d'une ancienne ordonnance 509 967. Divisibilité de la dette des arrérages entre les héritier- du débi- renlier 509 Société, prêt, dépôt. — 2e éd. 45 706 DU PRÊT (N~j Pages B. Forme de la stipulation des intérêts. 968. La stipulation doit être écrite 510 < !. Lieu de paiement des intérêts. 969. Ils sont payables au domicile du débiteur 510 D. Sanctions de l'obligation de payer les intérêts. 970. La constitution de rente est-elle résoluble pour inexécution des conditions? Droit du créancier de faire courir les intérêts des intérêts 510 971. Différence sur ce dernier point entre le prêt et la constitution de rente 510 IL Remboursement tlu capital. 972. Ce remboursement est facultatif en principe 511 A. Prescription de l'action en remboursement. 973. La prescription est de trente ans. Sun point de départ 511 B. Rachat de la rente. a. Caractère essentiel 'lu drn't de r.i. hat. Clause contraire. 974. La rente est essentiellement racbelable. Motifs îill 075. Ancien droit ' • • 512 976. Peu importe la qualité du crédi-renlier. Communes et établisse- ments publics 512 077. La règle ne s'applique pas aux rentes ((instituées à titre gratuit. 512 978. La faculté de rachat esl imprescriptible 513 979. Validité de la clause interdisant le radial pendant dix ans au plus. 513 980. La clause interdisant le rachat pendant plus de dix ans est réduite a dix ans 51 i t> Condition* du rachat. 981. Taux du rachat si la rente est constituée en argent. Stipulation modifiant ce taux. Du cas où la rente est constituée à titre gratuit 51i '.'82. Taux du rachat si la rente est constituée en denrées 515 983. Le débi-renlier doit-il informer a l'avance le crédi-rentier du rachat? Il doit offrir le capital entrer et les intérêts échus. Des offres réelles sont inutiles 51ft 984. Divisibilité du droit de rachat entre les héritiers 51f> c. Capacité en matière de rachat. 085. Capacité du crédi-rentier 517 086. Capacité du débi-rentier 517 d. Effets du rachat. 987. Tout rapport cesse entre les parties. Recours en cas d'éviction. Recours en cas de conversion de rentes sur l'Etat 517 I Mil i Dl 8 11 \ H ÈRES -07 (N«) Pafw. i i. i Ibligation de rembourser la rente. *.»ss. Le remboursement ne peul être exigé du débiteur. Clause con- traire. I lypothèses où la l<>i autorise le crédi-rentier a deman- der le remboursemenl 5t* t° Défaut d'accomplissement des obligations pendant deux ans. Il faut trois ans de non paiement 518 989 bis. Il n'est pas nécessaire que les années dues soient consécutives. . 519 990. Les pailics peuvent décider que le défaut de payement devra avoir lien pendant un délai moindre ou plus long 519 991. Celle premièrecause de remboursement n'est pas une application du pacte comraissoire tacite 519 992. Une mise en demeure du débiteur est inutile. Quid si la rente est quérable? 520 993. Les tribunaux peuvent accorder un délai de grâce. A défaut de délai de grâce, aucun terme n'est accordé au débiteur 521 994. Cette cause de résolution ne s'applique pas aux rentes constituées à titre gratuit 521 995. ... ni aux rentes constituées pour prix d'un immeuble 522 996. La résolution du contrât ne peut être demandée que contre ceux des héritiers du débiteur qui n'exécutent pas leurs obli- gations 522 997. 2° Défaut de prestation «le sûretés promises. Diminution des sû- retés. La diminution par cas fortuit suffit-elle? Le débiteur peut-il fournir d'autres sûretés ? 522 998. Les juges peuvent accorder un délai de grâce 523 9C>9. Celle cause de résolution ne s'applique pas aux rentes constituées à litre graluil 523 1000. 3° Faillite ou déconfiture du débiteur. Le capital peut être exigé même contre la caution 523 1001. L'acceptation bénéficiaire n'est pas assimilée à la faillite 523 1002. Cette cause de résolution ne s'applique pas aux rentes constituées à litre gratuit ou pour prix de la vente d'un immeuble .... 523 1003. Effets du rachal 524 § V. Obligations du prêteur ou crédi-rentier. 1004. Assimilation avec le prêt à intérêt 524 >; VI. Effel rétroactif des lois en matière de constitution de rente. 1005. La loi en vigueur au moment de la constitution régie les rentes pendant leur durée. Application aux maximum des arrérages. 524 1006. Application au calcul de la valeur des denrée- 524 1007. Application an cas de rachat 524 § VII. De la rente perpétuelle en droit international. 1008. Assimilation au prêta intérêt. . . 525 708 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE DU DEPOT ET Dl SEQUESTRE CHAPITRE PREMIER GÉNÉRALITÉS SUR LE DÉPÔT SECTION PREMIÈRE DÉFINITIONS. ACTES Ql I CONSTITUENT DES DÉPÔTS |N«) P»ges. i009. Définitions 527 1010." Différences entre le prêl el le dépôt 52t< 1011. Différences entre le prêt de consommation el le dépôt irrégu- lier 528 1012. Différences entre le dépôl et le prêt à usage. Hcmise de clichés pour «les impressions, remise d'un objet pour le voir, remise d'objets qui doivent être fournis en garantie d'un prêt .... 528 1013. Différences avec le mandat. Dépôt de livres chez un libraire. . . 529 1014. Différences avec le nantissement ■ 529 1015. Différences avec la vente à condition, le louage d'ouvrage, le con- trat de transport 529 SECTION II CARACTÈR1 ÔT. DIVERS1 DE DÉPÔT 1016. Ledépôtesl un contrat réel. Promesse de dépôt 530 1017. Suite. La tradition peut être feinte 531 1018. Ledépôtesl un contrat unilatéral el gratuit 531 1019. Deux espèces de dépôl : dépôt proprement dil et séquestre. . . . 532 CHAPITRE II 1U DÉPÔT PROPREMENT DIT SECTION PREMIÈRE DÉFINITION ET CATAC TERES DU DÉPÔT 1020. Définition 532 1021. Le contrat est réel, unilatéral el de bienfaisance 533 SECTION 11 OBJETS Si R LESQ1 ELS PEUT PORTEE LE DÉPÔT 1022. Le dépôt ne peut porter que sur des meubles. Motifs 533 1023. 11 ne peut s'appliquer qu'à des meubles corporels. Titres de créance oo;> 1024. 11 peut porter sur des choses qui se consomment par le premier usage TABLE DES MATIÈRES 70!) SECTION III DIVERSES BORTES DE DÉPÔT ORDINAIRE (S") Pw. l"'-'"'. Dépôt volontaire, dépôt nécessaire, dépôt Lrrégulier SECTIOM IV lil DÉPÔT VOLONTAIRE 5; I. Conditions essentielles à lu formation et à la validité du contrat. I. Consentement. 1026. Le consentement est obligatoire même dans le dépôl nécessaire. 536 II. Capacité. 1<>27. La capacité doit être celle de contracter 536 \.. ( iapacité du déposant. 1U28. La capacilé d'administrer suint. Exemples 537 1029. Il en est ainsi même dans le dépôt salarié 537 1030. Mais pour l'aire un dépôt irrégulier, il faut avoir la capacilé d'aliéner •>:'< 1031. Nullité du dépôt l'ait par un incapable. L'incapable peut demander l'exécution du contrat en acquittant ses obligations 537 1032. Situation des parties si l'incapable demande la nullité 539 1033. Dépôt fait par une personne qui ne peut consentir : fou, enfant. . 539 1034. Le décès peut être fait par un mandataire. Dépôt de la chose d'autrui • • 539 Li. Capacilé du dépositaire. 1035. Cette capacité doit être celle de s'obliger. Exemples 540 1036. Caractères et effets de la nullité 540 1037. L'incapable est responsable de son dol 541 1038. Le dépôt peut être fait à plusieurs personnes 542 III. Objet. 1039. Le dépôt ne peut porter que sur des meubles corporels. Chose d'autrui Jl- §11. Preuve du dépôt. 1040. Historique 542 1041. L'acte n'est pas soumis à la formalité des doubles. Renvoi pour le dépôt salarié 5*2 1042. L'acte est soumis à la formalité de bon pour ou approuvé .... 543 1043. Il en est surtout ainsi dans le dépôt irrégulier 544 1044. Il en est également ainsi dans le dépôt salarié ;)11 1045. La preuve par témoins est interdite dans les mêmes cas que pour les autres contrats **4* 1046. Cas où la preuve par témoins est permise 5*5 !'">47. Preuve par l'aveu 5i5 710 DU DÉPÔT ET DL SÉQUESTRE (N°»l ra?««. 10i8. Interrogatoire sur faits el articles 545 10i9. Cas où l'une des affirmations eal invraiseinbable 547 1U50. Effet relatif de l'aveu 547 1051. Serment 547 1052. Règles de preuve quand le procès s'élève devant la juridiction criminelle 547 §111. Obligations du dépositaire. I. Obligation de garder avec fidélité la chose. 1063. Celte obligation a plusieurs conséquences 548 A. Responsabilité du dépositaire. a. Appréciation i'e la faute. 1054. Le dépositaire n'est responsable que de la faute qu'il ne commet pas dans ses propres affaires. Motifs ois 1055. Il en est autrement si le dépositaire apporte à ses affaires plus de soins qu'un bon père de famille 54'.i 105G. Le dépositaire n'est pas tenu de la faute la plus lourde, s'il la commet dans ses propres affaires 549 1057. 1-e dépositaire peut confier à un tiers l'objet déposé. Il est res- ponsable du fait de ce tiers 550 1058. Responsabilité en cas de dépôt irrégulier 550 1059. Cas exceptionnels où la responsabilité est celle d'un bon père de famille 550 1060. 1° Si le dépositaire s'est offert pour recevoir le dépôt. Exemples . 551 1061. 2° Si le dépositaire a stipulé un salaire. Renvoi pour la nature du contrat 552 1062. Suite. Responsabilité du dépositaire en ce cas 552 1063. 3° Si le dépôt a été fait dans l'intérêt du dépositaire. Exemple. . 552 1064. Suite. Même solution pour le cas où le dépôt est fait dans l'inté- rêt des deux parties 552 1065. 4° Convention formelle sur la responsabilité 552 1066. On peut aussi convenir que le dépositaire ne répondra que de certaines fautes 552 1067. A quel moment se calcule la valeur de la cbose 553 1068. Responsabilité s'il y a plusieurs héritiers ou dépositaires 55!! 1069. Le dépositaire doit-il, en cas de danger commun, préférer sa chose à celle du déposant ? 554 1070. Indemnité due au dépositaire qui sacrifie sa chose pour sauver celle du déposant 55» b. Cas fortuit et force maji 1071. Le dépositaire n'en est pas tenu. Exceptions pour la mise en de- meure et pour le cas d'une clause formelle 554 1072. Responsabilité du dépositaire si le cas fortuit a été précédé d'une faute de sa part ou s'il n'a pas soustrait la chose aux résultats du cas fortuit. Caisse d'un fonctionnaire pillée pendant une guerre 554 IAIUI DES MUirills 711 Kg*. Uù'.\. Le dépositaire doil prouver le eu fortuit 1074. Exemples de cas fortuit : pillage, incendie, vol C. Aiittrance contre lin 1075. Le dépositaire n'esl pas tenu d'assurer la chose, ^aui usage con- traire 555 1076. S il a fait assurer la chose, il n'a d'action qu'en cas cTincendie provenant de sa faute ou s'il s'est çharg fortuit. . . . 556 1077. Action du déposant contre l'assureur 566 1078. Suite. Cas où le dépositaire a agi comme mandataire ou gérant d'affaires du déposant 557 B. Usage de la chose. 1<>79. Le dépositaire nepeut se servir de la chose qu'avec l'autorisation expresse ou présumée du déposant. Cas d'autorisation présu- mée 557 1080. Suite. Choses qui se détériorent ou se détruisent par l'usage. . . 558 1081. Si le dépositaire est autorisé à se servir de la chose, le contrat est-il un prêt à usage? 558 1"82. Responsabilité du dépositaire qui s'est servi de la chose sans auto- risation 559 1083. Preuve, dans ce cas, de la valeur de la chose 559 1084. Montant des dommages-intérêts dus par le dépositaire dans le même cas 559 1085. Le dépositaire qui se sert de la chose commet-il un vol d'usage 7 559 C. Obligation de ne pa< chercher à connaître la chose. 1086. Cas où existe cette obligation 569 1087. Sanction 560 II. Obligation accidentelle de payer un salaire an déposant. 1088. Cette obligation peut dériver de la convention. Intérêts d'un dé- pôt irrégulier 5G0 III. Obligation de restituer lu chose. A. Restitution en nature ou par équivalent. 1089. Le dépôt doit être restitué en nature, même s'il porte sur de l'ar- gent ou sardes choses qui se consomment parle premier usage 561 1090. Preuve de l'identité des choses déposées si elle est contestée. . . 561 1091. Preuve de cette identité si elle est contestée par les créanciers du dépositaire 562 1"92. Il peut être convenu que la restitution n'aura pas lieu en nature. Dépôt irrégulier , 563 1093. • Le dépôt d'une somme d'argent est présumé irrégulier; il en est autrement du dépôt de titres au porteur 563 1094. Différences entre le dépôt irrégulier et le prêt au point de vue du terme et des intérêts 563 1< »95. Suite. Opinion qui confond les deux contrats ' ' 1096. Suite. Critérium fondé sur l'intention des parties. Moyens de déterminer cette intention 564 712 DL DÉPÔT ET Dl SÉQUESTRE (»•) Pages. 1097. Suite. Les dépôts d'argent à la Banque île France ou à une société de crédit foncier sont des prêts 505 1098. Suite. Les dépôts de cautionnement d'employés sont des prêts. . 565 1099. Suite. Différences entre le prêt et le dépôt aux points de vue de la responsabilité, de la compensation, du droit fiscal . . . 566 1100. Le dépôt avec la clause que le dépositaire pourra se servir de la chose et la restituer par équivalent est-il un dépôt irrégulier? 566 1101. Le dépôtaver faculté de se servir delà chose et d'en restituer l'é- quivalent si tel événement se produit est-il un véritable dépôl? 567 1102. Le déposant n'a dans le dépôl irrégulier aucun privilège vis-à-vis des autres créanciers do dépositaire 567 Jï. Restitution des fruits. 1103. Distinction entre les sommes d'argent et les autres objets .... 568 C. Sanction de l'obligation de restituer. 1104. Calcul des dommages-intérêts 568 1 1 < »r» . Calcul des intérêts dune somme déposée 568 1106. Faits qui font courir les intérêts 5ô3 1 1 « »T . 11 n'est pas dû de dommages-intérêts si la dépositaire n'avait pas le droit de restituer. Saisie-arrêl ou opposition 569 1108. Droit du déposant de se faire ouvrir l'appartement du dépositaire. 569 1109. Calcul des dommages- intérêts si le dépositaire s'esl servi de la chose 569 1110. Indemnité spéciale pour le cas où le déposant a subi un préjudice outre la perte de l'objet 570 1111. Le dépositaire doit-il de plein droit les intérêts des choses dont il s'est servit 570 1112. Le dépositaire qui emploie les ronds a des opérations de jeu, doit-il compte du profit au déposant? 571 1113. Le dépositaire infidèle est passible de la contrainte par corps et n'est pas admis au bénéfice de cession 571 D. Cas où le dépositaire est dispensé de restituer, étal dan- lequel la chose doit être restituée et personnes qui doivent restituer. 111 i. Responsabilité de la perle. Assurance. Renvoi 571 1115. Les obligations du dépositaire cessent s'il peut prouver qu'il est propriétaire de la chose 572 1116. i Conditions dan- lesquelles le fait qu'un tiers est propriétaire dis- pense de la restitution. Renvoi 572 1117. Le dépositaire ne peut opposer la compensation dans le dépôt régulier, il en est autrement dans le dépôt irrégulier 572 1118. Les détériorations par cas fortuit ne sont pas à la charge du dépositaire 572 1119. Le prix obtenu en échange de la chose enlevée par cas fortuit doit être restitué au déposant. Il en est de même des objets obtenus en échange 573 1120. Si le dépositaire a aliéné la chose, quelles sont les actions du déposant? 573 TABLE DES M \ l il RES ~ 1 .'{ s- Page». 1121. Restilulion à faire par l'héritier du dépositaire qui a vendu de bonne foi la chose ~>~>'-> 1122. lin cas où l'héritier a consommé de bonne roi la chose 1123. Du cas où l'héritier a donné de bonne foi la chose 1124. Suite. Profit tiré par l'héritier de la donation '>'•■< 1 125. Qui doit faire la restitution s il y a plusieurs dépositaires ou plu- sieurs héritiers du dépositaire 575 E. A nui doit être faite la restitution. 1126. La restitution doil être faite au déposant. Du tiers qui commet un faux pour se faire restituer la chose 576 1127. Restitution clans le cas où il y a plusieurs déposants ou plusieurs héritiers du déposant 576 1128. Restitution m le déposant capable esl devenu incapable ou si le déposant a toujours été incapable 576 1129. Restitution si le déposant incapable est devenu capable 577 1 130. Le dépositaire no peul exiger la preuve de la propriété du dépo- sant 577 b Cas où >'u h toute réquisition du déposant. . . 587 1151. Motifs 587 1152. Il en est ainsi même -i l«- dépositaire a été autorisé à se servir de la chose, <>;i -i ledépôl a clé fait dans l'intérêt du dépositaire, ou -i le dépôt esl salarié 587 1153. La même obligation existe dans ledépôl irrégulier 588 1 154. Un terme peut être stipulédans le dépôt à la condition d'être court 588 1155. positaire peut retenir la chose jusqu'au paiement de ses dépense-;. Il en est de même si la chose a été volée. Cas d'une saisie-arrêt 588 1156. Formes de la saisie-arrêt. Le dépositaire peut-il retenir la chose parce qu'il connaît le propriétaire? 589 lir>7. Le dépositaire ne peul restituer la chose avant qu'elle lui soit demandée. Pouvoirs du juge 589 1158. Le dépositaire ne peut restituer avant le terme fixé 590 ' i. Lieu de la restitution. 1159. A défaut de convention, la restitution doit être faite dans le lieu du dépôt 590 H. Frais de la restitution. 1160. IN -ont ù la charge du déposant 591 i- IV. Obligations .NM) l'a*,.. 1166. A qui peul être demandé le remboursement des dépenses si la restitution esl faite non au déposant, mais au véritable proprié- taire g ; 1167. Indemnité des pertes: vices de la chose, sacrifice de la chose du dépositaire pour sauver celle du déposant '.>'/.', II. Obligation de payer le salaire. 1168. Un salaire peul être stipulé, sans que le contrai perde -on caractère 594 1169. Opinion qui voit alors dans le cou Irai un louage d'ouvrage. . . 1170. Nature du contrai par lequel un négociant gai de des objets moyennant salaire 596 1171. Nature du contrat de dépôt de titres ou de marchandises 596 117-'. En <-as de dépôt irrégulier, le salaire peut être stipulé sous forme d'intérêt. Le contrat ne devient pas nécessairement un prêt . r.'jT 1173. Si la restitution est faite non au déposant, mais au propriétaire des objets, ce dernier est-il tenu du salaire? 597 III. Solidarité entre les déposants. 117i. Les déposants ne sont pas solidaires pour leurs obligations . . . r»'. »7 IV. Garanties de l'exécution des obligations du déposant. 1175. Droit de rétention du dépositaire ; pour quelles créances existe ce droit.' 598 1176. Le droit de rétention est-il opposable à l'acquéreur ou aux créan- ciers du déposant? 599 1177. Il n'est pas opposable au véritable propriétaire de la chose. . . . 599 1178. Il est subordonné à la possession de la chose 600 1179. Il ne donne pas de droit de préférence au dépositaire 600 1180. Privilège du dépositaire 601 $ V. Du dépôt volontaire en droit international. 1181. Application du droit commun 600 SECTION V OU OÉPÔT .NÉCESSAIRE 1182. Circonstances dans lesquelles le dépôt est réputé nécessaire . . . 601 1183. Suite. Dépôt par une femme séparée de biens à son mari. Dépôt par un malade entrant dans un établissement hospitalier. . . . 602 1184. Suite. Cas où le dépositaire a eu peine à trouver un déposant. Cas où un danger non pressant a pu être prévu 603 1185. Suite. Preuve du dépôt nécessaire. Renvoi 603 1186. Application des règles générales du dépôt sur les autres points. . 604 SECTION VI nu dépôt d'hôtellerie § I. Motifs de la responsabilité spéciale. Droit comparé. 1187. Le dépôt d'hôtellerie, assimile à un dépôt nécessaire, n'est pas cependant un dépôt nécessaire. Droit romain 604 716 DU DÉPÔT KT DO SÉQUESTRÉ (N"l Page». 1188. Ancien droit 604 1189. Molif de la responsabilité spéciale. Législations étrangères. . . . 605 5; II. Nature des <>/>j>>is auxquels s'applique In responsabilité spéciale. 1190. Sens du mot effets: linge, bijoux, argent, billets de banque, litres au porteur. Marchandises 606 1191. Suite. Animaux et voilures 607 1192. Suite. L'aubergiste esl responsable, mais par application du droit commun, des objets qui ne sont pas drs effets 607 1193. Objets se trouvant sur la voilure du voyageur 608 1194. Obligation de veiller à la sécurité personnelle du voyageur . . . 608 i; III. Point de dépari <■/ conditions de la responsabilité de l'aubergiste. 1195. L'aubergiste est responsable de- objets des qu'ils lui sont remis ou li ses préposés 608 1196. Il esl responsable des effets apportés par le voyageur avant ou pendant son séjour 608 1197. l>aus l'ancien droit les objets devaient être mis entre les mains de l aubergiste 609 1198. Il en est autrement aujourd'hui; la responsabilité existe en quel- que endroit de l'auberge que se trouvent les effets 609 1199. Mai- il Faut que les effets aient été introduits du consentement de l'aubergisl i de ses préposés ... 010 12'">. La responsabilité existe quoique le voyageur soit en état d'ébriété. 611 1201. Effets du voyageur qui loge ailleurs. 611 1202. Effets laissés par un voyageur qui quille l'hôtel ou s'absente . . . 611 1203. Effets confiés à l'aubergiste pour être remis à un voyageur. . . . 612 1204. Certains effets doivent être mi- entre les mains de l'hôtelier. Renvoi 612 § IV. Cas d'application '/<■ /" responsabilité 717 |K«) l>»K». 1212. Incendie 616 1213. Force majeure provenant des préposi 616 1214. Failli' ou imprudence du voyageur. Exemple 616 1215. Suilr. Vol l'ail par un autre voyageur 611 1216. Pail des domestiques du voyagenr Dis 1217. L'aubergiste est responsable de ses préposés même s'il y a raule du voyageur <;is 1218. A qui appartient il de prouver qui est l'auteur du dommage? . . 619 1219. La faute du voyageur peul aussi limiter la responsabilité de l'aubergiste 619 1220. L'aubergiste est responsable non seulement du vol, mais de loul autre dommage. Exemple 619 5i \ . Montant de la responsabilité . 1221. L'aubergiste esl tenu de la \ aleur totale des effets ou de la dété- rioration . 619 1222. Il en esl ainsi même s'il s'agil d'objets précieux 620 1223. Suite. Opinioq qui limite alors les sommes à rembourser suivant la condition ilu voyageur 620 1224. Suite. Cas ou ledommageesl causé par les préposés de l'hôtelier. 621 1225. Monnaies, billets de banque el autres titres au porteur. Loi du 18 avril 1889, qui limite la responsabilité si les objets ne sont pas remis aux mains de l'hôtelier 621 1226. S'ils sont déposés entre ses mains, sa responsabilité esl absolue. 622 1227. Le voyageur doil prouver qu'il élail en possession des objets non déposés entre les main- de 1 hôtelier , . 62."» 1228. L'hôtelier qui commet une faute esl responsable de la valeur totale des objets non déposés entre ses main-. De même s'il y a faute de ses préposés. Le voyageur doit prouver cette faute 623 § VI. Preuve en matière de dépôt d'hôtellerie. 1229. Le voyagenr doil prouver le dépôt. Modes de preuve 624 1230. 11 n'a pas à prouver sa propriété . . ; 624 1231. 11 doil prouver sa possession. Modes de preuve. Preuve du dom- mage. Preuve de la force majeure 624 1232. Modifications de la preuve en matière d'objels précieux 625 § VII. Actes et conventions modifiant les règles de la respon- sabilité. 1233. La responsabilité peut être limitée par une convention ou une déclaration de l'aubergiste antérieure à l'entréedes efletsdans l'auberge 625 1234. Sa responsabilité peut-elle être modifiée par un avis affiché?. . . 626 1235. L'aubergiste peul subordonner sa responsabilité a un dépôt fait entre ses mains 1236. L'aubergisle peul se dégager de sa faute par la convention. . . . 626 718 DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE § VIII. D? ce ({u'il faut entendre pur aubergistes ou hùleliers et par ooyaqeurs. !N") Pages 1237. Caractère restrictif du lexte 627 1338. Hôtels garnis. Appartements garnie 627 1239. Location d'appartements à des tiers qui en assurent l'entretien. Location accidentelle d'appartements garnis 628 1240. Personne qui prend en location une chambre d'hôtel dans la ville où elle habile 629 12 il. Cafetier, restaurateur 629 1212. Vestiaire d'un théâtre 629 1243. Bateau-lavoir 630 1244. Bains publics. Cabane de bains 630 1245. Navire, étable ou autre local 631 1246. Wagons-Lits 631 1247. Maître de pension. Patron chez lequel le domestique ou l'ouvrier laisse des outils 634 1248. Règles de la responsabilité dans les cas où ne s'appliquent pas les principes du dépôt d'hùlellerie 634 § 1\. Exercice il' l'action. 1249. L'action peut être dirigée contre les héritiers de l'aubergiste. . . 635 1250. Les aubergistes sont-ils tenus solidairement? 635 1251. Compétence du tribunal civil 635 1252. Suite. Cas où le dépositaire est un commerçant 635 CHAPITRE 111 M SÉQ1 ESTRE SECTION PREMIÈRE DÉFINITION ET NATURE IU SÉQ1 ESTRE 1253. Définition 635 1254. Caractères. Comparaison avec le dépôt 636 SECTION II DU SÉôIKSTUK CONVENTIONNEL 1255. Définition 037 1250. Le séquestre est gratuit en principe 637 1257. Nature du contrat dans le cas où le séquestre est soit salarié, soit gratuit 638 1258. Une convention est nécessaire pour qu'un salaire soil dû. Calcul du salaire 638 1259. Le séquestre peut avoir pour objet des immeubles 638 1260. Le séquestre ne peut restituer la chose qu'après la fin de la con- testation et au gagnant, sauf accord contraire des intéressés . 639 1261. Ce qu'il faut entendre par intéressés 639 1262. Le séquestre ne peut renoncer que pour causes légitimes à la garde. Appréciation de la légitimité de la cause 639 TABLE m:s matières 719 N v Pàfn 1263. Le séquestre peut réclamer ses impenses au gagnant. Cas où le int élail étranger au dépôt 640 1261. Le séquestre ne peut réclamer son salaire au gagnanl étranger au dépôt. Ses droits '•nuire les déposants qui n'uni pas eu g de cause 640 \\!ù~k Les déposants sont détenus solidairemenl 641 1266. Pouvoirs du séquestre 641 SECTION III ni SÉQUESTRE JUDICIAIRE 1267. Le séquestre judiciaire et le dépôt judiciaire ne font qu'un. . . . 641 § I. Cas dans lesquels il y a lieu ù In nomination du séquestre judiciaire. 1268. La loi indique trois cas 642 1269. Mais elle n'est pas limitative 642 1270. I Ipinion qui distingue sur ce point entre les instances relatives à la possession et les faits étrangers à ces instances G43 1271. Les tribunaux peuvent ordonner le séquestre en cas d'instance en divorce ou en séparation de corps ; autres exemples 644 1272. Mais les tribunaux ne peuvent établir de séquestre qu'en cas de contestation 645 1273. Séquestre d'un document dont la propriété n'est pas contestée . . 645 1274. Le séquestre ne peut porter sur des objets dont la gestion n'est pas susceptible d'être confiée à un tiers. Pharmacie. Office ministériel t3 45 1275. Séquestre des choses qu'un débiteur offre pour sa libération . . . 645 1276. Séquestre des biens d'un contumax 646 1277. Séquestre des immeubles saisis 646 1278. Séquestre des immeubles soumis à un usufruit, quand l'usufrui- tier ne trouve pas de caution 646 1279. Séquestre des immeubles hypothéqués au crédit foncier 646 1280. Suite. Opposabilité des quittances de loyers au crédit foncier . . 648 1281. Séquestre de meubles saisis sur un débiteur 648 1282. Le séquestre peut-il être nommé pour gérer un patrimoine entier? 648 1283. Suite. Succession. Biens d'un non présent 649 1284. Le séquestre peut-il être nommé à un patrimoine entier ave le consentement du débiteur? 649 1285. Effets d'un jugement qui, après avoir nommé illégalement un sé- questre, est passé en force de chose jugée 649 1286. Le tribunal n'est jamais tenu de nommer un séquestre 649 § II. Mode de nomination du séquestre judiciaire. 1287. Le séquestre est nommé en audience publique 650 1288. Pouvoirs du juge du référé. Ordonnance sur requête 650 § III. Choix du séquestre judiciaire. <'itr/<• sa mission. 1289. Le séquestre ne peut être nommé par le juge que si les parties ne s'entendent pas sur le choix 652 720 1>1 DÉPÔT ET Dl SÉQUESTRE (N«) Pag»" 1290. Le séquestre se rapproche du dépôt. Est-il chargé d"un service public? 652 1201. La nomination d'un séquestre judiciaire n'est pas un contrat . . . 653 1292. Le séquestre n'est pas forcé d'accepter sa mission 653 § IV. Droits et obligations du séquestre judiciaire. 1293. Le séquestre doit administrer en bon père de famille 65!! 1294. Il est soumis aux obligations du dépositaire 653 1295. La personne donl les biens sont sous se |uestre peuls'engagersur ces biens, en disposer, donner un mandai 653 1296. Le débiteur garde U possession des biens s Action en justice 65i 1297. Les créanciers gardent leur droit individuel de poursuites . . . . 651 i.. séquestre ne peut faire que les actes conservatoires. Actes d'administration provisoire. Baux de courte durée 654 1299. Dépenses s. Action des fournisseurs et ouvriers. Frais de poursuite . . . .' 655 1299 bis. Consignation et emploi des fonds. Sanction. Intérêts i\n< parle stre 655 1300. Faute donl répond le séquestre 65('> Les tribunaux ne peuvenl donner au séquestre des pouvoirs plus étendus. Exemples 656 1302. !-•■ salaire esl de droit. 11 ■•. Séquestre de- meubles saisis sur un débiteur. Caractère 658 1311. Le séquestre désigné peut refuser sa mission 659 1312. Ce séquestre esl un dépôt 659 1313. Le séquestre esl tenu des obligations du dépositaire. Conditions. 659 1314. Entre quelles personnes le séquestre établit des obligations .... G59 1315. Le salaire est de plein droit 65'.» 1316. Faute- donl répond le séquestre qui ne touche pas de salaires. . . 66: 1858 1891 1859 1892 1893 1894 1860 1861 1862 L895 1863 Société , PRÊT, DÉPÔT. — 2e éd. j 722 TABLE DES MATIÈRES Articles du Code civil. 1899... 1900... 1901... 1902... 1903... 1904... L905... 1906... 1907.. 1908.. 1909.. 1910.. 1911.. 1912.. 1913.. 1914.. 1915.. 1916.. 1917.. 1918.. 1919.. 1920.. 1921.. 1922.. 1923.. 1924.. 1925.. 1926. 1927. 1928. 1929. 1930. 59... 69... 541 . 596 902 s. 1007 744 s. 747. 764, 765. 766 s. 748 s. 789, 793 s. 799. 809, 902 s. 912 s. 820 s., 952. 951. 974 s. 988 s. 951. 1009, 1016. 1019. 1021, Il 1022 s. 1016, 1017. 1025. 1026. 1034. 1045 8. 1047. 1027 s. 1036 s. 1054 b. 1059 s., 1168 -. 1071 ?. 1079 s. Articles du Code civil. Numéros 1086, 1087. 1089 s. 1118. 111'.». 1120. 1121 s. mas. 1126. 1130, L131 s. 1127. 1142 s. 1128. 1129. 1159, 1160. 1159. 1138, 1150 s. 1113. 1 1 15. 1069, 1070, 1161 1175 s. 1182 s. 1185. 1186. 1205 s. 1209 s. 1253, 12:0. 1255. 1256. 1257. 1259. 1262 <. 268 s., 1310 s. 1293 - . 1315. 11. CODE DE PROCÉDURE 18... 22... 221 1 . '.97. 11. 495. 1310 s. 52. 1. 102. V2_ 597 . 605. 681 1316 s. 1318. 1277. 111. CODE DE COMMERCE Numéros 311. 447i. 632. 638. 923. 883. 887 •-".'I l un i DES M u il RI S Y. CODE PÉNAL 292 •i", IV. CODE D'INSTRUCTION CRIMINELLE Artlc'e Numéro 465 L276. [II. LOIS SPÉCIALES Numéro! Déel. royale 25 janv. 1690 sur les emprunts des fabriques .... 722 Ordonnance 1er mars 1745 sur les prêts aux matelots 719 L. 18-29 déc. 17'.»). lit. 3, art. 2 sur le rachat des rentes] ....... 982 L. 22 frimaire an Vil (sur l'enregistrement), art. 31 800 art. 68, §3 173, 1098 art. 69, §4 21 L. 21 ventôse an VII, art. 19 (sur les hypothèques 173 Décret 24 messidor an XII, art. 8 (Monts-de-piété L. 3 septembre 18U7 sur les intérêts , art. le' 821 s. art. 2 821 art. 3 889 s. art. 4 Avis Cons. d'État 21 décembre 1808 (constitutions de rente .... 983 Décret 20 novembre 1809 (sur les fabriques 722 L. 21 avril 1810 sur les mines , art. 8 11 s.. 42. 233 art. 32 114 Avis Cons. d'Étal 10 octobre 1611 (vol dan- les hôtelleries .... 1237, 1238 L. 28 avril 1816, art. ~>4 droits d'hypothèque 173 !.. 28 tvril 1816, art. 91 cessions d'office; Ordonnance 3 juillet 1816, art. 2 (caisse des dépôts 1299 bis L. 27 avril 1838, art. 7 -ur les mines 293 Ordonnance 4 janvier 1843, art. 12 sur le notariat) 73 L. 5 juillet 1844. art. 20 (sur les brevets d'invention 164 bis, 176 L. 19décembre 1850 sur l'usure), art. 1 825,889s., art. 2 883, 897 art. 3 Décret 28 février 1852 sur le crédit foncier 788,1279 L. 23 mars 1855 sur la transcription hypothécaire), art. 1 17:; art. 2. n. i . . 17 i L. 9 juin 1857 (sur la Banque de France), art. 8 868 I.. 2 juillet 1862 sur les agents de change 80 !.. 21 juin 186">. art. 3 sur les associations syndicale- L. 22 juillet 1867, art. "> sur la contrainte par corps) 1113 L. 24 juillet 1867 sur I»-- sociétés . art. 37 462 art. n4 423 art. 56 102 art. 68 1, 12, lui. s., .".71. ffê art. 70 932 724 TABLE DES .MATIÈRES Numéros L. 21 mars 1884, art. 6 sur les syndicats professionnels 570 L. 27 août 1884 (sur le prêt en Algérie 867 L. LO-jûillet 1885, art. 3 (prêt sur navires) . . . .' 871 L. 12 janvier 1886 (sur les intérêts du prêt en matière commerciale). 822, v i1 1 ~..'.!< 0 L. 30 avril 1886 (sur les médailles et diplômes 196 L. 18 avril 1889 (sur le dépôt d'hôtellerie) 1222 -. !.. i juillet 1889 sur le trafic des décorations) 86 L. 2 juin 1891, art. 2 sur les sociétés de courses) 565,569,574 L. 30 novembre [892 (sur la médecine 66 L. I" aoûl 1893 sur les sociétés . V. L. 24 juillel 1867 Décret 21 juillet 1897, arl. 9 el 10 sur les Universités) 718 Décrel 29 janvier 1898 sur le prêl en Algérie 867, 886 L. 1er avril 1898, art. 1 sociétés de secours mutuels 562 arl. 2. :;. i. 6, 13, 17 et 20 570 I.. 13 ;i\ ril 1898, art. 61 sur le prêl en Algérie 86/ L. 3 avril 1900 sur l'inlérêl légal de l'argent) p. 699, note I 23,863, — Bordeaux, Y. Cadoret, impr., rue Poquelin-Molière, 17. a / 39003 008 5 3^090b - L*/ DATE DUE HARfiiW CAT. NO. 113 7 \ » I r V ^kjMât I*** M. **lrt> J kT»! £> i j d >f ^ è* ;*